samedi 31 octobre 2009

Pour une milonga d’Halloween [Coutumes]

Cette mode commerciale, qui a déferlé sur nous il y a 15 ans ou un peu plus, est retombée assez vite, comme un soufflé raté. Seuls Disneyland Paris et quelques devantures de boulangeries-pâtisseries résistent, encore et toujours, à l’idée d’abandon, grâce à la vente magique, qui les rend invincibles, de chocolats en forme de potiron, de tête de mort, de fantôme et autres araignées et de gâteaux le long desquels le coulis de fraise surgelée dégouline comme l’hémoglobine de cinéma.

Si à Paris, l’Académie Esprit Tango (3 rue des Vignoles, Paris 20ème) a remplacé cette année sa traditionnelle pratique Halloween par un buffet bio, avec supplément de prix puisque l'entrée sera dans ce cas à 15 € au lieu des 9 € habituels qui donnent droit à un open bar sobre (au menu : salade de quinoa, choux rouge et raisins secs, terrine de carottes à l'indienne à base de farine de pois chiches assaisonnée de câpres et de curry, et fondant au chocolat), la milonga Madretango à Buenos Aires (Loyola 828) a bien adopté, quant à elle, mercredi dernier, la thématique yanko-cucurbitacée : tous les participants devaient arriver habillés en orange et en noir, celui qui venait déguisé remportait un prix et on annonçait une ambiance spectrale !

Alors, pour une fois et pour la bonne cause, Barrio de Tango se met à l’unisson de cette coquecigrue marchande (fenicia, comme on préfère dire à Buenos Aires) en changeant, dans cet article et lui seul, l'habituel code de couleurs (les noms passent à l'orange et à l'orange il faut s'arrêter) et en adoptant une thématique à la hauteur, grâce au talent et à l’humour de deux artistes que j’apprécie beaucoup, le poète Luis Alposta et le compositeur-chanteur Daniel Melingo, à qui l’on doit une grande marmite de frissons concoctés à base de poèmes à vous faire dresser les cheveux sur la tête.

Il y a peu, Luis a rassemblé dans un petit recueil, fort opportunément intitulé De horror, des créatures aussi croquignoles que Frankenstein, Dr Jeckill, Mr Hyde, Jack l’Eventreur ( Jack The Ripper dans le texte) et Dracula. Pour ne pas être en reste, Daniel Melingo a mis tout ça en musique et le chante avec sa voix travaillée au papier Emery. Je suis allée farfouiller pour vous dans cette galerie des horreurs, histoire que vous puissiez souffler une idée, juste une, mais bien horrifique, au DJ de votre milonga de cette nuit.

Aux Trottoirs de Buenos Sierre par exemple, dans le Valais. Mais pas à Chexbres : une nouvelle milonga est inaugurée ce soir au Caveau du Coeur d'or, avec une soirée amoureusement construite autour des produits du terroir, le terroir du canton de Vaud, qui n’a pas grand-chose à voir avec la vieille fête irlandaise de Samhain ou sa version carnavalesque et confisière nord-américaine (sur les deux milongas de ce soir en Suisse Romande, voir mon article du week-end dernier).

Tango del Vampiro a été écrit le 22 octobre 1998 (la traduction ci-dessous date exactement du 11ème anniversaire). Mais la musique est plus récente que la letrra, comme presque toujours avec les textes de Luis Alposta.

Tango del Vampiro

En el lenguaje popular se llama vampiro o chupa sangre al que explota el trabajo del otro y al mismo tiempo toma sus recaudos para que el otro no pueda explotar. Viene a ser la otra cara del que labura noche y día como un buey. La cara oculta -o no tan oculta- del que vive de los otros, del que afana y el que curra, y para el que no parece existir la ley.
Pero hoy vamos a referirnos a otro tipo de vampiro. Recordaremos al conde Drácula, el inmortal personaje de Bram Stoker.
Drácula es una palabra de origen rumano, que tiene dos significados: puede ser «drac», diablo, o «dracul», dragón.
Este personaje, desde su nacimiento literario, en 1897, ha originado numerosos estudios, ha sido llevado muchas veces al cine y ha gozado siempre de muy buena prensa. A través de los años, se ha ido perfilando hasta lograr una personalidad tan definida que, más que un espectro, hoy se nos puede antojar como un viejo conocido. Alguien que se ha ido metamorfoseando hasta convertirse en un personaje tan digno, dentro de su desgracia, tan aparentemente real, tan terrorífico y cruel a la vez, que hasta nos da pie (un pie muy pálido, por supuesto) para que lo tratemos con humor.
La astucia del conde Drácula es proverbial. Si alguna vez se le aparece y le dice que le amará hasta la muerte, tenga por seguro que se refiere a la muerte suya y no a la de él. Recuerde que detesta la luz del día y el olor del ajo.
A Drácula y a Lucy, la más conocida de sus víctimas, acabo de llevarlos al tango.
(Luis Alposta)
Tango du Vampire

Dans le langage populaire, on appelle vampire ou sangsue celui qui exploite le travail de l’autre et en même temps en ramasse le produit pour que l’autre ne puisse rien exploiter. Cela finit par être l’envers de celui qui bosse jour et nuit comme une bête de somme. Le côté caché, ou pas si caché que ça, de celui qui vit sur le dos des autres, de celui qui rapine et celui qui s’en met jusque là et pour qui la loi n’a pas l’air d’exister (1).
Mais aujourd’hui nous allons nous référer à un autre type de vampire. Nous allons rappeler le souvenir du Comte Dracula, l’immortel personnage de Bram Stoker.
Dracula est un mot d’origine roumaine, qui a deux sens : cela peut vouloir dire drac, diable, ou dracul, dragon.
Ce personnage, dès sa naissance littéraire en 1897, a donné lieu à de nombreuses études, il a été porté de nombreuses fois au cinéma et il a toujours joui d’une très bonne presse. A travers les années, son profil s’est poli jusqu’à atteindre une personnalité si bien définie que, bien plus qu’un spectre, aujourd’hui nous pouvons le considérer comme une vieille connaissance. Quelqu’un qui n’a cessé de se métamorphoser jusqu’à devenir un personnage si digne, dans son infortune, d’apparence si réel, si terrifiant et si horrible à la fois, qu’il prête même le flanc (un flanc très pâle, bien sûr) à un traitement par l’humour
(2).
L’esprit du Comte Dracula est proverbial. Si un jour il vous apparaît et vous dit qu’il vous aimera jusqu’à la mort, soyez sûr qu’il se réfère à votre mort à vous et non à la sienne. Souvenez-vous qu’il déteste la lumière du jour et l’odeur de l’aïl.
Dracula et Lucy, la plus connue de ses victimes, je viens tout juste de les porter au tango...

(Traduction Denise Anne Clavilier)

Escucho a un fueye que me asegura
que ya es de noche y es noche oscura.

J’entends un soufflet (3) qui m’assure
Qu’il fait déjà nuit et qu’il fait nuit noire
.
Hoy su rezongo suena a sirena
que está anunciando que hay luna llena.
Aujourd’hui son râle sonne comme une sirène
Qui nous annonce que c’est la pleine lune

Este es el tango que con voz ronca
le canto a Lucy al salir del jonca.

Ceci est le tango que d’une voix caverneuse
Je chante à Lucy en sortant de ma rebiè
(4)
¡Lucy! ¡Mi Lucy! Que no hay collares
con que se oculten tus yugulares.

Lucy ! Ma Lucy ! Qu’il n’y ait pas de collier
Pour me cacher tes jugulaires.

Desde hace siglos no siento el hambre
y hoy sólo quiero beber tu sangre.

Depuis des siècles maintenant je ne ressens pas la faim
Et aujourd’hui je ne veux rien que boire ton sang.

¡Conde! ¡Mi Conde!
¡Mi amor prohibido!

Comte ! Mon Comte !
Mon amour interdit !

Ya desde el día en que la has bebido
mi sangre toda te corresponde.
Depuis le jour où tu l’as bu
Tout mon sang répond à ton amour.
Si me has herido,
mi flor de anemia
No es esta noche lo que me apremia,
sino la llama que has encendido.

Si tu m’as blessée,
Ma fleur d’anémie,
Ce n’est pas cette nuit ce qui me presse
Mais la flamme que tu as allumée.
Si algo me quieres,
sólo por eso,
abre la boca con que me hieres
y hoy dame un beso.

Si tu m’aimes un peu
Rien que pour ça,
Ouvre la bouche avec laquelle tu me blesses
Et aujourd’hui donne-moi un baiser.

El mismo fueye, como si hablara,
me está diciendo que es noche clara.

Ce même soufflet, comme s’il pouvait parler,
Est en train de me dire que la nuit cède au jour.
Ya no es rezongo, ni es la guadaña.
Ni es esa historia de Transilvania.
Este es el tango con voz quebrada
que ahora le canto a mi enamorada.

Maintenant ce n’est pas un râle, ce n’est pas même la faucheuse (5)
Ce n’est pas même cette histoire de Transylvannie.
Voilà, c’est le tango que d’une voix brisée
A présent je chante à mon énamourée
.
¡Pero carajo!... ¡Pero carajo!...
¡Quién trajo el ajo!... ¡Quién trajo el ajo!...
¡Tan justo ahora, que sin collares
Lucy me muestra sus yugulares!
(Luis Alposta)
Mais quelle horreur ! Quelle horreur !
Qui a apporté de l’aïl ! Qui a apporté de l’aïl !
Juste au moment où sans collier
Lucy me montre ses jugulaires !
(Traduction Denise Anne Clavilier)

Pour finir de vous mettre dans l’ambiance de ce soir, voici le tango en VO par Daniel Melingo et Fabiana Cantilo dans le rôle de Lucy grâce à You Tube...

Pour ceux qui, au bal, préfèrent la soirée passée au coin du feu, qu’ils aillent donc écouter sur Canal Académie cette réflexion profonde du philosophe (en colère) Damien Leguay sur La face cachée d’Halloween (qui dénonce d'un ton excédé la régression anthopologique et magique que représente la mode soudaine de cette fête sans racine chez nous).

(1) Mêlange de citations et de paraphrases, reprenant la fin de Cambalache de Enrique Santos Discépolo.
(2) dar pie : donner l’occasion de, offrir un prétexte pour. La pirouette verbale à laquelle se livre Luis aussitôt après ne vous aura pas échappé. Et comme vous le voyez aussi, en français, c’est beaucoup moins savoureux. Comme quoi, traduire, c’est toujours trahir un peu. Là où l’espagnol dira dar pie (littéralement donner pied ou donner un pied), le français dira prêter le flanc (presentar el costado, del verbo arcaïco prester, hoy présenter).
(3) fueye : bandonéon en lunfardo.
(4) jonca : cajón al vesré, en verlan (Luis Alposta adore ça). Cajón, c’est une caisse, d'où une bière, un cerceuil.
(5) la guadaña : littéralement la faux (l’espagnol parle de l’outil, le français de celle qui la manie, la mort). Dans le même sens, on trouve cette même métaphore dans Whisky de Héctor Marcó et Carlos Di Sarli (sur le rôle des métaphores dans la genèse du lunfardo,
lire cet article. Il s'agit d'une conférence donnée par Luis Alposta sur le sujet).

Horacio Molina à la Biblioteca Café avec quelques potes [à l'affiche]

Le chanteur Horacio Molina était hier et sera ce soir à la Biblioteca Café, avenida M. T. de Alvear 1155 (dans le quartier de Retiro), à 21h (c'est un habitué du lieu). Il s'agit d'une soirée avec dîner et concert, le prix est donc de 100 $ (raisonnable, dans ce quartier du nord de Buenos Aires).

Horacio partagera la soirée avec des invités qui sont aussi ses amis : sont annoncés Juan Vattuone, María Volonté, Susana Moncayo et Guillermina Beccar Varela (et d'autres dont le nom n'est pas indiqué sur le site de la Biblioteca Café et comme Horacio n'a pas pensé à m'informer ! Heureusement que j'écoute la 2 x 4, la radio todo tango de Buenos Aires, de temps en temps pour rester au courant de ce que font les amis...)
Si vous êtes là-bas, ne loupez pas l'occasion.
Il se pourrait qu'Horacio Molina revienne chanter en Europe au cours de l'hiver mais pour le moment, je ne sais encore ni quand ni où.

Pour en savoir plus : consulter les autres articles sur ces artistes en cliquant sur leur nom dans le bloc Pour chercher, para buscar, to search, ci-dessous, sous le titre. Cependant, cet article représente la première mention de Susuna Moncayo et Guillermina Beccar Varela dans Barrio de Tango.
Vous pouvez aller découvrir sur leur site, pour ceux qui ont leurs propres pages sur un mode ou un autre :
Guillermina Beccar Varela
Horacio Molina le site
Horacio Molina sur Myspace
Juan Vattuone (c'est un blog)
María Volonté le site
María Volonté la page Myspace

vendredi 30 octobre 2009

Néstor Tomassini et Hernán Reinaudo au Salón dorado du Colón [à l’affiche]

A Buenos Aires, il y a deux Salón Dorado, celui de la Casa de Cultura, dans la avenida de Mayo (siège du Ministère de la Culture du Gouvernement de la Ville Autonome de Buenos Aires), et celui du Teatro Colón. Les deux sont des endroits emblématiques aussi prestigieux l’un que l’autre. Mais le Théâtre Colón qui est l’opéra de Buenos Aires est fermé pour travaux depuis plus de deux ans. Qu’à cela ne tienne, la programmation du Colón a immigré un peu plus loin et a investi le Teatro Nacional Cervantes... avec son cycle Música en el Salón Dorado...
Les lecteurs habituels de Barrio de Tango savent bien qui sont Néstor Tomassini et Hernán Reinaudo, deux musiciens et compositeurs de tango contemporain, le premier avec la clarinette et le saxophone, le second avec une bonne vieille guitare. Les Belges, les Français et les Suisses auront sans doute en mars prochain l’occasion de les écouter puisqu’ils feront une tournée par chez nous avec leur amie et partenaire violoniste bruxelloise Ananta Roosens, qui retourne à Buenos Aires passer quelques jours en novembre. On entendra donc bientôt parler d'eux trois ensemble là-bas. Les lecteurs nouveaux de Barrio de Tango peuvent les découvrir à travers les autres articles que je leur ai déjà consacrés ici, grâce aux raccourcis à leur nom dans la rubrique Vecinos del Barrio, en partie haute de la Colonne de droite.

Affiche officielle du Cervantes

Parce que pour le reste, tout est sur l’affiche : il n’y a rien à ajouter.
Il y a la date (4 novembre),
l’heure (17h),
l’adresse (rue Libertad 815, en plein centre de Buenos Aires, près de Plaza Lavalle et de la Avenida 9 de Julio)
et le prix (pas cher : 5 $).
Sur le côté droite, cette longue liste, c’est le programme du concert. Don Néstor est une milonga de Hernán Reinaudo dédiée à Néstor Tomassini (et qu’ils ont jouée pour la première fois en public, à Bruxelles, au concert qu’ils ont donné en novembre dernier à la milonga Cellule 133a et sur lequel j’ai publié en son temps un Retour sur images). Asado mate y café et Balcarce y Calvo sont deux milongas de Néstor Tomassini (Balcarce y Calvo est une esquina du quartier de San Telmo, où se trouve son studio de travail dans une antique maison de maître qui devint un hôpital pendant l'épidémie de fièvre jaune de l'été 1871 puis devint un conventillo pour les immigrants qui arrivaient du port pas très lointain du quartier). Quant à Unión Cívica et El Esquinazo, ce sont des vieux "tubes" du tango. Des morceaux de la Guardia Vieja, cette veine la plus ancienne du tango, sur laquelle Néstor travaille beaucoup et où il trouve son inspiration pour une musique qui soit à la fois d’aujourd’hui et fidèle à la tradition...

Une petite nouvelle sur Todo Tango [Actu]

Todo Tango est ce site web encyclopédique consacré entièrement au tango dans toutes ses formes : musique, poésie, histoire, interprètes, discographie. Y collaborent une cohorte de spécialistes plus prestigieux les uns que les autres,, parmi lesquels Oscar del Priore, Horacio Ferrer, Roberto Selles, Luis Alposta... Le site, gigantesque, est dirigé par Ricardo García Blaya, auteur de très nombreux articles.

Vous y trouverez plus de 4000 textes de tango et autant de partitions. Quand aux enregistrements que vous pouvez écouter en streaming, je renonce à les compter. Il y en a trop.

Dernièrement, en juin, une page biographique est venue rendre justice à Luis Alposta. Jusqu’à présent, pour accéder à quelques renseignements sur lui, vous deviez passer par la rubrique Quienes somos. Un peu compliqué. Lui-même avait au début de l’année signé la page biographique de Daniel Melingo.

Le 23 octobre, l’auteure-compositrice Marta Pizzo, dont je vous ai parfois parlé à l’occasion de tel ou tel spectacle auquel elle a participé et dans mes articles sur la Cumbre Mundial del Tango à Bariloche en mars dernier, Marta Pizzo donc nous a informés avec fierté et joie que Ricardo García Blaya avait créé une page qui lui est consacrée dans la catégorie Poetas.

Vous trouverez aussi dans Todo Tango une trentaine de textes d’elle, ce qui est un chiffre impressionnant. En revanche, il n’y a pas encore de partition.
Pour aller plus loin (en espagnol) :
Lire la page consacrée à Daniel Melingo
Lire la page consacrée à Luis Alposta
Lire la page consacrée à Marta Pizzo

Pour aller plus loin (en français) :
Lire mes articles sur la Cumbre Mundial del Tango.

Prochaine création d'un Ballet Escuela de Tango à Buenos Aires [Actu]

Photo tirée du Portail de la Ville de Buenos Aires

Hernán Lombardi, le Ministre de la Culture de la Ville autonome de Buenos Aires, a annoncé mercredi dernier la création d'un Ballet Ecole de tango à la manière de la Orquesta Escuela de Tango Emilio Balcarce au cours du cocktail offert par Mora Godoy (photo ci-dessus) dans les locaux de son école dans le très chic quartier de la Recoleta, sur avenida Puyerredón 1090, pour fêter les 10 ans de sa fondation.

Ce projet de ballet escuela répond à une stratégie de promotion de la danse, dans le cadre de la promotion du tango en général, pour valoriser l'inscription du genre au Patrimoine mondial de l'UNESCO à le 30 septembre dernier (lire mon article à ce propos). Le ministre a parlé "d'élever le niveau de professionnalisation de la danse" (les Argentins rêvent que la danse du tango conquière le prestige international du ballet classique, tel qu'il existe au Bolchoï ou à l'Opéra de Paris !) et il annonce que ce projet de ballet école prolonge et complète la loi que la Députée portègne, Inés Urdapilleta, a fait voter pour permettre le développement de la danse (1).

Le recrutement des danseurs a été confié à la danse et chorégraphe Mora Godoy qui fêtait les 10 ans de son école de danse, par laquelle sont passés cette année 40 000 élèves (2). Actuellement, le recrutement se pratique dans les milongas des différents quartiers. Ces danseurs recevront une formation, qui sera donc confiée à Mora Godoy, qui prendra la direction du Ballet Escuela.

Mora Godoy est la danseuse vedette et la chorégraphe du spectacle Tango Emoción, qui a connu un grand succès, a fait le tour du monde et a donné lieu à un produit dérivé, un DVD distribué par Gativideo, un spectacle qui se distingue des shows habituels parce qu'il se dispense d'une intrigue et prend appui d'abord et essentiellement sur la musique et la danse dans leur propre consistance, comme le fait un ballet de Maurice Béjart ou de Georges Balanchine, qui n'avaient pas besoin de raconter une histoire pour s'exprimer à travers la danse. Ce n'est donc pas sans raison que Mora Godoy est respectée et connue à Buenos Aires comme danseuse professionnelle.
A noter qu'elle a lancé, il y a trois ans, dans son école, un cycle de cours gratuits destinés aux élèves à bas revenus. Le communiqué ministériel, que vous pouvez lire sur le Portail de la Ville de Buenos Aires, insiste sur cette initiative sociale, sans doute pour parer à l'avance les critiques que ne manquera pas de lui adresser les tangueros de gauche, celles de profiter de la déclaration de l'UNESCO pour promouvoir le tango for export, surnom local du tango commercial et sans authenticité, à destination des touristes qui n'y connaissent rien mais qui crachent au bassinet. Hélas, l'étroite liaison qui a été faite entre le 10ème anniversaire de l'école privée de Mora Godoy et l'annonce de cette création d'un ballet école qui fonctionnera sur des deniers publics, l'absence de tout appel public à candidatures pour le choix de la directrice, l'absence d'auditions pour un casting organisé, rien de tout cela n'est vraiment de nature à lever le soupçon, qui pèse toujours, a priori, dans l 'esprit et le discours de la grande majorité des artistes et des intellectuels à Buenos Aires, sur toutes les initiatives de ce gouvernement libéral qui ne jure, il est vrai, que par la gestion privée et la recherche de la rentabilité.

Seul l'avenir nous dira ce qu'il en est.
Pour aller plus loin : visiter le site de Mora Godoy.

(1) Voir mon article sur la présentation qu'a faite Inés Urdapellita de son livre sur la milonga à la Feria del Libro en mai dernier.
Inés Urdapilleta, rappelons-le, est une députée de la Legislatura, l'Assemblée législative de la Ville de Buenos Aires. Elle est la Présidente de la Commission culturelle et je peux témoigner personnellement que lorsqu'elle prend un dossier en main, elle le fait aboutir et qu'elle a une incroyable capacité de bousculer les lourdeurs bureaucratiques traditionnelles en Argentine. Elle siège dans le bloc péroniste, ce qui veut dire qu'elle appartient à l'opposition politique à l'actuel Gouvernement de la Ville de Buenos Aires (mais à la majorité au pouvoir au niveau national). On peut voir dans la petite incise du ministre Lombardi une main tenue à l'opposition (on peut toujours rêver) ou une réponse à l'avance aux arguments hostiles que la plus grosse partie de la gauche (constituée par les péronistes) et la majorité au niveau du pays seront très tentées de faire entendre.
(2) La colossale clientèle des écoles de tango à Buenos Aires est due à la présence dans tous les cours d'une écrasante majorité de touristes, qui viennent à Buenos Aires tout spécialement pour danser dans les milongas et progresser dans leur pratique. C'est tellement le but de leur séjour qu'un certain nombre d'entre eux ne connaissent de cette ville immense que les milongas et les cours. Je fréquente moi-même une école de très bonne réputation mais qui n'est pas la plus présente dans l'information délivrée aux touristes. Et je n'ai jamais vu que des touristes dans les cours, y compris le samedi matin. Les touristes sont donc très nombreux, dans tous les cours, à tous les niveaux, dans tous les styles, mais la majorité d'entre eux ne prennent en fait qu'une poignée de leçons, 5, 10 ou 15 en fonction de la durée de leur séjour, qui n'excède que rarement quelques semaines. Les vrais élèves réguliers, qui sont réellement formés par l'école, quelle qu'elle soit, représentent donc une infime minorité.

jeudi 29 octobre 2009

Lors du prochain Plenario, on causera de Pichuco [à l’affiche]

Ces deux photos ont été prises à Zivals (Corrientes y Callao) et sont diffusées aujourd'hui même par la Academia Nacional del Tango et Ediciones del Soñador

Le premier Plenario de novembre à la Academia Nacional del Tango sera consacré à la présentation de la biographie de Aníbal Troilo (Pichuco pour les intimes) que vient de publier Horacio Ferrer aux Ediciones del Soñador (les éditions du rêveur), sous le titre El Gran Troilo. Ce sera lundi prochain, le 2 novembre, à 19h30, et c’est comme d’habitude avec entrée libre et gratuite dans la limite des places disponibles.

La conférence sera donc à la charge du Maestro Ferrer lui-même. Il racontera entre autres la genèse de ce travail biographique, d’hommage à un musicien avec lequel il a travaillé et qu’il considère aujourd’hui encore comme l’un de ses maîtres. Un très grand portrait de Pichuco trône d’ailleurs dans son bureau de Président de la Academia.

Le tango rituel sera Pichuco, un instrumental de Armando Pontier, enregistré par le compositeur et son orchestre.

L’espace artistique sera confié au mythique duo Aníbal Arias (guitare) et Osvaldo Montes (bandonéon), deux musiciens qui travaillèrent avec Pichuco. Dont un autre grand portrait figure en bonne place dans la galerie des portraits du Salón de los Angelitos Horacio Ferrer, où ont lieu tous les Plenarios (Horacio Ferrer a fait disposer sa photo à lui juste à côté et toc !). Vous la trouverez tout au fond de la salle, près de la fenêtre qui domine la avenida Rivadavia (au 1er étage du numéro 830). L’un des bandonéons de Troilo est, lui, exposé, ouvert, dans une vitrine, à l’entrée même de la salle.



Dans Barrio de Tango, je vous ai déjà parlé de ce livre. C’était en septembre dernier à l’occasion de cette signature qui s'est tenue à la librairie Zivals, à Buenos Aires (lire l’article).

C’est le 3ème article que je consacre à la présentation d’un livre dans le cadre d’un plenario. Je vous ai déjà parlé de la biographie que Oscar del Priore a consacrée à Osvaldo Pugliese en juillet 2008 (lire l’article, qui date du 19 juillet 2008, le premier jour de vie de ce blog) et du livre de photos que le journaliste et photographe Carlos Carrizo a monté à partir de 300 clichés inédits de Piazzolla et édité par lui-même (lire l’article sur Imagenes de Piazzolla).

Horacio Ferrer sera à la mi-novembre en Europe.
Il se rend en Italie, où il recevra le prix Tenco 2009 dans le cadre du festival de la chanson de Sanremo, en Ligurie. La remise du prix aura lieux le dernier des trois jours consacrés à la chanson d'auteur (Rassegna della canzone d'autore), organisés par le Club Tenco, qui octroie le prix, créé en 1972 en souvenir d'un chanteur de variété, Luigi Tenco, qui s'était donné la mort pendant le Festival (site du Club Tenco). Ce jour-là, le 13 novembre, sera aussi présentée au public une anthologie de ses poèmes, intitulée Loca ella y loco yo (1), une centaine de poèmes traduits en italien. Cela se passera au Teatro Ariston de San Remo, à 17h, dans le cadre d'un manifestation consacrée au tango, avec la participation de Daniel Melingo et celle du poète et promoteur italien de la poésie en toute langue, Claudio Pozzani (2).
Horacio Ferrer a encore sous le coude tout un tas de trucs. Dans tous les domaines. Recueil de poèmes, mini-série télévisée et j'en passe.
Bref, en août, il était débordé, mais en octobre, il est heureux comme un poisson dans l'eau. Accrochez-vous pour suivre !

Pour en savoir plus :
Dans la rubrique Vecinos del Barrio (Colonne de droite), vous retrouverez sous leur nom tous les articles consacrés dans Barrio de Tango à Pichuco et à Horacio Ferrer
Un peu plus haut, dans la rubrique Les grandes avenues, vous trouverez le raccourci vers les articles de la section Disques & Livres.
Dans la partie basse de la Colonne de droite, vous trouverez les liens aux sites extérieurs. Celui de la Academia Nacional del Tango se trouve dans la rubrique Les Institutions (vous l’auriez deviné tout seul !).
Et pour ceux qui cherchent des partitions (il y en a beaucoup parmi mes lecteurs et ils ne pensent pas toujours à aller voir de ce côté-là), vous trouverez sans doute tout ce que vous cherchez et au-delà, dans cette même rubrique (Les Institutions), en cliquant sur le lien vers le site de Todo Tango (en espagnol, partition se dit partitura, et elles sont présentées par ordre alphabétique).

(1) C'est la conclusion (criée) de Balada para un loco. Dont on fêtera en novembre les 40 ans de la création à Buenos Aires, par Amelita Baltar et Astor Piazzolla, et aussitôt repris dans une version très légèrement modifiée (3 mots) par Roberto Polaco Goyeneche ; loca ella y loco yo, c'est la fin de cette version-là, la version pour voix d'homme (elle [est] folle et moi aussi). Ce tango est arrivé en deuxième position au Concours de la chanson de Buenos Aires cette année-là. Le jury de 1969 avait bien le tiercé gagnant, mais dans le désordre. Le premier prix était allé à Hasta el último tren, un gentil tango sans grande originalité et qui n'aura pas marqué son époque.
(2) en italien (annonce Club Tenco) : Alle 17 Tango al Tenco, spazio dedicato al tango argentino, con la partecipazione di Marco Castellani, un incontro con Daniel Melingo e la presentazione del libro di Horacio Ferrer Loca ella y loco yo, con Claudio Pozzani.
Site de Claudio Pozzani.

María Volonté le jeudi soir au Jazz Voyeur Club [à l’affiche]

La chanteuse María Volonté, une artiste à la discographie et à la carrière impressionnantes, se produit tous les jeudis soir depuis début octobre et jusqu’à fin novembre au Jazz Voyeur Club, de l’Hôtel Melia Recoleta Plaza, rue Posadas 1557, à 21h.

La soirée se compose du dîner et du concert. L’entrée s’élève donc à 140 $. Vu le standing du quartier (le plus chic et le plus raffiné de la ville) et le type d’établissement (hôtel 5 étoiles), ce n’est pas du vol. Vous pouvez donc vous y rendre en toute tranquillité. (1)
Pour cette série de concerts qu’elle a intitulée Nueve vidas (9 vies), María Volonté s’accompagne elle-même à la guitare et elle est entourée de Jorge Rabito (basse et guitare), Fabián Miodownik (batterie et percussions) et Kevin Footer (harmonica). Chaque soir, elle a un invité différent.

Pour découvrir cette artiste, il faut visiter son site Internet, bilingue espagnol-anglais et sa page Myspace.
(1) le quartier le plus cher (et le plus arrogant) est en effet un quartier qui n’en était pas un jusqu’au années 1990, celui de Puerto Madero le long des bassins d’amarrage. Des gratte-ciels sans âme, de verre et d’acier, côtoient les vieux docks du port de Buenos Aires, que les urbanistes ont obligés à renier leur histoire portuaire et ouvrière et ont travestis en lofts pour nouveaux riches, en palaces inabordables pour le commun des mortels et en show-rooms de haute couture ou de meubles design hors de prix. Un peu comme ces filles des faubourgs qui, dans les tangos de Homero Manzi, de Celedonio Flores ou de Homero Expósito, délaissent leur mise simple, s’habillent en fausse soie et ambitionnent de s’élever au-dessus de leur condition en se donnant au plus offrant des clients du cabaret qui les aura embauchées. Toujours cette fascination d’une certaine Buenos Aires pour l’argent voyant et la gloire dont elle l’entoure.

Hommage à Mercedes Simone à Parque Chacabuco [à l’affiche]

La Mutuelle Manuel Ugarte du quartier de Parque Chacabuco organise un hommage à la chanteuse et compositrice Mercedes Simone, surnommée La Dama del Tango, en présence de sa fille et avec la participation du bandonéoniste Gabriel Chula Clausi, qui l’a bien connue et a eu souvent l’occasion de l’accompagner. Gabriel Clausi est né en 1911 (voir mon article sur le plenario consacré à Pedro Maffia auquel il a participe en août à la Academia Nacional del Tango).

La chanteuse Celia Saia et la poètesse Nélida Puig seront aussi de la partie avec plusieurs fils de... venant rappeler le souvenir d’un père ou d’une mère proche de Mercedes Simone.

Plaque fileteada en l'honneur de Mercedes Simone, presque face à la Esquina Osvaldo Pugliese, sur l'avenue Boedo (dans le quartier de Boedo)

Ce sera le jeudi 12 novembre à 20h au Toro Bar-Do-Bar, au niveau 890 de la rue Cachimayo, à 10 mètres de la rue Zuviria et à quelques pas d’une station de métro de la ligne E, dans le quartier Parque Chacabuco.
Entrée libre et gratuite.

Julio Pane et El Arranque à No Avestruz [à l’affiche]

No Avestruz (comprenez Autruche interdite, un de ces titres de salle bien surréalistes, comme les Argentins en raffolent) est une salle du quartier de Palermo, installée rue Humboldt au numéro 1857.

Demain et vendredi de la semaine prochaine, les 30 octobre et 6 novembre, à 21h, le bandonéoniste et compositeur Julio Pane se joindra à l’orchestre El Arranque pour les deux derniers concerts que cette formation donnera cette année dans cette salle. Les grandes vacances d’été sont dans moins de deux mois et l’heure approche donc des "derniers concerts de l’année".

El Arranque se compose de sept instrumentistes et d’une chanteuse, qui est désormais Noelia Moncada. Les instrumentistes sont Camilo Ferrero et Juan Ramiro Boero, respectivement premier et deuxième bandonéon, Guillermo Rubino et Osiris Rodríguez, respectivement premier et second violons, Ariel Rodríguez, au piano, Martín Vázquez à la guitare et l’immuable et fidèle Ignacio Varchausky à la contrebasse, le dernier des fondateurs du groupe.
Le prix de l’entrée est fixé à 35 $.

Cours d’interprétation vocale par Patricia Barone [actu]

Photo diffusée par Patricia Barone

La chanteuse Patricia Barone (voir rubrique Vecinos del Tango, dans la Colonne de droite) reprend en novembre sa série de quatre cours déjà donnés avec grand succès en octobre et destinés aux chanteurs de tango. Ce sont des cours d’interprétation plus que de chant stricto sensu.

Ce sera tous les samedis de novembre, de 16h à 19h, à la Escuela Popular de Música du Sindicato Argentino de Músicos, le syndicat fondé en 1936 sous l’impulsion de Osvaldo Pugliese avec une poignée d’autres compositeurs et musiciens socialement très engagés comme Juan de Dios Filiberto (dont je vous parlais hier au sujet de son quartier, La Boca). Cette école est installée avenida Belgrano 3655.

Au programme de cette série de quatre cours :
une introduction sur les deux rôles du chanteur (musicien et comédien),
l’expressivité de la voix, celle du corps et la maîtrise de l’espace sur scène,
l’étude des textes pour accéder à une compréhension fine et exacte (1),
le phrasé (pour jouer avec les nuances, le silence et les variations mélodiques),
les techniques d’adaptation de l’interprétation aux singularités du morceau,
l’analyse des différentes époques du chant dans le tango,
l’analyse, à l’aide d’enregistrements et de vidéos, des styles de chanteurs qui ont marqué leur époque,
l’intégration de ces styles pour un tango d’aujourd’hui et de demain,
l’interprétation par chaque élève de deux morceaux avec feed-back du professeur et du groupe.

Les inscriptions sont ouvertes, sur place, jusqu’au 4 novembre à 21h.

A 19h, ce mercredi 4 novembre, Patricia Barone donnera une conférence gratuite et ouverte à tous en guise d’introduction au séminaire.
Même si vous ne pouvez pas (ne voulez pas) vous inscrire, allez au moins l’écouter.

Vous pouvez retrouver Patricia Barone à travers de nombreux articles en français dans ce bloc (en cliquant sur son nom en haut, dans le bloc Pour chercher, para buscar, to search, ou dans la rubrique Vecinos del Barrio, dans la Colonne de droite).
Vous pouvez la retrouver dans l’article que le magazine français Tout Tango (ed. LP, à Montpellier) lui consacre, en pleine page, dans son numéro courant (octobre, novembre, décembre 2009).
Vous pouvez la retrouver enfin sur le site Web qu’elle partage avec son mari, le guitariste et compositeur Javier González (lien dans la partie basse de la Colonne de droite, dans la rubrique Zorzales, grillons et autres cigales).

(1) Patricia Barone est une chanteuse particulièrement aguerrie en la matière. Elle a créé de nombreux tangos des poètes de la nouvelle génération, des gens comme Alejandro Szwarcman ou Raimundo Rosales, dont je vous parle parfois. Elle est aussi l’une des interprètes du rôle de María dans l’opéra-tango María de Buenos Aires dont le livret, écrit par Horacio Ferrer, est extrêmement délicat à faire passer (un texte complexe, à sens multiple, sur lequel il faut savoir garder son équilibre entre la démesure et le naturel). Cette interprétation est disponible en un double disque édité par Milan Records, sous les auspices de la Fondation Astor Piazzolla.

mercredi 28 octobre 2009

Cucuza et Moscato changent de quartier ce vendredi [à l’affiche]

Le vendredi soir, le chanteur Cucuza et le guitariste Moscato nous ont habitués (dès les premiers billets de ce blog) à leur concert hebdomadaire à El Faro, café-restaurant installé sur la frontière entre le quartier de Villa Urquiza, où habite Cucuza, et celui de Villa Puyerredón, où Cucuza n’habite pas (se reporter à tous mes articles sur la série de concerts El Tango vuelve al Barrio ou ETvaB). Mais ce vendredi (30 octobre) à 21h30, c’est à la Boca, au Malevaje Arte Club, avenue Garibaldi 1670 (à 200 mètres de Caminito, précise l’annonce) que le duo se produira. Entrée à 15 $.

Ils étaient déjà au Malevaje Arte Club vendredi dernier, comme invités du Cuarteto Típico Catenacho (voir mon article à ce sujet).


Ci-dessous, je vous livre (en version bilingue, comme d’habitude) l’annonce, toujours bien tournée et drôle, lancée par Cucuza à sa liste de diffusion :

Cantor y Guitarrista van a seguir haciendo/presentando lo que vienen presentando/haciendo desde hace 2 años en aquel Bar de "Villa Urquizadón", lo que pronto darán a luz en forma de disco, disco EN VIVO Tangos "tradicionales" y las comillas quieren decir que esos Tangos no serán los increíbles y tan cantados "Pasional" o " Sur" precisamente, sino que escarvando un poquito más llegarán hasta "Viejas alegrias", "Barrio viejo", "El adios", "Farolito de papel", "Olvido" entre otros miles... Tan simple, honesto, directo y sanguineo como un Cantor y un Guitarrista haciendo esos Tangos...
No nos vengan con que es lejos, que es fin de mes y esa gilada (si vivimos en fin de mes desde principio de mes...!) Los esperamos en ese lugar increíble que es "El Malevaje Tango Club"...
(Hernán Cucuza Castiello)

Chanteur et Guitariste continuent d’interpréter/présenter ce qu’ils présentent/interprètent depuis maintenant 2 ans dans ce fameux Bar de "Villa Urquizadón", ce que bientôt ils mettront au jour sous forme de disque. De disque EN PUBLIC (1). Des tangos "traditionnels" et les guillemets veulent dire que ces Tangos ne seront pas exclusivement (2) les fantastiques et si souvent chantés Pasional ou Sur mais en grattant un petit peu plus, on arrivera jusqu’à Viejas alegrias, Barrio viejo, El adiós, Farolito de papel (3), Olvido parmi des milliers d’autres... Aussi simple, aussi honnête, aussi direct et aussi bouillant qu’un Chanteur et un Guitariste interpétant ces Tangos...
Et ne venez pas nous dire que c’est loin
(4), qu’on est à la fin du mois et toutes ces âneries (de toute façon, la fin du mois, c’est dès le premier !). Nous vous attendons dans cet endroit fantastique qu’est le Malevaje Tango Club... (5)
(Traduction Denise Anne Clavilier)

Voilà, le tango à Buenos Aires, c’est ça !

(1) J’ai consacré un article en août à la soirée d’enregistrement de ce disque. Malheureusement, l’occasion a été gâchée par la présence d’un ivrogne très bruyant et qui avait plutôt le vin méchant. Cucuza et Moscato ont donc dû répéter l’opération le vendredi suivant, en faisant revenir à El Faro ceux de leurs invités qui pouvaient encore se libérer, parce que l’enregistrement était difficilement exploitable (on y entendait à peu près sur tous les morceaux les braillement de Miguelito). Cucuza m’a expliqué que la deuxième soirée s’était mieux passée. Miguelito était bien là encore une fois mais pas seul et ses amis l’ont empêché de perturber les artistes comme il l’avait fait la première fois. Le disque est en cours de montage et de mixage. Il sortira donc bien, malgré l’incident qui a dérangé les musiciens plus que les spectateurs.
(2) precisamente traduit par exclusivement. Comme quoi, le langage parlé, la langue de tous les jours se caractérise par son manque de précision et ses approximations. Et toute la difficulté de la traduction ici, c’est de trouver précisément l’approximation qui rendra le plus justement possible la nuance de la langue originelle. En français, l’expression "pas précisément" signifie "tout à fait à l’inverse", "tout au contraire". Ce qui n’est pas du tout la pensée de Cucuza. Ne serait-ce que parce qu’il sait mieux que personne que Pasional et Sur ne sont pas au même niveau dans le classement des tangos inscrits au répertoire de tout le monde.
(3) Farolito de papel, de Teófilo Lespés pour la musique et Francisco García Giménez pour les paroles, est sans doute l’un des tangos préférés du répertoire de Cucuza.
(4) La Boca est un quartier totalement excentré de Buenos Aires, tout au sud, coincé entre le Río de la Plata à l’est et le Riachuelo à l’ouest. C’est probablement le lieu de la fondation de la toute première Buenos Aires, par Pedro de Mendoza en 1536 (
voir mon article sur la fondation de Buenos Aires). La plupart des spectateurs habituels du vendredi soir à El Faro habitent au nord-ouest de Buenos Aires, du côté de Villa Urquiza et de Villa Pueyrredón, c’est un public d’habitués qui viennent là en voisins pour la majorité d’entre eux. Regardez une carte de Buenos Aires, vous allez constater que pour eux, La Boca, c’est le bout du monde !
(5) Ce n’est pas pour rien que cette salle installée là où elle est installée porte ce nom : Malevaje est un tango composé par Juan de Dios Filiberto et écrit par Enrique Santos Discépolo en 1928, alors que tous les deux partageaient les mêmes idéaux anarchistes. Juan de Dios Filiberto est le local de l’étape : il est né (le 8 mars 1885), il a vécu toute sa vie et il est mort à La Boca le 11 novembre 1967... Dès 1932, il a élu définitivement domicile dans une maison de la rue Magallanes, au n° 1140, dont la façade a été peinte par son ami et voisin boquense, Benito Quinquela Martín, dont la maison, aujourd’hui un musée, est voisine de Caminito, autre tango de Juan de Dios Filiberto (avec des paroles de Gabino Coria Peñalosa). Cette maison de la rue Manganalles a été récupérée par la Ville de Buenos Aires en 2007qui l’a inscrite à son Patrimoine culturel. Juan de Dios Filiberto est aussi le fondateur de la Orquesta Nacional de Música Argentina Juan de Dios Filiberto, un nom qui lui a été accordé bien longtemps après la mort de son fondateur.

Lucas Kohan au Sanata ce samedi minuit [à l’affiche]

Illustration diffusée par l'artiste

Le guitariste Lucas Kohan se produira avec son groupe, autour de la présentation de son récent disque, Partiendo (sur le départ), le samedi 31 octobre à minuit, au Sanata Bar, situé esquina Sarmiento y Sánchez de Bustamante, dans le quartier de Almagro (lire mon premier article, de novembre dernier, sur la sortie de ce disque).
Autour du guitariste et compositeur, il y aura Luis Vázquez au bandonéon, Gonzalo Braz à la clarinette (clarinettes au pluriel sur l’annonce originale, pour tenir compte des diverses tessitures de l’instrument), Daniel Figueroa à la percussion et Alejandro Ponte à la flûte traversière. Clarinette, flûte traversière et percussion ne font pas partie des instruments traditionnels du tango, depuis les années 20. Ils ont été réintégrés dans l’orchestre de tango par Astor Piazzolla puis des compositeurs comme Raúl Garello.

Lukas Kohan présente lui-même ainsi Partiendo :
El disco tiene la particularidad de haber sido grabado en estudio pero “como en vivo”, en tomas con el grupo tocando completo, con un sonido muy natural y espacio para la improvisación.
Autodefinido como música contemporánea rioplatense, el CD abre con el tema que le da su nombre, un solo para guitarra; incluye dos canciones con textos del propio Kohan –interpretadas por Sandra Marquez y el Cardenal, respectivamente; pero también algunos temas con instrumentaciones para vientos y hasta un cuatro venezolano, que toca Kohan. Los aires son de tango, candombe o milonga, pero también de jazz y música contemporánea.
Le disque présente la particularité d’avoir été enregistré en studio mais comme en public, grâce à des prises du groupe au complet, avec une sonorité très naturelle et de la place pour l’improvisation.
(Lucas Kohan)

Auto-défini comme musique contemporaine du Río de la Plata, le CD s’ouvre avec le morceau qui lui donne son nom, un solo de guitare, comprend deux chansons avec des textes de Kohan lui-même, respectivement interprétées par Sandra Marquez et Cardenal (1) et aussi quelques morceaux avec des instrumentalisations intégrant des instruments à vent et même un cuatro vénézuelien (2), dans les mains de Kohan. Les mélodies sont des tangos, des candombes ou des milongas mais aussi du jazz et de la musique contemporaine.
(Traduction Denise Anne Clavilier)

En novembre, Lucas Kohan et son quintette seront au Centro Cultural Julio Cortázar, rue O’Higgins 3050, dans le quartier de Nuñez, le vendredi 20, à 21h (entrée libre et gratuite) et à Clásica y Moderna, Callao 892, dans le quartier de la Recoleta (20 $ l’entrée), le vendredi 27 novembre à 23h45.
Pour en savoir plus sur l’artiste et découvrir sa musique, connectez-vous à son site bilingue (espagnol-anglais) ou à sa page Myspace.
Pour lire les autres articles de Barrio de Tango sur ce musicien, cliquez sur le mot-clé constitué par son nom, en haut, dans le bloc Pour chercher, para buscar, to search, sous le titre.
(1) Surnom du chanteur de tango Javier Domínguez (voir mes articles sur lui, donc en français).
(2) cuatro venezolano : instrument de musique à (quatre) cordes pincées, de la même famille que la guitare. Sa caisse de résonance est néanmoins plus ventrue. Les luthiers qui fabriquent le cuatro vénézuelien veillent à employer des bois locaux, au nombre de deux ou trois types pour un même instrument (deux pour la caisse et un autre pour le manche), des bois qui permettent au cuatro de bien sonner. Traditionnellement, le haut de la caisse de résonance est de couleur sombre et le bas de couleur claire. L’instrument ne doit être ni verni ni peint, ce qui nuirait à sa qualité sonore. Attention aux instruments bon marché dans les boutiques de souvenirs dans les pays du nord de l’Amérique du Sud (A Buenos Aires, dans ce type de commerce, vous trouverez d’autres articles de bimbeloterie, estampillés Recuerdo de la Argentina mais made in China).

mardi 27 octobre 2009

Alfredo Arias à El Cubo et au Théâtre du Rond-Point [ici]

Masques théâtraux sur un trottoir du quartier de l'Abasto. Ils désignent l'entrée d'un théâtre ou de ce qui fut un théâtre. Il y en a plein sur les trottoirs de ce quartier, de part et d'autre de Corrientes.

Ce triptyque théâtral, inspiré par la culture de Buenos Aires, est aux antipodes du spectacle de O Tango dont je parle dans un autre article de ce jour : il s’agit d’une oeuvre en trois volets ou de trois oeuvres partageant un même cycle de représentations au Théâtre du Rond Point, signé(e)s par l’un des plus grands artistes du théâtre contemporain, le dramaturge, comédien, écrivain et metteur en scène argentin, bonaerense pour être plus précise (1), Alfredo Arias, installé en France depuis les années 1970, après qu’il a quitté un pays ravagé par l’instabilité politique, la censure et la répression.

Alfredo Arias est un artiste qui a des choses à dire et qui les dit le plus souvent sous la forme de pièces de théâtre du répertoire classique ou plus encore d’oeuvres originales (de su autoría, comme on dit à Buenos Aires), fantastiques, oniriques, iconoclastes, excentriques (lui dit "sophistiquées") où il mêle la musique, la danse, la poésie et les ressources de la mise en scène, des lumières, des décors, dans une écriture dramatique qui lui appartient en propre. Comme son ami, Jérôme Savary, argentin comme lui et comme lui né au début des années 40, mais lui à Buenos Aires. A Paris, Alfredo Arias a travaillé plus d'une fois au Théâtre du Rond-Point, qu’avaient créé Jean-Louis Barrault et Madeleine Renaud, dans une ancienne patinoire près des Champs Elysées, et que dirige depuis novembre 2001 le dramaturge et metteur en scène Jean-Michel Ribes, l’un de ses complices de créativité, après d’autres de la même taille (un Marcel Maréchal par exemple à la fin des années 1990).

Alfredo Arias présente donc à partir du 10 novembre et jusqu’au 31 décembre trois pièces dont il a puisé la matière dans ses souvenirs personnels, ceux du Buenos Aires de son enfance et ceux de la place de la Contrescarpe, où il a retrouvé, lors de son arrivée à Paris, au tout début des années 70, ses compatriotes Copi, Jorge Lavelli et Jérôme Savary et dans de grands mythes de la culture et de l’histoire argentine (Evita, le cinéma...), culture à laquelle il appartient jusqu’à l’os, une culture argentine sublimée par l’alambic de l’exil en France, des voyages à travers le monde et du déchirement de l’éloignement physique, une culture argentine où le tango, au sens large du terme, tient une place primordiale, fondatrice mais sans esbroufe, une place naturelle, légitime, qu’il n’a donc besoin ni de justifier ni d’exploiter ni même d’affirmer ou de revendiquer. Si ce sont des spectacles où sont présents la danse et la musique, le tango et d’autres genres populaires (opéra pop, musique de cinéma, comédie musicale nord-américaine...), il ne s’agit pas pour autant de spectacles de tango (au sens étroit ou strict du terme) mais d’authentiques pièces de théâtre d’un artiste citoyen du monde qui va jusqu’au bout de son identité et l’Argentine et sa culture populaire et faubourienne en est la pierre de fondation.

Ces trois spectacles musicaux s’intitulent Trois Tangos (qui nous font passer d’un faubourg de Buenos Aires des années 30 à un paquebot italien des années 50 pour déboucher 20 ans plus tard, sur la Place de la Contrescarpe, dans le Paris de la Rive Gauche), Tatouage (qui revisite le personnage historique de Miguel de Molina, un chanteur espagnol homosexuel qui dût fuir l’Espagne franquiste et trouva refuge en Argentine, grâce à l’intelligence humaine et artistique de Eva Perón) et Cabaret Brecht Tango Broadway (un hommage au music-hall et au cabaret, à Marlène et à Brecht, à une tradition qui fut aussi l’occasion d’un grand brassage social, à Buenos Aires, à Paris, à Berlin ou à New York). Alfredo Arias sera lui-même sur les planches pour Tatouage et Trois Tangos.

Ces deux derniers se jouent du mardi au samedi (sauf le 11 novembre), à 18h30 pour Trois Tangos (15h30, le 31 décembre) et à 21h pour Tatouage (18h30, le 31 décembre). Il est donc possible au spectateur d’enchaîner les deux spectacles, d’autant que le Théâtre du Rond Point propose un restaurant et une librairie où vous pourrez vous poser entre les deux.
La troisième pièce ne se jouera que le dimanche à 18h30, soit 7 représentations du 15 novembre au 27 décembre, et c'est déjà plein.

Les prix sont raisonnables : 28 € la place, dans la Salle Jean Tardieu (176 places). Vous aurez 2 € de frais si vous retenez vos places par Internet et elles vous attendront une demi-heure avant le lever du rideau à la caisse du théâtre (à moins que vous ne choisissiez de les imprimer vous-même chez vous). Différentes réductions sont accordées aux plus de 60 ans (26 €), aux moins de 30 ans (16 €), aux chômeurs et intermittents du spectacle (18 €) et aux titulaires de la carte Imagin’R (un abonnement de transport en commun réservé aux collégiens et lycéens de région parisienne, qui ne payeront, quant à eux, que 12 €). Les réservations sont ouvertes entre 14 et 2 jours avant la représentation. Si vous réservez par Internet, munissez-vous de votre carte de paiement pour aller retirer vos places (on vous la demandera pour ne pas délivrer vos billets à quelqu’un d’autre que vous).

Les deux premières pièces ont été présentées hier, en avant-première, à El Cubo, un espace théâtral de Buenos Aires, dans la rue Zelaya, en plein quartier de l’Abasto, à quelques mètres du Museo Casa Carlos Gardel dont je vous parle parfois dans ce blog. Les Portègnes les auront vues sans les jeux de lumière ni les costumes prévus pour la création à Paris. Ils n’ont eu droit qu’au jeu de scène et à l’interprétation musicale, ce qui, aux dires de leur auteur, est essentiel dans ces pièces.
Cabaret Brecht Tango Broadway avait déjà été présenté, en avant-première aussi, à Villa Ocampo, la maison où vécut l’écrivaine et éditrice Victoria Ocampo (1890-1979) à San Isidro, dans la banlieue nord et chic de Buenos Aires et où l’UNESCO a installé un prestigieux centre de rencontres culturelles.


A cette occasion, Página/12 a interviewé l’Argentin du bout du monde dans son édition d’hier. L’article, de Hilda Cabrera, s’intitule Le souvenir ne doit pas être paralysant. Alfredo Arias y livre quelques formules bien frappées dont il a le secret :
La Argentina es el laboratorio de mi memoria. No vengo con ambición de conquistar o hacerme ver. Hay algo mucho más íntimo y valioso en estos viajes: trabajar sobre aquellas cosas que me formaron. Ese es mi patrimonio oculto.
Página/12

L’Argentine est le laboratoire de ma mémoire. Je ne [re]viens pas avec une ambition de conquête ou pour me faire voir. Il y a quelque chose de beaucoup plus intime et précieux dans ces voyages : travailler sur ces choses-là qui m’ont formé. Tout ça, c’est un patrimoine caché.
(Traduction Denise Anne Clavilier)

Los artistas populares me inspiran, pero para hacer algo sofisticado, como el Cabaret... que construimos alrededor de las interpretaciones de Sandra y Alejandra. Me asombra que aquí una misma persona pueda hacer cosas tan diferentes. Alejandra hizo Canciones degeneradas, Chicago, canta tangos... Esto es una particularidad de los artistas argentinos.
Página/12

Les artistes populaires m’inspirent, mais pour faire quelque chose de sophistiqué, comme le Cabaret... que nous construisons autour des interprétations de Sandra [Guida] et Alejandra [Radano] (2). Cela m’émerveille qu’ici une personne puisse faire des choses si différentes. Alejandra a fait Canciones degeneradas, Chicago [de Bob Fosse], elle chante du tango. Ça, c’est une particularité des artistes argentins.
(Traduction Denise Anne Clavilier)


Uno no puede disfrazar sus raíces, aunque hayan sido dolorosas y accidentadas. Cuando me fui de la Argentina tuve que reconstruir mi interior. No es simple. He tenido la suerte de que se me haya escuchado y protegido en Francia. Eso me autoriza a llevar a los franceses lo más recóndito de mi persona.
Página/12

On ne peut pas travestir ses racines, même si elles ont été douloureuses et accidentées. Quand j’ai quitté l’Argentine, il a fallu que je me reconstruise à l’intérieur. Ce n’est pas simple. J’ai eu la chance qu’on m’ait écouté et protégé en France. Cela m’autorise à apporter aux Français ce qui est le plus enfoui de ma personne.
(Traduction Denise Anne Clavilier)


Alfredo Arias a publié de nombreux livres en français (ouf !!!!), à commencer par ses pièces de théâtre, pour la plupart au catalogue d’Acte Sud, et tout récemment, un livre d’entretiens, avec Hervé Pons (L’écriture retrouvée, éd. du Rocher, 2008).

Pour aller plus loin :
Lire l’interview complète sur le site de Página/12.
Visiter le site (en français) de Alfredo Arias (pas vraiment exhaustif puisque les futures créations au Rond Point n’apparaissent pas).
Pour le spectacle lui-même : tout est sur le site du Théâtre du Rond Point.
Vous pourrez y réserver vos places, écouter des extraits musicaux des trois spectacles, visionner un mini-film et télécharger le dossier de presse sous format pdf, plus explicite et plus détaillé que les présentations succinctes que vous trouverez dans le programme de la saison 2009-2010.
(Ajout du 15 novembre) Vous pouvez aussi lire mon article du 14 novembre sur le spectacle, tel que je l'ai vu le 12 novembre 2009.
Ajout du 30 novembre 2009 : pour voir quelques extraits de ce spectacle tel qu'il est représenté à Paris en ce moment, visionnez ce reportage du journal de France 3 reprenant des passages filmés sur scène et une interview du maître dans les coulisses du Théâtre du Rond-Point.

(1) Il est né à Lanús, dans la banlieue sud de Buenos Aires, en 1944.
(2) les deux chanteuses argentines du spectacle.

Tango for Export au Casino de Paris et un peu partout en France [ici]

Affiche telle qu'on la trouve sur le site du Casino de Paris et sur les murs de la capitale

Ajout du 13 novembre 2010, à l'attention des internautes qui découvrent cet article à la suite du reportage diffusé par France 3 ce jour (13.11.10) : les commentaires télévisés contenaient de très nombreux clichés, erreurs et approximations en tout genre, sans aucun rapport avec la réalité historique. Le journaliste est tombé dans tous les panneaux du dossier de presse (qui est fait pour d'ailleurs !), il l'a repris tel quel sans exercer l'esprit critique qui fait la valeur ajoutée de sa profession. Par conséquent, je me dois, de mon côté, d'avertir mes lecteurs :  O Tango n'est pas ce qu'en disent la production et le reportage, ce n'est pas un authentique spectacle de Buenos Aires. Le public argentin ne l'a jamais vu, pour une raison simple : ce genre de spectacle est réservé là-bas aux cars de touristes étrangers qui payent très cher sans le savoir puisque l'entrée au dîner-spectacle est comprise dans le forfait réglé au Tour Operateur organisateur du voyage organisé. (5)

Cela s’appelle O Tango, du nom de la compagnie internationale qui présente ce spectacle sans titre que son site web, en anglais, appelle simplement "the show". Et c’est l’exact opposé de l’autre spectacle dont je parle ce soir dans mon autre article, le triptyque que présente Alfredo Arias au Théâtre du Rond-Point à Paris, à partir du 10 novembre prochain (lire l'article en cliquant sur ce lien).

La tournée en France de O Tango commence le 17 novembre 2009 à Anzin et se terminera le 6 décembre 2009 à Toulouse. O Tango s’arrêtera au Casino de Paris du 20 au 22 novembre 2009, pour quatre représentations dont une matinée et une soirée le dimanche, à des prix dignes du Casino de Paris et que je trouve personellement prohibitifs (de 66 à 33 € en fonction de la visibilité). Hors Paris, O tango s’arrêtera dans 16 villes dont les plus importantes sont Bordeaux (avec deux représentations) et Toulouse. Mais il y aura aussi Roubaix, Cambrai, Amiens, Enghein, Tours, Poitiers, Nantes, Perpignan, Montpellier, Carpentras, Pau et Biarritz.
Il s’agit de l’habituel spectacle qui tourne en Europe tous les ans à la même époque en ressassant les même platitudes, un peu recyclées d’une année et d’une troupe sur l’autre et que le sémiologue, amateur ou averti, peut détecter dans la pub de la production sur les sites Web des salles qui accueilleront la tournée (la propaganda, comme on appelle la publicité en Amérique du Sud) :

"1910. Une nuit se lève sur le port de Buenos Aires." Le sacro-saint décor portuaire où commence toujours l’intrigue, toujours à la même époque (avant 1914), avec les figures obligées des voyous et des prostituées qui transforme la naissance du tango en mélodrame crapuleux (en évacuant les authentiques aspects historiques, politiques et sociaux de l'événement) et avec l’oxymore poétique de service. Cette année, en français, c’est "la nuit se lève". Les deux Homero, Manzi et Expósito, les Enrique Cadícamo, Cátulo Castillo, Horacio Ferrer, Héctor Negro, Luis Alposta ou Alejandro Szwarcman (voir Les poètes, dans la rubriques Les artistes, dans la Colonne de droite) peuvent bien aller se rhabiller : ils ont trouvé leur maître... (1)
Le reste de l'argument n'a pas d'intérêt en soi : dans ce type de spectacle, l'histoire n'est qu'un prétexte pour faire défiler les tangos, généralement très connus, les morceaux de bravoure chorégraphique et les costumes. L'action dramatique n'a pas d'existence autonome.

"Mythifié par Gardel, sublimé par Piazzolla, le tango etc." Sur la centaine de grands compositeurs qui ont fait le tango en 120 ans, le propre du tango for export est de ne pas dévier de ces deux-là. D’abord parce qu’il est bon de pratiquer la récup’ "c’est comme là-bas, dis !". La récup’, c’est l’art que pratiquent avec une habileté remarquable tous les pauvres -et ils sont nombreux- dans toute l’Argentine. Ensuite parce qu’avec ces deux-là, on est sûr au moins de ne pas se tromper : tout le monde les connaît déjà, au moins de nom. Tambouille Big Mac-Garbit à la sauce Chan Chan (2).
Et, dernier détail qui trahit le tango for export aussi sûrement que les empreintes, digitales ou génétiques, finiront toujours par confondre le criminel qui les a laissées sur la scène du crime, à chaque fois, vous pourrez trouver quelque part des comptes d’apothicaire travesti en producteur hollywoodien (3), destinés à épater le chaland : "En deux actes, cinq tableaux et plus de soixante costumes originaux, 17 artistes de Buenos Aires". La plupart en fait totalement inconnus du public argentin qui ne va jamais à ces spectacles-là, comme vous pouvez le constater si vous lisez régulièrement Barrio de Tango (c'est de tout façon beaucoup trop cher pour eux). Sur toute la distribution, Claudia Pannone est une chanteuse dont on entend un peu parler à Buenos Aires même quand il est question de tango. Quant au couple de danseurs vedettes, s'ils sont bien de Buenos Aires, ils se partagent entre deux spectacles, celui de l’ensemble français Tanguisimo, dont fait partie José Luis Barreto, le partenaire de scène de Claudia Pannone dans ce spectacle à en croire les annonces qui en sont faites (4) , et O Tango lui-même.

On appelle à Buenos Aires tango for export une certaine manière d’exploiter commercialement, le genre et sa notoriété mondiale, sur place comme à l’étranger. Pour les danseurs professionnels, le tango for export représente 90%, si ce n’est plus, des opportunités de monter sur scène. Les musiciens eux ont un choix plus large pour exercer leur art. Les 5 couples de danseurs qui participent au spectacle sont donc certainement ravis de pouvoir monter sur scène grâce à cette tournée. Quand ils n’ont pas de contrat de ce genre, la plupart des danseurs professionnels de tango l’enseignent. Certains ont leur propre cours. D’autres travaillent dans des écoles de danse, des centres culturels, et pas toujours pour les touristes...
Sur les indices qui permettent de discerner entre tango for export et tango des artistes, le jour où vous irez à Buenos Aires, voir mon article n° 600.

Si l’une de ces quatre représentations parisiennes vous tente, le mieux est de vous reporter aux informations diffusées par le Casino de Paris dont voici le site Internet.

Pour les autres étapes de la tournée, vous devez consulter le site tout en anglais (autre indice du tango fort export, aussi incontestable que les empreintes digitales) de la Compagnie O Tango. Vous y trouverez des photos, des vidéos, des extraits publicitaires du spectacle (trailers) tirés de différents millésimes.

Et pour en savoir un peu plus sur les artistes du spectacle, vous pouvez visiter le site bilingue espagnol-anglais de Claudia Pannone, celui unilingue, en français, de José Luis Barreto (4) et celui, uniquement en espagnol, du couple de danseurs et chorégraphes Adrián Veredice et Alejandra Hobert (ils sont fait la couverture du numéro 161 de El Tangauta, en mars 2008). Ils sont ces jours-ci au Sicilia Tango Festival, à Palerme, du 29 octobre au 1er novembre 2009 (attention : le site est en italien). L’ensemble Cinco Tango (les musiciens du spectacle) n’a pas de site à cette heure.

(1) aller se rhabiller (ir a vestirse otra vez) : turno idiomático para decir que no le parece uno importante o interesante a nadie. El origen (argótico) es el caso de la prostituta que su cliente rechaza por no ser tan atractiva como él se lo había imaginado. En el mismo significado, se puede decir también aller se coucher, aller se faire voir, aller se faire voir ailleurs, aller se faire pendre ailleurs. Trouver son maître : encontrar a alguien que tiene más calidades que uno.
Le directeur artistique du spectacle, Oliver Tilkin, musicien formé au Conservatoire de Bruxelles si j’ai bien compris (ce qui n’est pas sûr), décrit lui-même le show ainsi : "Renaissant sans cesse de ses cendres, le tango sera toujours ce chant d'âmes en peine, ce sexe dansant, ce phoenix païen qu'idolâtrent les fous et les ivres d'infini, et qui aura à jamais le talent ultime d'émerveiller là où jamais on ne l'attend..." Retrouvant dans le texte que le Casino de Paris affiche sur son site à la page du spectacle, une phrase tirée de cette citation d’Oliver Tilkin ouvrant la présentation du 24 novembre au Zénith d’Amiens, j’en déduis que la troupe n’a pas eu besoin de faire appel aux services d’un publicitaire ad hoc.
(2) Chan Chan : c’est l’onomatopée avec laquelle les Argentins, peu amateurs de tango, désignent le genre en imitant le caractéristique double accord qui conclut chaque morceau. La traduction en français, c’est tsoin tsoin.
(3) J’adore le pastiche qu’en avait fait, sur la couverture d’Astérix et Cléopâtre, René Goscinny, qui a lui-même passé toute son enfance à Buenos Aires : "14 litres d’encre de Chine, 30 pinceaux, 62 crayons à mine grasse, 1 crayon à mine dure, 27 gommes à effacer, 38 kilos de papier, 16 rubans de machine à écrire, 2 machines à écrire, 67 litres de bière ont été nécessaires à la réalisation de cette aventure". Le nouvel éditeur, Hachette, a fait disparaître de la couverture de l’album cet inégalable boniment de foire. Quelle perte pour la culture !
(4) Attention, le nom de ce chanteur était annoncé à l'affiche au moment de la publication de cet article par certaines salles et par le site de O Tango. Mais lui-même, José Luis Barreto, me fait savoir aujourd'hui (9 novembre 2009) et en espagnol qu'il ne participe pas au spectacle. Dont acte. Il me fait aussi savoir qu'il n'aime pas mon article. Et c'est son droit. Ceci dit, je laisse néanmoins le lien vers son site Web (après tout, il y a sûrement des internautes qui peuvent avoir envie de le visiter). Au demeurant, je n'ai parlé de ce spectacle qu'à cause du battage médiatique qui en fait une actualité liée au tango en France. Hors battage médiatique, c'est le genre de spectacle dont je ne m'abaisse pas à parler dans Barrio de Tango. Pas besoin de moi pour se faire connaître, c'est le moins qu'on puisse dire. Quant à cet article, il n'empêchera aucun théâtre qui programme O Tango de faire le plein tout au long de cette tournée en France. Tant mieux pour eux ! Dommage pour le vrai tango vivant et qui n'entend pas prendre le public pour un imbécile.
(5) Ajout du 16 novembre 2010 : à noter que le journal de France 3 a su faire un reportage beaucoup nettement plus solide sur le spectacle d'Alfredo Arias qui passait à la même époque au Théâtre du Rond-Point. Comme quoi, un reportage est aussi le fidèle reflet du spectacle dont il parle : un mauvais spectacle donne un reportage plein de clichés, un bon spectacle, avec des artistes qui ont quelque chose à dire (et c'est le cas d'Alfredo Arias, qu'on aime ou qu'on aime pas) donne un reportage de bien meilleure tenue.

lundi 26 octobre 2009

Il y aura un second tour en Uruguay [Actu]

Fait assez rare dans la région où la dispersion des votes reste un phénomène très marginal un quart de siècle après la fin des dictatures les plus dures qu’ait vécu le sous-continent, l’Uruguay devra organiser un second tour pour l’élection de son prochain président de la République et pour bon nombre des sièges à pourvoir dans les deux assemblées législatives. Ce deuxième tour est prévu dans un mois.

Photo de une de El País
Le duo (la formula) de la coalition de gauche, Frente Amplio, José Mujica, candidat à la présidence, et Danilo Astori, candidat à la vice-présidence, arrive largement en tête des suffrages exprimés au premier tour avec un peu plus de 46 % des voix mais la formula n’atteint pas la majorité absolue nécessaire à l’élection selon la Constitution uruguayenne (1). D’autant que le vote blanc est comptabilisé dans cette élection nominale et pèse donc sur les résultats finaux, ce qui, mathématiquement, rend plus ardue toute victoire au premier tour (2).

Le deuxième tour de la présidentielle opposera, comme le prévoyaient les sondages de la semaine dernière, José Mujica et Luis Alberto Lacalle, président du Partido Nacional, ancien président de la République lui-même et auquel le Partido Colorado en la personne de son candidat et président, Pedro Bordaberry, a immédiatement apporté son soutien (sur les sondages pré-électoraux, lire mon article de la semaine dernière).

Dans le camp des Blancos (Partido Nacional), la joie est sans mesure comme on le voit fort bien sur la photo du haut tirée de la une du quotidien El País (à gauche, épuisé par le succès inattendu, on Luis Alberto Lacalle. En dessous, la formula de gauche, Astori à droite, Mujica à gauche, tous eux serrant dans leurs mains crispées un drapeau de l'Uruguay). Il y a encore quelques mois en effet, la victoire de la gauche paraissait acquise dès le premier tour. Qui plus est, si le Frente Amplio est arrivé largement en tête hier, il ne dispose que de très peu de marge pour élargir sa base électorale au second tour. Vu les maigres, très maigres résultats du Partido Independiente (2,37 %, son Président n'assure même pas son siège au Sénat) et de la Asemblea Popular (résultats si insignifiants qu’ils sont confondus dans un ensemble intitulé les autres formations, qui fait un total à peine supérieur à 5%), le Frente Amplio a fait le plein de ses voix, comme diraient nos politologues distingués. Il ne peut maintenant gagner de nouveaux suffrages à un niveau significatif qu’auprès des électeurs abstentionnistes, parmi lesquels les expatriés qui n’ont pas fait le déplacement pour venir voter au pays. Mais encore faudrait-il qu’ils puisent se payer le voyage. Pire : il faut que les électeurs du Frente Amplio qui sont rentrés au pays hier fassent aussi le voyage du second. S’ils habitent à Buenos Aires, Rosario ou Porto Alegre, c’est un jeu d’enfant ou presque. Mais s’ils habitent New-York, Miami, Ottawa, Londres, Madrid, Lausanne, Sydney ou Tokyo, leur participation au scrutin est loin d’être acquise (3). De l’autre côté, l’addition des résultats des deux partis de droite au premier tour donne un meilleur résultat (29,15 % +16,96 %, à 86 % des bulletins dépouillés) que celui obtenu par le Frente Amplio (46,62 %, à 86% des bulletins dépouillés à midi, heure française, 3 heures de moins à Montevideo).

Au fur et à mesure du dépouillement, les résultats ont progressivement creusé l’écart entre le FA et les deux partis de droite par rapport aux sondages sortis des urnes, qui plaçait le FA à un peu plus de 43%, le Partido Nacional un peu au dessus de 30% et le Partido Colorado à un peu plus de 17% des voix.

Malgré cette remontée dans les chiffres réels, c’est néanmoins un coup très rude pour la gauche uruguayenne devant laquelle un vrai boulevard semblait s’ouvrir, grâce au bilan extrêmement positif du mandat de Tabaré Vázquez, le président sortant, à sa popularité immense (4) et à celle, très forte également, du candidat désigné lors des primaires du 28 juin dernier, lequel a peut-être gâché sa chance avec quelques formules à l’emporte-pièce, notamment en matière diplomatique, qui ont fait beaucoup de bruit et de scandale dans le pays et à l’étranger (5).

En ce qui concerne les deux référendums qui étaient aussi au programme du scrutin d’hier, à savoir l’instauration d’une modalité de vote par correspondance dans le Code électoral uruguayen et l’invalidation de la Loi d’amnistie contre les officiers et soldats ayant commis des homicides et des actes de torture pendant la Dictature militaire de 1973-1985 (dite Ley de Caducidad), les deux propositions ont été rejetées de manière incontestable : la Ley de Caducidad, déclarée pourtant anticonstitutionnelle il y a une semaine par la Cour Suprême (voir mon article à ce propos), n’est pas invalidée (les 48% de oui sont un revers pour Tabaré Vázquez qui a beaucoup fait pour que cette loi soit définitivement répudiée et n’y sera pas parvenu). Quant aux Uruguayens expatriés, où qu’ils habitent, ils continueront à devoir retourner au pays pour chaque scrutin s’ils veulent exercer leur droit de vote (le oui n’a atteint que 38% sur cette question).

Quant à la composition des prochaines assemblées, la Chambre des Députés et le Sénat, il faudra attendre la fin du décompte très compliqué du dépouillement pour y voir plus clair. En effet, au Sénat le mode électoral est celui d'un scrutin uninominal à deux tours (il faut la majorité absolue pour remporter le siège dès le premier tour). Mais à la Chambre des députés, c'est un scrutin à la proportionnelle qu prévaut. Et le vote blanc n'y est pas considéré comme un suffrage exprimé (alors que pour la présidentielle, si). La Cour électorale (Corte Electoral), qui est souveraine en matière de dépouillement, effectuera les calculs de répartition des sièges restants de députés, circonscription par circonscription, à partir de demain et jusqu'à vendredi soir. Donc pour nous, en Europe, les résultats définitifs, avant élection du Président du Sénat (c'est toujours le Vice-Président de la République), seront connus samedi matin. Toutefois, il apparaît qu’il sera difficile au Frente Amplio de conserver la majorité absolue qu'il détient dans les deux chambres et qu'il a d'ores et déjà la majorité à la Chambre des Députés.

Signe des progrès de la démocratie en Uruguay : la journée électorale n’a compté qu’un tout petit nombre d’incidents. En cela, on observe un écart considérable avec l’ambiance électrique, incroyablement polémique et "village gaulois" qui régnait, il y a deux ans, en Argentine, pour la même échéance électorale, avec des récriminations acerbes et aigres émanant de tous les partis qui contestaient presque tous le déroulement du scrutin. De surcroît, ce quadruple scrutin n’a en rien altéré les habitudes dominicales des Uruguayens qui ont su accomplir le même jour leur devoir électoral et vivre la vie habituelle d’un dimanche printanier et ensoleillé, avec asado et mate en famille ou entre amis, dans l’attente d’une soirée électorale devant la télévision, chez soi, au bistrot ou dans les permanences des partis, comme dans les pays de l’hémisphère nord, ainsi qu’en témoigne le quotidien montevidéen El País (lire l’article sur les incidents mineurs relevés au long de la journée électorale et celui sur les comportements observés à Montevideo chez l’homme de la rue).

Pour en savoir plus :
Lire l'analyse globale des résultats par El País (quotidien uruguayen)
Lire l'article de El País sur la situation du Frente Amplio
Lire l'article de El País sur le résultat des référendums

(1) Ce n’est pas le cas en Argentine où le candidat présidentiel l’emporte s’il rassemble dès le premier tour plus de 43% des voix exprimées. Ce qui a été le cas successivement de Néstor Kirchner et de Cristina Fernández de Kirchner quatre ans plus tard.
(2) Attention : l’expression "vote blanc" en français veut dire "vote nul" (voto invalido, anulado, voto en blanco) et non pas vote en faveur du Partido Nacional, comme c’est le cas en espagnol d’Uruguay.
(3) D’où l’importance qu’avait le référendum sur le voto espistolar : il est probable qu’après les années d’instabilité tragique et terrifiante de la Guerre Froide, plus les pratiques démocratiques vont s’enraciner dans ce pays, dont la culture est essentiellement latine, plus il y aura des élections à 2 tours parce que les électeurs prendront l’habitude de disperser leurs voix sur une multitude de propositions politiques distinctes.
(4) Tabaré Vázquez est si populaire qu’il y a eu devant certains bureaux de vote certains de ses partisans pour brandir des banderoles réclamant sa candidature en 2014, à l’issue du prochain mandat présidentiel. En effet, la Constitution actuelle, que Tabaré Vázquez a résolument refusé de voir modifiée dans ce sens, interdit au Président de se présenter immédiatement à l’issue d’un mandat mais l’autorise tout à fait à se présenter par la suite. Ce que fait cette année Luis Alberto Lacalle.
(5) Il s’est en particulier montré très agressif avec l’Argentine, se prononçant de manière très peu respectueuse sur le positionnement idéologique de la Présidente et n’hésitant pas à critiquer le comportement du pays voisin dans la querelle sur la papeterie Botnia, une papeterie implantée sur la rive orientale du fleuve Uruguay, sans consultation préalable de l’Argentine, et dont le cas est actuellement soumis à l'examen du Tribunal international de La Haye où les représentations argentine et uruguayenne s’échangent des mots doux. Peut-être aurait-il été mieux inspiré de laisser Tabaré Vázquez assumer toute la responsabilité et la violence verbale du contentieux judiciaire
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