mardi 21 janvier 2020

San Martín, libérateur de l’Amérique du Sud et parisien d’adoption [ici]

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Entre 1812 et 1822, le général José de San Martín (1778-1850), on le sait trop peu en Europe, a garanti l’indépendance de l’actuelle Argentine et libéré du jour colonial le Chili (en 1817) puis le Pérou (en 1821). Par la suite, refusant de demeurer dans des pays livrés à la guerre civile, dont il ne voulait être ni un acteur ni un otage, il partit vivre, temporairement croyait-il, en Europe. Ses campagnes émancipatrices à l’échelle d’un continent et surtout sa spectaculaire traversée des Andes pendant l’été 1817, couronnée par la victoire de Chacabuco (2 février 1817), l’avait fait reconnaître en Europe comme un « nouveau Napoléon » et un « autre Hannibal »… Il surprit toute l’Europe et toute l’Amérique, du nord et du sud, lorsqu’en septembre 1822, au moment où tout le monde s’attendait à le voir se faire couronner à Lima, il renonça au pouvoir et quitta aussitôt la scène publique...

L'hôtel Aguado en 1839
d'après une estampe de la collection personnelle du propriétaire

Dans son exil volontaire et douloureux, il passa neuf mois à Londres puis sept ans à Bruxelles avant de venir s’installer à Paris au début du printemps 1831. En 1835, il put acheter une belle maison de campagne à Evry avec un jardin dont il s’occupait personnellement tout l’été. C’est là que sa seconde petite-fille, Pepa (diminutif de Josefa), est née le 14 juillet 1836 (1). Peu avant, il avait acheté un appartement dans un immeuble qui venait de sortir de terre, dans une rue nouvellement percée dans le nord de Paris, dans un nouveau quartier, ultra-moderne, lumineux et propre, conçu par le préfet de la Seine, le comte Rambuteau, et qu’on appela très vite la Nouvelle Athènes, à cause du grand nombre d’intellectuels et d’hommes politiques libéraux (2) qui vinrent y habiter. Il s’installa ainsi dans la rue Saint-Georges, sur la paroisse de Notre-Dame de Lorette.

Monument à l'Armée des Andes sur le Cerro de la Gloria (Mont d'Honneur)
à Mendoza, d'où partit l'expédition de libération du Chili

Dans le même quartier, se dressait l’ancien Opéra de Paris que dirigeait un mécène, un ancien afrancesado (3) sévillan, Alexandre-Marie Aguado, fastueux financier qui protégea la majorité des artistes romantiques, d’Alexandre Dumas à Honoré de Balzac comme de Giacomo Rossini à Frédéric Chopin (4). Lorsqu’il était à Paris, Aguado vivait dans un hôtel particulier qui est aujourd’hui la mairie du 9e arrondissement, dans une partie de la rue de la Grange-Batelière qui est devenue la rue Drouot. En 1808, avant qu’Aguado rejoigne le camp des Français au cours de la guerre d’Espagne, il avait servi pendant quinze jours dans la même unité de l’armée patriote que San Martín, alors capitaine. Tous les deux se retrouvèrent à Paris et devinrent des amis personnels et intimes.

Nécrologie de San Martín paru dans la Gazette de Lausanne
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En 1842, à la mort prématurée d’Aguado, par la volonté du défunt, San Martín devint son exécuteur testamentaire principal et le tuteur de ses deux fils mineurs. Ce devoir envers son ami le retint sur Paris à une époque où le Chili apaisé s’apprêtait à accueillir son libérateur, le vainqueur des Andes : San Martín aurait pu y couler une retraite heureuse dans une belle propriété agricole. Mais il était dit qu’il devait mourir en France, ce qui advint le 17 août 1850, à Boulogne-sur-Mer, dans une maison qui est devenu un musée argentin extraterritorial sur la Côte d’Opale.

Détail du groupe Monument à l'Armée des Andes à Mendoza
San Martín, sur son cheval, observe les Andes et médite son plan de campagne

C’est dans cet ancien hôtel Aguado que je suis invitée par la Société d’étude du Patrimoine et de l’Histoire du 9e arrondissement à donner ma prochaine conférence :

José de San Martín (1778-1850),
libérateur de l’Amérique du Sud et parisien d’adoption

Ce sera le vendredi 7 février 2020, à 18h30.

Entrée libre et gratuite.

Vente de mes ouvrages et dédicace sur place.



(1) Josefa Balcarce de San Martín est décédée en 1824, à Brunoy, dans l’Essonne. Elle y est enterrée. Pendant la Grande Guerre, elle fut une bienfaitrice des blessées de l’armée française, qu’elle accueillit dans un hospice de vieillards qu’elle avait fondé, qu’elle convertit en hôpital de pointe pendant le conflit et qu’elle dirigea personnellement, s’y rendant tous les jours et donnant toute son énergie à cette tâche éprouvante.
(2) La gauche de l’époque et le soutien du régime de Juillet.
(3) Les Espagnols ont appelé afrancesados les collaborateurs de l’occupant français pendant le règne de Joseph Bonaparte, considéré comme usurpateur du trône de Fernando VII. Aguado passa dans ce camp politique vers 1810 au moment où San Martín commençait à concevoir son départ pour l’Amérique où il voulait continuer à lutter pour la liberté politique et l’indépendance nationale, hors de portée du régime bonapartiste qui dominait une grande partie de l’Europe.
(4) Aguado inspira à Dumas père le personnage du comte de Montecristo. Le roman parut, sous forme de feuilleton dans la presse, deux ans après la disparition du généreux bienfaiteur des artistes qui repose toujours au cimetière du Père Lachaise où San Martín avait contribué à le faire conduire. Il fut le seul de ses proches dont il put assister aux obsèques.