Il
n'y a pas que Berlusconi et Sarkozy pour s'exprimer comme des
charretiers dans la vie politique... La droite argentine use, elle
aussi, d'un vocabulaire pour le moins scabreux lorsqu'elle parle de la
Présidente en exercice, dont vous savez déjà
qu'elle ne se ralliera jamais à ses robes noires... Il faut
néanmoins ajouter que ces noms d'oiseaux orduriers n'ont
jamais été employés en public, devant une
batterie de micros et de caméras comme le faisaient nos
anciens dirigeants, mais plutôt dans des cercles restreints,
dans l'entre-soi droitier de certains beaux quartiers... Manque de
bol, l'insulte a un jour été proférée sur
une fréquence de radio qui a interféré avec
celle de l'hélicoptère présidentiel, dans des
échanges qui semblaient bel et bien relever d'un complot
contre la vie de la Chef d'Etat... L'insulte hante depuis la gauche
kichneriste et c'est avec cette injure et avec l'actuelle atonie de
la droite (1) que le duo Rudy et Paz s'amusait hier dans la vignette
de une de Página/12... Ce qui donne ce dialogue imaginaire
entre un journaliste faussement objectif (2) et l'habituelle
caricature de l'oligarque estanciero à gros sourcils et grosse moustache qui symbolise la droite gorila
(anti-péroniste).
Le
journaliste : Pourriez-vous résumer le programme de
l'opposition en une ou deux idées ?
Le
Gorila (3) : Des idées ? Hummm !
Le
journaliste : "Case-toi,
pauv' con !" ne
compte pas. (4)
Le
Gorila : Flûte alors !
(Traduction Denise Anne Clavilier)
C'est
juste un tout petit peu too much, mais c'est très drôle.
Plus humoristique en tout cas, alors que la posture idéologique
est la même, que le dessin sur les incongruités du Front National
en France (voir mon article du 28 septembre 2012 sur la réaction
du duo aux propositions laïcardes de Marine Le Pen).
(1)
La droite a été si écrasée aux élections
d'il y a un an qu'elle n'a plus d'idées un tant soit peu
consistantes et manque considérablement de punch. Même
l'idée quelque peu saugrenue d'accorder le droit de vote aux
mineurs à partir de 16 ans ne la fait pas sortir du bois avec
des arguments recevables.
(2)
Les journalistes politiques ne sont pas objectifs en Argentine. Ce
sont tous des militants, d'un bord ou d'un autre mais des militants,
que ce soit dans les journaux, à la télévision
ou à la radio, et chaque support a sa ligne politique où
vous n'accédez jamais directement à la pensée
opposée. La distance qui sépare en Europe le
journaliste du politique, qui est son objet d'observation, le
journaliste argentin ne la connaît pas. C'est vrai aussi, et
comment, de Rudy et Daniel Paz et de tous les autres dessinateurs de
presse.
(3)
Gorila est un terme, peu amène, inventé à la fin des années
1940 par les péronistes (Página/12 est péroniste) pour désigner les
anti-péronistes et ça reste dans le vocabulaire
politique pour désigner la droite anti-sociale.
(4)
La vraie citation de Rudy n'est pas celle-là mais l'expression
qu'il emploie sonne de la même manière à une
oreille argentine aux Francophones (du monde entier) cette saillie
sarkozienne... L'opposant dit littéralement : "Va-t-en,
jument !" Ce qui
est l'une des pires insultes qu'on puisse adresser à une
femme. C'est encore pire que le français "chienne".
C'est cette insulte de yegua qui a été captée
sur la radio de l'hélico présidentiel il y a quelques
années et que les kichneristes ont gardée en travers du gosier.