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jeudi 1 novembre 2012

En Argentine, le droit de vote s'ouvre aux mineurs [Actu]


C'était dans l'air depuis de nombreux mois et à peu près tout le monde, y compris des kirchneristes convaincus (1), reconnaissait, in petto ou ouvertement, qu'il s'agissait d'une opération démagogique destinée à assurer l'élection du successeur de Cristina Kirchner au prochain scrutin présidentiel, qui devrait opposer un peroniste K, ne bénéficiant pas de l'aura ou du charisme de la Présidente actuelle qui ne peut pas se représenter, à Mauricio Macri, qui, à défaut d'un bon bilan à la tête de Buenos Aires, joue à merveille de son physique avantageux et profite sans scrupule de son immense fortune personnelle (comme Berlusconi en Italie) pour monter toutes les opérations de communication utiles, à la manière des campagnes électorales des Etats-Unis, où l'argent est roi, bien plus que les idées, comme on le voit en ce moment.

La Chambre des Députés argentine, après le Sénat il y a une quinzaine de jours, a voté l'extension du droit de vote aux élections politiques, municipales, provinciales et nationales, aux mineurs à partir de 16 ans révolus.

La mesure est d'autant plus mal venue qu'elle va immédiatement renforcer les arguments de ceux qui veulent abolir le régime pénal des mineurs et l'assimiler à celui des majeurs, à partir de 16 ou 14 ans, ce qui ne laisse pas beaucoup d'espoir aux enfants de se sortir d'un mauvais pas une fois franchies certaines limites légales.

Le vote a été acquis à la Chambre par 131 voix pour, 2 voix contre et 1 abstention, tandis que l'opposition a courageusement déserté l'hémicycle juste avant le scrutin, sous prétexte d'une prise de bec avec un chef de file de la Campora, le mouvement de la jeunesse kirchneriste (2), réputé pour la radicalité de ses prises de position (ses adversaires,de droite et de gauche, parlent eux du "fanatisme" du mouvement).

Ce droit de vote n'est pas assorti de l'obligation de voter comme pour les majeurs. Il reste un droit optionnel que les jeunes peuvent choisir, normalement par eux-mêmes, d'exercer ou non. Il n'est donc pas assorti d'une sanction en cas d'abstention, ce qui est une vaste blague car si le vote des majeurs est bien obligatoire depuis 1912, les sanctions ne sont jamais appliquées (l'Argentine n'est pas en Belgique) et l'abstention atteint des taux invraisemblables lors de certains scrutins. Même la dernière élection présidentielle, en octobre 2011, n'a pas fait le plein des inscrits sur le registre.

Le Gouvernement argentin présente ce nouveau droit comme une avancée de la démocratie en ce centenaire de la loi Saenz Peña, qui établit le droit de vote universel (pour les hommes majeurs et argentins de naissance, sans acception de fortune), secret (auparavant, on votait à main levée ou par acclamation) et obligatoire. Les deux premiers critères ont tout de suite été respectés en période constitutionnelle. Cent ans plus tard, le troisième n'est toujours pas entré dans les mœurs.

La nouvelle loi s'appliquera cependant au premier scrutin de 2013.

Pour aller plus loin :
lire l'article de Página/12 (kirchneriste, favorable à la réforme électorale)
lire l'article de Clarín (défavorable)
lire l'article de La Nación (défavorable aussi).


(1) Ceux-ci n'en pensaient pas moins mais n'osaient rien dire à haute voix de peur de renforcer l'opposition au lieu de remonter le ressenti (désastreux) du terrain jusqu'aux instances dirigeantes du parti. C'est dire si les citoyens croient leur démocratie encore bien fragile qu'il leur faille laisser passer des aberrations de ce type plutôt que de peser sur le Gouvernement pour lui faire changer son fusil d'épaule.
(2) La Campora est une organisation politique présidée par Máximo Kirchner Fernández, le fils de la Présidente. Ce côté familial et donc clanique est pour beaucoup dans la mauvaise image qu'a la Campora en dehors du kirchnerisme. Le nom de l'organisation est une allusion à la bonne vieille veste de campagne trois-quart, en général de couleur verte, que portait toujours le président Kirchner, avec une décontraction négligée qui a participé à le rendre très populaire (voilà un homme qui n'était pas un poseur, qui avait su rester simple).