Attention : Fausse troupe ukrainienne de ballet en tournée avec Le Lac des Cygnes

mardi 28 mai 2024

Des réserves alimentaires gardées en cas de catastrophe [Actu]

"Notre pain de ce jour", titre Página/12
en citant un verset du Notre Père
En haut : la crise gouvernementale
Cliquez sur l'image pour une meilleure résolution


Depuis plusieurs jours, la presse se fait l’écho d’un scandale social qui met en lumière le caractère volontaire, d’aucuns disent cruel ou sadique, de la politique menée par Mileí contre les plus précaires partout en Argentine : cinq mille tonnes de nourriture (farine, lait en poudre, sucre, conserves, yerba mate, huile, etc.) seraient conservées dans deux entrepôts nationaux, l’un dans la banlieue de Buenos Aires, l’autre dans celle de Tucumán. Les explications données par le ministère du Capital Humain et d’autres autorités nationales n’ont pas cessé de se contredire. La dernière en date est particulièrement cynique : ces denrées seraient destinées à une intervention de secours en cas de crise majeure, la faim qui sévit un peu partout dans les secteurs pauvres du pays n’étant donc pas considérée comme répondant à cette définition.

Au-dessus de la photo de Nadal quittant Roland Garros,
le remaniement gouvernemental expédié par le président
avant un énième voyage aux USA
Cliquez sur l'image pour une haute résolution

Or des « crises majeures », inondations, tempêtes catastrophiques, il y en a bien eu : dès le 16 décembre, six jours après l’investiture du président, une tempête a ravagé Bahía Blanca, sur la côte au sud de la Province de Buenos Aires, puis ce fut le tour de Corrientes et de la capitale elle-même d’être balayées par des vents qui ont laissé les villes sens dessus-dessous, sans oublier de graves inondations dans le nord-est du pays, dans la continuation territoriale de celles, exceptionnelles par leur amplitude, qui ont affecté le sud du Brésil. Et pourtant, aucun déstockage n’a été ordonné ni opéré. Il n’y a aucune distribution de vivres dans les zones affectées, à part deux petites livraisons anecdotiques sans aucun rapport avec l’ampleur des sinistres en cours.

Lors du traditionnel Te Deum du 25 mai, l’archevêque de Buenos Aires a dit son fait au président et à son gouvernement, assis au premier rang, au grand complet, dans la cathédrale métropolitaine comme l’exige la coutume depuis le 25 mai 1811. Le prélat a même élevé la voix assez fort pour que toute la presse s’en fasse l’écho le lendemain. Il a parlé d’une situation d’« urgence alimentaire » pour le pays. En pure perte : ses réclamations n’ont nullement troublé l’autosatisfaction que Mileí étale partout où il passe et qu’avec son sourire carnassier, il a exhibée l’après-midi même à Córdoba, où une foule clairsemée était venue pour acclamer son discours. A tel point que le lendemain, dimanche de la Sainte-Trinité, une semaine après la Pentecôte, le président de la Conférence épiscopale d’Argentine, ancien responsable de la politique sociale de l’Église au sein de l’institution, y est allé de sa propre déclaration sur les réseaux sociaux, avec vidéo sur Youtube. Pour marteler la même chose que l’homélie de la veille.

En une, la photo de l'attaque contre le camp de réfugié à Rafah
En haut : la crise gouvernementale
Cliquez sur l'image pour une haute résolution

Dimanche soir, même la très conservatrice animatrice d’un talk-show très suivi d’une chaîne commerciale, Mirtha Legrand, qui porte allègrement ses plus de 90 printemps sur les plateaux de télévision, s’est émue du scandale au sujet duquel elle a parlé d’attitudes « criminelles » de la part des autorités qui retiennent ces aliments, alors que, parmi ses invités d’un soir, se trouvait l’actuelle ministre des Affaires étrangères, Diana Mondino, qui a donné sa propre explication en contradiction avec les précédentes : il y aurait trop de corruption dans le réseau caritatif des associations qui animent les soupes populaires auxquelles il semblerait que ces vivres aient été bel et bien destinés. Cette réserve alimentaire a été constituée et entretenue par le précédent gouvernement qui distribuait régulièrement des secours alimentaires aux organismes d’assistance sociale, privés depuis décembre de subventions financières et de livraisons en nature. Ce qu’il y a dans les hangars était là pour faire la soudure au moment où les équipes changeaient.

Hier, un juge fédéral a ordonné en référé au ministère du Capital Humain de produire dans les 72 heures un inventaire précis des réserves disponibles puis de publier un calendrier de livraison aux soupes populaires qui attendent. Le ministère en question a aussitôt interjeté appel. Tant que cette procédure n’aura pas abouti, ces gens ne bougeront donc pas le petit doigt pour venir en aide à ceux de leurs compatriotes qui ont faim.

Même dans la presse de droite, on commence à se demander quel est le but réel de cette politique qui accumule les « impairs » diplomatiques et qui s’acharne contre les plus pauvres alors que leur nombre aurait augmenté de 18 % au cours des deux derniers mois selon une étude de la très conservatrice (elle aussi) Université catholique d’Argentine, à Buenos Aires. D’autant qu’on a aussi découvert que le gouvernement sortant avait acheté une cinquantaine d’utilitaires neufs pour aider les provinces à effectuer des distributions sur leurs territoires. Ces camionnettes, qu’il n’a pas eu le temps de livrer à leurs bénéficiaires, attendent depuis dans un garage et s’abîment lentement au lieu d’être utiles là où on les attend.

En haut : la crise politique
En bas, un accident de montagne à San Juan
a fait un mort
Cliquez sur l'image pour une haute résolutio

Tout cela n’a pas empêché le président de reprendre un avion hier pour se rendre en Californie où il entend rencontrer Mark Zuckerberg et à nouveau Elon Musk, avec prise de photo pour ses réseaux sociaux personnels, et où il doit recevoir un énième prix d’un énième obscur think-tank libertarien ou ultra-libéral sans la moindre reconnaissance internationale. Juste avant de s’embarquer dans l’avion présidentiel pour un énième voyage privé, avec sa frangine, aux frais du contribuable, il a viré l’équivalent du Premier ministre et laissé le gouvernement en plein remaniement-déménagement. Au bout de six mois de mandat, cela laisse à penser qu’il se contrefiche complètement de son pays, de la politique et de la diplomatie. Tout ce qui semble l’intéresser, c’est sa propre notoriété et la jouissance d’un train de vie dispendieux. Comme un candidat de téléréalité qui ne rêve que d’être connu et riche ! Pour en faire quoi ensuite, c’est le dernier de ses soucis.

© Denise Anne Clavilier


Pour aller plus loin :

lire l’article de Página/12 hier
lire l’article de La Prensa hier (sur Mirtha Legrand, qui a aussi plaidé la cause de la Casa del Teatro, une institution caritative professionnelle fondée par la femme d’un président des années 1920, qui était cantatrice : la Casa del Teatro vient en aide aux anciens de la scène dont les vieux jours sont difficiles)
lire l’article de Página/12 d’aujourd’hui sur la décision du juge de première instance
lire l’article de La Prensa sur le même sujet
lire l’article de Clarín sur l’appel interjeté par le ministère.


Ajout du 29 mai 2024 :
Ce matin, à la une de Página/12, ce dessin de Daniel Paz et Rudy

La réceptionniste : Monsieur Musk, vous avez commandé du lithium ?
Musk : Oui.
Elle : Le livreur est arrivé
(Traduction © Denise Anne Clavilier)
Le livreur en question n'est autre que Mileí
(un peu difficile à reconnaître pour nous, c'est vrai)

lire aussi cet article de Página/12 sur les explications que la Casa Rosada a soufflé à quelques journalistes amis, alors que le président est à l’étranger, pour expliquer le limogeage du Premier ministre… cela vaut son pesant de cacahuètes !