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Zamba, son éternel enthousiasme, sa blouse blanche et son cartable sur le dos ! Cliquez sur l'image pour une meilleure résolution |
Paka Paka est une chaîne de télévision pour les enfants au sein du groupe de la télévision publique nationale argentine. La chaîne a été créée en 2010, l'année du Bicentenaire de la Révolution de Mai, sous le mandat de Cristina Kirchner et la droite a pris l’habitude de la haïr en prétendant qu’elle diffusait de la propagande kirchneriste.
C’était très largement faux. En revanche, avant Mileí, cette chaîne promouvait des valeurs démocratiques comme la tolérance, l’inclusion, le partage, la lutte contre le racisme, le patriotisme. Les programmes permettaient aux petits de découvrir la géographie et l’histoire du pays, l’existence des peuples autochtones, la variété des expressions artistiques nationales, les pays limitrophes ou plus lointains, comme le Venezuela ou le Mexique (tous les deux confondus par la droite dans la même haine de la « gauche » qui les gouverne alors qu’il y a une dictature dans un cas et une démocratie dans l’autre).
Le petit personnage iconique de la chaîne, Zamba, écolier, comme l’indique son éternelle blouse blanche portée par tous ses semblables en Argentine, originaire du nord-est du pays, encore largement marqué par la présence guaranie (comme le montre le teint cuivré du petit garçon), entraînait aussi les jeunes téléspectateurs dans des leçons de biologie, de chimie ou d’astronomie, voire de diététique ou de cuisine, le tout avec de l’humour et des chansons, un peu comme on a longtemps aimé en France l’excellent C’est pas sorcier du service public. Avec Jamy et la « Petite voix »… sans oublier le camion et les jeux de mots dignes de l’Almanach Vermot.
Zamba
avait permis des progrès réels chez les enfants. Une amie, guide
dans deux musées d’histoire et elle-même électrice de Macri, me
racontait que depuis l’apparition du personnage, elle constatait
que les enfants reconnaissaient spontanément les figures historiques
dans les tableaux qu’elle leur présentait et qu’ils les aimaient
du fond du cœur au lieu de au mieux de ne même pas savoir de quoi
il s’agissait, au pire de les regarder avec crainte et recul, comme
des créatures dominatrices dont la demi-divinité était louée à
tout bout de champ par l’enseignant.
Paka Paka a bien failli disparaître complètement avec l’ensemble du service public de radio-télévision argentin lorsque Mileí a débarqué à la Casa Rosada. Par un des rares miracles qui se sont produits au tout début du mandat, le service public a tout de même survécu. Sans budget ou presque mais il a survécu. Pourtant ce qui arrive maintenant est peut-être pire que la disparition de la chaîne. A compter du 1er juillet, elle revient sur la TNT pour diffuser des programmes étrangers, notamment des dessins animés japonais, et un discours libertarien très militant, hostile à l’État et au « socialisme », c’est-à-dire à tout ce qui touche de près ou de loin au partage de la richesse, au service public et à la réglementation de l’économie, relayant les canulars des antivax, tentant de dissuader les enfants d’aspirer à des études supérieures, réputées trop chères alors qu’il est si simple de faire fortune en se passant de la moindre formation (Mileí en est l’exemple même, à ceci près qu’il est né avec une cuillère en argent dans la bouche – ça aide !), saluant au passage le président du San Salvador, l’ignoble et fat Bukele aux prisons infernales où Trump envoie ses indésirables sans aucune forme de procès (au feu, l’habeas corpus fondateur !), ou, enfin, montrant du doigt les familles monoparentales (vue la vie dissolue que mène le président, c’est l’hôpital qui se fiche de la charité !).
Même La Nación, journal bon teint de la droite libérale et patronale parfaitement capitaliste, s’en émeut, extraits vidéo des nouvelles émissions à l’appui. C’est vous dire !
Pour
aller plus loin :
lire
l’article
de Página/12,
il y a quelques jours, le premier quotidien à avoir commenté cette
mue de la chaîne
lire
l’article
de Página/12
ce matin (aujourd’hui, le journal consacre deux articles à ce
sujet, l’un des deux étant réservé aux abonnés sur le site
Internet)
lire
l’article
de La
Nación