jeudi 31 mars 2011

Nicolás Ciocchini et Federico Arreseygor Trío samedi soir à La Plata [à l'affiche]

Le chanteur Nicolás Ciocchini, dont je vous parle ici pour la première fois, et le Federico Arreseygor Trío donneront un concert conjoint ce samedi 2 avril 2011 à 21h30 au Mil9once Bar, esquina 12 y 71, à La Plata (les lecteurs réguliers de Barrio de Tango ont constaté qu'à La Plata, les rues ne portent pas de nom mais des numéros).

Entrée : 25 $ (tarif réduit pour les étudiants, 20 $. La Plata est une ville universitaire et ça se voit !).

Affiche diffusée par Choco

Nicolás Ciocchini est un très fin interprête de tango-canción que j'ai connu à travers mon amitié avec Alorsa et par delà la mort de cet ami commun. Si vous avez la curiosité d'aller sur sa page Myspace, vous allez découvrir de très belles versions de quelques classiques dont une somptueuse Milonga triste. A son répertoire, il a mis des milongas, des candombes et différents autres morceaux appartenant à des genres musicaux apparentés. Interprétation simple, sobre, sans fanfreluche, avec un souci sensible du texte original et de la musique, ce qui n'est pas si fréquent de nos jours où un certain nombre d'artistes cherchent l'originalité un peu pour elle-même. Sur ma propre page Myspace, dans la liste d'écoute consacrée à Barrio de Tango, ed. du Jasmin, j'ai mis sa version de la valse Betinotti... Nicolás, surnommé Choco, a déjà publié un disque, Viola mía (ma chère gratte, ma chère guitare), chez Acqua Records (disponible sur le site de vente en ligne de Zivals, Tangostore) et il est en train d'organiser une tournée européenne pour la fin du printemps septentrional, au cours de laquelle il doit passer par Paris. Je vous tiendrai au courant.

Federico Arreseydor est un pianiste et un compositeur. Son univers, c'est le jazz et le folklore tant argentin que plus largement latino-américain. Lui aussi a sa page Myspace où je vous invite à aller découvrir sa musique personnelle et originale. Il a lui aussi sorti un disque solo, intitulé Espirales (spirales). Le trio s'est formé à la mi-2010, il a donc encore peu d'histoire derrière lui.

Pour aller plus loin :
découvrez le site Internet du bar Mil9once (entendez 1000-9-11)
découvrez la page Myspace de Choco
découvrez la page Myspace de Federico Arreseygor

Avril - mai à l'Espace Tango Negro [ici]

Le 14 avril, à 20h, un voyage à travers les musiques latines du monde avec Manu Cáceres (malgré ce patronyme, il n'y a aucun lien de famille avec les animateurs du lieu).

Participation aux frais : 10 €.

Les portes sont ouvertes à 19h30. Vous êtes invités à réserver votre place par mail (tangocaceres@aol.com) ou par téléphone. Pour que le concert ne soit pas interrompu ou le public dérangé dans son écoute, on ferme la porte à 20h, lorsque les musiciens prennent place.


Le jeudi 21 avril, à la même heure et au même endroit, le duo piano et guitare, formé par Laura et Norberto Pedreira, viendra nous donner une autre version de la musique latino-américaine, une version où les rythmes classiques trouvent une place et qu'enrichissent des improvisations que les organisateurs estiment exceptionnelles (et ils s'y connaissent, puisqu'il s'agit de Juan Carlos Cáceres et son épouse, Alicia Zadán, ou vice-versa).

Affiche diffusée par l'association Tango Negro

Le jeudi 28 avril, ce sera le tour du guitariste Leandro Bonfiglio qui a pour invitée Josefina Echenique, surnommée La José. Vous êtes invités à réserver votre place par mail (tangocaceres@aol.com) ou par téléphone (comme indiqué sur l'affiche ci-dessous, que vous pouvez imprimer et afficher à votre bureau, chez vous, partout où elle pourra être vue...).

Affiche diffusée par Alicia Zádan

En mai, le 3 mai, Alicia Zádan, qui met en musique les activités de l'Espace Tango Negro, présidera le vernissage de son exposition sur le thème de la nature morte post-cubiste, une suite de 17 dessins qu'elle a exécutés à la mine de plomb.


Le lendemain, le jeudi 4 mai 2011, le trio Taquetepa viendra à son tour donner un concert et présenter son disque, Au Taquet. Vous les connaissez déjà très bien si vous lisez régulièrement ce blog ou si vous habitez... Clermont-Ferrand (consulter sur ce point mes articles sur leurs représentations en Auvergne, que vous trouverez en cliquant sur leur nom dans le bloc Pour chercher, para buscar, to search, ci-dessus). Ce concert prend place pendant leur séjour parisien 2011. Ne le ratez donc pas. On en reparlera bien entendu.



Les lundis 11 avril, 2 mai et 16 mai 2011, de 15h à 17h, j'animerai trois cafés littéraires autour du tango, sur le thème des grands archétypes du genre, dans les deux versions, la version sérieuse et la version parodique. Le lundi 11 avril, rendez-vous autour de Mi noche triste (Pascual Contursi) et de Victoria (Enrique Santos Discépolo), sur la thématique de l'amour abandonné. Vous allez voir : ce n'est pas triste.
Participation : 15 €.
Inscription indispensable par mail (puisque vous avez Internet, si vous lisez cette page !) : dactango@hotmail.fr.

Toutes les activités de l'Espace Tango Negro sont suivies d'un pot amical pour permettre échanges et convivialité. Tant et si bien que les participants commencent à retrouver avec plaisir sur place des têtes connues et que des liens se tissent progressivement, à contre-courant de la désocialisation de la vie dans la capitale française, rongée par la solitude de la grande ville...

Espace Tango Negro
71 rue Rochechouart
75009 Paris
M° Anvers ou Barbés-Rochechouart

Connectez-vous à la page Myspace de Tango Negro (attention : pour le moment, l'accès au contenu est réservé aux "amis", il faut donc être membre du réseau Myspace et, une fois titulaire d'un compte Myspace, demander votre inscription comme ami)

mercredi 30 mars 2011

Ciné, BD, Gardel, la triade du 1er avril à Caen [ici]


C'est un programme centré sur l'écrivain argentin installé en France, José Muñoz, que l'association Tempo Tango consacre sa journée festive annuelle en partenariat avec le cinéma Lux, de Caen, en cette fin de semaine (vendredi 1er avril 2011). En fin d'après-midi, la fête commence avec la présentation-dédicace de la bande dessinée sur un Gardel revu et corrigé par l'écrivain (1) en fonction de l'image qu'il a du personnage mythique qu'est devenu Carlitos, exposition de dessins, dégustation d'empanadas et de vins argentins (il faudra bien se nourrir !), projection d'un documentaire pour commencer la soirée et grande milonga pour la finir.

Je vous laisse découvrir le programme sur les documents diffusés par cette association culturelle, modeste mais ambitieuse, dont vous pouvez retrouver le blog dans la rubrique Eh bien, dansez maintenant !, de la partie basse de la Colonne de droite (sur cet écran).



(1) Une certaine légende de Gardel s'y mélange à la réalité historique.

Les 80 ans de El Faro [à l'affiche]


La fête revient au Bar El Faro à la limite entre Villa Urquiza et Villa Pueyrredón pour les 80 ans de sa fondation, ce vendredi 1er avril 2011. En Argentine, un pays jeune, on n'attend pas le siècle pour faire la fête. La plupart des chiffres ronds donnent lieu à célébration et c'est comme ça que peu à peu, se construit une identité nationale. C'est à force de créer des repères dans l'histoire au plus près de la vie des gens.

Depuis l'arrêt contraint, forcé et administrativo-corrompu, il y aura bientôt un an, des concerts traditionnels que Cucuza et Moscato y avaient installés sous le titre de El Tango vuelve al Barrio (ETvaB, pour les intimes) et qui ont permis à l'établissement de se faire reconnaître comme Bar Notable (établissement classé) en février 2010, c'est seulement la deuxième fois que les deux musiciens parvienent à y organiser à nouveau une fête artistique. Ils ont invité à les rejoindre pour l'occasion Juan Seren, le Dúo Púa Abajo, Juan Pablo Villareal, A Punto Fijo et le poète Raimundo Rosales (1), qui est presque toujours de la partie dans la salle...

Si le temps le permet (vous avez compris qu'au printemps, en été et à l'automne comme maintenant, il pleut souvent, et fort à Buenos Aires), des tables seront installées sur le trottoir.

Le spectacle est gratuit. Il commence à 21h30 (arrivez avant pour pouvoir commander et dîner avant le spectacle. Pas de bruit de fourchette pour accompagner la musique !).

Il faut impérativement réserver (El Faro, esquina La Pampa y Constituyentes) et pensez bien que tous les habitants du coin vont se précipiter (cela fait si longtemps qu'ils sont privés de leurs artistes !). Ceci dit, si vous pouvez encore trouver le bout d'un tabouret, ça vaut le coup. Et mille pardons à mes lecteurs qui sont à Buenos Aires et qui m'en voudront beaucoup de ne pas les avoir informés suffisamment à l'avance : mon ordinateur et moi avons des scènes de ménage épiques depuis une semaine. Les noms d'oiseaux volent entre nous !

(1) Raimundo Rosales est l'un des poètes dont je présente une dizaine de letras et de poèmes, dans Deux cents ans après, le Bicentenaire de l'Argentine à travers le patrimoine littéraire du tango, supplément 2010 de la revue Triages, Tarabuste Editions, janvier 2011 (Tarabuste Editions, rue du Fort, 36170 Saint-Benoît du Sault). Raimundo est un poète très marqué par la poésie espagnole et par l'effervescence artistique, socialement et politiquement fortement engagée, qui existait à Buenos Aires dans les annéees 60 et 70 avec le surgissement du rock nacional (grâce à Litto Nebbia et Luis Alberto Spinetta, dont je vous parlais avant hier à propos d'un disque de berceuses très particulier, voir mon article du 28 mars 2011) et la seconde révolution piazzollienne, celle qui démarre en 1968 (eh oui !) avec le début du partenariat entre Astor Piazzolla et Horacio Ferrer, autre poète présent dans Deux cents ans après, un duo créateur auquel Raimundo a souvent rendu hommage, notamment à travers Palabras para Astor, p 42, et Las manos de Horacio, p 55 (que vous pouvez écouter sur la liste d'écoute Deux cents ans après sur ma page Myspace). Il a aussi écrit un très beau Elogio de la duda (éloge du doute), sur le vécu des adultes que sont devenus aujourd'hui les enfants volés à leurs parents pendant la Dictature, un régime que Raimundo a fui en se réfugiant en Espagne (p 53). Face à Elogio de la Duda, le volume présente División de bienes, un tango sur un couple qui divorce et partage ses biens (Qui garde quelle partie de quoi ? / Et comment se conclut cette idylle / La pluie à la fenêtre / Et ce petit matin / Qui nous lit les lettres de l'exil [...]), autre morceau que vous pouvez entendre sur la liste d'écoute. Milonga de los arroyos et Soy cantor sont aussi dans l'ouvrage comme dans la liste d'écoute. Et il y a encore dans le recueil d'autres textes, dont je n'ai pas trouvé les versions enregistrées sur le réseau Myspace. Un poète à découvrir, doublé d'un chic type, aussi attachant que talentueux. C'est un grand ami de Cucuza qui n'hésite pas à inscrire ses tangos, ses valses et ses milongas à son répertoire. Pour mieux connaître leurs activités à l'un et à l'autre, cliquez sur leur nom dans le bloc Pour chercher, para buscar, to search, ci-dessus.

lundi 28 mars 2011

Un autre sainete de Alberto Vacarezza repris au Teatro Cervantes [à l'affiche]

Depuis quelques années, c'est à un véritable retour aux sources de la culture portègne qu'on assiste à Buenos Aires avec ces reprises du théâtre populaire qu'est le sainete porteño. Il y a quelques mois, je vous parlais de cette réédition d'une partie de l'oeuvre du dramaturge, Alberto Vacarezza (1), qui fut aussi l'un des auteurs du répertoire du tango (voir mon article du 28 décembre 2009). Cet été, Susana Rinaldi tenait la vedette d'une reprise de El Patio de la Morocha, de Cátulo Castillo (voir mon article du 4 février 2011). Un peu plus tôt encore, un directeur de théâtre avait lancé un cycle de sainete au Centre Culturel Marco del Ponts (voir mon article du 9 mars 2009).

Cette fois-ci, c'est un metteur en scène, qui est aussi acteur, marionnettiste et lui-même dramaturge, Santiago Doria, qui reprend au prestigieux Teatro Cervantes, le grand théâtre national argentin, un classique d'entre les classiques, El Conventillo de la Paloma, entendez "Le taudis de la Colombe" (2), une pièce qui fit si bien date qu'elle eut sa représentation en forme de mural de céramique dans une station de métro du centre de Buenos Aires (l'oeuvre a malheureusement été fortement dégradée, au point qu'en août dernier, elle était méconnaissable, tout comme le sont les représentations murales similaires de la Révolution Française sur les quais de la station aérienne du métro Bastille, au grand dam des Parisiens, des banlieusards et des touristes !).

Dans cette mise en scène actuelle, El Conventilllo de la Paloma a remporté un grand succès l'année dernière dans un théâtre privé : 17 000 spectateurs entre octobre et décembre 2010. La reprise au Cervantes est donc la consécration d'un succès populaire.

La pièce est jouée comme le spectacle complet qu'elle était à sa création, en 1929, avec des acteurs qui chantent et qui dansent (elle fut créée entre autres par Tito Lusiardo et Libertad Lamarque). Les chorégraphies sont signées Juan Carlos Copes, le créateur du tango de scène (3) dans les années 60, lorsque le tango était au plus bas, et sa fille Johana Copes y fait deux apparitions.

A l'occasion de cette reprise, Página/12 est allé interviewer le metteur en scène d'une part et l'une des filles de l'auteur d'autre part. Quelques extraits, en version bilingue bien entendu :

“Quisimos realizar un espectáculo entrañable que, además de ser capaz de entretener, nos acercara a las raíces de nuestro teatro. Y podemos decir que cumplimos”
Santiago Doria, cité par Página/12

Nous avons voulu réaliser un spectacle que les gens aiment et qui, en plus d'être capable de les divertir, nous rapprocherait des racines de notre théâtre. Et nous pouvons dire que nous avons réussi.
(Traduction Denise Anne Clavilier)

“Al sainete le sigue el grotesco criollo –explica el director–, un estilo de obra que deja atrás el patio del conventillo para adentrarse en sus habitaciones y en temas menos festivos. Hay que ver que, un año antes de El conventillo..., ya Discépolo había estrenado Stéfano.” Según apunta, el estreno de este sainete tuvo lugar “cuando Buenos Aires iba transformándose. El mundo que aparece en esta obra ya estaba diluyéndose para dar paso a otra realidad. Por eso, Vacarezza aclara que la acción transcurre en la Buenos Aires de ayer”.
Página/12

Le saintete porteño a fait place après lui au grostesque criollo, explique le metteur en scène, un style d'oeuvre qui laisse derrière lui la cour du conventillo pour entrer chez les gens et dans des thèmes moins drôles (4). Il faut voir que, un an avant El Conventillo, déjà [Armando] Discépolo avait créé Stéfano. Comme il le signale, la création de ce sainete a eu lieu quand Buenos Aires allait se transformer. Le monde qui apparaît dans cette oeuvre était déjà en train de se dissoudre pour faire place à une autre réalité. Pour cela, Vacarezza explique que l'action se passe dans la Buenos Aires d'hier.
(Traduction Denise Anne Clavilier)

“Es cierto que el público tiene reacciones ingenuas, como sucedía con el antiguo radioteatro”, confirma el director, para quien el tema de la inmigración aún tiene gran aceptación en el público actual: “Es que la clase media argentina tiene ese origen. Si bien el sueño de hacer la América para muchos quedó en la nada, otros tantos fundaron familias y pudieron darles a sus hijos lo que ellos no tuvieron”.
Página/12

Il est sûr que le public a des réactions très simples, comme cela se passait avec le vieux théâtre radiophonique, confirme le metteur en scène, pour qui le thème de l'immigration tient encore une grande place dans le coeur du public actuel. C'est que la classe moyenne argentine est de cette origine-là. Si le rêve de faire fortune en Amérique est tombé à l'eau pour beaucoup, tant d'autres ont fondé des familles et ont pu donner à leurs enfants ce qu'eux n'avaient pas eu.
(Traduction Denise Anne Clavilier)

– ¿Actores más jóvenes no hubiesen sabido interpretar a los personajes de Vacarezza?
– Es que no tienen modelos. Yo les dije desde un principio a los actores que convoqué: miren que somos el último eslabón que queda para pasarles el sainete a los jóvenes. Las nuevas generaciones no pueden hacer estos personajes porque no tienen a quien imitar. En las calles ya no se encuentran, como en los tiempos de la inmigración, ni italianos, ni gallegos o turcos. ¿De dónde copiar su forma de hablar, su modo de ser? Los actores elegidos, en cambio, tienen referencias del sainete. Cada uno fue buscando un formato y un color para su personaje, pero siendo fieles a un mismo pentagrama.
Página/12

- Des acteurs plus jeunes n'auraient pas su interprété les personnages de Vacarezza ?
- C'est qu'ils n'ont pas de modèles. J'ai dit dès le début aux acteurs que j'ai retenus : regardez ! Nous sommes le dernier maillont qu'il reste pour transmettre le sainete aux jeunes (5). Les nouvelles générations ne peuvent jouer ses personnages parce qu'elles n'ont personne à imiter. Dans la rue, on ne rencontre plus, comme au temps de l'immigration, ni les Italiens, ni les Espagnols, ni les Arabes (6). Où iraient-ils copier leur manière de parler, leur façon d'être ? Les acteurs qui ont été choisis, en revanche, ont des références pour le sainete. Chacun est allé chercher un format et une couleur pour son personnage mais en étant fidèles à la même portée musicale.
(Traduction Denise Anne Clavilier)

– ¿Por qué sostiene que un autor como Vacarezza es un punto de partida en la dramaturgia local?
– Precisamente porque el sainete criollo fue el antecedente del grotesco, y éste es un género que está en la base de todos nuestros grandes autores, hasta los actuales. Creo que El conventillo... es una pieza fundacional del teatro argentino, porque es allí donde están las fuentes de nuestra escena.
Página/12

- Pourquoi soutenez-vous qu'un auteur comme Vacarezza est un point de départ pour l'écriture dramatique d'ici ?
- Justement parce que le sainete criollo a été le prédécesseur du grosteque et que c'est là un genre qui constitue les fondements sur lesquels ont écrit tous nos grands auteurs, jusqu'à ceux d'aujourd'hui. Je crois que El conventillo est une pièce fondatrice du théâtre argentin, parce que c'est là que se trouvent les sources de notre répertoire.
(Traduction Denise Anne Clavilier)

Le spectacle se donne du jeudi au samedi à 21h et le dimanche à 20h, dans la grande salle du Teatro Cervantes.

Pour aller plus loin :

(1) Alberto Vaccarrezza fut en particulier l'auteur de Padre Nuestro (Notre Père), un tango extrait d'un sainete de 1923, qui fait partie de mon anthologie parue en mai de l'année dernière, Barrio de Tango, recueil bilingue de tangos argentins, éditions du Jasmin, p 113.
(2) Un conventillo (comprenez littéralement "petit couvent") est un ensemble de logements situés dans un même bâtiment qui abritent des personnes très pauvres. Dans la période de la grande immigration, entre 1880 et 1930, le conventillo était l'habitat ordinaire de l'immigrant plus ou moins nouvellement arrivé. Un habitat insalubre, humide, à loyer parfois exorbitant, issu de constructions hâtives ou de la transformation de vieilles demeures abandonnées par les patriciens dans les quartiers de Barracas ou de San Telmo, au moment ou après l'épidémie de fièvre jaune de 1871. C'est le cas par exemple du Viejo Hotel à San Telmo, où le musicien Néstor Tomassini a son studio de travail, qui semble bien avoir été abandonné au début de l'épidémie, sans doute dès janvier, qui servit d'hôpital puis dès la montée en puissance de l'immigration de conventillo. Aujourd'hui restauré, il abrite un restaurant touristique et des studios d'artistes et d'auto-entrepreneurs. En 1871, les familles riches avaient fui le danger, abandonnant derrière eux leurs biens immobiliers, et s'étaient réfugiées dans les quartiers nord réputés plus sains, exempts des miasmes dont on croyait encore que provenait cette terrible maladie, alors mortelle mais simplement transmise par un moustique. C'est toute cette histoire complexe qui explique que le conventillo fasse encore aujourd'hui partie intégrante de la sociologie de la ville, où ils existent encore à La Boca, à Villa Soldati, à Mataderos... Il est très présent dans le sainete porteño et dans le tango, notamment les oeuvres de Celedonio Flores et de Enrique Santos Discépolo, parce que sainete porteño et tango décrivent précisément la vie quotidienne du peuple et souvent sur la même scène (le sainete a inclus beaucoup de tangos, notamment ceux qu'interprétent les chanteuses Lucrecia Merico, Valeria Shapira et leur accompagnateur, dans ce spectacle dont je vous parle souvent et qui s'intitule Las Minas del Tango reo, voir mes articles sur le sujet).
(3) Avant Juan Carlos Copes, le tango dansé sur scène était beaucoup moins acrobatique qu'aujourd'hui et il était dansé par les acteurs-chanteurs et non pas par des danseurs professionnels exclusivement danseurs, comme c'est le cas de Copes et de sa fille. On avait donc quelque chose qui devait ressembler en bien des points aux spectacles montés par Alfredo Arias et en tournée en France actuellement, avec, en particulier, Sandra Guida et Alejandra Radano (voir mes articles à ce sujet).
(4) Le saintete parle essentiellement des questions du vivre ensemble des immigrants, vivre ensemble visible et perceptible dans le patio de la grande maison partagée par tous. Un des berceaux du tango, soit dit en passant, bien plus historique que l'éternel cliché (archi-faux) du tango soit disant né dans les bordels. Le grotesque criollo était lui aussi un genre de théâtre social. Il fut inventé par Armando Discépolo, le frère aîné de Enrique Santos. Il fait plus de place à la manière ont un individu en particulier va faire face à la situation. Il y a un héros qui se détache alors que le sainete parle d'un groupe.
(5) Cette question de la transmission est cruciale pour la culture populaire en Argentine. Entre 1955 et 1983, tout a été fait par les pouvoirs publics pour briser cette transmission et cette rupture, qui fut assez efficace, se fait lourdement ressentir dans le monde du tango, comme je tente de le faire toucher du doigt aux participants à mes rencontres littéraires. Il se fait sentir aussi dans tout le reste de la vie artistique populaire : cinéma, télévision, folklore, fileteado. C'est aussi cette rupture qui explique en partie la corruption du tango en un produit touristique et commercial qui a pris la place de l'authenticité, dans une partie importante du public notamment à l'étranger sans que celui-ci puisse être bien conscient de cette corruption, ce qui est beaucoup moins le cas de son cousin des Etats-Unis, le jazz, par exemple, dont l'image, y compris commerciale, est beaucoup plus fidèle à la tradition. En revanche, le flamenco, autre cousin, a subi une corruption similaire, du fait lui aussi d'une autre dictature, celle de Franco, qui avait besoin d'en faire un produit touristique en le vidant de toute sa dimension sociale et donc politiquement subversive.
(6) Gallegos : au sens premier Galiciens, mais en Argentine le terme désignent indistinctement tous les Espagnols. Turcos : il s'agit en Argentine non pas des Turcs mais des Arabes qui fuyaient l'Empire ottoman en plein déclin mais toujours maître des pays de la rive est de la Méditerranée. Les Turcos sont donc essentiellement des Libanais, des Syriens et des Palestiniens (d'avant la création de l'Etat d'Israël), très majoritairement des chrétiens qui fuyaient l'islamisation grandissante de l'Empire ottoman. Carlos Menem, l'ancien président de la République en froid avec la justice de son pays, est surnommé régulièrement El Turquito, car descendant d'immigrants qui étaient des chrétiens de Damas.

Les rockeurs et les enfants, une coopération artistique avec les orphelins de Buenos Aires [à l'affiche]

C'est un disque qui est sorti il y a une dizaine dejours, produit par l'ONG La Casa de la Cultura de la Calle (maison de la culture de la rue), fondée et animée par Gastón Pauls : il a proposé à plusieurs artistes de rock argentin de mettre en musique des textes de berceuse que certains de ses protégés avaient écrites sur un projet qu'il leur avait proposé, écrire la berceuse qu'ils auraient aimé que leur maman leur chante s'ils avaient eu la chance d'avoir une mère pour s'occuper d'eux dans leur âge tendre.

La Casa de la Cultura de la Calle offre aux enfants vivants en foyers, parce qu'ils sont orphelins ou abandonnés, et aux enfants qui vivent dans la rue toute une gamme d'activités culturelles qui ont un effet thérapeutique sur ces mineurs en grand danger social.

Ce sont donc des enfants de huit, neuf, dix et jusqu'à un post-adolescent de 22 ans (1) qui ont écrit des textes aussi peu neuneu que possible car ils ont tiré leur inspiration de leur expérience assez terrible de la vie.

Ces berceuses rock constituent le 3ème disque publié par La Casa de la Cultura de la Calle, après un Tango para los chicos et un Folklore para los chicos. Ce Canciones de cuna est distribué dans les supermarchés Discos, au prix très raisonnable de 14,90 $. Les recettes du CD permettront d'investir dans de nouvelles activités au bénéficier des enfants défavorisés.

C'est la crème du rock argentin qui a répondu présent pour l'opération : Luis Alberto Spinetta, Ricardo Mollo, Fito Páez, Pedro Aznar, Germán Daffunchio, Fernando Cabrera, Hilda Lizarazu, Kevin Johansen, Lisandro Aristimuño, Damien Rice, Luka Bloom, Miguel Cantilo, Hugo Fattoruso, Vítor Ramil ainsi que Litto Nebbia et Gonzalo Aloras, qui avaient chanté ensemble à Paris en septembre 2009, dans un concert partagé sur lequel je vous avais fait un Retour sur images puisque j'en avais assuré l'organisation (voir mon article du 28 septembre 2009).

Tous ces artistes ont choisi parmi les textes qui leur ont été présentés celui qui leur parlait le plus et chaque compositeur a enregistré son morceau dans le studio d'enregistrement prêté pour l'occasion par Spinetta.

Gastón Pauls, émerveillé par l'enthousiasme manifesté par les artistes, envisage désormais un deuxième album avec les artistes qui avaient répondu oui mais dont l'agenda n'a pas permis à la fin qu'ils participent vraiment à cette opération.

Une audition du disque a été organisée pour les enfants et les chanteurs qui étaient disponibles ce jour-là. Página/12 raconte qu'on ne sait pas très bien qui des minots ou des musiciens étaient les plus émus de se retrouver les uns en face des autres.

Le 20 mars dernier, ce disque a eu les honneurs de la une des pages culturelles de Página/12 et Luis Alberto Spinetta, l'un des plus prestigieux artistes de rock en Argentine, s'est fendu d'un billet éditorial pour expliquer de manière fort militante le pourquoi de sa participation. Un billet, intitulé Un niño debe ser uno mismo (un enfant, c'est comme soi-même), que je vous traduis ci-dessous :

En el mundo en que vivimos, desde el momento en que un niño carece del abrazo y el arrullo de su madre, somos todos parte de un episodio trágico en el que sufrimos nuestro propio abandono. Es una escena muda. Aunque hayamos tenido una madre hermosa y protectora, nos rehusamos a pensar que el mundo debe ser así, y reaccionamos como para intentar rehacer los lazos que son el origen del crecer. Ser abandonado por la madre es ser devuelto al mundo de otra manera, la del silencio.
Una canción de cuna es un encuentro entre la piel y el aire. Es el toque de un ángel en medio de la locura de las horas, que nos presenta la paz como el cauce fundamental de la propia conciencia y la sensibilidad.
De ahí en más, cantar una canción de cuna es un acto materno, nos pone en la piel del que ampara y es amparado y se desvive en hacerlo. El niño debe ser uno mismo.
Y también desde esa misma imagen de preciosos latidos compartidos, uno puede volar un poquito y pensar que también estamos arrullando al mundo.
Gracias por hacerme participar de esto.
Luis Alberto Spinetta, dans Página/12

Dans le monde dans lequel nous vivons, à partir du moment où un enfant n'est pas serré dans les bras ni bercé par sa mère, nous faisons tous partie d'un épisode tragique dans lequel nous subissons la souffrance de notre propre abandon. C'est une scène muette. Quand bien même nous aurions eu une mère belle et protectrice, nous refusons de penser que le monde doit être comme ça et nous réagissons pour essayer de retisser les liens qui sont à l'origine de toute croissance. Etre abandonné par sa mère, c'est être retourné au monde d'une autre manière, celle du silence.
Une berceuse est une rencontre entre la peau et l'air. C'est le toucher d'un ange au milieu de la folie du temps, qui nous présente la paix comme le lit fondamental de notre propre conscience et de notre sensibilité.
De plus, chanter une berceuse est un acte maternel, il nous met dans la peau de celui qui protège et qui est protégé et qui se met en quatre pour cela. L'enfant, ce doit être soi-même.
Et à partir de cette même image de beaux battements de coeur partagés, chacun de nous peut voler une petit peu et penser que nous aussi nous berçons le monde.
Merci de m'avoir fait participer à ça.
(Traduction Denise Anne Clavilier)

Pour aller plus loin :
lire la présentation de l'ONG par Página/12
Pour connaître certains de ces artistes, aller retrouver leur page Myspace parmi mes amis de ma propre page Myspace (Fito Paéz et Litto Nebbia en font partie).
En ce qui concerne Litto Nebbia, j'ai souvent écrit sur lui dans ces colonnes. Vous pouvez accéder à l'ensemble de ces articles en cliquant sur son nom dans le bloc Pour chercher, para buscar, to search, ci-dessous.
Pour lire tous les articles de Barrio de Tango relatifs au rock nacional comme le dénomment les Argentins, cliquez sur le mot-clé rock dans le bloc Pour chercher.

(1) Depuis peu, la majorité en Argentine est passée de 21 ans à 18 ans.

vendredi 25 mars 2011

Café littéraire du mardi 29 mars à 20h : le programme [ici]

Le mardi 29 mars 2011, à 20h, j'animerai un Café littéraire autour du répertoire du tango, comme une première approche de la littérature argentine, à l'Espace Tango Negro, 71 rue Rochechouart, Paris 9ème (M° Anvers).

Le principe des Cafés littéraires de l'Espace Tango Negro est celui d'une rencontre et d'un échange en toute liberté autour d'un ou deux textes de tango, dans des versions bilingues espagnol-français, afin d'en découvrir l'écriture, le style, l'histoire et la musique, avec son évolution au fil du temps, en fonction des modes et des vicissitudes politiques et sociales qui ont marqué l'Argentine depuis la création du tango-canción en 1916 (Mi noche triste).

Aucune connaissance préalable n'est nécessaire : on peut donc venir sans connaître l'espagnol, sans connaître ni savoir lire la musique, sans savoir chanter, sans savoir danser le tango ni n'importe quelle autre danse. Ceci dit, se pencher sur les textes des tangos donnera toujours un supplément d'âme aux danseurs qui se prêteront à l'exercice. La rencontre se déroule avec un café (ou une autre boisson) et de quoi grignoter, en toute convivialité...

Au programme de Café littéraire : Mi noche triste, l'incontournable tango de Pascual Contursi sur une partition de Samuel Castriota, enregistré pour la première fois par Carlos Gardel dès 1917 (1).

Et si l'on a le temps, on se penchera aussi sur cette autre première que fut, en 1932, Milonga sentimental, de Homero Manzi et Sebastián Piana, le premier morceau qui renoua avec une vieille tradition et un vieux rythme octosyllabique de la Pampa, la milonga des bivouacs et de l'itinérance des payadores, remise au goût du jour et à celui des citadins (2).

Participation aux frais : 15 € par personne. Nombre de places limité.
Pour la bonne organisation de la rencontre, il vous est donc demandé de réserver par mail en donnant votre nom, votre prénom, celui de vos accompagnants (le cas échéant) et si possible une adresse, pour la bonne tenue de la facturation (dactango@hotmail.fr).

Mes deux livres, Barrio de Tango et Deux cents ans après, sont en vente à l'Espace Tango Negro et pourront donc être acquis au cours des Cafés littéraires.

(1) Mi noche triste est traduit et présenté dans Barrio de Tango, recueil bilingue de tangos argentins, ed. du Jasmin, avec 230 autres letras de tango, à la page 18.
(2) Milonga sentimental est également traduite et présentée dans Barrio de Tango, à la page 22.

La nuit bien chargée de Jacqueline Sigaut [à l'affiche]

Demain soir, samedi 26 mars 2011, se tiendra la Nuit blanche (la Noche en Vela), que le Gouvernement de la Ville autonome de Buenos Aires organise, en imitant quelque peu l'initiative de Bernard Delanoë à Paris.

La chanteuse Jacqueline Sigaut, tout juste rentrée d'Espagne, où elle s'est produite au Festival International de Grenade, chantera à 19h au Parque Rivadavia, Avenida Rivadavia 4800, dans le quartier de Almagro, accompagnée du pianiste Franco Polimeni, du bandonéoniste Clemente Carrascal et du contrebassiste Juan Jaunitz.

Puis à minuit, elle sera au Bar Iberia, dans le cadre de La Noche en Vela, à l'angle entre la Avenida de Mayo et calle Salta, dans le quartier de Monserrat. Elle sera accompagnée par Franco Polimeni.

Dans les deux cas, l'entrée est gratuite, même si le Secrétaire du Gouvernement de la Ville a osé affirmer, il y a quelques jours, que la manifestation était destinée à "des gens normaux, pas à des pauvres" (voir mon article du 21 mars 2011 sur cette réflexion aussi stupéfiante que les déclarations publiques des ministres de l'Intérieur en France ces trois dernières années).

Juan Gelman a eu gain de cause dans son procès contre l'Etat uruguayen [Actu]

Le poète argentin Juan Gelman, qui est aussi éditorialiste au quotidien Página/12, est en procès depuis de nombreuses années contre l'Etat uruguayen en vue de faire ouvrir une instruction concernant la disparition de sa belle-fille en 1976 et l'adoption illégale de sa petite-fille, qu'il a, depuis, pu identifier et connaître. Comme en Argentine, les enfants en bas-âge des opposants arrêtés en Uruguay ou ailleurs en Amérique du Sud par les forces de l'ordre uruguayennes, dans le cadre du Plan Condor, vaste accord multilatéral permettant à tous les Etats partipants de procéder à des arrestations sur le territoire de n'importe quel autre pays participant, ont été volés à leur famille légitime pour être confiés en adoption plénière à des familles affidées à la junte militaire sous des identités falsifiées.

Or depuis toutes ces années, l'Etat uruguayen opposait aux plaignants la loi dit de caducité (Ley de Caducidad), une loi d'amnistie qui protège depuis 1986 les bourreaux de la Dictature de 1973-1985. L'ancien Président Tabaré Vázquez avait fait de nombreux efforts pour obtenir l'abolitin de cette loi, jusqu'à organiser, il y a environ un an et demi, un référendum qui a été gagné par les partisans de la loi (voir mon article du 21 octobre 2009 à ce sujet). L'actuel Président, Pepe Mujica, qui fut pourtant un guerrillero fervent et audacieux, est quant à lui plus réservé car il pense qu'il y a dans toutes les exigences de justice sur ces matières une part de désir de vengeance chez les plaignants et il a cela en horreur.

Quoi qu'il en soit, l'arrêt que la Cour Interaméricaine des Droits de l'Homme a rendu hier exige que l'Uruguay cesse d'appliquer cette loi. Ainsi donc d'ici quelques semaines, le Parlement devrait-il inscrire à son ordre du jour son abolition. Grande victoire pour les militants des Droits de l'Homme qui l'ont fêtée hier comme vous pouvez l'imaginer, avec à leur tête l'ONG Madres y Familiares de Uruguay, qui mène un combat similaire à celui de Abuelas de Plaza de Mayo et Madres de Plaza de Mayo dans le pays voisin.

Le fils de Juan Gelman, Marcelo, qui avait alors 20 ans, et sa femme, María Claudia García Iruretagoyena, 19 ans, enceinte de 7 mois, ont été appréhendés à Buenos Aires en août 1976. La jeune femme a été par la suite détenue à Montevideo, où après quelques semaines de captivité, elle a mis au monde une petite fille à l'Hôpital Militaire. Elle a ensuite disparu. Nul ne sait ce qu'elle est devenue ni où se trouve son corps. Les restes de Marcelo, quant à eux, ont été identifiés par la Police Scientifique argentine en 1989. Et à 23 ans, Macarena, leur fille, a retrouvé son identité de naissance et fait la connaissance de son grand-père parternel qui la cherchait depuis l'arrestation de ses parents.

Tous deux ensemble se sont portés partie civile dans l'enquête concernant le sort de María Claudia et c'est ensemble qu'ils ont entendu l'arrêt prononcé hier par la Cour Interaméricaine.

Ce matin, le Gouvernement uruguayen n'avait pas commenté la décision judiciaire qui va l'obliger à diligenter enfin une enquête qui a trop tardé et tant d'autres recherches, entravées jusqu'à présent par le vote en 1986 de cette loi, un an après la fin de la Dictature.

Hier, l'Argentine fêtait le Jour de la Mémoire, de la Vérité et de la Justice, en commémoraison du putch de Jorge Videla, le 24 mars 1977.

Pour aller plus loin :

jeudi 24 mars 2011

Ciudad Baigón et Alan Haksten Grupp demain soir au Teatro Orlando Goñi [à l'affiche]

Vendredi 25 mars 2011, à 23h, les deux orchestres typiques que sont Ciudad Baigón et Alan Haksten Grupp se partageront la soirée du Teatro Orlando Goñi, Cochabamba 2536, dans le quartier de San Cristobal.

Participation aux frais : 30 $.

On peut acheter les places au tarif réduit chez Lee Chi, avenida Santa Fe 1670.

Pour en savoir plus sur ces deux formations, cliquez sur leur nom dans le bloc Pour chercher, para buscar, to search, ci-dessus. Vous accéderez ainsi à l'ensemble des articles que j'ai déjà consacrés à l'une et à l'autre, dans ce blog, à la date où vous lisez cet article.

La Orquesta Escuela de Tango Emilio Balcarce recrute sa 11ème promotion [Actu]

La Orquesta Escuela de Tango Emilio Balcarce (OET), fondée en 2000 par Ramiro Gallo, Ignacio Varchausky et le Maestro Emilio Balcarce, qui est décédé cet été (voir mon article du 23 janvier 2011 à ce sujet), lance sa campagne d'inscription pour la 11ème promotion. Depuis le retrait définitif de Emilio Balcarce, c'est-à-dire depuis trois ans, la direction de l'orchestre est confiée au Maestro Néstor Marconi.

Les inscriptions sont ouvertes depuis le 21 mars et se termineront le 15 avril 2011 au soir.

Cette annonce s'adresse à des musiciens déjà très avancés dans leur formation tanguera et de niveau professionnel ou pré-préfessionnel, bandonéonistes, altistes, violonistes, violoncellistes, contrebassistes et pianistes. Amateurs s'abstenir.

Pour s'inscrire, il faut ne pas avoir dépassé l'âge de 35 ans et envoyer un mail à Ana Di Toro, qui s'occupe de toute cette partie administrative à l'association Tangovía, fondée et dirigée par Ignacio Varchausky, qui tient tous ces projets dans sa main. L'entrée dans cet orchestre-école est ensuite soumis à des auditions et donc au principe du concours.

La Justice argentine annonce l'identification de certains équipages des vols de la mort [Actu]

Aujourd'hui, l'Argentine commémore le 35ème anniversaire du coup d'Etat qui instaura le 24 mars 1976 la plus terrible dictature de son histoire, qui pourtant en compte plusieurs. Cette dictature a pris fin en décembre 1983, à la prise de fonction du président légitimement élu, Raúl Alfonsín, après que la guerre des Malouines et la défaite militaire devant la Grande-Bretagne (avril-mai 1982) eurent déconsidéré le régime et que l'élection, à Rome, d'un pape polonaisn vigoureusement anticommuniste, eut commencé à détourner les Etats-Unis du sud du continent au profit d'un travail de déstabilisation définitif du bloc soviétique.

Au retour de la démocratie, on a fait de cette date tragique un Jour national pour la Mémoire, la Vérité et la Justice (Día de la Memoria, Verdad y Justicia), où les mouvements apparentés au péronisme jouent un grand rôle, puisque les opposants à la Junte appartenaient, pour une écrasante majorité d'entre eux à l'une ou l'autre des nombreuses obédiences péronistes et non pas au parti communiste comme le faisait croire les militaires putchistes. Le partido justicialista, fondé par Perón, tient en effet une ligne politique de souveraineté nationale dans tous les domaines, économique, politique et stratégique, ce à quoi les époux Kirchner, Néstor puis Cristina, actuellement au pouvoir, ont voulu, au début des années 2000, ajouter une forte dose de respect des droits de l'homme, avec lesquels Perón lui-même n'était pas très scrupuleux.

Aujourd'hui donc, la Justice argentine a fait savoir qu'après un travail très ardu d'analyse des archives militaires et policières et des plans de vols et des années de recoupement en tout sens, elle a identifié les membres de l'équipage d'un des vols de la mort les plus symboliques, celui qui jeta dans le Río de la Plata les corps sans doute vivants, entravés et drogués, de ces militantes emblématiques des droits de l'homme que furent trois des fondatrices de l'ONG Madres de Plaza de Mayo, Azucena Villaflor de De Vicenti, Esther Ballestrino de Careaga et María Ponce de Bianco, arrêtées le 10 décembre 1977, et la religieuse française Léonie Duquet, arrêtée deux jours plus tôt et photographiée par ses geoliers le 14 décembre (l'exemplaire du journal La Nación, placée entre ses mains, faisant foi). Dans la semaine du 20 au 28 décembre 1977, on retrouvait les corps de ces femmes sur une plage de la côte atlantique, où les courants marins les avaient déposés. Les corps furent enterrés de manière anonyme. En 2005, la police scientifique argentine a procédé aux identifications et pu constater, à partir des fractures, que ces femmes avaient effectivement, comme le disait une rumeur insistante, été précipitées d'une altitude très élevée contre un corps d'une grande dureté. En l'occurence, on sait maintenant qu'il s'agit bien de l'eau du Río de la Plata.

L'équipage de ce vol de la mort, comme on appelait ces missions du Plan Condor, un plan multinational concerté entre l'Argentine, le Chili, le Brésil, le Paraguay, l'Uruguay, la Colombie et le Pérou pour éliminer les militants de la Déclaration universelle des droits de l'homme, a pu être identifié par des déductions très subtiles : il s'agissait de retrouver les rares vols de nuit partis de l'Aeroparque Jorge Newberry, l'aéroport national de Buenos Aires, situé en bordure du Río de la Plata, entre 6 heures de l'après-midi et 6 heures du soir, avec des heures de départ et des heures d'arrivée qui ne correspondent pas à la durée normale du trajet et des ordres de mission bizarres (par exemple une cargaison indiquée qui ne correspond à aucune livraison à l'atterrisage, un point de départ et un point d'arrivée sans lien logique avec la mission officielle du vol). La Justice a ainsi remarqué qu'entre 1976 et 1977, ces vols nocturnes ne correspondaient qu'à 6% du trafic sur l'aéroport national et qu'à partir de 1978, leur fréquence augmente jusqu'à atteindre les 10% du trafic total. Et c'est un total de 2758 plans de vols, effectués entre 1976 et 1978, qui ont été épluchés par les services d'enquête judiciaire, sous la direction d'un quarteron de juges vedettes, magistrats du siège et du parquet, qui conduisent ensemble les deux plus gros dossiers de ce lourd héritage de la dictature (le dossier de l'ESMA et celui du Plan Condor).

Parmi les membres de l'équipage qui a liquidé les co-fondatrices de Madres et la Soeur Léonie Duquet, se trouvent des gens qui ont poursuivi leur carrière dans des compagnies commerciales et qui se sont vantés de leurs exploits auprès de leurs collègues après la fin de la Dictature. Ce fut le cas d'un lieutenant de frégate qui avait continué sa carrière dans la compagnie néerlandaise Transavia, un dénommé Julio Alberto Poch, qui a été extradé d'Espagne après ces révélations mais a pu échapper à toute condamnation grâce à des arguties procédurales, dont une certaine tradition judiciaire argentine a le déplorable et honteux secret. Ce fut le cas aussi, et c'est un signe plus fort encore d'assurance d'impunité, d'un sous-officier, Rubén Ricardo Ormello, qui travaillait à bord d'avions d'Aerolineas Argentinas et fit son épouvantable récit devant ses collègues civils argentins. Les collègues l'ont dénoncé mais là encore, l'homme, bien défendu, a pu échapper à toute sanction. Il est probable, le temps passant, que plus aucun de ces individus ne vole plus à bord d'avion d'aucune compagnie en activité. Trente-cinq à vingt-sept ans après les faits, ils n'ont plus l'âge de travailler à bord.

Selon Página/12, deux aumôniers catholiques étaient eux aussi bien informés de ces crimes et n'ont jamais été poursuivis. Le journaliste, Diego Martínez, n'en décolère pas. Reste à savoir si ces hommes étaient favorables à cette politique et se sont portés volontaires pour assister spirituellement ces pilotes sans conscience ou s'ils se sont tus parce qu'ils étaient tenus par le secret de la confession, qui ne saurait dans ce cas leur être opposable et derrière lequel ils peuvent aussi avoir abrité leur complicité en toute connaissance de cause.

Pour en savoir plus :
lire l'article de une de Página/12

Ajout du 27 mars 2011 :
lire l'article de Página/12 de ce matin sur les affectations successives du Père Zanchetta, l'un des aumôniers militaires, cités plus haut, et dont le quotidien estime qu'il est protégé par le Cardinal Bergoglio, Archevêque de Buenos Aires, fortement suspecté par la gauche d'avoir eu des faiblesses pour la Dictature.

mercredi 23 mars 2011

Página/12 réédite une somme sur l'histoire de Madres de Plaza de Mayo [Actu]

Demain, l'Argentine célèbre le Jour de la Mémoire, de la Vérité et de la Justice (Día de la Memoria, Verdad y Justicia), au jour anniversaire du pire accident de son histoire en terme de droits de l'homme, le coup d'Etat mené par Jorge Videla, alors chef d'Etat-Major, pour renverser Isabel Perón et établir la dictature la plus terrible qu'ait connu ce pays tout au long de son histoire. Ce sera le 35ème anniversaire de cette catastrophe.

A cette occasion, demain, le quotidien de gauche Página/12 publiera la réédition en deux tomes d'une histoire des Mères de la Place de Mai (Madres de Plaza de Mayo), ces femmes qui se ressemblèrent très tôt, dès le mois d'avril 1977, pour réclamer à la Junte des informations sur leurs enfants disparus, des militants des droits de l'homme et/ou des militants nationalistes, qui luttaient contre ce régime qui livrait le pays pieds et poings liés aux intérêts économiques et stratégiques des Etats-Unis. Elles transformèrent en lutte collective ce qui n'était au départ que des inquiétudes privées et familiales et ont, ce faisant, été un puissant facteur de déstabilisation du régime. Partout dans le monde, on les connaissait et les démocraties soutenaient leur mouvement, né pour dénoncer auprès de l'ONU les violations de la Déclaration universelle des droits de l'homme dont l'Argentine est signataire.

Le premier tome sort demain, au prix de 34 $. Le second paraîtra le 3 avril.

Le premier volume s'intitule La rebelión de las Madres (1976-1983). C'est l'oeuvre de l'historien Ulises Gorini. Il paraîtra accompagné d'une préface de Osvaldo Bayer, l'un des plus prestigieux histoiriens argentins (franchement de gauche et nationaliste, les deux notions étant liées en Argentine alors qu'elles sont devenues antinomiques en Europe).

Le second volume s'intitule La otra lucha et porte sur la période de la difficile instauration de la démocratie et la phase des premiers procès, 1983-1986, procès auxquels il fut vite mis fin par le défunt président Raúl Alfonsin (voir mes articles le concernant dans ce blog), comme en Europe à la fin de la seconde guerre mondiale, on arrêta assez vite les opérations d'épuration. Il fallait bien que le pays reprenne sa vie, tout en conservant ses élites administratives (juges, officiers de police et de l'Armée).

L'annonce de cette réédition est l'occasion pour Página/12 de publier une interview de Ulises Gorini sur ce travail ancien.

Pour aller plus loin :

La Orquesta La Vidú, la Milonga del Indio et le Quinteto de los Santos ce soir à la ADUBA [à l'affiche]


Ce soir à 21h, dans le cadre de la série de concerts intitulé Identité nationale et Projet populaire, au siège de l'organisation syndicale ADUBA, qui ressemble des enseignants de l'Université de Buenos Aires clairement situé à gauche sur le plan politique, en cette veille du Jour de la Mémoire, de la Vérité et de la Justice, qui célèbre les droits de l'homme au jour anniversaire du coup d'Etat de 1976, la Orquesta Típica La Vidú et le Quinteto de los Santos partageront la scène pour animer la Milonga del Indio, qui changera de lieu et de jour pour l'occasion (1).

Cette série de concerts est parrainée par le Maestro Ernesto Baffa et le chanteur de folklore Chango Farias Gómez. Le Secrétariat d'Etat à la culture est aussi partenaire de l'opération, qui se déroulera au siège de l'ADUBA, Azcuénaga 770, dans le quartier de San Nicolás.

Entrée gratuite.

(1) La Milonga del Indio a lieu traditionnellement en plein air, à San Telmo, le dimanche soir, à la fin de la Feria de San Telmo, du côté de Plaza Dorrego.

Placido Domingo est solidaire des musiciens du Colón [Actu]

Le chanteur lyrique espagnol Placido Domingo est arrivé dimanche dernier à Buenos Aires où il était prévu qu'il chante aujourd'hui, au Teatro Colón puis au pied de l'Obélisque, lors d'un méga-concert organisé par la Fondation Beethoven et le Gouvernement de la Ville Autonome de Buenos Aires, dont je vous ai déjà entretenu du long conflit social qui y l'oppose aux artistes de l'opéra, notamment les musiciens de l'orchestre et les danseurs de la troupe (voir mon article du 17 février 2011)

Mauricio Macri, rentrée de son séjour parisien, a aussitôt sommé les musiciens de reprendre le travail et les a rendu responsables par avance de l'affront qui serait fait à la vedette internationale qu'est Domingo, si ce dernier devait annuler son concert.

Mais Placido Domingo n'a pas joué le jeu. Il a déclaré publiquement, lors d'une conférence de presse qui s'est tenue lundi en fin d'après-midi, sa solidarité avec ses confrères musiciens du Colón, lesquels ont du coup accepté de jouer pour assurer la partie du concert qui devait se dérouler au pied de l'Obélisque. Le concert aura lieu ce soir à 20h, en plein air. L'entrée est bien entendu libre et gratuite.

En cas de pluie ce soir (il pleut dru depuis ce matin sur Buenos Aires), le Ministre portègne de la Culture, Hernán Lombardi, qui était lui aussi du voyage à Paris ce week-end, le concert sera reporté de 24 heures.

En revanche, le théâtre de l'opéra restera fermé et la grève des musiciens reprendra son cours demain.

Pour en savoir plus :
lire l'article de Página/12 (triomphant) d'hier sur la conférence de presse de Placido Domingo
lire l'article de Página/12 (ironique) de ce matin sur l'accord intervenu entre l'orchestre et le chanteur.

Ajout du 25 mars 2011 :
Lire l'article de Página/12 ce matin, au lendemain du concert
Lire l'article de Página/12 ce matin sur les différentes positions politiques du public

Quand Página/12 reçoit un diplôme des droits de l'homme de la part d'un bourreau de la Dictature [Actu]

Ce matin, à la veille du jour de la Mémoire, de la Vérité et de la Justice, jour anniversaire du coup d'Etat de 1976, qui instaura la plus cruelle dictature de l'histoire de l'Argentine, Página/12 publie en entrefilet de Une cette déclaration incroyable d'un des accusés du procès de Comodoro Py (voir mon article du 1er mars 2011 à ce propos), le procès du système de soustraction systématique des enfants en bas-âge à leurs parents militants politiques, arrêtés arbitrairement et mis à mort sans procès :

Jorge “El Tigre” Acosta fue interrogado ayer en el juicio sobre el plan sistemático para apropiarse de hijos de desaparecidos. El represor de la ESMA dedicó un tramo de su declaración a este diario: “Yo jamás dije que no había que leer Página/12; al enemigo hay que leerlo todos los días, estudiarlo permanentemente y más si es un mentiroso”. La jueza María del Carmen Roqueta lo interrumpió: “Esta no es una tribuna política, si quiere quejarse escríbale una carta al diario”
Página/12, édition du 23 mars 2011

Jorge Acosta, dit "La bête fauve" (1), a été interrogé hier au cours du procès sur le plan systématique pour adopter illégalemetn les enfants des disparus. Le bourreau de l'ESMA (2) consacra un pan de ses déclarations à ce journal : "Je n'ai jamais dit, moi, qu'il ne fallait pas lire Página/12. L'ennemi, il faut le lire tous les jours, l'étudier en permanence et encore plus si c'est un menteur". La juge María del Carmen Roqueta l'a interrompu : "On n'est pas ici sur une tribune politique. Si vous voulez porter plainte, écrivez une lettre au journal".
(Traduction Denise Anne Clavilier)

Pour lire directement le billet sans traduction sur le site de Página/12, cliquez sur le lien.

(1) El tigre, en Argentine, a deux sens majeurs (en dehors de nom du félin asiatique en voie de disparition et de la ville du Gran Buenos Aires, dont il m'est arrivé déjà de vous parler, notamment lors d'un Retour sur images sur une promenade dominicale). Il peut désigner la cruauté ou la virtuosité. D'un côté, on peut traduire par La bête fauve, le sauvage. De l'autre, on peut traduire La bête, qui en langage populaire à Paris désigne une personne qui domine particulièrement son affaire. Ainsi le surnom de Eduardo Arolas était-il El tigre del Bandoneón parce qu'il en était un très grand virtuose, selon les critères de sa génération. D'autres bandonéonistes de quelques années plus jeunes, Pedro Laurenz et Pedro Maffia, le surpassèrent assez vite mais il reste un musicien mythique dans la mémoire argentine.
(2) L'ESMA, ancienne école supérieure de mécanique de la Marine, à Palermo, servait alors de centre de détention clandestin et de centre de torture. Des femmes y ont accouché avant de se faire retirer leur nouveau-né et d'être exécutées, dans des circonstances qui restent encore pour beaucou d'entre elles inconnues. Le bâtiment de l'ESMA est devenu un lieu civil. Il abrite désormais les activités culturelles de l'association Madres de Plaza de Mayo (dont le centre culturel s'appelle ECunHi, Espacio Cultural Nuestros Hijos).

lundi 21 mars 2011

Rendez-vous littéraire Tangos d'hier et d'aujourd'hui : programme du 26 mars 2011 [ici]

Samedi 26 mars 2011, à 18h, nouveau Rendez-vous littéraire Tangos d'hier et d'aujourd'hui, à l'Académie Esprit Tango, 3 rue des Vignoles, 75020 Paris (M° Avron), au 1er étage (escalier à droite dans la cour).

Au programme de ce Rendez-vous :
Yuyo verde, de Homero Expósito et Domingo Federico (musique), que nous n'avons pas eu le temps de regarder samedi dernier (1)
et, si nos échanges sur Yuyo verde nous en laissent le temps (2), Trenzas, du même Homero Expósito et du compositeur Armando Pontier (qui fut aussi un admirable chef d'orchestre, qui a laissé sa trace dans l'histoire du genre) - ci-contre la couverture de la partition, extraite du site Internet argentin Todo Tango (voir la rubrique Les Institutions, dans la partie inférieure de la Colonne de droite).

Pourquoi ces deux classiques ? Depuis le début de ces rencontres littéraires, nous nous penchons sur le thème de l'amour et la variété de ses déclinaisons, selon la personnalité des poètes et en fonction de l'histoire, l'histoire du tango mais aussi celle de la société portègne, dont le répertoire du tango est un très fidèle reflet. Après le thème de l'amour malheureux parce qu'ELLE est partie (Mi noche triste), parce que l'amour est mort entre eux deux (Toda mi vida, Como dos extraños), parce qu'il s'agit d'un amour impossible (Fuimos, qui nous a ouvert l'univers de Homero Manzi) (3), ou parce qu'à la manière romantique, la mort (la tuberculose faisait des ravages) y a mis un point final (Milonga triste).

Tous ces morceaux s'enchaînent donc les uns aux autres grâce à des liens que je choisis pour leur cohérence culturelle et que nous explorons ensemble : Mi noche triste est le père (ou la mère) de tous les tangos chantés, il a été écrit par Pascual Contursi en 1916. Son fils, José María Contursi, une génération plus tard, écrivit Toda mi vida et Como dos extraños. Lors de la troisième rencontre, nous nous sommes penchés sur Fuimos, avec une première approche de Homero Manzi et l'influence des surréalistes, notamment français, sur les écrivains de tango de la première moitié du 20ème siècle. Samedi, dans cette très sobre et très puissante Milonga triste, nous avons vu apparaître ce signe secondaire de féminité que sont, dans l'univers du tango, les tresses (trenzas) des jeunes filles et des femmes de la classe ouvrière, celles que l'on peut épouser (trenzas negras s'opposant au pelo corto y rubio des dames légères ou de petite vertu qui se sont haussées au-dessus de leur condition sociale en vendant leurs charmes à de riches protecteurs ou s'apprêtent à le faire). Dans Milonga triste, on a vu que ces tresses, noires et même parfois imprudemment défaites, avaient une puissance sensuelle digne de Baudelaire. On les retrouvera dans Yuyo verde, qui traite encore de la tragédie de l'amour entravé par la mort, mais avec ces métaphores que la fréquentation assidue des surréalistes français ont insufflés aux vers de Homero Expósito, un Argentin polyglotte qui les lisait dans le texte.

Si le temps nous le permet, nous retrouverons les tresses et l'ombre des surréalistes dans Trenzas, et pour cause. Avec Trenzas, nous aborderons pour la première fois et sur la pointe des pieds les rives de la poésie érotique. D'une manière des plus pudiques (pensez donc, nous remonterons le temps jusqu'en 1945 !). Il faudra encore attendre six ans pour que le thème ose paraître au jour et presque trente ans pour qu'un poète aussi inspiré que Horacio Ferrer ose créer une vraie thématique dans ce domaine. Des poètes de la génération suivante, comme Raimundo Rosales ou Alejandro Szwarcman (5), ont poursuivi sur cette voie et ce sera ce que l'on verra dans les séances suivantes pour clore notre première approche du thème amoureux, dont ainsi nous n'aurons pas encore fini l'exploration, ce qui nous laissera encore beaucoup de matière pour la rentrée de septembre.

Avec Yuyo verde et Trenzas, nous continuerons de découvrir des chanteurs, qui firent et font vivre et évoluer la tradition de l'interprétation du tango et ce sera notre première excursion dans le répertoire de la Orquesta de las Estrellas...

Pour participer, il est indispensable de vous inscrire à l'avance par mail sur dactango@hotmail.fr (4). Vous pouvez le faire dès à présent. La raison en est très simple et tombe sous le sens : j'ai besoin de savoir, entre autres choses, combien de documents je dois imprimer et je veux pouvoir vous avertir s'il y a un changement de programme (cela peut arriver).
Participation : 15 € par personne.

S'il est indispensable de s'inscrire, il ne l'est pas de parler espagnol (les textes sont vus en version bilingue, traduits par mes soins), ni de savoir lire la musique, ni de savoir chanter, encore moins de savoir danser. Les textes sont lus en version bilingue, traduits par mes soins. Et ces ateliers, qui donnent un supplément d'âme aux danseurs qui veulent bien y participer, sont ouverts aussi aux non danseurs, aux personnes à l'esprit curieux et ouvert qui n'auront jamais le goût ni l'envie de se lancer sur une piste de danse. De nos différences, les rencontres et les échanges s'enrichissent.

Pour en savoir plus sur les rencontres littéraires et leur programme, cliquez sur CLT dans le bloc Pour chercher, para buscar, to search, ci-dessus.
Pour en savoir plus sur l'Académie Esprit Tango, cliquez sur le sigle AET dans le même bloc Pour chercher ou visitez leur site que vous trouverez dans la rubrique Eh bien dansez maintenant, dans la partie basse de la Colonne de droite.
Pour en savoir plus sur les Rendez-vous littéraires Tangos d'hier et d'aujourd'hui, cliquez sur le mot-clé RVL.
Pour en savoir plus sur l'ensemble de mes activités, cliquez sur le sigle ABT.

(1) Yuyo verde fait partie du corpus de letras que j'ai traduites dans Barrio de Tango, recueil bilingue de tangos argentins, ed. du Jasmin, mai 2010, p. 253.
(2) Samedi, nous avons eu une discussion sur le contenu et les modalités de ces rencontres : doivent-elles s'étendre sur une heure et demie plutôt qu'une seule heure comme c'est le cas actuellement et dois-je couper systématiquement l'heure en deux, 30 mn pour chaque morceau, ou laisser libre cours à nos échanges. Le groupe s'est mis d'accord que mieux valait rester sur la durée d'une heure pour le moment et il a reconnu que les échanges étaient essentiels, que c'était eux qui permettaient l'appropriation des morceaux, ce qui permet par la suite de les indentifier et de mieux les apprécier lorsqu'on les entend lors d'un récital ou sur disque, à la radio (La 2 x 4, Radio CAFF, les podcasts de Fractura Expuesta ou celle de la chronique de Jean-Louis Mingalon sur France Musique, voir le raccourci Radio dans la rubrique Tangoscope, en Colonne de droite), dans un cours de tango, une pratique ou une milonga. En plus, les échanges au fur et à mesure que les rencontres existeront aideront à créer du lien entre nous, une certaine convivialité, un certain luxe dont le Parisien de base manque un peu à l'heure actuelle. C'est pourquoi je continuerai à annoncer deux morceaux, tout en sachant qu'on n'en traitera peut-être qu'un seul. Mais ce n'est pas au détriment de la culture, car la culture est un tout et elle s'explore pas à pas, en suivant une course éliptique. Après le thème de l'amour, qui nous accompagnera jusqu'à la fin avril sans être épuisé, on passera à une autre thématique, et celle de l'amour pourra être reprise plus tard, l'année prochaine, ou ailleurs, à l'Espace Tango Negro par exemple.
(3) Mi noche triste, Toda mi vida, Como dos extraños et Fuimos font également partie de Barrio de Tango, aux éditions du Jasmin.
(4) Cette adresse mail est exclusivement réservée aux inscriptions à mes rencontres littéraires. Il ne sera pas fait de réponse aux autres sollicitations et surtout pas aux spams.
(5) Tous les trois largement présentés dans Deux cents ans après, le Bicentenaire de l'Argentine à travers le patrimoine du tango, revue Triages, Supplément 2010, Tarabuste Editions, janvier 2011.

Lucio Arce et ses potes remettent ça demain soir [à l'affiche]


L'auteur-compositeur-interprète Lucio Arce regroupe une nouvelle fois ses amis, dont il mélange allègrement les noms, les surnoms et les titres dans le mail qu'il vient de nous envoyer et sur l'affiche qu'il diffuse, pour un tour de chant partagé avec ses propres chansons.

Cet auto-hommage lui sera rendu au restaurant de Palermo La Paila, rue Costa Rica au numéro 4848, demain, mardi 22 mars 2011, à 21h (arrivez vers 20h pour dîner et éviter les bruits de fourchette pendant le spectacle).

Entrée : 25 $ (ajoutez le coût, très modique, du repas, avec une carte de gastronomie du nord de l'Argentine. C'est très bon, essayez !).

Pour en savoir plus sur ce spectacle (dont le titre est une blague, vous l'aviez compris au premier regard sur l'affiche, n'est-ce pas ?), voir mon article du 19 février 2011 sur sa première représentation.
Pour voir de quoi a l'air Lucio lorsqu'il chante à La Paila, voir mon article du 17 octobre 2010 dans lequel je vous ai livré un retour sur image sur une soirée d'août à laquelle il avait eu la gentillesse de m'inviter.

Milonga du Konex avec musique vivante [à l'affiche]

Pour Cucuza, avec toute mon amitié

Les chanteurs Cucuza (Hernán Castiello, de son vrai nom mais ne l'appelez jamais comme ça, il ne se reconnaîtrait pas !) et El Chino (Walter Laborde, qui est aussi le chanteur titulaire de l'orchestre coopératif Fernández Fierro, la OTFF dont je vous parle souvent) et leurs accompagnateurs, le guitariste Dipi (autrement dit, Diego Kvitko), et Sebastián Zasali, qui n'a pas de surnom mais joue du bandonéon et parfois aussi du piano, se retrouveront mercredi prochain, le 23 mars 2011, à 21h30, pour préluder à la milonga du Konex, dans la cour (attention au risque de pluie, c'est l'automne et Buenos Aires connaît bien les giboulées de mars, elle aussi !), rue Sarmiento, à la hauteur du numéro 3131, dans le quartier très emblématique dit de l'Abasto.

Le concert est annoncé par Cucuza avec cette formule qui me fait rire (j'aime bien l'humour un rien potache de Cucuza) :

CUCUZA, EL CHINO, DIPI Y ZASALI
TODO DICHO, NADA HECHO

Ce que vous pouvez comprendre comme "Tout est dit, rien n'est fait". Prenez-le comme vous voulez, mais allez-y si vous vous trouvez à Buenos Aires. Ces quatre mousquetaires-là valent que vous tendiez l'oreille.


Le mail de Cucuza est aussi illustré de cette superbe photo du photographe Nicolás Foong, à admirer, c'est pour cela que je vous la livre... Et aussi parce qu'elle a été prise dans la cour du Konex, où la scène longe la rue. Revoir cette cour m'a touchée : c'est là que j'ai eu ma dernière conversation à un ami très cher, que nous avons beaucoup aimé, Cucuza comme moi, Alorsa, à la mémoire de qui j'ai dédié ma deuxième anthologie bilingue sortie le 26 janvier 2011 (1).

A 23 heures, commencera la milonga. Et avant tout ça, à 20h, il y a un cours de tango danse.

(1) Deux cents ans après, le Bicentenaire de l'Argentine à travers le patrimoine culturel du tango, revue Triages, Tarabuste Editions. Les textes de Alorsa, qui tiennent du tango, du candombe et de la murga, ouvrent l'ouvrage et sa photo est sur la couverture. Le moins que je pouvais faire pour un ami et un artiste dont la tendresse et le talent nous manquent tant depuis près de deux ans.

Une réflexion révélatrice du Secrétaire du Gouvernement portègne... relévé par Página/12 comme toujours [Actu]

Alors que Mauricio Macri achève son séjour parisien, où il est venu se montrer au Salon du Livre de Paris, dont Buenos Aires, capitale mondiale du livre 2011, était la première ville invitée d'honneur, Marcos Peña, le Secrétaire du Gouvernement de la Ville Autonome de Buenos Aires présidait récemment une réunion des principaux responsables culturels de la ville pour fixer les derniers détails de La Noche en Vela (La nuit aux chandelles ou la nuit à veiller), une manifestation culturelle de 24 heures consécutives que monte le Ministère de la Culture.

C'est le quotidien irrévocablement de gauche Página/12, qui a des oreilles qui traînent partout semble-t-il, qui révèle ce matin l'étrange conception de la culture et de la sociologie démocratique que possède ce monsieur. En écoutant les directeurs exposer la manière dont va se dérouler la journée, il les a regardés, "sans rire", tient à préciser le journal, et leur a lancé : "Cette affaire, c'est pour des gens normaux, pas pour des pauvres". Et le quotidien commente que les responsables se sont retirés en en ayant perdu leur latin mais qu'aucun d'entre eux n'a cependant osé relever l'absurdité assez révoltante de cette consigne officielle (on croirait entendre la parole d'un Ambassadeur de France en Tunisie, non ?).

Etant donné que les responsables culturels à Buenos Aires sont majoritairement des gens de gauche, peut-être ont-ils été tout simplement assomés par la brutalité du propos et son incroyable cynisme.

Pour lire cette anecdote dans le texte, connectez-vous sur l'entrefilet sur le site de Página/12.

Sortie de La Cantante de Tango en France : le 30 mars 2011 [ici]

Le film franco-germano-argentin La Cantante de Tango, du réalisateur argentin installé à Bruxelles Diego Martínez Vignatti, sorti en Belgique l'année dernière, sortira en France le 30 mars prochain. Je vous en ai déjà parlé à plusieurs reprises, parce que le réalisateur avait été invité en mai 2010, pour les fêtes du Bicentenaire, au micro de la RTBF (voir mon article du 2 juin 2010 à ce sujet), et parce que le film est déjà sorti en Argentine, où il a été projeté notamment au Museo Casa Carlos Gardel (voir mon article du 10 novembre 2010 à ce sujet).

Photo du film extaite du site Internet

La sortie sera accompagnée de plusieurs projections en avant-première un peu partout dans le pays, dont une dès cette semaine à Toulouse, dans le cadre des Rencontres des cinémas d'Amérique Latine.

Solange Bazely, qui est une spécialiste de l'histoire du bandonéon et de la relation entre cinéma et tango, a diffusé ce week-end une critique fort intéressante de ce film qu'elle a déjà vu. Comme sa critique ne peut pas trouver sa place dans les pages du prochain numéro du magazine trimestriel Tout Tango, je lui accorde bien volontiers un peu d'espace dans ce blog dont elle est une fidèle lectrice et qu'elle soutient de tout son enthousiasme, dont ceux qui la connaissent savent qu'il est fort généreux...

* * * *

Cela n'arrive pas tous les ans, un long-métrage dans le milieu du tango argentin. Celui-ci ne tourne pas autour de la danse (même s'il y a quelques scènes) mais du tango chanté. Présenté en août 2009 au festival de Locarno, puis sorti en Belgique en juin et en novembre 2010 en Argentine, ce film débarque enfin sur les écrans français le 6 avril 2011.


On connaît déjà le réalisateur argentin résidant en Belgique depuis 1997 où il a fait l'INSAS (Ecole de cinéma, après un diplôme d’avocat), notamment pour son documentaire Nosotros en 2004, ou son premier long-métrage La Marea, en 2007 avec déjà celle qui, de son égérie, est devenue sa femme, la danseuse, actrice et désormais chanteuse de tango Eugenia Ramírez Miori. Ils font tous deux partie des acteurs de la scène tanguera à Bruxelles et savent donc de quoi ils parlent !


Réalisateur, scénariste et chef-opérateur, Diego Martinez Vignatti nous plonge ici au coeur de l'expérience solitaire d'une femme dévastée par la fin d'une histoire d'amour et pour qui le chant et l'exil volontaire permettra peut-être de refermer les plaies. Amateurs de film d'action s'abstenir, ce film assume le choix du silence, des plans séquences (et des plans fixes), du temps de l'introspection et de la sensation. Obsédée par la perte de son amour, la jeune femme s'enfonce dans la douleur. Malgré un nouveau contrat qu'elle accepte avec ses musiciens au Théâtre Homero (parce que son maître, Oscar Ferrari veut croire qu'elle chantera pour lui), elle finira par quitter Buenos Aires, dans un parcours en taxi où chaque coin de rue lui rappellera ce monde qu'elle quitte.


Dans ce nouveau pays où les éléments se déchaînent, la mer, le froid et le vent balayent peu à peu, à coup de ballades à pied ou à bicyclette, sur les falaises ou la jetée, le malêtre. Une noyade littérale et symbolique dans le chagrin et la mer, la découverte du pétrissage de la pâte à pain et un retour difficile et progressif vers le chant finiront par la transformer et l’amener à pouvoir écrire une nouvelle page de vie sur le mur fraîchement peint de sa nouvelle demeure en bord de mer.


Grâce à des flash-backs et ellipses, le film navigue et laisse comme une option, que se serait-il passé si un autre choix avait été fait ?


Tout le film est centré sur elle et sa blessure absurde (comme dit le tango qu'elle interprète, La última curda), les autres personnages étant flous, de dos, ou en second plan, comme dans ce long plan-séquence où elle suit son ancien compagnon, lui toujours filmé de dos, au son des notes aigües du bandonéon.


La bande-son est particulièrement intéressante notamment par de multiples distorsions du son (parfois étouffé) en accord avec la perception décalée de l'héroïne, quand son regard s'éveille dans le bal, le son s'atténue; la ballade en taxi, la scène sous l'eau sans aucun son. Le seul son direct est quand Helena chante avec ses musiciens sur scène.


La musique de tango prend une place centrale dans ce film, notamment par le chant, soulignant la vie intérieure et la mélancolie des personnages, peu bavards. Même entre frère et soeur, ils ne se parlent quasiment pas.


La voix permet de traduire les tourments d'Helena qui s'exprime en chantant sur scène mais s'enferme dans le silence dès qu'elle l'a quittée. Les paroles des tangos sont un véritable personnage, celui qui dit lorsqu'elle tait.


L'esthétique des cadres est cruciale, de même les paysages choisis, les couleurs et contrastes... qui surenchérissent la sensation d'étrange, d'éloignement, de façon quasi onirique parfois. Rien n'est laissé au hasard. Il y a toujours une fenêtre d'où voir la mer ou la ville, souvent un cadre dans le cadre, comme pour voir la réalité au travers d'une vitre, tant à Buenos Aires qu'en Europe.


Les effets de distorsion d'images renforcent la perte de sens ou des réalités, comme quand elle porte son regard au loin, perdue et où le bal est flou ou lors d'un transtrav (travelling compensé) quand elle vient écouter la chorale chanter et que cela lui procure une forte émotion puis quand on la voit enlacée à un homme, sans bouger alors que les autres couples dansent autour de la piste.


Quelques éléments fantastiques sont disséminés ça et là, comme ce téléphone rouge qui sonne sans arrêt sur la jetée.


Quelques bémols cependant dans le mutisme excessif qui nous éloigne parfois des personnages, avec lesquels j'ai eu du mal à entrer en empathie. Du coup, par contraste, quelques dialogues sonnent faux de même l'utilisation des mains d'Helena lorsqu'elle chante... Certains spectateurs pourraient être laissés au bord du cadre car si "la caméra est capable de lire les pensées et de radiographier l’âme", le spectateur le peut-il ? Le sens aigu du tragique peut friser parfois, selon les sensibilités, l'excès de pathos.


Le réalisateur a refusé une autre actrice, une autre chanteuse qui ne soit sa femme, qui n'a pas été doublée et assure chaque scène, avec force et fragilité.


Carlos Gardel est présent à plusieurs reprises dans le film, d'abord comme modèle suprême pour Helena puis avec Alma en pena dans la version qu'il a immortalisée.


Quelques références subtiles également au cinéaste Hugo Santiago, que ce soit dans le nom du quartet Aquilea, le Café Invasion ou le vieux monsieur qui écoute Eduardo Rovira. Pour ce nouveau film bilingue, français et espagnol, Diego Martinez Vignatti signe une fois encore la réalisation, l’image, et le scénario en collaboration avec Luc Jabon. avec Eugenia Ramírez Miori, Bruno Todeschini, et l'apport incontestable d’Alfredo Piró et d’Oscar Ferrari devenu le Maestro, voire l’ange gardien d’Helena/Eugenia (Ferrari est décédé avant d'avoir pu voir le film. Il était également présent dans le documentaire Café de los Maestros) dans leur propres rôles qui ont formé l'actrice à l'interprétation du tango. On les voit réunis dans la scène de la leçon de chant où Alfredo Piró s'entraîne au vibrato. Signalons les arrangements originaux de Juan Otero en Argentine et Hernán López Ruiz en Europe.


2009-2010 - 1h40 - Scope - Couleur - Dolby SRD - Visa 120115 - Production Tarantula -
Distribution Tamasa - lacantantedetango.com

Solange Bazely (mars 2011)

Pour en savoir plus :
vous pouvez lire tous les articles que j'ai consacrés à Solange Bazely dans ce blog en cliquant sur son nom dans le bloc Pour chercher, para buscar, to search, ci-dessus, y compris les deux articles qu'elle a elle-même écrits dont celui-ci.
Vous trouverez aussi, en lien permanent sur Barrio de Tango, son blog sur le bandonéon et son histoire dans la Colonne de droite, dans la partie basse.