samedi 28 février 2015

Cucuza et Cie font leur rentrée au Faro [à l'affiche]

Vendredi 6 mars 2015, à 21h30, le tango revient au Bar El Faro, de la esquina Constituyentes y Pampa, aux limites des quartiers Villa Urquiza, Parque Chas et Villa Pueyrredón.


Pour une fois, la bande à Cucuza a oublié d'indiquer le prix dans sa communication (ça devrait être aux alentours de 100 $ ARG).

Le chanteur, que tous mes lecteurs connaissent bien, Hernán Cucuza Castiello, sera accompagné comme à son habitude depuis plusieurs années maintenant par le bandonéoniste Sebastián Zasali, la pianiste Noelia Sinkunas et le jeune guitariste Mateo Castiello, le fils de Cucuza.

Il a aussi invité le guitariste Hugo Rivas.

Si vous voulez y trouver une place, réservez impérativement (la salle est plutôt petite et le succès est immense) : 15 6198 3206 ou infocucuza@gmail.com.

Discours d'un président sur le départ [Actu]

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Le Président José Mujica a prononcé hier son discours de fin de mandat, où il a remercié le peuple uruguayen pour sa maturité politique et son soutien, et au milieu de la semaine, il a accordé une grande interview chez lui, dans sa chacra (1) où il n'a pas cessé de vivre pendant toute la durée de sa présidence.

Le gros titre dit : "Nous [l'Uruguay] sommes connus grâce à Suárez [le footballeur] et Mujica".

Les journaux continuent à lui rendre hommage ce matin, pour son dernier jour à la tête du pays.


Demain, dimanche, il remettra l'écharpe présidentielle à Tabaré Vázquez... L'émotion semble grande dans toute la population, chez les rédacteurs et chez l'intéressé lui-même, qui avoue son addiction à la militance et son intention de rester dans le jeu politique, en soutien à son successeur.

Demain Joe Biden ne sera pas là, contrairement à ce qui avait été annoncé : le vice-président des Etats-Unis souffre d'un refroidissement (c'est peut-être vrai, vu le temps qui règne sur la Côte-Est dans l'hémisphère nord). Nicolás Maduro ne se déplacera pas non plus : les troubles au Venezuela exigent que le chef d'Etat reste sur place...

Pour aller plus loin :
lire l'interview dans El País, qui la reproduit aussi en vidéo
voir la vidéo de l'interview dans El Observador, qui ne retranscrit pas les propos
lire l'article sur la cérémonie d'adieux d'hier dans La República.


(1) Traditionnelle propriété agricole. Mujica vit des productions de sa chacra.

Tango de Miércoles reprend cette semaine au CCC [à l'affiche]


Cela sent la fin de l'été : la nouvelle saison de Tango de Miércoles s'ouvre ce mercredi 4 mars 2015 à 20h30 dans la salle Osvaldo Pugliese du rez-de-chaussée, au Centro Cultural de la Cooperación Floreal Gorini (CCC), Corrientes 1543, avec le groupe Monos del Infierno (singes de l'enfer), un sextuor de tango contemporain composé de Lucía Herrera, au violon, Mariano Malamud à l'alto, Marcela Muollo au violoncelle, Julia Peraltaen au bandonéon, Gerardo De Monaco à la contrebasse, le compositeur et arrangeur Fabian Adell au piano et la chanteuse invitée Felicitas Rossi.

Entrée : 70 $ ARG (billets à retirer le jour même ou quelques jours à l'avance au guichet du CCC).

Monos del Infierno dispose d'une page Facebook où vous pouvez découvrir cette formation.

vendredi 27 février 2015

Un dossier qui fait pschitt... [Actu]


Quarante jours après la découverte du corps du procureur Alberto Nisman dans une mare de sang derrière la porte de sa salle de bain et une semaine après l'ouverture d'une procédure pénale contre la présidente Cristina Kirchner, plusieurs de ses ministres et un bon nombre de hauts responsables ministériels, le juge d'instruction Daniel Rafecas vient de clore la phase de première instance avec une ordonnance de non-lieu dont le moins que l'on puisse dire est qu'elle fait beaucoup de bruit dans la presse argentine et qu'elle soulève la colère d'une des instances représentatives juives, ouvertement alignée sur l'opposition de droite.


Les quotidiens consacrent tous des pages et des pages à l'annonce judiciaire, qui pourrait d'ailleurs avoir des suites puisque le procureur a la faculté de faire appel de cette ordonnance. Il avait d'ailleurs refusé de comparaître lundi devant le groupe majoritaire au Congrès qui voulait lui demander d'expliquer sa position. Il avait avancé pour cela des motifs d'ordre procédural : l'instruction devait être couverte par le secret. Les parlementaires avaient trouvé cela curieux : alors que les procureurs et tant d'autres magistrats avec eux parlent à tort et à travers des éléments de l'enquête sur la mort violente de leur collègue Alberto Nisman, quand il s'agit du chef de l'Etat et que le pays est en campagne électorale, il faudrait l'inculper à neuf mois de la fin du mandat et en garder secrètes les raisons...


La presse se partage donc en deux ce matin (pour ne pas changer) : en faveur de la Présidente, Página/12 et contre elle, à des degrés divers de violence et de bonne ou mauvaise foi, La Nación, Clarín et La Prensa.
Página/12 ajoute au dossier l'analyse d'un document préparatoire dans lequel on voit qu'au mois de décembre, soit un mois avant sa mort, Nisman soutenait la politique gouvernementale vis-à-vis de l'Iran jusqu'auprès de l'ONU. Il est pour le moins étrange qu'il ait viré de bord à 180° en quelques semaines à peine, en publiant un réquisitoire contre cette même politique et ses acteurs, avant de demander un revolver à une personne de son entourage et d'être découvert tué par arme à feu le 18 janvier.
Toujours aussi revanchard et acrimonieux, Clarín préfère mettre en avant une autre procédure contre la présidente, qui n'a pour le moment abouti à aucune mise en accusation, une affaire de fausses factures et de détournement de pots-de-vin dans un hôtel que Cristina Kirchner possède en Patagonie (dès avant la mort de Néstor Kirchner, le couple présidentiel avait en effet investi partie de ses avoirs dans le tourisme dans la Province de Santa Cruz).

Un autre fait politique retient l'attention aujourd'hui : un mini-remaniement ministériel pour libérer deux ministres de leurs responsabilités afin qu'ils puissent se consacrer à leur campagne électorale dans leur province respective.

Pour aller plus loin :
lire l'article de Página/12 sur les documents préparés par Nisman
lire l'article de Clarín sur le non-lieu
lire le billet d'opinion que Clarín consacre au scandale supposé Hotesur
lire l'article principal de La Prensa.

Ajout du 28.02.2015 :
Le juge d'instruction a donné une interview à Reuters, où il explique sa décision, fait remarquer que le gouvernement argentin a fait toutes les démarches qui lui incombaient pour que la justice suive son cours en Argentine sur l'attentat contre l'AMIA et qu'il n'a exercé aucune pression sur son travail, qu'il a pu effectuer dans la sérénité. Página/12 reprend le contenu de cet entretien dans son article de une ce matin.

Ajout du 8.03.2015 :
L'Ambassade d'Argentine en France (comme sans doute de nombreuses autres ambassades argentines partout dans le monde, sinon toutes sans exception) a publié sur son site Internet l'intégralité de l'ordonnance de non lieu (pour désigner cet écrit en termes juridiques français), en pdf téléchargeable. Le texte est en espagnol, sans traduction. Une seule traduction est disponible : en anglais.

jeudi 26 février 2015

Mujica s'apprête à passer la main dans une forme olympique [Actu]


En Uruguay, le président José Mujica, celui qui dit des gros mots et que l'argent n'intéresse pas, s'apprête à passer le flambeau à son successeur, qui est aussi son prédécesseur, à la plus haute magistrature de la République orientale de l'Uruguay : dimanche 1er mars 2015, Tabaré Vázquez prêtera serment comme chef d'Etat pour la seconde fois.

Six présidents sud-américains sont attendus pour les cérémonies du week-end et autant de vice-présidents, dont Amado Boudou qui représentera l'Argentine.

Pepe Mujica se retire de la vie politique avec une cote de popularité qu'on envierait sans doute à l'Elysée : 65% d'Uruguays se disent satisfait de ce président.

Tous les journaux uruguayens publient ces jours-ci des analyses synthétiques sur ces quatre ans de mandat. C'est le cas de La República qui revient sur ce sondage et sur les différentes apparitions présidentielles prévues pour ces trois prochains jours, souvent en compagnie des autres chefs d'Etat qui sont déjà à Montevideo, comme Evo Morales, le président bolivien, ou Dilma Roussef, la présidente brésilienne.

A partir de lundi, le style changera (Vázquez parle avec un langage châtié) mais la politique suivra la même voie : c'est encore et toujours la gauche du Frente Amplio qui gouverne le pays. Il semblerait que ni la France ni la Belgique ni la Suisse n'ait prévu d'être représentée par un membre de leur gouvernement. Espérons qu'au moins l'Union Européenne sera au rendez-vous en tant que telle (l'Espagne enverra sans doute quelqu'un de quelque rang protocolaire) ! Joe Biden, le vice-président des Etats-Unis, est attendu à Montevideo.

Pour aller plus loin :
lire l'article de La República sur le sondage et les dernières apparitions publiques officielles
lire l'article de La República sur le programme pour la journée du 1er mars.

Rentrée aussi pour Cardenal et Reinaudo [à l'affiche]


Ce soir, jeudi 26 février 2015, à 21h, le chanteur Cardenal Domínguez et le guitariste Hernán Reinaudo reprennent le collier au Café La Trama, Mexico 1500, dans le quartier de Monserrat.

Au programme, un vaste répertoire de tangos, milongas et autres chansons du Río de la Plata et quelques compositions personnelles de Reinaudo.

Participation libre (à la sortie). Indications pour les touristes : entre 80 et 100 $ ARG minimum. Et n'oubliez pas les consommations.

mercredi 25 février 2015

237 bougies soufflées par Fabiana Mastrangelo et Leonardo Liberman dans Siempre Argentina - Conexión Español [Disques & Livres]

Fabiana Mastrangelo à gauche, lorsqu'elle m'accompagnait au CCC en septembre dernier

Aujourd'hui, c'est l'anniversaire de naissance de José de San Martín, né le 25 février 1778 à Yapeyú, dans l'actuelle Province de Corrientes, dans le nord-est argentin. Le grand héros de l'indépendance du pays. El Padre de la Patria.

En décembre, comme je vous l'avais dit, dans un article du 7 janvier 2015 (1), l'historienne Fabiana Mastrangelo a sorti une biographie du personnage, avec une lecture peu commune : analyser sa trajectoire à travers les valeurs éthiques qu'il mit en œuvre pour accomplir son travail politique et militaire de libération du midi de l'Amérique du Sud. Le journaliste et animateur radio Leonardo Liberman a saisi l'occasion pour l'interviewer et l'entretien, en espagnol, est disponible sur le blog de RAE (Radio Nacional) et sur son blog personnel, El Mirador Nocturno.

Si vous parlez cette belle langue de l'Argentine, précipitez-vous sur ce document : Fabiana Mastrangelo sait parler clair, simple et vivant, ce qui n'est pas l'apanage de tous les historiens sud-américains...

Pour écouter ou télécharger l'interview, faites un tour sur El Mirador Nocturno.


(1) Un article que j'avais préparé depuis deux jours pour ce jour-là et que j'ai tenu à publier, malgré les sinistres événements qui secouaient Paris à quelques kilomètres de chez moi. Les droits de l'homme sont les droits de l'homme !

Les salons se suivent et ne se ressemblent pas [ici]

Après Montmartre, sa séance de signature et sa conférence sur les femmes dans le tango le samedi 7 mars (14h à 18h), je serais à Villemandeur, non loin de Montargis, les 14 et 15 mars 2015 pour présenter mes livres (sur le tango et sur l'histoire argentine) et les signer sur le stand des Editions du Jasmin. Ce sera aussi l'occasion de parler de mon prochain livre à paraître cet été, il portera cette fois-ci sur la culture de l'Intérieur, la culture de ce grand pays rural qu'est l'Argentine.


Comme d'habitude, il y aura dégustation de mate gratuite sur le stand, pour ceux de nos lecteurs qui ont les papilles aventureuses, et, si j'ai le temps de m'en occuper le vendredi précédent, je compte bien apporter des chipá maison pour compléter les dégustations gastronomiques. A côté de la boisson nationale, amère et tannique, des petits pains au fromage originaires du même nord-est argentin où, le 25 février 1778, est né le général José de San Martín, dans l'actuelle Province de Corrientes, loin, bien loin du tango, dans la patrie du chamamé (une autre musique typiquement argentine et participante de son identité culturelle nationale). Il fallait que je me risque à vous le dire : aujourd'hui, c'est l'anniversaire de naissance du héros comme vous le verrez dans un autre article du même jour.

Le salon ouvre dès le jeudi. Le stand du Jasmin sera disponible le samedi de 10h à 19h puis le dimanche de 10h à 18h. Entrée libre et gratuite, au Complexe sportif du Château Blanc.

Nous vous attendons nombreux pour vous présenter un catalogue original et quelques livres en français sur un pays à découvrir...

Pour en savoir plus :
visitez le site Internet de la manifestation et connectez-vous à sa page Facebook.

mardi 24 février 2015

Rentrée à Circe pour Cecilia Bonardi [à l'affiche]


La chanteuse Cecilia Bonardi et son groupe Flores Negras se produiront ce samedi , le 28 février 2015, à 21h, à Circe, Córdoba 4335. C'est la rentrée qui se profile à l'horizon.

Entrée : 80 $ ARG

Pour découvrir l'artiste, vous pouvez visiter son site Web ou vous connecter à son profil Facebook.

jeudi 19 février 2015

Une conférence sur les femmes dans le tango pour la Journée internationale de la Femme [ici]

Le samedi 7 mars 2015, à 16h, je donnerai une conférence sur la femme dans le répertoire du tango argentin dans le cadre d'un salon du livre qui se tiendra tout le week-end à la Halle Saint-Pierre, au pied de la Butte Montmartre, au sein du musée de l'Art Brut, à Paris.



La conférence sera précédée d'une dédicace à partir de 14h. La séance de signature reprendra après la causerie jusqu'à 18h.

La causerie prévue pour durer environ 45 mn portera sur quelques archétypes féminins qui hantent le répertoire du tango depuis 1916 jusqu'à nos jours, à travers quelques chansons du répertoire dont je donnerai les tenants et les aboutissants sociologiques et littéraires.

Le salon du livre accueille une quinzaine d'exposants qui sont autant de petits éditeurs indépendants proposant des catalogues qui sortent des sentiers battus. Mon éditeur de référence sera là : les Editions du Jasmin.


Cliquez sur l'affiche pour une résolution haute

Cette troisième intervention 2015 sera l'occasion pour moi de faire une avant-présentation de mon prochain ouvrage, qui paraîtra aux Editions du Jasmin au début de l'été. J'en ai travaillé le tout premier jeu d'épreuves hier après-midi, juste avant de partir à Versailles pour une conférence qui traitait du général San Martín et de son épopée émancipatrice en Amérique du Sud. Et il y aurait sans doute beaucoup à dire sur San Martín et les femmes un 8 mars à venir...

La Halle Saint-Pierre telle qu'elle aime se présenter elle-même
(Saint-Pierre est le saint paroissial de Montmartre)

A l'heure où je publie cette annonce, le salon du livre n'a pas encore publié son affiche. Mais d'ici qu'il le fasse (très prochainement), vous pouvez découvrir ce lieu culturel qu'est la Halle Saint-Pierre en visitant le site Web du musée ou sa page Facebook.

Marche silencieuse sous la pluie après la mort du juge Nisman [Actu]

Pour lire la une, cliquez sur l'image et obtenez une meilleure résolution

Hier, la marche organisée par l'opposition pour réclamer que toute la lumière soit faite sur la mort du procureur Nisman, il y a un mois, a rencontré un vif succès à travers toute l'Argentine. On estime à près d'un demi-million les manifestants à Buenos Aires (malgré une pluie diluvienne comme l'été portègne en a le secret) et à 15 000 ceux qui se sont rassemblés au pied du Monument à l'Hymne national, à Rosario, la seconde ville du pays, alors que beaucoup de gens sont en vacances. A La Plata, le défilé s'étirait sur un kilomètre (10 cuadras comme disent les Argentins). Il y a aussi eu des marches ou des rassemblements importants à Santa Fe et à Córdoba.


Marches silencieuses, sans pancarte militante, sans insulte proférée contre le gouvernement sur les différents parcours (il en est allé un peu autrement sur les réseaux sociaux). L'ex-épouse du défunt procureur, elle-même juge de profession, s'est jointe au cortège dans la capitale fédérale, avec leurs deux filles mineures et son ex-belle-mère. D'après certains observateurs, c'est leur présence à toutes les quatre qui aurait donné à la marche la solennité, la gravité et la retenue qu'on a pu observer et qui est pour le moins exceptionnelle en Argentine, surtout en période électorale. Il est vrai que l'ex-épouse a exigé vendredi dernier, dans une conférence de presse de l'opposition au Congrès, que l'opposition et les médias cessent de politiser le dossier judiciaire que cette politisation immédiate a sensiblement pollué au point que l'enquête est entravée par les nombreux dysfonctionnements de la procédure criminelle en cours.

Derrière la famille s'avançaient plusieurs carrés de personnalités, organisés sur le modèle de la marche parisienne du 11 janvier : il y avait le carré des juges au plus près de la famille, celui des représentants des institutions juives ainsi qu'un carré de responsables politiques de l'opposition tous plus ou moins candidats déclarés à l'élection présidentielle d'octobre, comme Mauricio Macri (droite libérale issue du monde des affaires), Sergio Massa (Frente Renovador), Hermés Binner (socialiste), Julio Cobos (radical, ex-vice-président de Cristina Kirchner pendant son premier mandat), etc. Aucun membre de la majorité n'a pris part à cette marche qui s'annonçait surtout jusqu'au début de cette semaine comme une manifestation explicitement organisée contre le Gouvernement en place.

Depuis vendredi, pendant ces quatre jours fériés qu'on appelle en Argentine vacances de carnaval qu'elle a prolongées avec le mercredi des cendres hier, la Présidente est restée dans l'intérieur du pays où elle a fait plusieurs déclarations vigoureuses pour affirmer que personne ne la détournerait de son chemin. C'est son côté va-t-en guerre qui la dessert si souvent car il accentue les fractures politiques à l'intérieur du pays au lieu de faciliter la conciliation et le rassemblement (1).


Ce matin, les journaux consacrent près de la moitié de leurs articles en ligne à cet événement. La rédaction de Página/12 se montre quelque peu désarçonnée et même vaguement dépitée de la dignité avec laquelle il s'est tenu (son rôle eût été plus facile si l'opposition avait manifesté son agressivité habituelle sur les parcours).

Trois journaux prennent le temps d'écrire sur l'invitation que le groupe parlementaire FpV (Frente para la Victoria, le parti kirchneriste) a adressée au procureur Pollicita à venir exposer sa démarche judiciaire au Congrès lundi prochain (l'audition sera ouverte au public et pourrait être retransmise en direct sur l'un ou l'autre canal national). Ce procureur vient en effet de lancer une information préliminaire contre la Présidente et divers membres du gouvernement qu'il accuse d'avoir voulu soustraire à la justice les auteurs (iraniens) présumés de l'attentat contre l'AMIA en juillet 1994 (voir mon article du 14 février 2015). Ces quotidiens sont Página/12, La Nación et La Prensa.

Clarín a choisi une plongée sur Plaza de Mayo vue de Avenida de Mayo
(la silhouette du Cabildo est reconnaissable à droite. Derrière, on aperçoit le débouché de la rue Bolívar)

Et presque tous rendent compte d'une brève conversation hier au Vatican, au cours de l'Audience générale, d'une délégation des victimes de l'AMIA avec le Pape pour lui demander d'intervenir auprès de l'Iran (dont François a reçu il y a quelques jours la vice-présidente de la République avec toute une délégation féminine) et d'Israël pour faire la lumière sur l'attentat de 1994. Auprès de l'Iran pour que ce pays livre à la justice argentine ceux de ses ressortissants qu'elle veut entendre dans le cadre de l'instruction et auprès d'Israël dont un ambassadeur en Argentine avait un jour laissé entendre, sans la révéler, qu'il connaissait l'identité des terroristes. Sergio Burstein, le chef de cette petite délégation de trois personnes (2), a tenu par la suite une conférence de presse à l'ambassade argentine près le Saint-Siège, comme c'est désormais la coutume, pour dire qu'il espérait qu'un appel au Pape calme les tensions et les divisions civiles qui menacent en ce moment l'Argentine démocratique. Les quotidiens qui en rendent compte ce matin sont Página/12 (par la plume de sa correspondante Elena Llorente), Clarín et La Prensa. La Nación, quant à elle, a publié son article en ligne dès hier, dès qu'elle l'a reçu de sa correspondante à Rome, Elisabetta Piqué (que les lecteurs de ce blog commencent à bien connaître). Le titre de ce premier article sur cet entretien est pour le moins perfide (mais personne ne peut en rendre la journaliste responsable : ce ne sont pas toujours les auteurs des articles qui les titrent, surtout à 11 000 km de distance).

Pour aller plus loin sur la marche elle-même :
Pour le reste, vous pouvez naviguer dans les sites Web de ces journaux à partir des liens ci-dessus ou vous rendre directement sur leur page d'accueil : un lien permanent avec chaque grand titre de la presse nationale, argentine et uruguayenne, est disponible dans la rubrique Actu de la Colonne de droite (partie inférieure, où j'ai rassemblé les liens vers des sites tiers).


(1) A sa décharge, depuis huit ans qu'elle est à la tête de l'Argentine, elle a eu plus que son compte d'avanies, de médisances et d'insultes, non pas tant pour sa politique que pour le seul fait qu'elle est une femme. Ce genre de harcèlement n'a jamais aidé à développer le tact et la diplomatie chez personne.
(2) Ils étaient trois pour représenter la Asociación 18J Sobrevivientes, Familiares y Amigos de las Víctimas del Atentado a la AMIA (association 18 juillet - Survivants, parents et amis des victimes de l'attentat contre l'Amia), une association tranquille qui ne veut pas entrer dans les jeux parfois pervers des institutions confessionnelles et qui s'est portée partie civile dans l'interminable procédure judiciaire qui dure maintenant depuis plus de vingt ans.

mardi 17 février 2015

Vendredi, c'est carnaval à l'ouest avec Ariel Prat [à l'affiche]


Le murguero Ariel Prat animera toute une soirée de carnaval vendredi 20 février 2015 au Club Agronomia Central, dans le quartier homonyme, à 21h30. L'auteur-compositeur interprète partagera la soirée avec la Orquesta Típica Misteriosa Buenos Aires (ce sera pour le tango) et divers équipes de murga des quartiers de Palermo et de Villa Urquiza.

Entrée : 50 $ ARG.

Un buffet est prévu sur place ainsi que des tirages au sort et on dansera !

La soirée est soutenue par le Ministère fédéral de la Culture, celui conduit par la chanteuse Teresa Parodi.

lundi 16 février 2015

Les habitants de San Telmo défendent leur parc Lezama [Actu]

Manifestation devant le palais municipal en avril 2013 (photo Télam)
En noir sur fond blanc on lit : Pas de grille !
En rouge : Association [de riverains] Parque Lezama

Depuis au moins deux ans, le gouvernement municipal de Buenos Aires enferme systématiquement les petits espaces verts derrière des grilles ce qui enlaidit beaucoup la ville, y fait régner un sentiment d'insécurité fictive (jusque dans des quartiers aussi tranquilles que Palermo, Recoleta ou Belgrano) et complique la vie des habitants qui doivent faire à pied tout un détour pour profiter de l'espace vert qui ne dispose plus que d'un seul point d'entrée et de sortie ou pour le contourner pour atteindre l'une ou l'autre des autres rues qui délimitent la place. Et tout ça dans une ville où marcher sur la pelouse ne lui fait aucun mal : l'humidité est telle à Buenos Aires que la végétation n'a rien à craindre des chaussures des hommes. Rappelons que la ville est bâtie sur une zone marécageuse, le delta du Río de la Plata, lui-même formé par la jonction de deux énormes cours d'eau principaux, le Paraná et l'Uruguay (à quoi il faut ajouter au sud de Buenos Aires même le Riachuelo, dont on voit l'embouchure sur le plan, en bas, à droite : le coude vers l'ouest que l'on aperçoit à l'extrémité des quais de Puerto Maderno, bâti sur le Río de la Plata).

Vue satellitaire légendée du parc en juin 2011
C'est l'hiver, ce qui vous explique le manque de verdure
Au sud, vous reconnaissez une zone industrielle

L'année dernière, j'ai constaté avec stupeur que la place du Chili, qui fait face à la Plaza Gran-Bourg, sur laquelle donne le bâtiment de l'Institut National Sanmartinien, à Palermo, avait subi cet affront : les grilles cassent toute l'harmonie du lieu et du mariage entre les statues des grands héros de la vie de José de San Martín en Amérique et en Europe (pendant son exil), avec les arbres majestueux qui s'épanouissent sur cette place, très sereine, malgré la proximité de l'artère automobile qu'est Avenida del Libertador. La même chose est arrivée au Parque del Centenario à Flores et tant et tant d'autres lieux bucoliques en pleine ville.

L'année dernière encore, je n'avais pas mis les pieds au Parque Lezama dans le sud de San Telmo qui était entouré d'engins de travaux, boueux, abîmé de partout par ces travaux qui semblaient très lourds.

Plan de l'est de Buenos Aires
Le parc est au centre, au sud de l'autoroute vers La Plata et à l'est de l'autoroute Frondizi (orange)
Le grand canal bleu correspond à trois bassins du Vieux Port de Buenos Aires
A l'ouest de l'autoroute Frondizi, on reconnaît le départ de la gare de Constitución (gris)

Il s'avère qu'ils avaient pour but de clore le parc (en fait un grand jardin public, délicieux par ailleurs, à l'extrémité duquel on trouve le Musée national historique pour lui donner son nom en français (Museo Nacional Histórico). Mais les habitants des environs ne l'entendent pas de cette oreille et vont manifester en ces jours fériés des jours gras avec une murga de carnaval bien ancrée dans la lutte politique pour dénoncer cette absurdité urbaine. Página/12 raconte par ailleurs dans un article de ce matin comment ils s'organisent pour bloquer les travaux et la pose des grilles, après que la justice portègne leur a donné raison en faisant suspendre l'opération. Les habitants se sont organisés en association de riverains pour ester en justice et organiser la défense d'un accès libre à cet espace vert et de la manière dont ils l'investissent au quotidien. Le jardin sert en effet de raccourci quand on veut le traverser en diagonale pour aller d'une avenue à l'autre...


C'était un grand progrès d'urbanisme au vingtième siècle que les grilles des espaces verts soient abattues. Mauricio Macri ramène sa ville un siècle en arrière alors qu'il faudrait développer la marche à pied et la bicyclette pour lutter contre la pollution automobile dans toute la capitale. Il fait l'inverse. La même chose peut être dite de sa politique d'enchérissement inflationniste des transports en commun qui pèsent de plus en plus sur le budget des ménages qui voient aussi augmenter les impôts locaux. Il faut croire que trop c'est trop !

Une carte postale du Parque Lezama avant 1931
C'est l'année où l'on a abattu cette enceinte et améliorer la circulation pédestre des riverains

dimanche 15 février 2015

Les unes en rouge cardinalice [Actu]

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Comme on pouvait le prévoir depuis l'annonce que Monseigneur Daniel Sturla allait être créé cardinal, les unes uruguayennes ce matin sont consacrées à cette élévation qui a eu lieu hier à la Basilique vaticane...

El Observador, qui gratifie le lecteur d'un épouvantable solécisme dans son gros titre (1), nous offre une intéressante interview du nouveau cardinal, présentée comme ayant été donnée vendredi dans une résidence proche du Vatican alors que la photo d'illustration a été prise dans la salle Paul VI, là où Daniel Sturla pouvait recevoir les félicitations de qui voulait le saluer, comme le dispose le protocole après chaque consistoire pour la création de nouveaux cardinaux (le fond de l'image montre en effet le Christ ressuscité si caractéristique de l'espace scénique de ce gigantesque amphithéâtre). Et c'est aussi El Observador qui nous confie la plaisanterie avec laquelle le Pape François a salué le nouveau prélat après l'embrassade protocolaire : "Que fait un Uruguay par ici sans son mate ?" C'est que les Uruguayens sont connus sur tout le sous-continent pour emporter partout leur mate, l'avoir en main en toutes circonstances ainsi que la thermos, qu'ils tiennent sous le bras, d'où son surnom de tercero brazo (troisième bras)... Que cela fait du bien, un Pape qui sait rire même dans les circonstances les plus solennelles !


Autre interview dans El País, recueillie sans doute dans la salle Paul VI après la tenue du consistoire hier midi.

Quant à la délégation officielle de la République orientale de l'Uruguay, les journaux n'ont pas le même avis : El País déplore l'absence de tout représentant du gouvernement tandis que La República nous raconte qu'une délégation officielle importante entourait le prélat (2).



Pour aller plus loin :
lire l'interview accordée par Daniel Sturla à El Observador
lire l'article de fond de El Observador (avec solécisme)



(1) El Observador observe sans doute beaucoup de choses mais apparemment pas les règles de la syntaxe latine dont la rédaction semble ignorer qu'elle use de déclinaisons. Un complément d'objet direct doit donc être affecté de la désinence d'accusatif et non de nominatif, réservée au sujet. Le titre devrait être Habemus cardinalem comme la formule bien connue : Habemus Papam. O temporis o mores ! Le titreur n'a jamais fait de latin. Et pourtant ça sert dans certaines circonstances quand on veut faire de l'esprit.
(2) En fait, elle se composait de quatre personnes, l'ambassadeur auprès du Saint-Siège, l'ambassadeur en Espagne (pourquoi pas celui en poste à Rome ? les journaux sont muets sur le point) et deux anciens dignitaires d'institutions d'Etat sans être même des anciens ministres. Les autres étaient des pèlerins privés, venus à titre familial ou amical, et des délégués de la conférence épiscopale uruguayenne.

samedi 14 février 2015

Et la République Orientale tourne un œil vers la coupole de Saint Pierre [Actu]

Ce matin à Rome

Même si le scandale judiciaire qui secoue l'Argentine voisine occupe beaucoup la presse uruguayenne depuis hier midi, elle qui a toutes les raisons du monde d'être satisfaite des élections quasi-helvétiques que le pays a connues en octobre et novembre dernier (législatives et présidentielle sans l'ombre d'une fausse note), les journaux regardent vers Rome où l'archevêque de Montevideo, Daniel Sturla, issu de la congrégation salésienne si populaire en Amérique du Sud, est devenu ce matin le second cardinal du pays (son prédécesseur dans ce rang est mort il y a de nombreuses années).

Tous les journaux ont un petit mot pour rappeler la cérémonie pontificale et il y a fort à parier que les unes de demain auront une dominante pourpre.

Pourtant l'été étant l'été, aucun membre du gouvernement sortant ne s'est déplacé pour assister à la cérémonie, laissant l'ambassadeur uruguayen auprès du Saint-Siège exercer seul la représentation du pays. Alors que tous les autres Etats concernés (1) ont envoyé des délégations de haut rang, y compris les petites îles Tonga, représentées par leur roi en personne...

La première photo utilisée aux aurores par la presse uruguayenne
La cérémonie s'est tenue à 11h (heure de Rome)

Pour aller un tout petit peu plus loin (mais pas beaucoup) :
lire l'article de El Observador, qui a intégré sur son site Internet deux vidéos, celle de l'imposition des insignes du cardinalat et une interview antérieure du nouveau cardinal.
Tous ces quotidiens ont modifié les illustrations de leurs articles après la cérémonie dans la basilique Saint Pierre qui peut être visionnée sur l'un des sites Internet du Vatican (Vatican Player).



(1) Enfin, pas la France au moins. Dont le cardinal entrant est un membre de la Curie et non un évêque en charge pastorale d'un diocèse national. Et même dans ce cas-là, je doute fort que le gouvernement ait envoyé quelqu'un. L'installation d'un Pape, c'est une chose. La double canonisation de deux papes, passe encore mais une remise de barrette...

Un hommage à Luis Alberto Spinetta à Buenos Aires et autour pour l'anniversaire de sa mort [à l'affiche]


Aujourd'hui et pour le reste du mois de février, des artistes s'unissent pour rendre hommage à Luis Alberto Spinetta, l'un des plus grands rockers argentins, et marquer l'anniversaire de sa mort.

Ils ont ouvert une page Facebook et le supplément Rollings Stones de La Nación en parlait hier. Le quotidien El Día, journal local de la Province de Buenos Aires, à La Plata, y consacre lui aussi un assez long article.


A Buenos Aires même, ce sera pour le dernier jour du mois. D'ici là, le festival investit les villes de Quilmes, Varela, Bernal et Solano.

Spinetta était un auteur-compositeur interprète qui a durablement marqué les musiciens contemporains, y compris ceux qui ont versé dans le tango au lieu de maintenir vivante la jeune tradition du rock argentin, qui fête cette année son cinquantenaire.

Le parquet fédéral ouvre une information judiciaire contre le Gouvernement [Actu]


Sur la base du réquisitoire émis par le juge Nisman quelques jours avant qu'il ne soit retrouvé baignant dans son sang dans sa salle de bain, le parquet fédéral argentin a lancé hier midi une enquête préliminaire en matière pénale contre la Présidente Cristina de Kirchner et plusieurs membres de son gouvernement, dont le ministre des affaires étrangères, Héctor Timerman.

A la Casa Rosada, on parle de coup d'Etat judiciaire dans la mesure où la magistrature est en majorité très hostile à Cristina, qui a voulu faire évoluer le fonctionnement de la Justice pour la rendre plus démocratique, y compris dans son recrutement, et où les faits illégaux qui sont invoqués pour justifier l'enquête à son encontre ne sont pas avérés. Or en droit, on ne peut pas poursuivre une personne en l'absence de fait avéré de caractère répréhensible. Ici, on accuse la présidente d'avoir signé un accord bilatéral avec l'Iran, accord ratifié comme le veut la Constitution par un vote du Congrès (qui est donc l'expression du peuple souverain), sous prétexte qu'il cacherait une tentative, qui de toute façon n'a abouti à rien, de soustraire à la justice argentine des citoyens iraniens soupçonnés d'avoir commis l'attentat contre l'AMIA en 1994 (85 morts à Buenos Aires et 300 blessés, dont plusieurs sont handicapés à vie). L'accord aurait accompagnés de clauses secrètes, qui ne sont pas produites par l'accusation et qui auraient prévu une sorte de troc du pétrole iranien contre du grain argentin, échange dont il n'existe pour le moment aucune espèce de preuve qu'il ait jamais eu lieu (1). L'accusation repose en outre sur des conversations supposées entre la présidente et un officier du renseignement argentin qui aurait lui-même téléphoné à des personnes qui auraient averti les suspects qui se sont mis à l'abri. Or l'ordre de capture internationale émis contre eux par l'Argentine est toujours en vigueur et Interpol reste chargée de procéder à l'arrestation dès que celle-ci sera possible.



En droit, il semble donc bien inexplicable qu'on lance ainsi une enquête contre un chef d'Etat en exercice et démocratiquement élu pour des faits qui n'ont pas eu lieu, qui ne peuvent donc pas être démontrés et dont l'intention non suivie d'exécution, si elle a existé, n'est pas répréhensible (et ne peut pas l'être en tout état de cause puisque que dans un Etat de droit, seule l'exécution d'un acte illégal peut donner lieu à condamnation, laquelle peut être plus sévère si l'accusation prouve qu'il a été commis à dessein et non par accident – mais l'intention en elle-même ne constitue pas un délit).

L'Argentine est en campagne électorale. Cristina de Kirchner ne peut pas se représenter alors pourquoi s'en prendre à elle de manière aussi légère ? Parce que son successeur probable, Daniel Scioli, semble avoir quelques chances d'être élu si en effet il se présente ? Peut-être mais c'est pousser le bouchon bien loin. Scioli était le vice-président de Néstor Kirchner, en 2006, lorsque celui-ci a pris acte des résultats de l'enquête diligentée par Nisman, qui désignait le hezbollah et l'Iran comme commanditaires de l'attentat. Beaucoup de politologues distingués du monde industrialisé, notamment certains Français, s'étaient alors gaussés de ce chef d'Etat qu'avec leur morgue habituelle ils méprisaient (2) en le traitant de paranoïaque grandiloquent (3). Plus tard, l'accord avec l'Iran a été signé dans l'espoir de solder ce compte, non pas pour laisser échapper les suspects mais pour que la République islamique puisse au contraire accepter de les livrer, comme le fit Khadafi avec les terroristes libyens recherchés par la Grande-Bretagne. Le fait que l'Iran n'ait pas répondu comme la Libye ne peut en aucun cas, en soi, être imputé au gouvernement argentin !

Autrement dit, il ne s'est rien passé [de répréhensible] et c'est pourquoi la Présidente doit passer en jugement. Une histoire de fou.



Avant-hier, l'ex-épouse de Nisman avait pris la parole au Congrès lors d'une conférence de presse de parlementaires d'opposition et elle a demandé à ces mêmes élus, parmi lesquels elle se tenait pourtant et qui l'avaient invitée à prendre la parole, et aux médias (de l'opposition eux aussi) de cesser de politiser l'affaire. Elle-même magistrat, elle constate, un mois après la mort du père de ses enfants, que la politisation outrancière du dossier a déjà beaucoup nui à l'enquête, qu'elle a brouillé les pistes et que le secret nécessaire à l'instruction a été violé sur des points d'une gravité insigne (au risque que les criminels, s'il y en a, se mettent à couvert ou préparent des alibis en béton sachant ce que savent les enquêteurs). Mais elle a protesté en pure perte, puisque le jeu pervers continue encore aujourd'hui avec Clarín, La Nación et La Prensa, qui font état de nouvelles découvertes d'indices hier dans l'appartement du juge (fouillé une nouvelle fois quatre semaines après les faits)...

Avant-hier encore, les services de communication de l'AMIA ont diffusé par mail une pétition réclamant l'exclusion de Héctor Timerman de l'institution, alors même qu'il est préjugé innoncent puisqu'il n'est pas jugé (4). Certes en Argentine, l'ensemble des institutions juives se sont toujours montrées hostiles au gouvernement des Kirchner en particulier (sauf en 2006, cherchez l'erreur !) et à la gauche en général. Depuis la Guerre des Six Jours, elles s'inscrivent dans une droite libérale assez dure, très proche des Etats-Unis qui soutiennent Israël, dans toutes les configurations géopolitiques possibles et imaginables.

Dans son interview à La Nación, en décembre dernier, le Pape François avait demandé qu'on laisse le gouvernement sortant terminer son mandat dans la paix civile et que les élections se passent dans un climat serein. Le moins qu'on puisse dire est qu'il n'a guère été écouté !

Aujourd'hui, tous les journaux développent ces informations sur plusieurs pages. Je me contenterai de vous renvoyer aux articles principaux :
lire l'article de Página/12 (qui soutient le gouvernement)

En Uruguay, on peut lire l'article de La República pour avoir un regard extérieur au Cône Bleu.

Pour éclairer le propos, le lecteur pourra revenir sur deux analyses juridiques publiées en janvier par Página/12 et dont j'ai fait état sur ma page Facebook : l'une, le 22 janvier, est dressée par Raúl Zaffaroni, ex-membre de la Cour Suprême qui se lance à partir de la rentrée comme avocat pénaliste occasionnel, l'autre, le 25 janvier, a été établie par le juriste Julio Maïer. Ils font tous les deux la même analyse technique du réquisitoire écrit par Nisman : il ne repose sur le fruit de l'imagination du magistrat et par ailleurs sur rien de tangible (5).

L'acharnement du parquet est tel qu'un autre magistrat vient de déclencher une autre procédure pénale contre trois ministres fédéraux pour la mort par dénutrition d'un enfant dans la Province du Chaco, au nord-ouest du pays. L'accusation porte sur un homicide commis par omission. L'enfant était atteint de malnutrition et de tuberculose. Il était traité à l'hôpital (public) qui l'a renvoyé chez lui (sans doute quand il n'y avait plus d'espoir). Il est décédé au début janvier. Il avait sept ans. En quoi un ministre, qui plus est fédéral, peut être tenu pour responsable par omission d'un pareil drame ? L'un des ministres inculpés, Alicia Kirchner, ministre des Affaires sociales, n'est autre que la belle-sœur de la Présidente, la sœur de Néstor Kirchner et la plainte, qui a donné lieu à cette procédure, a été déposée par un militant du Frente Renovador, le parti d'opposition dirigé par Sergio Massa, dont je vous ai déjà parlé à plusieurs reprises dans ces colonnes, notamment pour son attaque récente contre les ONG des droits de l'homme dont il souhaite suspendre l'action s'il est élu président.

Sur cette inculpation absurde, lire l'article de La Prensa.



(1) Le gouvernement a d'ailleurs publié des chiffres qui montrent que les échanges commerciaux avec l'Iran sont presque inexistants et il a expliqué que l'Argentine ne peut pas acheter du pétrole à l'Iran parce qu'elle ne dispose pas de la bonne infrastructure technologique pour le raffiner.
(2) C'est comme dans Les Lettres Persanes de Montesquieu : comment peut-on être argentin ! Et si en plus on est péroniste, laissez-moi rire... Et ces intellectuels de plateau télé prétendent nous aider à comprendre un monde qu'ils tiennent en si piètre estime...
(3) Pourquoi le hezbollah s'en prendrait-il, n'est-ce pas, à un pays autre que les nôtres. Les seuls assez importants pour mériter d'être pris pour cibles sans doute. Heureusement, l'élection du Pape a mis un frein à l'arrogant caquet de ces glorieux imbéciles.
(4) L'AMIA est une mutuelle d'assurance tous risques qui rassemble la communauté juive argentine en même temps qu'une institution représentative équivalente aux consistoires établis par Napoléon en Europe. Elle exerce certains pouvoirs de type rabbinique très importants pour la vie des pratiquants : la gestion des cimetières juifs, celle des mariages religieux entre juifs et non-juifs ou des critères qui rendent délibérément impossible en Argentine la conversion au judaïsme, pour des raisons uniques au monde liées à un scandale de traite des Blanches dans les années 1930 impliquant de faux rabbins, une fausse synagogue, de faux mariages religieux et de très réelles et très nombreuses prostituées que des proxénètes déguisés en marieurs allaient chercher en Pologne. Un scandale dont la communauté croyante semble ne s'être jamais remise.
(5) Aujourd'hui, selon certains analystes argentins, le juge Nisman aurait été manipulé par deux officiers des renseignements argentins qui échappaient totalement au contrôle de leur hiérarchie et trempaient depuis plusieurs années dans des affaires louches très lucratives. Il est un fait que quelques jours après la découverte du corps du juge, assassiné ou suicidé, la Présidente a dissous les services secrets (qui avaient un ADN assez contestable, cet organisme ayant été fondé par et pour la CIA en pleine guerre froide) et décidé de le remplacer par un organisme plus conforme à un Etat de droit (le projet de loi a été envoyé au congrès dans des délais record). De là à penser qu'il s'agit d'un coup fourré de quelques barbouzes pour court-circuiter le gouvernement et l'empêcher de dissoudre le SI (Servicio de Inteligencia) ou l'inverse...