samedi 27 juin 2020

Nouveau confinement pour Buenos Aires et sa région à partir de mercredi [Actu]

"A la maison au pas de course" dit le gros titre
en haut, au centre, la disparition à l'âge de 77 ans d'un leader socialiste
premier gouverneur à la rose en Argentine (Sante Fe)
candidat malheureux mais brillant à la présidence de la Nation en 2011
Atteint par la maladie d'Alzheimer, Hermés Binner avait disparu
de la scène publique depuis un bon moment.

Dans quelques jours, en Argentine, ce sont les vacances d’hiver qui commencent avec la saison du ski (dont la station la plus importante du continent se situe à Bariloche, dans les Andes de Patagonie). Aussi, devant l’avancée de l’épidémie de covid-19, le gouvernement national (gauche péroniste), celui de la Ville Autonome de Buenos Aires (droite libérale) et celui de la province du même nom (gauche péroniste) se sont-ils concertés une nouvelle fois pour resserrer les boulons.

En bonne place sur la une,
l'impressionnant graphique de l'épidémie qui galope

Du 1er au 17 juillet, la capitale fédérale et sa banlieue reviendront à un régime très strict de confinement avec seulement 24 activités où le travail restera possible, les 24 activités qui restaient autorisées dans le décret de confinement du 20 mars dernier. Tout le reste est au chômage technique, avec diverses aides de l’État, ou en télétravail. Les écoles restent fermées, depuis la maternelle jusqu’à l’université. Il n’y aura plus de transports publics entre la capitale et les villes limitrophes ou très peu. Des promenades resteront autorisées pour les enfants mais les adultes devront se passer du footing de jour comme de nuit. Des magasins qui avaient pu rouvrir devront à nouveau baisser le rideau. Le pays atteint les 100 jours de confinement. Un tiers de l’année.

Du point de vue économique, c’est bien entendu une catastrophe d’autant que le travail au noir avait notablement progressé pendant les deux dernières années du mandat précédent, qui furent deux années de crise noire (surendettement de l’État, dérégulation à tout va et baisse voire disparition des dispositifs sociaux). Il y aura aussi des protestations au nom de la liberté mais, comme l’a dit le président : la liberté est une affaire de vivants. Pour les morts, il n’y a plus de liberté qui vaille. Il faut donc limiter autant que possible leur nombre or l’épidémie flambe en ce moment et le système sanitaire, notamment les services de soins intensifs, est mis à rude épreuve.

Un groupe de scientifique a mis au point un protocole permettant des dépistages de groupe qui ne nécessitent de tests individuels que pour les personnes composant le groupe dans lequel la présence du virus a été détectée. Ceci devrait aider le pays à tester davantage à moindre coût, une des clés du succès dans ce pays étranglé par la dette contractée au cours du mandat précédent. L’Argentine déplore déjà 1.175 décès du covid sur une population de 46 millions d’habitants (en comptant les 8 morts annoncées ce matin). Autrement dit, même mal respecté par tous les travailleurs en situation précaire qui le bravent pour aller gagner leur pain, le confinement reste la solution la plus efficace en l’absence (durable) de remède et de vaccin.

"Circulation limitée dans le Gran Buenos Aires
et fermeture de 300.000 commerces", dit le gros titre
En haut, à droite, la photo de Hermés Binner
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Quelques observateurs de droite osent toutefois élever la voix pour critiquer le gouvernement au sujet de la mise en place en mars-avril d’un hôpital de quarantaine dans le parc éducatif à thème Tecnopolis. Cette structure n’a en effet pas encore servi et elle ne servira peut-être jamais (en tout cas pas avant l’arrivée du printemps en octobre) car elle ne peut pas être utilisée pendant l’hiver (c’est un simple hangar à exposition et à Buenos Aires, il faudrait mettre du chauffage pour y loger, comme cela avait été prévu, des malades atteints à un degré léger ainsi que des asymptomatiques qui doivent tous pouvoir être isolés pendant qu’ils sont contagieux). Comme si le pic d’une maladie nouvelle et soudaine était un fait maîtrisable par les pouvoirs publics ! La presse mainstream affûte déjà ses armes pour tailler en pièce cette majorité haïe. Pourtant le chef de gouvernement de la Ville de Buenos Aires est de droite et il coopère sans faille (apparente en tout cas) avec la majorité de gauche : depuis le mois de mars, les trois exécutifs rament tous dans le même sens sur la stratégie contre l’épidémie, laquelle occupe 99,99 % de leur activité.

On peut donc espérer que, malgré la mauvaise volonté de certains, nettement plus sectaires que d’autres, que cette longue expérience de concertation transpartisane, qui a déjà valu un podium à l’Argentine dans les pages de Time Magazine, ne change durablement le paysage politique national et ne favorise l’indispensable cicatrisation d’une division idéologique qui remonte au début de la guerre civile en 1820 et que les coups d’État militaires successifs de 1930 à 1976 n’ont fait qu’aggraver tout au long du 20e siècle.

L'édition de Página/12 à Rosario,
capitale culturelle et économique de Santa Fe
Belle photo de Hermés Binner
et gros titre qui rappelle qu'il était médecin

Les dates choisies pour prolonger le confinement incluent la fête de l’indépendance, le 9 juillet. Encore une occasion de célébrer qui passe par pertes et profits dans une année qui devait être riche en manifestations culturelles autour du souvenir de Manuel Belgrano, l’un des plus importants artisans de la création du pays. On a vu la semaine dernière que le bicentenaire de sa mort était passé presque inaperçu dans les colonnes de journaux.


Pour aller plus loin :