mardi 3 novembre 2015

Conférence donquichottesque et sanmartinienne à Azul [à l'affiche]


Depuis le 27 octobre 2015, au cœur de la Province de Buenos Aires, la ville de Azul déploie pour la neuvième fois consécutive son festival cervantin autour du mythe littéraire de Don Quichotte avec une centaine de manifestations les plus diverses. Ce soir, ce sont deux monstres médiatiques qui uniront leurs talents sur la scène du Teatro Español autour du thème San Martín lecteur de Don Quichotte : l'historien vulgarisateur Felipe Pigna et le dessinateur Miguel Rep, l'un va disserter autour de l'un de ses sujets favoris (1), l'autre va dessiner en direct. Cela va être du spectacle, les deux en connaissent un bout !


Ce festival rassemble des activités de toutes sortes, depuis la conférence de littérature ou d'histoire jusqu'à celle sur l'économie ou la politique, en passant par le concert, le cinéma, le théâtre, les arts plastiques, la danse, des cours et des ateliers et la liste n'est pas close. Certaines activités sont gratuites, d'autres payantes mais elles restent très bon marché (30 $ ARG). L'événement se déploie pendant trois semaines jusqu'au 15 novembre prochain dans cette agglomération perdue dans la pampa d'environ 60 000 habitants. La municipalité est acquise au kirchnerismo (sans quoi il n'y aurait pas cette programmation au cachet FpV bien reconnaissable).

La couverture du programme affiche un détail du monument à Don Quichotte
qui orne la place principale de la cité 

La manifestation s'enracine dans l'histoire de cette ville, qui a grandi autour d'un fort fondé là par Juan Manuel de Rosas (1793-1877) en 1832 et son grand érudit, Bartolomé José Ronco (1881-1952), brillant juriste doublé d'un bibliophile distingué, qui illustra par son savoir encyclopédique la prospère cité du début du XXème siècle, avant de léguer aux 30 000 habitants répartis en ville et dans sa campagne environnante ses impressionnants fonds bibliographiques, dont une collection de 300 éditions historiques (2) du Don Quichote de Cervantes (3) et une non moins gigantesque collection consacrée au Martín Fierro de José Hernández (4), l'épopée paysanne (gauchesca) qui est en Argentine la pierre de fondation du patrimoine littéraire national, rôle que joue en Espagne le roman de chevalerie de Cervantes. Les fonds constitués par ce collectionneur hors pair forment plusieurs bibliothèques réparties dans la petite ville de campagne.

Pour aller plus loin :
accéder à la fiche du spectacle sur le site Internet du festival
consulter le site Web du festival



(1) Comment San Martín, au cours de ses campagnes, lisait des extraits de Don Quichote à la troupe, qui ne savait ni lire ni écrire, afin d'aider ses soldats, sans distinction de couleur de peau, à bénéficier de la culture classique qui était celle des officiers. Cette idée tourne un peu à l'image d'Epinal à force d'être répétée à longueur d'antenne, à la radio et à la télévision, mais elle fait partie du mythe de San Martín vu par les revisionistas (ces historiens qui ruent dans les brancards de l'histoire officielle nationale).
(2) L'une d'entre porte encore l'ex-libris d'une reine d'Espagne ! Une autre édition, en huit tomes, vient d'Anvers où elle a été imprimée en 1697... C'est le plus ancien ouvrage de cette bibliothèque exceptionnelle.
(3) C'est la plus importante collection en dehors de l'Espagne. Elle vaut à Azul le titre enviable de Ciudad Cervantina, délivré sous l'autorité de l'UNESCO.
(4) Epopée en vers octosyllabes dont le premier tome a été publié en 1872. La seconde partie a été publiée en 1879.