"Le Plan Pourboire", du verbe je pourbois, tu pourbois, il pourboit ! Le jeu de mots fonctionne aussi en français (un peu tiré par les cheveux) |
La
députée de la majorité, Elisa Carrió, qui dirige l'une des
composantes mineures de la coalition gouvernementale Cambiemos, a
proposé avant-hier, en direct, sur la chaîne toute info TN (groupe
Clarín), une étrange solution pour lutter contre la pauvreté. Elle
a invité la classe moyenne et la classe supérieure à se montrer
plus généreuses dans la distribution des pourboires. Comme vous
pouvez l'imaginer, cette idée surréaliste et incohérente a suscité
beaucoup de moqueries dans tout le spectre politique, avec un large
avantage dans l'opposition qui serait morte de rire si la situation
sociale n'était si pathétique.
Un
garçon de restaurant de La Plata a aussitôt raconté sa propre
expérience dans le domaine avec l'élue : pour une addition de
300 pesos, elle lui avait fort peu généreusement laissé 5 pesos et
quelques centimes. Or en Argentine comme ailleurs, un pourboire digne
de ce nom se calcule à environ 10% de l'addition. On était donc
loin des 30 pesos. C'est d'autant plus choquant qu'il est de
notoriété publique que les élus reçoivent de très grasses
rémunérations (on ne parle même pas d'indemnités comme on le
fait, pudiquement, en France).
Página/12
s'en donne donc à cœur-joie ce matin, avec des titres comme "Sans
pluie d'investissements, allons-y pour les pourboires" ou "Face à la
crise, donne un avis PRO" (nom du parti qui pèse le plus dans
Cambiemos) avec un jeu de mot entre opinar (donner son avis) et
propinar, un néologisme construit sur propina (pourboire)...
La
Nación n'en dit pas un mot et préfère présenter, sous la forme
religieuse des 10 commandements, les 10 solutions envisagées par le
président pour couper dans les dépenses publiques. En revanche,
Clarín ne peut pas ne pas rendre compte des propos de la députée
et de l'avalanche de critiques qui se sont abattues sur elle après
cette énième sortie provocatrice dans les studios de télévision
du groupe. C'est une spécialiste. Et pourtant, quand elle a du temps
de parole, elle est loin de tenir un discours idiot (j'ai même été
étonnée un jour que je l'écoutais sur une chaîne privée).
D'aucuns la tiennent pour folle, d'autres pensent qu'elle est surtout
une serial-gaffeuse.
Daniel
Paz et Rudy n'auraient pas pu rater l'occasion. Voici leur vignette
du jour dont le décor suggère que la scène pourrait se passer à
Télam (voir mon article du 27 juin 2018)
Lui :
Pour combattre la récession, Carrió propose de laisser un pourboire
Elle :
Tu me crois si je te dis que je regrette l'époque où ils
promettaient des investissements ?
Traduction
©
Denise
Anne Clavilier
Pour
aller plus loin :
lire
l'article principal de Página/12, que la rédaction a illustré
d'une photo publiée sur Twitter, en 2010, où l'on voit le
président, alors chef du gouvernement de la Ville de Buenos Aires,
donner un pourboire de 2 pesos (c'était déjà une misère, surtout
au regard de la richesse qui est la sienne et celle de sa famille)
lire
l'entrefilet où Página/12 se paye la tête de la députée
lire
l'article de La Nación sur les mesures envisagées
lire
l'article de La Nación sur le malaise dans les forces armées
auxquelles après avoir beaucoup promis depuis deux ans et demi, le
gouvernement vient d'accorder des augmentations riquiqui, alors que
les soldes avaient été quasi-gelées pendant les mandats des époux Kirchner, obsessionnellement anti-militaristes
lire
l'article de Clarín
Ajouts du 5 juillet 2018 :
lire cet article de Página/12 sur les explications malheureuses que Lilita (Elisa Carrió) a voulu donner lors de son temps de parole dans l'hémicycle. Cette grande pourfendeuse de la corruption a fait un énorme lapsus en disant qu'elle estimait qu'il fallait maintenir les pourboires (propinas) et les dessous-de-table (coimas). Fou rire à la rédaction !
lire cet entrefilet de La Prensa
lire cet article de La Nación, qui irait de son éclat de rire si on la poussait un peu
Ajout du 6 juillet 2018 :
lire cet éditorial de Julio Maier dans Página/12 sur cette proposition de Carrió. Julio Maier est un professeur honoraire de droit pénal, qui a travaillé à l'Université de Buenos Aires (UBA)
Ajout du 7 juillet 2018 :
Les anecdotes sur la relation de Lilita avec l'argent se multiplient. Hier, c'est un chauffeur de taxi qui a raconté sur les ondes d'une radio kirchneriste que la députée avait un jour tenté de descendre sans payer la course. Lire à ce propos l'article de Página/12.
Ajouts du 5 juillet 2018 :
lire cet article de Página/12 sur les explications malheureuses que Lilita (Elisa Carrió) a voulu donner lors de son temps de parole dans l'hémicycle. Cette grande pourfendeuse de la corruption a fait un énorme lapsus en disant qu'elle estimait qu'il fallait maintenir les pourboires (propinas) et les dessous-de-table (coimas). Fou rire à la rédaction !
lire cet entrefilet de La Prensa
lire cet article de La Nación, qui irait de son éclat de rire si on la poussait un peu
Ajout du 6 juillet 2018 :
lire cet éditorial de Julio Maier dans Página/12 sur cette proposition de Carrió. Julio Maier est un professeur honoraire de droit pénal, qui a travaillé à l'Université de Buenos Aires (UBA)
Ajout du 7 juillet 2018 :
Les anecdotes sur la relation de Lilita avec l'argent se multiplient. Hier, c'est un chauffeur de taxi qui a raconté sur les ondes d'une radio kirchneriste que la députée avait un jour tenté de descendre sans payer la course. Lire à ce propos l'article de Página/12.