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vendredi 11 juillet 2025

Mileí attaque une historienne qui rejette ses manipulations [Actu]

En 2002, la jeune chercheuse présentait son livre
sur les relations de Cristina Kirchner avec l'histoire nationale


Hier, dans une émission de télévision, Camila Perochena (ci-dessus), une historienne, probablement pas une militante de gauche, jeune (38 ans) et bien formée à la Universidad Nacional de Rosario, où elle a décroché un titre qui pourrait être l’équivalent du CAPES en France, et occupant maintenant un poste d’enseignante en histoire dans une université privée à Buenos Aires, la Universidad Torcuato di Tella, a eu un vif débat avec l’avocat José María Posse, que Javier Mileí a arbitrairement nommé en avril 2024 directeur de la Casa Histórica de Tucuman, la maison coloniale où la déclaration d’indépendance a été votée et signée le 9 juillet 1816.

Ce monsieur, qui n’a aucune compétence ni en histoire ni en muséologie et dont la nomination a été saluée par un concert de critiques de la part des milieux académiques légitimes en la matière, a remis sur le tapis une vieille rengaine de Mileí qui proclame à qui veut l’entendre qu’en 1910, l’Argentine était une grande puissance mondiale. C’est archi-faux et toutes les archives de l’époque le démontrent à l’envi. L’Argentine avait seulement un PIB très élevé dont seule une petite minorité d’ultra-riches tiraient profit en s’en mettant plein les poches, après avoir confisqué le pouvoir politique puisque le pays était alors régi par le suffrage censitaire (masculin, cela va sans dire).

De la même manière que Trump voudrait faire revenir son pays à ce qu’il appelle « l’âge d’or », c’est-à-dire dans son esprit les années 1880-1912, ce qui relève du grand n’importe quoi, Javier Mileí (MAGA lui aussi, avec un premier A pour Argentina) voudrait revenir à la situation imaginaire, enjolivée par ses soins, de 1910, quand un certain nombre de dignitaires européens, invités par la République argentine, étaient venus participer aux célébrations du centenaire de la Révolution de Mai.

Camila Perochena,lui a donc répondu que ce n’est pas le revenu national rapporté au nombre d’habitants qui fait d’un pays une puissance internationale. Le revenu économique national et la puissance dans le monde n’ont en effet que peu de liens de causalité. La puissance n’est pas fondée sur l’économie en tant que telle, comme le croient Trump et Mileí. Elle se construit sur un écheveau de compétences, notamment politique, militaire, diplomatique et culturel, or celles-ci manquaient complètement à l’Argentine du début du 20e siècle. Elles continuent d’ailleurs à lui manquer aujourd’hui, en dépit de ce que veulent bien proclamer Macri hier et Mileí maintenant, et ce n’est pas la politique présente et le comportement grossier du chef de l’État qui vont pallier ces défaillances.

Camila Perochena a conclu que les historiens et les musées n’avaient pas vocation à servir l’idéologie du dirigeant du moment mais devaient permettre de comprendre le passé.

Roy Hora répond au message insultant de Mileí, qu'il traite de "primitif"
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Furieux d’être contredit sur ce point sur lequel il fonde tout son discours politique, Javier Mileí a donc ouvert son compte X et y a déversé, sans retenue, un flot d’insultes et de critiques désarticulées, acerbes et ridicules sur cette femme qui semble avoir de son métier et de sa discipline une conception exceptionnellement saine puisque ce qu’on appelle histoire en Argentine n’est pas encore une discipline scientifique reconnue comme telle mais reste, la plupart du temps, au pire, un outil de propagande (à gauche comme à droite) et, au mieux, un espace sans méthodologie, où l’imaginaire et la fiction se donnent la main pour écrire le roman national.

La sortie furibonde du président lui a valu une volée de bois vert dans la presse et dans les médias sociaux de la part d’historiens et d’intellectuels que ce comportement honteux à la tête de l’État indigne à juste raison. D'autant que c'est la deuxième fois en moins d'un mois que le président s'en prend à un historien reconnu : il y a quelques jours, il a viré Gabriel di Meglio de la direction du Museo Histórico Nacional de Buenos Aires (il se murmure qu'il se venge de son refus de sortir du musée le sabre de San Martín dont Mileí aurait rêvé de se servir lors de la cérémonie du 25 mai dernier, la première fête nationale argentine).

© Denise Anne Clavilier


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