jeudi 31 décembre 2015

A la hussarde ! [Actu]

Le journal le plus remonté contre les récentes mesures
ce qui est normal, c'est désormais le seul quotidien de l'opposition
La une montre le siège social de l'AFSCA gardée par la police
pour empêcher son occupation par les ex-dirigeants révoqués

C'est par décret, du type DNU (décret de nécessité et d'urgence), que le Président Mauricio Macri met fin à l'existence des deux instances régulatrices qui étaient issues de la Ley de Medios, la loi qui limite la constitution de positions hégémoniques dans les médias, et à laquelle le nouveau président s'est toujours prononcé.

Que l'AFSCA et l'AFTIC soient fusionnées n'est pas une surprise, on savait depuis plusieurs jours déjà que telle était l'intention du Gouvernement et en  particulier depuis la prise de contrôle par décret de l'AFSCA il y a exactement une semaine (voir mon article du 24 décembre 2014). Que cela se fasse par le biais d'un DNU et non par un projet de loi présenté au Congrès et discuté dans les deux hémicycles un peu plus. Puisque les deux organismes avaient été créés par la loi, on s'attendait à ce qu'ils soient dissous par une autre loi. Il ne manque donc pas d'acteurs politiques et de constitutionnalistes aujourd'hui pour dénoncer le procédé comme anti-constitutionnel et peu démocratique.

Página/12 consacre à l'affaire à peu près la moitié des articles en ligne de ce matin.
Les autres titres un peu moins.

C'est à peine si Clarín en parle (voir le dernier titre tout en bas)
mais la Ley de Medios de Cristina Kirchner constituait précisément
un instrument légal à l'encontre de ce groupe médiatique hégémonique
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La nouvelle institution, el ENACOM (Ente Nacional de Comunicación), dépendra directement du Gouvernement (alors que les deux dissoutes, sur le papier au moins, en étaient indépendantes, mais on sait qu'à leur tête avaient été placés des caciques de partis politiques). Elle devra mettre en place les conditions d'une authentique liberté de la presse, qui ne soit plus ni muselée ni soumise au pouvoir politique en place comme elle l'aurait été dans la période antérieure (je cite ici en substance les termes du communiqué officiel) (1). Par ailleurs, il sera créé au Congrès une commission bicamérale chargée de rédiger la nouvelle loi sur la communication, la presse et les médias, qui prendra le meilleur des lois qui régissent actuellement les technologies de communication (Argentina Digital) et les médias (ley de Medios).

Dans el ENACOM, qui n'a peut-être pas vocation à être un organisme pérenne mais devrait exister pendant au moins les deux ans de mesure temporaire dont on parle pour aboutir à l'entrée en vigueur de la nouvelle loi, il est prévu de faire siéger des parlementaires de l'opposition mais dans une proportion inférieure au nombre de représentants de l'Exécutif (3 parlementaires contre 4 commissaires gouvernementaux). Il y en avait aucun à l'AFSCA !
Dans les futures dispositions, les petits organes de presse devraient trouver des garanties de leur existence. C'est en tout cas ce que promet le Premier ministre dans son communiqué d'hier.

La Nación est un peu plus concernée (premier titre, en haut à gauche)
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Ceci n'empêche pas Página/12 d'envisager le pire scénario du complot antidémocratique, qui, certes, ne peut pas être écarté mais ce n'est pas pour l'heure ce qui se dessine. D'autant qu'un juge a invalidé une partie du DNU, ce qui en retardera peut-être l'application, initialement prévue pour lundi. Pour le moment, le fait que les décisions gouvernementales agitent autant le monde politique en pleines vacances et pendant des jours fériés signifie au moins que la démocratie est bien vivante en Argentine et que tout le monde joue son rôle, y compris cette justice si souvent pris à parti de part et d'autre...

Pour aller plus loin :
lire le communiqué officiel de la Casa Rosada.



(1) En août dernier, j'ai eu des échos très sérieux, à la fois à Buenos Aires et à Mendoza, de l'existence d'une réelle, quoi que fort discrète, censure en Argentine. Mais on ne m'en a pas fourni de preuves. Je n'ai pas eu le temps d'en chercher non plus !

L'Institut national Manuel Dorrego cesserait d'exister dès ce soir [Actu]

Capture d'écran ce matin du site Internet de l'Instituto Dorrego
(La plupart des organismes publics chôment cette journée du 31 décembre,
la mise à jour à droite est peut-être le fait d'un contenu programmé à l'avance).

Les quotidiens La Nación et Clarín font état d'un décret présidentiel, soutenu par le ministre de la Culture, qui dissoudrait dès aujourd'hui un institut d'histoire à l'idéologie plus que revendiquée et de ce fait très contesté, el Instituto Nacional de Revisionismo histórico Manuel Dorrego, fondé par Cristina Fernández de Kirchner, en novembre 2011, à l'instigation d'un historiographe péroniste, Pacho O'Donnell, qui l'a quitté l'année dernière, arguant que les "ennemis" étaient dans la place. L'institut devait rétablir un équilibre et redonner tout leur éclat aux figures historiques qui avaient été maltraitées (c'est un fait incontestable) par l'histoire officielle forgée par l'oligarchie (entendez la pensée dominante venue de la droite intellectuelle de la seconde moitié du XIXe siècle, sous l'impulsion de Sarmiento et Mitre).

Le décret auquel font allusion les deux journaux et que je n'ai pu trouver sur aucun des différents portails publics du Gouvernement argentin fait état du caractère arbitraire et "abusif" de l'intervention de l'Etat dans "les questions de méthodologie historique" (pas faux), le même procès qui fut fait en son temps, mais dans l'autre sens (contre la droite dans notre cas), à l'avortée Maison de l'Histoire de France voulue par Nicolas Sarkozy et qui se serait installée dans l'ancien siège des Archives nationales dans le Marais mais dont le projet fut abandonné à l'été 2012 (voir cet article du journal Le Monde sur le sujet).

Le site Internet de l'institut en question ne fait rien apparaître de cet ordre, sinon cette dernière lettre de Manuel Dorrego, lorsqu'il faisait ses adieux à son neveu juste avant d'être fusillé par les unitaires (volontiers identifiés aux néolibéraux et à Macri par les historiens revisionistas d'aujourd'hui).

Même Página/12, d'habitude si rapide à prendre la défense de ce genre d'institution, reste muet dans son édition de ce jour. Il est possible que l'organisme ait fini par se décrédibiliser après la grave crise du départ de son fondateur et tout premier président il y a tout juste un an (voir mon article du 20 décembre 2014, complété par des ajouts les 22 et 27 décembre suivant).

Le 28 décembre de cette année, il y a quatre jours, l'institut s'était contenté de changer sa photo de couverture Facebook en modifiant le drapeau qui apparaît derrière le visage de Dorrego dans le logo : il a remplacé le drapeau de la Patria Grande (multicolore) par le bicolore argentin. Ce qui en soi est assez étonnant ! Qui aurait cru jusqu'à présent que l'institut soit un tant soit peu susceptible de privilégier les seules couleurs nationales ?
La directrice du Museo Histórico Nacional, qui faisait partie des historiens fondateurs de l'institut, Araceli Bellota, écrivain et scénariste, ui se présente avant tout comme péroniste et féministe, vient de son côté de démissionner de ses fonctions au MHN qu'elle occupait depuis avril 2013 et auxquelles elle avait été reconduite le 9 décembre dernier, dans l'une des ultimes décisions de Cristina de Kirchner, prise sans aucune concertation avec le gouvernement Macri qui prenait ses fonctions le lendemain - sans oublier le véritable sac de nœuds de mandats cumulés entre la direction du Patrimoine national, celle du Museo del Cabildo et celle du MHN, le tout croisé avec l'organigramme de l'INRH Manuel Dorrego !

Reproduction de la page 20 de La Nación du 20 décembre 2014
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Au-delà de l'acte politique, partisan et idéologique qu'elle représenta en 2011, la création de cet institut aurait pu être une salutaire provocation intellectuelle en vue d'équilibrer le secteur de la recherche historique, qui n'existe pas vraiment en Argentine où l'histoire est encore, pour une grande part, un outil de formation de l'opinion publique et un champ de bataille idéologique sur l'identité du pays et son avenir. Peut-être a-t-il d'ailleurs permis à une partie du monde intellectuel de prendre conscience de la nécessité de développer dans le pays une recherche historique au sens scientifique du terme... C'est ce que l'on devrait pouvoir vérifier à la rentrée prochaine, en mars, en voyant quelle direction vont prendre les différents instituts nationaux d'histoire puisqu'ils en existent plusieurs, l'un consacré à José de San Martín, un autre à Manuel Belgrano, un autre à Juan Manuel de Rosas, un autre à Hipólito Yrigoyen et un autre, enfin, à Evita Duarte de Perón (et peut-être suis-je en train d'en oublier).

Pour aller plus loin :
lire l'article de La Nación d'aujourd'hui
consulter sa page Facebook
lire l'article de La Nación du 20 décembre 2014 (en fac-similé ci-dessus) lorsque Pacho O'Donnell proposait, en vain, de dissoudre l'institut noyauté par l'"ennemi" (rappelons à ceux qui l'aurait oublié que l'Argentine est un pays démocratique et neutre, dont les citoyens peuvent avoir des adversaires, ou des opposants, mais certainement pas des ennemis et encore moins si ceux-ci sont des compatriotes vivant dans le même pays).

Ajout du 2 janvier 2016 :
L'INRH Dorrego vient d'annoncer sur sa page Facebook, en deux statuts distants de quelques heures, l'un daté du 31 décembre dans l'après-midi, l'autre du 1er janvier dans la matinée, la nouvelle de sa dissolution par décret présidentiel. C'est par la presse que les salariés ont pris connaissance de l'imminence de la dissolution de leur institut, ce qui est d'une violence extrême, en tout temps mais encore plus en cette période de fête et de longues vacances d'été. Quoi qu'il en soit du bien-fondé ou non de l'institut, le respect humain exigeait plus d'égard envers les gens qui, grâce à leur emploi, gagnent leur vie et de quoi subvenir aux besoins de leurs familles...
L'annonce évoque donc le sort professionnel incertain des salariés de l'Institut (ce qui est en effet un souci majeur en ce début d'année) et se conclut sur une citation de l'hymne national : "Al gran pueblo argentino salud" (au grand peuple argentin, salut !)
Pour une institution qui aurait rencontré son public et aurait prouvé son utilité et sa popularité, les partages restent limités : un peu plus de 1800 pour le premier message (à quelques heures du réveillon) et un peu plus de 220 pour le second.
Sur les sites Internet gouvernementaux, on ne trouve toujours rien sur le sujet.
Pas davantage sur Página/12, qui prend le temps de commenter assez longuement (sans toutefois le faire apparaître sur sa une) une tentative d'effraction avec violence aux petites heures du 31 décembre dans les locaux de La Voz de las Madres, la radio de Madres de Plaza de Mayo... Que signifie ce silence de la part du principal quotidien d'opposition ?
S'agirait-il d'une fuite autour d'une décision déjà envisagée mais que le ministre avait prévu d'annoncer aux intéressés, avec plus de ménagement, après les fêtes, voire à la rentrée ?
Comment une dissolution pourrait-elle être effective au 31 décembre 2015 alors que le 2 janvier 2016, aucun décret n'est encore paru au Bulletin officiel de la République argentine et qu'il n'y a aucun signe que le Président Macri ait signé un tel décret ? Et s'il s'agit bien d'une fuite, le ministre ou la Casa Rosada elle-même seraient bien inspirés, me semble-t-il, d'émettre un démenti, ou de fournir des explications, ou de présenter de toute urgence des excuses pour un tel faux pas de leurs services tout en annonçant le lancement d'une enquête interne, deux démarches qui ne sont pas encore -et de loin, hélas- entrées dans les mœurs politiques argentines...

Robinet à musique sur Nacional Rock en janvier [à l'affiche]


Hernán Lombardi vient de donner l'ordre à Nacional Rock, la station de Radio Nacional consacrée à cette musique, de mettre fin à toute sa programmation à compter de ce soir minuit. Cet ordre a immédiatement provoqué la démission du directeur de la station, ce qui était peut-être le but poursuivi par le ministre, qui constatait, dimanche dernier, dans une interview à La Nación, dont je vous ai traduit de larges passages dans Barrio de Tango, qu'il n'avait toujours pas accès à la radio publique qui dépend pourtant de sa responsabilité gouvernementale.

En janvier, la chaîne devrait diffuser de la musique en continu, sans autre programme : il n'y aura même pas de flash d'information et il n'y aura aucune émission au sens artistique et culturel du terme. Tous les contrats de travail vont être examinés et ne seront maintenus que ceux qui correspondent à des prestations considérées comme relevant des missions de la station. En février, on nous promet une nouvelle grille à l'antenne avec un nouvel organigramme.

L'un des soutiens affichés par Nacional Rock
celui du personnel du CCK, le centre culturel qui dépend lui aussi de Hernán Lombardi
et qui semble ruer dans les brancards beaucoup plus
que ce que voulait bien en concéder dimanche l'équipe du ministre à La Nación

La décision fait l'unanimité des artistes de rock et au-delà contre elle, alors que le monde de la musique populaire est très majoritairement à gauche et a été profondément hostile à Mauricio Macri pendant toute la durée de ses deux mandats à la tête de la Capitale fédérale. Il n'est donc pas étonnant que tous soient vent debout devant une décision aussi soudaine et aussi brutale. Les messages de soutien saturent donc depuis hier les réseaux sociaux et les animateurs de la page Facebook de la station ne se privent pas de les relayer. Et pourtant l'information n'est commentée sur aucun site d'aucun des trois grands quotidiens de droite au niveau national : rien sur La Nación, rien sur Clarín, rien sur La Prensa. Il est vrai que l'actualité est particulièrement riche pour une saint Sylvestre, depuis les suites d'une évasion spectaculaire dans la Province de Buenos Aires jusqu'aux plus récentes mesures économiques, sans oublier la fusion à la dure des deux instances issues de la loi des médias, l'AFSCA et l'AFTIC, laquelle, sans être une surprise, se réalise dans des conditions spectaculaires et plus que polémiques...

Pour aller plus loin :
lire l'article de Perfil d'hier
lire l'interview de Hernán Lombardi dans Perfil le 26 décembre
Le site Internet est daté d'un flux en streaming qui vous permet d'écouter l'antenne en direct partout dans le monde.

Ajout du 2 janvier 2016 :
l'ex-directeur de Nacional Rock se fend d'un vigoureux éditorial pour défendre sa station sur Página/12 dans cette première édition 2016.

mardi 29 décembre 2015

Hernán Lombardi appelle un chat un chat [Actu]

Decir pan al pan, comme on dit en Argentine : "appeler le pain pain". C'est ce qu'a fait avant-hier dimanche le ministre Hernán Lombardi, en charge de la réforme des médias nationaux (radio, télévision, agence de presse ainsi que deux institutions culturelles qui lui ont été bizarrement rattachées, le centre culturel CCK et le parc scientifique et technologique saisonnier, Tecnópolis) (1), dans une interview à trois qu'il a accordée à La Nación, où il s'est fait accompagner par ses deux adjoints, Gabriela Ricardes en charge des contenus publics (Tecnópolis, le CCK, les deux chaînes culturelles Canal Encuentro et Paka Paka ainsi que la Banque Audiovisuelle de Contenus universels argentins, de son petit nom le BACUA, peu ou prou l'équivalent de l'INA en France), et Jorge Sigal, en charge des médias publics (radio, télévision, agence de presse).

Photo La Nación

Malgré une certaine hostilité, pour ne pas dire une hostilité certaine aux pratiques et même aux personnes du gouvernement précédent (2), le nouveau ministre a parlé clair et on attend bien entendu qu'il traduise ses propos en actes de gestion qui implanteront dans les faits l'ouverture et le pluralisme dont il sait très bien parler. Quoi qu'il en soit, il a le mérité d'expliquer les enjeux économiques qui sous-tendent la politique générale de ce gouvernement qui veut obtenir la démission des hauts responsables nommés par Cristina de Kirchner et qui n'acceptent pas de se mettre au service du nouveau Président, pourtant démocratiquement élu, qui pensent qu'ils ont légitimité à conserver leur ligne d'action, sous prétexte qu'ils ont été nommés pour un mandat qui court toujours, alors qu'un changement global de politique a été enclenché par un vote du peuple souverain (3).

Extraits

-¿Están sentados en lo que fue el ministerio del Relato? [la entrevista se realiza en la oficina que ocupó en Tecnópolis, Javier Grosman]
-(Lombardi) Fue no sólo el ministerio del relato sino en muchos aspectos fue un aparato propagandístico muy fuerte, concentrado y unilateral que se montó durante 12 años. Y esto desde nuestro punto de vista ha sido muy pernicioso para la Argentina y también, desde mi punto de vista, para el anterior gobierno que terminó creyéndose ese propio relato y se fue alejando cada vez más de la realidad. Fue un relato muy pobre intelectualmente y en valores.
La Nación

- Vous êtes assis dans ce qui fut le ministère du Récit ? (4) [L'interview se tient dans le bureau que Javier Grosman a occupé à Tecnópolis]
(Lombardi) - Cela n'a pas été que le ministère du récit. Sur de nombreux aspects, ça a été un appareil de propagande très costaud, concentré et unilatéral qu'on a monté pendant douze ans. Et ceci de notre point de vue a été très pernicieux pour l'Argentine et aussi, de mon point de vue, pour l' ancien gouvernement qui a fini par croire à son propre récit et a de plus en plus perdu le contact avec la réalité (5). Cela a été un récit très pauvre sur le plan intellectuel et en terme de valeurs (6).
(Traduction © Denise Anne Clavilier)

[…]

Nuestra misión es aportar a una fuerte ampliación de la ciudadanía, donde cada argentino sea un ciudadano libre, respetuoso, con espíritu crítico, incentivado para el conocimiento y la vida en sociedad. Esto es muy distinto a construir un pensamiento único alternativo al pensamiento único dominante. Esto es que se exprese la enorme diversidad regional y de los orígenes. Nosotros debemos respetar simultáneamente el aporte de las culturas precolombinas y también el aporte de las corrientes inmigratorias. No somos lo uno o lo otro, somos lo uno y lo otro. Debemos reconocer el pensamiento de las grandes ciudades pero también el de las regiones y de los pequeños pueblos. Reconstruir un sentido auténticamente federal.
La Nación

Notre mission est de contribuer à élargir [l'accès de tout] à nos concitoyens, pour que chaque Argentin soit un citoyen libre, respectueux, doté d'un esprit critique, encouragé à connaître et à vivre en société. Et ceci est très différent de construire une pensée unique alternative à la pensée unique dominante (7). Il faut que s'exprime l'énorme diversité régionale et celle des origines. Nous devons respecter simultanément la contribution des cultures précolombiennes et aussi celle des courants d'immigration (8). Nous ne sommes pas l'un ou l'autre, nous sommes l'un et l'autre. Nous devons reconnaître la pensée des grandes villes mais aussi celle des régions (9) et des petits villages. Reconstruire un sens du fédéralisme authentique. (10)
(Traduction © Denise Anne Clavilier)

En cada una de las áreas la palabra federalismo está atravesando todo. Pluralismo, tolerancia, diversidad y que todas las opiniones se puedan expresar. Y otro eje va a ser la fuerte impronta de futuro. Pararnos en nuestra historia pero enamorarnos del futuro, ese es el concepto con el cual vamos a desmontar este ministerio de la propaganda. Vamos a hacer un aporte a la sociedad plural de los argentinos.
Para nosotros esto es esencial. Cada cosa concreta que hagamos va a estar impregnada de estos valores.
- (Sigal) Nosotros no solamente respetamos la diversidad porque es un derecho de las personas sino que decimos que sale de allí las cosas nuevas, de los diferentes pensamientos salen las mejores cosas.
- (Lombardi) No es sólo un concepto ético, es un concepto arquitectónico.
La Nación

Dans chacun des secteurs, le mot fédéralisme touche à tout. Pluralisme, tolérance, diversité et que toutes les opinions puissent s'exprimer. Et un autre axe sera la forte empreinte du futur. Nous arrêter sur notre histoire, oui mais aussi tomber amoureux de notre futur, ça, c'est la notion à travers laquelle nous allons démonter ce ministère de la propagande. Nous allons réaliser une contribution à la société plurielle des Argentins.
Pour nous, ça, c'est essentiel. Chaque chose concrète que nous allons faire va être imprégnée de ces valeurs-ci.
(Sigal) - Nous, nous n'allons pas nous contenter de respecter la diversité parce que c'est un droit de la personne. Non, ce que nous disons, c'est que c'est là la source des idées nouvelles. Des modes de pensée différents, c'est le meilleur qui sort.
(Lombardi) - Ce n'est pas qu'une notion éthique, c'est une notion architectonique.
(Traduction © Denise Anne Clavilier)

[…]

-¿Qué va a pasar con Tecnópolis?
-(Ricardes) Tecnópolis es un parque de arte, ciencia y tecnología, que va a continuar con sus muestras como estaba previsto. En líneas generales, las muestras empezaban en julio y terminaban en noviembre. Se va a empezar a trabajar ahora con los socios que tiene el parque, los ministerios de Ciencia, Educación y Cultura en las nuevas muestras. Vamos a trabajar en un parque que no sea un organismo de propaganda de entes gubernamentales sino que tienda a mostrar el enorme potencial, la creatividad y la innovación de los argentinos. También vamos a buscar asociaciones estratégicas con otros parques similares en el mundo. Y además esperamos darle una itinerancia en el interior del país con asociaciones con diferentes provincias, que puedan articular también con actores locales.
-(Lombardi) El concepto de modernidad. Este va a ser un lugar donde se pueda exhibir el futuro. Este año en particular va a estar dedicado a la celebración del bicentenario. Tanto el CCK como Tecnópolis tendrán una enorme interrelación con los medios audiovisuales, va a ser un polo de creación de contenidos.
La Nación

- Que va-t-il se passer à Tecnópolis ?
(Ricardes) - Tecnópolis est un parc à thème autour de l'art, de la science et de la technologie qui va continuer avec ses expositions comme c'était prévu. En ligne générale, les expositions commençaient en juillet et se terminaient en novembre. On va travailler avec les partenaires du parc, les ministère des Sciences, de l'Education et de la Culture sur les nouvelles expositions. Nous allons travailler sur un parc qui ne soit pas un organisme de propagande d'institutions gouvernementales mais qui tendent à montrer l'énorme potentiel, la créativité et l'innovation des Argentins. Nous allons aussi chercher des associations stratégiques avec d'autres parcs similaires dans le monde (11). Et en plus, nous espérons le rendre itinérant dans l'intérieur du pays en partenariat avec différentes provinces, des partenariats qui puissent aussi s'articuler avec des acteurs locaux.
(Lombardi) - L'idée de modernité. Ce parc va devenir un lieu où on pourra exposer le futur. Cette année en particulier va être consacrée à la célébration du bicentenaire (12). Tant le CCK que Tecnópolis auront une énorme interaction avec les médias audiovisuels. Ce sera un pôle de création de contenus.
(Traduction © Denise Anne Clavilier)

-¿Los presupuestos que cada uno de estos entes se van a mantener?
-(Lombardi) Son los que están votados en la ley de presupuesto. En todos los casos hay un sistema laberíntico donde hay recursos que provienen de distintos ministerios. Eso no es solamente mucha desorganización sino también muy poca transparencia. Hay que hacer un trabajo de orfebre para rescatar y ordenar todas las partidas. En los últimos 15 días estuvimos trabajando en ese ordenamiento.
La Nación

- Les budgets de chacune de ces entités vont être maintenus ?
(Lombardi) - Ce sont ceux qui ont été votés dans la loi du budget. Dans tous les cas, il y a un système labyrinthique où les ressources proviennent de différents ministères. Tout ça, ce n'est pas seulement beaucoup de désorganisation mais aussi une bien faible transparence. Il y a un travail d'orfèvre à faire pour préserver et ordonner toutes les participations. Au cours des quinze derniers jours, nous n'avons pas cessé de travailler sur cette mise en ordre.
(Traduction © Denise Anne Clavilier)

-Con no menos de 5000 trabajadores en todos los medios y áreas, el personal es otro gran capítulo para el nuevo ministerio
-(Lombardi) Obviamente, el de los recursos humanos es un gran capítulo que atraviesa todo. Sobre todo en el sistema de medios, vamos a rescatar a gente muy profesional, muy valiosa que tiene muchos años de trabajo, que ha convivido con una politización extrema que se generó en los últimos años y casi te diría en los últimos meses. Nada de eso va a tener lugar dentro del sistema. Todo el que trabaja tiene que estar muy tranquilo, que se va a respetar su trabajo. Y todo el que no trabaja, tendrá que estar bien intranquilo porque no se va a respetar su condición de ñoqui.
La Nación

- Avec pas moins de 5000 salariés dans tous les médias et les secteurs, le personnel est l'autre grand poste pour le nouveau ministère.
(Lombardi) - C'est clair. Le poste ressources humaines est un poste important qui touche à tout. Surtout dans l'organisation des médias, nous allons préserver des gens très professionnels, très précieux, qui ont derrière eux beaucoup d'années de travail qui ont cohabité avec l'extrême politisation de ces dernières années et même, serais-je tenté de dire, des derniers mois. Rien de tout cela ne se produira dans ce groupe. Tous ceux qui travaillent n'ont pas à s'inquiéter, on va respecter leur travail. Et tous ceux qui ne travaillent pas, ils peuvent s'inquiéter parce qu'on ne va pas respecter leur qualité de tire-au-flanc.
(Traduction © Denise Anne Clavilier)

-¿Qué va a pasar con el CCK?
-(Ricardes) Es una situación diferente de la de Tecnópolis porque es un organismo que, digamos, nació prematuramente y en el que convivían los ministerios de Planificación y Cultura. Tiene estructuras paralelas, áreas que no se articulan y todo eso se ve reflejado en una artística que para nuestra manera de ver no está a la altura de un centro cultural que tiene que ser un faro para América latina. Además, todo se financia a través de las universidades. No hay estructura, no hay organigrama, no hay director ni gente de carrera. Hay que crear toda esta estructura para empezar a pensar. Barajar y dar de nuevo. Así como funciona no lo hace bien, hay mucho dinero público que se invirtió en esto y amerita una nueva mirada. No hay un concepto de programación ni curatorial ni de muestras. Los espacios conviven programados caóticamente, de diferentes áreas, artes y personas.
-(Lombardi) El CCK no tuvo hasta ahora director. Que un organismo cultural no tenga director es muy sintomático del desorden porque es quien debe impregnar con su visión el organismo.
-(Ricardes) Por otro lado, es un espacio que mucha gente no conoce y más allá de la anécdota del nombre creo que eso se debe a que no se trabajó para desarrollar una política de contenidos y cultural, sino que se tomó más que nada como un bastión de la cultura militante que resulta muy expulsiva para una enorme cantidad de ciudadanos. Creemos que esto se debe revertir, que es un centro cultural maravilloso y que hay que empezar a trabajar en el diálogo que no tuvo en su nacimiento. Eso va a ser un enorme trabajo.
La Nación

- Que va-t-il se passer au CCK ?
(Ricardes) - C'est une situation très différente de celle de Tecnópolis parce que c'est un organisme qui, si je puis dire, est né prématuré et dans lequel cohabitaient les ministères de la Planification (13) et de la Culture. Il a des structures parallèles, des secteurs qui ne s'articulent pas entre eux et tout ça se reflète dans une politique artistique qui, selon notre façon de voir les choses, n'est pas à la hauteur d'un centre culturel qui doit être un phare pour l'Amérique latine. Qui plus est, tout est financé à travers les universités. Il n'y a pas de structure, il n'y a pas d'organigramme, il n'y ni directeur ni personnel professionnel. Il faut créer toute cette structure pour commencer à penser. Battre les cartes et les redistribuer. Tel que ça fonctionne en ce moment, ce n'est pas bon. Beaucoup d'argent public a été investi et ça mérite qu'on y regarde de plus près. Il n'y a pas de notion générale de programmation, ni de conservation ni de commissariat pour les expositions. Les espaces font cohabiter des programmes chaotiques, de secteurs différents, de disciplines et de personnes.
(Lombardi) - Le CCK n'a encore jamais eu un directeur. Qu'un organisme culturel n'ait pas de directeur est très symptomatique d'un certain désordre parce qu'il faut bien quelqu'un pour imprégner le lieu de sa vision des choses.
(Ricardes) - Par ailleurs, c'est un espace que beaucoup de gens ne connaissent pas et au-delà de l'anecdote du nom [qui lui a été donné, celui de Néstor Kirchner, NdT], je crois que cela est dû au fait qu'aucun travail n'a été fait pour développer une politique culturelle et de contenus, mais que [le centre] a été pris surtout comme un bastion de la culture militante qui se révèle très excluante pour une énorme quantité de nos concitoyens. Nous croyons qu'il faut retourner la situation, que c'est un centre culturel merveilleux et qu'il faut commencer à travailler dans le dialogue qui n'a pas eu lieu à sa naissance. Cela va être un travail énorme.
(Traduction © Denise Anne Clavilier)

[…]

Dans le paragraphe suivant, sur une suggestion du journaliste, qui ne brille pas par sa pugnacité, reconnaissons-le, mais flirte plutôt avec la flagornerie, Hernán Lombardi donne un exemple de réussite qui n'aurait pas coûté aussi cher que l'exorbitant CCK : le travail qu'il a lui-même réalisé à La Boca, avec la Usina del Arte, quand il était ministre de la culture du Gouvernement portègne, et qui aurait pu être dupliqué dans toutes les provinces pour le prix investi dans les travaux du CCK. Ce manque d'humilité dévalorise passablement son propos pourtant intéressant...

-¿Estuvo tomado el edificio del CCK por los trabajadores?
(Ricardes) No, hicieron un abrazo por una defensa de la gratuidad, que aprovechamos para aclarar que no está en juego, y del nombre. Son dos temas que no están en la agenda: el nombre es un tema del Congreso y la gratuidad se va a mantener. Tuvimos una charla con los trabajadores y no hay demasiados problemas. Sí hay incertidumbre por la modalidad de contratación. Contratos que nosotros revisaremos en función del proyecto que el centro cultural va a tener. Entendemos que están contratados de manera precaria
(Lombardi) El 95% no tiene más de cinco o seis meses de contrato. Esos contratos vencen el 31 de diciembre.
La Nación

- Le bâtiment du CCK a-t-il été occupé par son personnel ?
(Ricardes) - Non, il a manifesté pour défendre la gratuité [des activités publiques] et nous en avons profité pour expliquer que ce n'était pas remis en question, et pour défendre la dénomination. Ce sont deux points qui ne sont pas à l'ordre du jour : la dénomination dépend du Congrès et la gratuité, on va la maintenir. Nous avons eu une discussion avec les salariés et il n'y a pas trop de problèmes. Ce qu'il y a, c'est de l'incertitude à cause de la modalité de recrutement. Des contrats de travail que nous allons revoir en fonction du projet qui sera celui du Centre culturel. Nous avons compris que les gens avaient été embauchés sur des bases précaires.
(Lombardi) - 95% d'entre eux ont un contrat qui ne dépasse pas les 5 ou 6 mois. Ces contrats prennent fin le 31 décembre.
(Traduction © Denise Anne Clavilier)

- ¿Qué pasará con Encuentro, Paka Paka y DeporTV?
(Ricardes) Educar es un ente que compartimos con el Ministerio de Educación. Ese ministerio va a seguir ocupándose del contenido específico para estudiantes, padres y educadores. Y los canales de televisión son de nuestra responsabilidad. Vamos a continuar con los tres canales, vamos a revisar las grillas de contenidos, vamos a rescatar los ciclos que nos parezcan interesantes y vamos a aportar otras miradas.
(Lombardi) La semana que viene presentaremos al equipo que encabezará estos canales. Seguramente circularán contenidos de estos y otros medios dentro del sistema. Nosotros tenemos una visión positiva de Encuentro, más allá de cierto sesgo que tiñó todo en los últimos meses.
La Nación

- Que se passera-t-il avec Canal Encuentro, Paka Paka et DeporTV ? (14)
(Ricardes) - Educar est une structure que nous partageons avec le Ministère de l'Education. Ce ministère va continuer à s'occuper du contenu spécifique pour les élèves, les parents et les éducateurs. Et les chaînes de télévision relèvent de notre responsabilité. Nous allons continuer avec les trois chaînes, nous allons revoir les grilles de programmation, nous allons conserver les émissions qui nous paraissent intéressantes et nous allons apporter d'autres contributions, avec un autre regard.
(Lombardi) - La semaine qui vient, nous présenterons l'équipe qui sera à la tête de ces chaînes. Ce qui est sûr, c'est que leurs contenus et ceux d'autres médias circuleront à l'intérieur du système. Nous avons une vision positive de Canal Encuentro, au-delà d'une certaine distorsion qui a tout déformé ces derniers mois.
(Traduction © Denise Anne Clavilier)

-¿Cómo se va a resolver la cuestión del directorio de Radio y Televisión Argentina (RTA), que se rige por la ley de medios?
(Lombardi) Estamos hablando de Canal 7, Radio Nacional sus FM y las 50 emisoras que la integran en todo el país. En la ley de medios audiovisuales está claro qué es RTA, sus objetivos y cómo se compone su directorio, que tiene siete miembros. Dos son designados por el Poder Ejecutivo, tres por el Congreso, uno por las universidades y otro por los trabajadores (estos últimos son a su vez designados por el Consejo Federal de Comunicación Audiovisual). Fueron designados hace dos años con un mandato de cuatro años. ¿Con qué filosofía encaramos esta transformación? Nosotros estamos convencidos de que hay que darle al sistema la combinación de mantenimiento de las cosas buenas que se hicieron y corrección de las malas. Esto significa un recambio institucional dentro de la misma organización. Aspiramos a que todo el mundo reflexione y permita este cambio, que dará continuidad a RTA.
El Ejecutivo tiene sólo dos directores. Uno ya renunció, que es Tristán Bauer. Falta el ingeniero Alberto Cantero, con quien me voy a reunir mañana y al que ya le hemos pedido un paso al costado. Lo que estamos pidiendo que nos dejen designar a los dos directores del Ejecutivo para darle continuidad a las cosas buenas que se hicieron.
La Nación

- Comment va se résoudre le problème de la direction de Radio et Télévison Argentines (RTA) qui est régi par la loi des médias ? (15)
(Lombardi) - Nous parlons là de Canal 7, Radio Nacional, ses modulations de fréquence et ses 50 antennes locales dans tout le pays. Dans la loi sur les médias audiovisuels, ce que sont RTA, ses objectifs et la manière dont se compose son comité directeur, de sept membres, c'est très clair. Deux sont désignés par le pouvoir exécutif, trois par le Congrès, un par les universités et un autre par les [représentants des] salariés (lesquels sont désignés de leur côté par le Conseil fédéral de communication audiovisuel). Ils ont été désignés il y a deux ans pour un mandat de quatre ans. Quelle est notre philosophie pour envisager cette transformation ? Nous sommes convaincus qu'il faut donner au système une combinaison entre le maintien des bonnes choses qui ont été faites et la correction des mauvaises. Cela entraîne un changement institutionnel profond à l'intérieur de l'organisation elle-même. Nous souhaitons que tout le monde réfléchisse et permette ce changement qui fera que RTA continue.
L'Exécutif n'a que deux directeurs. L'un a déjà démissionné, c'est Tristán Bauer. Pas l'ingénieur Alberto Cantero (16), avec lequel je vais avoir une entrevue demain et à qui nous avons demandé de se retirer. Ce que nous demandons, c'est qu'ils nous laissent désigner les deux directeurs de l'Exécutif pour continuer les bonnes choses qu'ils ont faites.
(Traduction © Denise Anne Clavilier)

-Pero si Cantero no renuncia, ¿Podrían intervenir RTA como se hizo con la Afsca y la Aftic?
(Lombardi) Hay varios mecanismos legales, uno de esos es ese. Nosotros instamos a todo el mundo a que sea razonable. Esto es central para los pasos posteriores, para la designación de las autoridades en Canal 7 y Radio Nacional. Creo que son importantes los hechos se dieron estos días, aún antes de asumir: la renuncia de Bauer, de la directora de Radio Nacional, María Seoane, y los gerentes del noticiero en Canal 7, Carlos Figueroa -que había sido jefe de campaña de Mariano Recalde- y Víctor Taricco. También se fue el presidente de Telam, Fabián Rodríguez. Y a todo esto se suma que el grupo Indalo decidió retirar 6,7,8, que era un programa suyo.
Con esto ya se empieza a sentir el recambio institucional, con lo cual además estamos ahorrando cuantiosas indemnizaciones y costos al Estado. Hay que tener mucho cuidado con esto. Con firmeza y paciencia hemos venido logrando estos objetivos.
La Nación

- Mais si Cantero ne démissionne pas, pourriez-vous prendre le contrôle direct de RTA comme cela s'est fait à la AFSCA et la AFTIC ?
(Lombardi) - Il y a plusieurs mécanismes légaux, dont celui-là. Nous demandons instamment à tout le monde de se montrer raisonnable. C'est crucial pour les démarches postérieures, pour la désignation des dirigeants à Canal 7 et Radio Nacional. Je crois que les faits qui ont eu lieu ces jours derniers, avant même l'investiture du gouvernement, sont importants : la démission de Bauer, de la directrice de Radio Nacional, María Seoane, et les directeurs de service du journal télévisé de Canal 7, Carlos Figueroa, qui avait été directeur de campagne de Mariano Recalde- (17) et Víctor Taricco. Le président de Télam, Fabián Rodríguez, est parti lui aussi. Et à tout ça, il faut ajouter que le groupe Indalo s'est décidé à retirer 6,7,8, qui était l'un de ses programmes (18).
A partir de là, on commence à sentir un grand changement institutionnel, grâce à quoi nous réalisons en plus de substantielles économies pour l'Etat. Il faut aussi être très attentif à cet aspect des choses. Avec de la fermeté et de la patience, on va parvenir à atteindre ces objectifs...
(Traduction © Denise Anne Clavilier)

-Pero hay quienes siguen resistiendo...
-(Lombardi) Todas estas patrullas perdidas se engloban en un concepto muy equivocado y de baja comprensión del tiempo que estamos viviendo. Detrás de todo esto está la idea de resistencia. La resistencia peronista se hizo del 55 al 73 considerando que Perón estuvo proscripto y luego al régimen dictatorial del 76 al 83. Entendemos el concepto de resistencia pero es anacrónico y ética y políticamente bajísimo hacerle resistencia al gobierno constitucional de los argentinos, que asumió hace dos semanas. ¿De qué resistencia están hablando? ¿Resistencia a la voluntad popular, a la democracia, a la república? Es intolerable. No pueden existir estas patrullas perdidas. Es una cosa escandalosa que hemos naturalizado.
La Nación

- Mais il y en a qui continuent à résister...
(Lombardi) - Tous ces barouds d'honneur correspondent à une conception très erronée, à une très mauvaise compréhension de l'époque que nous sommes en train de vivre. Derrière tout ça, il y a la notion de résistance. La résistance péroniste a eu lieu de 1955 à 1973 parce que Perón était proscrit et ensuite contre le régime dictatorial de 1976 à 1983. Nous comprenons la notion de résistance mais elle est anachronique et, sur le plan éthique et politique, c'est nullissime de faire de la résistance contre le gouvernement constitutionnel des Argentins, qui est entré en fonction il y a deux semaines. De quelle résistance parle-t-on ? Résistance à la volonté populaire, à la démocratie, à la république ? C'est intolérable. Ces barouds d'honneur, ça ne doit pas exister. C'est un scandale qui a fini par nous paraître quelque chose de normal.
(Traduction © Denise Anne Clavilier)

-(Sigal) Nosotros reclamamos como actitud para gobernar la posibilidad de cambiar las cosas porque no estamos de acuerdo con muchas de las que se hicieron. Por eso la ciudadanía decidió cambiar la administración del Estado. En el área que me toca a mi estamos frente a lugares que se han distorsionado. La Radio Nacional, el canal oficial y la agencia Télam no son lugares para irradiar propaganda partidaria. Allí tienen que estar representada la sociedad argentina. En los medios públicos no hubo debate. Debatir no es bajar línea, es escuchar, responder y llegar a una síntesis.
Inevitablemente, para montar algo nuevo hay que desmontar cosas viejas. Ahí tenemos un trabajo fuerte, yo soy muy consciente de lo que significa este anquilosamiento y retraso que ha habido en los medios del Estado.
-(Ricardes) Escuchamos periodismo, cultura y ciencia militante, como si todo eso bien hecho no fuera militante por sí mismo. ¿Cómo no creer en el poder revolucionario del arte y la cultura cuando está bien ejercida?
-(Sigal) Una sociedad plural existe si vos respetás todas las voces. La homogeneidad no es democrática. Son cosas muy elementales pero se han convertido en extrañas. Nosotros no venimos a construir un contrarrelato, que sería absurdo.
La Nación

(Sigal) - Pour gouverner nous revendiquons la possibilité de changer les choses parce que nous ne sommes pas d'accord avec beaucoup de celles qui se sont faites. C'est pour cette raison que nos concitoyens ont décidé de changer la politique à la tête de l'Etat. Dans le secteur qui me concerne, nous sommes face à des institutions qui ont été détournées de leur objectif. Radio Nacional, la chaîne publique et l'agence Télam ne sont pas des institutions destinées à diffuser de la propagande de parti. C'est le lieu où la société argentine doit se voir représentée. Dans les médias publics, il n'y a pas eu de débat. Débattre, ce n'est pas mettre abaisser le pavillon, c'est écouter, répliquer et parvenir à une synthèse.
Inévitablement, pour monter quelque chose de nouveau, il faut démonter des choses anciennes. Et là-dessus, nous avons beaucoup de travail, je suis très conscient de ce que signifie cette ankylose et ce retard qu'il y a eu dans les médias de l'Etat.
(Ricardes) - Nous entendons les journalistes, les hommes de culture et les scientifiques qui militent. Comme si tout cela, quand c'est bien fait, ce n'était pas du militantisme en soi ! Comment ne pas croire au pouvoir révolutionnaire de l'art et de la culture quand il est bien exercé ? (19)
(Sigal) - Une société plurielle existe à condition que tu respectes toutes les voix. L'homogénéité ce n'est pas démocratique. Ce sont des choses très élémentaires mais elles se sont transformées en bizarreries. Nous, nous ne venons pas construire un contre-récit, ça serait absurde.
(Traduction © Denise Anne Clavilier)

-¿Cuáles son los modelos a seguir en la radio y televisión públicas?
-(Lombardi) Nosotros aprendemos de todos. Podemos aprender de la TV francesa, la BBC o la TV Nacional de Chile, que son modelos distintos entre sí, pero que se pueden adaptar a la realidad y la idiosincrasia argentinas. Nosotros tenemos que operar sobre la realidad argentina, que es distinta de la francesa, la británica o la chilena. Una cosa que sí vamos a hacer es un manual de estilo de los medios públicos, cuya redacción vamos a encargar a un consejo de intelectuales.
-(Sigal) Necesitamos recuperar el objetivo de los medios públicos que estuvo adormecido detrás de la propaganda. La propaganda te convierte en un sujeto pasivo. La idea del periodismo militante subestimó al periodista, al que deja sin la capacidad de pensar por cuenta propia. Eso es una aberración. Es la idea que se instaló la ex presidenta, la idea de que el periodista es alguien comprable por unos pesitos.
La Nación

[…]

- Quels sont les modèles que la radio et la télévision publiques devraient suivre ?
(Lombardi) - Nous, nous apprenons de tout le monde. Nous pouvons apprendre de la télé française, de la BBC ou de la télé nationale du Chili, qui sont des modèles différents l'un de l'autre, mais qui peuvent être adaptés à la réalité et aux particularités argentines. Nous devons opérer sur la réalité argentine, qui est différente de la réalité française, britannique ou chilienne. Une chose que nous allons faire, là c'est clair, c'est un manuel avec des règles de conduite des médias publics dont nous allons confier la rédaction à un conseil d'intellectuels.
(Sigal) - Nous avons besoin de maîtriser la raison d'être des médias publics qui s'est endormie derrière son rideau de propagande. La propagande te transforme en un sujet passif. L'idée du journalisme militant sous-estime le journaliste, qu'il prive de sa capacité à penser par lui-même. Et ça, c'est une aberration. C'est l'idée dans laquelle s'est installée l'ex-présidente, l'idée que le journaliste c'est quelqu'un qu'on peut acheter avec quelques sous. (20)
(Traduction © Denise Anne Clavilier)

-¿Es posible hacer periodismo desde el Estado?
-(Lombardi) Es una pregunta filosófica. Nosotros creemos que sí, es posible desde lo público no desde lo gubernamental.
-(Ricardes) Es otra también la misión, la difusión de otra información o de realidades locales que los medios privados no cubren.
La Nación

- Est-il possible de faire du journalisme dans des organismes d'Etat ? (21)
(Lombardi) - C'est une question philosophique. Nous, nous croyons que oui, c'est possible dans un cadre public, pas au sein d'un gouvernement.
(Ricardes) - C'est aussi que la mission est différente, il s'agit de diffuser une autre information, parler de réalités locales que les médias privés ne couvrent pas.
(Traduction © Denise Anne Clavilier)

Pour aller plus loin :
lire l'intégralité de l'interview dans La Nación de dimanche
lire l'article de La Nación sur l'analyse du ministre de l'Intérieur sur la situation à l'AFSCA, la haute autorité fédérale de l'audiovisuelle reprise en main directement par le Gouvernement obligé de révoquer un directeur qui entendait faire de la résistance depuis ses fonctions
lire l'éditorial de Página/12 de lundi, signé par Horacio González. L'ex-directeur de la Bibliothèque nationale, qui ne mentionne même plus cette fonction alors que son remplaçant, Alberto Manguel, n'arrive qu'en juillet, y répond indirectement à Hernán Lombardi. Cet article s'avère très pénible à lire à cause d'une langue de bois très épaisse dont abuse ce sociologue, qui savait pourtant être clair et intéressant avant l'alternance. Il en découle une argumentation incompréhensible, où il peine à justifier l'emploi du concept de "résistance" dans le contexte pleinement démocratique qui est aujourd'hui celui de l'Argentine.
Vous pouvez lire aussi l'article d'aujourd'hui, dans La Nación, sur les contrats 2016 de quelques vedettes kirchneristes de Radio Nacional. C'est tristement édifiant sur la manière dont certaines personnes ont abusé (mais les mêmes injustices se produisent aussi par chez nous pour les vedettes du micro qui absorbent l'immense part de la masse salariale au détriment des travailleurs plus modestes mais néanmoins indispensables à la bonne marche de l'ensemble).

Ajouts du 6 janvier 2016 :
lire aussi cet article de Página/12 qui rapporte le point de vue du personnel du CCK soutenu par deux syndicats : les salariés se plaignent du manque de dialogue avec les nouveaux dirigeants,
lire l'article de La Nación sur la situation des salariés précaires dont le contrat, qui prenait fin le 31 décembre, n'a pas été renouvelé et qui devraient dans les jours qui viennent avec chacun un entretien sur le poste occupé et l'éventuelle embauche ferme. Cet article est plus équilibré et moins polémique.
Quand on lit les deux analyses, on prend conscience qu'il a sans doute chez certains kirchneristes l'idée qu'une confiscation de cette infrastructure publique à leur profit est légitimée par le fait que le centre a été pensé et conçu par Cristina de Kirchner. Ils ne semblent pas avoir pris conscience que le vote du peuple souverain est au-dessus de leurs desiderata individuels.
Le discours, qui se soutenait très bien lorsque ces mêmes personnes étaient dans la majorité, se transforme maintenant en un déni de démocratie assez préoccupant et donne raison (à mes yeux a posteriori) à l'ancienne opposition qui m'a souvent surprise (pour ne pas dire choquée) par ses accusations ultra-violentes et souvent insultantes contre la majorité de despotisme et d'appropriation (des accusations de despotisme et d'appropriation de l'Etat que j'écoutais sans en accepter le bien-fondé à cause de leur caractère éructant, parfois franchement haineux et de l'absence d'argument pour les fonder, en bonne Européenne habituée à construire une argumentation dans tous les domaines). Je constate que l'expression de l'hostilité civique et son ton quasi-haineux ainsi que la mauvaise foi, à moins qu'il ne s'agisse que de cette déroutante absence d'argumentation qui se tienne, ont changé de camp.

Ajouts du 7 janvier 2016 :
lire l'article de La Prensa, où Lombardi explique la raison du non-renouvellement de 600 contrats de travail du CCK issus d'un montage irrégulier de prêt de main d'œuvre de la part de trois universités nationales de la périphérie portègne, trois universités très marquées par le kirchnerisme. Le ministre y confirme ce qu'il disait déjà dans la longue interview de La Nación : le CCK a commencé à fonctionner sans qu'il y ait eu livraison des travaux, sans garantie et même avec d'éventuels problèmes de sécurité pour les personnes fréquentant ce lieu avant cette étape-clé avant ouverture.
lire la depêche de Télam sur l'analyse syndicale de cette même situation des personnels du CCK, où le montage financier très compliqué est présenté comme normal par le représentant syndical alors que c'est une vraie usine à gaz !

Ajout du 23 janvier 2016 :
Dans ses conversations de l'été, des interviews vidéos souvent très intéressantes, La Nación a mis en ligne hier un entretien d'environ une demi-heure avec les deux sous-secrétaires, Graciela Ricardes et Jorge Sigal. Ils commentent les récents événements médiatico-politiques du mois de janvier, sans langue de bois à ce qu'il me semble depuis mon expérience des médias publics en Europe, et exposent leur plan de travail pour les six mois à venir.
Cela peut se regarder et s'écouter en cliquant sur ce lien.
Bien entendu, les militants kirchneristes ne manqueront pas de dénoncer un discours mensonger pour endormir la vigilance du citoyen de gauche. A l'heure qu'il est, je ne vois aucune raison de sombrer dans ce pessimisme. Leur discours est cohérent avec le modèle démocratique et pluraliste qu'ils disent vouloir mettre en place en Argentine. Sans se risquer dans une autre langue que la sienne, la gauche kirchneriste pourrait facilement s'en convaincre en consultant le portail Web de la RTVE : il verrait que le modèle d'un grand groupe audiovisuel public démocratique est bien celui-là.



(1) Ce rattachement est un peu étrange. Certes ce sont deux institutions qui ont été fondés par le gouvernement précédent et ont servi d'écrin à une certaine propagande kirchneriste pendant que les activités similaires dans l'opposition servait à la communication inverse. Mais il y en a d'autres, comme la Casa del Bicentenario para exemple et elle a elle aussi servi de support à beaucoup de propos typiquement kirchneristes. Alors pourquoi ces deux-là alors que tout le reste est resté dans l'escarcelle du ministre de la justice. Pour moi, jusqu'à présent, c'est mystère et boule de gomme !
(2) Il a en particulier employé des expressions très méprisantes en parlant de traque aux ñoquis (pour désigner des employés payés à ne rien faire, dans ce qui s'apparente à des accusations d'emplois fictifs) et, sur suggestion du journaliste, qui se montre assez complaisant avec ses interlocuteurs, il s'est livré à des généralisations vexatoires, en suggérant qu'il y aurait eu des malversations partout dans les différents organismes dont il a maintenant la charge tout en avouant qu'en fait, il n'en sait rien. Il a répondu en trois phrases, la première aurait été suffisante. Jugez-en plutôt :
-¿Podría haber hechos de corrupción?
(Lombardi) Si hubieran conductas penales, serán derivadas a la Justicia inmediatamente. En todos estos lugares las podría haber. No nos gusta prejuzgar, pero damos la certeza que si las hubiera irán a la Justicia. (La Nación).
Tandis qu'avec ces trois phrases, il a tendu une perche merveilleuse à Horacio González qui s'est empressé de répondre sur Página/12 aujourd'hui.
(3) Il y a ici une très mauvaise interprétation de la hiérarchie des actes politiques de la part de certains membres de l'ancienne majorité. En démocratie, dans un Etat de droit, l'acte politique souverain par excellence, c'est celui du corps électoral et non pas celui d'un mandataire passé qui ne peut pas prolonger son action au-delà de la durée de son mandat par nomination interposée (cette dernière solution relève de l'Ancien Régime, sous lequel la souveraineté revient non pas à la Nation, qui s'exprime à travers le corps électoral, mais au Prince, qui n'est responsable devant personne, sauf devant Dieu lorsqu'il s'agit d'une monarchie de droit divin). On a ici un nouvel exemple de cette confusion si fréquente en Argentine entre Etat et Gouvernement, une confusion que Hernán Lombardi a le mérite de dénoncer depuis le premier jour et sans varier dans la clarté des concepts qu'il manie.
(4) Le récit en question, c'est la version de l'histoire du pays proposée par Cristina de Kirchner, une vision marquée au sceau de l'idéologie, donc qui tord la réalité dans un sens précis, et qui a été et reste partagée par une bonne partie de l'opinion publique. Depuis les élections primaires d'août, ce récit s'est d'ailleurs radicalisé en accentuant les divisions entre les Argentins au point que des gens jusqu'alors plutôt favorable à Cristina de Kirchner ont fini par s'en détacher et il semble que ses aspects les plus caricaturaux ont été révélés par la modération de la nouvelle majorité après le second tour. Ce récité épouse bien souvent les thèses de ce qu'on appelle en Argentine le revisionismo, courant idéologique qui a son propre institut national, fondé par Pacho O'Donnell, qui l'a abandonné il y a quelques mois parce qu'il lui semblait que la ligne politique tournait un peu trop au consensus. Au long des trois mandats kirchneristes, Pacho O'Donnell a plutôt durci ses positions, au point d'avoir aujourd'hui une mentalité qui frise la guerre civile. Ce n'est pas bon signe à l'issue d'une période politique qui se vante d'avoir renforcé la démocratie.
(5) Ce n'est pas faux !
(6) Très pauvre, c'est peut-être exagéré. C'est moins riche qu'un vrai pluralisme, c'est sûr, mais ça a indéniablement de la tenue et de la cohérence. Voilà un jugement de valeur qu'il aurait mieux valu ne pas prononcer, il ne fait que raidir l'opposition en la méprisant.
(7) Or c'est précisément de cette manière que s'envisage le revisionismo par exemple, comme une alternative à l'histoire mitriste (de Bartolomé Mitre, 1821-1906). Comme si l'évolution de l'histoire aujourd'hui devait se construire comme une alternative à une conception des choses qui remonte à 1860... Et c'est aussi cette substitution d'une pensée unique par une autre pensée unique que l'opposition continue de craindre avec ce changement de majorité. Avec les nominations extrêmement brillantes qui ont été faites dans le secteur culturel, ce risque me paraît s'éloigner à grands pas. D'autant qu'est sans doute arrivée l'époque où l'Argentine peut s'élever au rang d'une démocratie mûre quand elle a un Pape qui jette sur elle la lumière depuis Rome. Et un tel projecteur sur soi, ce n'est pas n'importe quoi pour un pays qui a une aussi haute opinion de lui-même que l'Argentine. Il faut être à la hauteur. Visiblement, Macri en a conscience et on se souvient de ce que la même situation avait provoqué en Pologne jusqu'au dernier souffle de Jean-Paul II (même si maintenant, dix ans après sa mort, ce bel élan retombe...)
(8) Allusion essentiellement à la grande vague migratoire des années 1880-1930 mais il y a eu aussi de l'immigration tout au long de l'histoire argentine, depuis les années 1520 jusqu'à aujourd'hui. L'un des pères de l'Argentine indépendance, Manuel Belgrano (1770-1820), était le fils d'un Italien.
(9) En dehors de la mégalopole qu'est le Gran Buenos Aires avec ses 11 millions d'habitants, l'Argentine se compose de cinq grandes régions géo-culturelles que j'ai personnellement voulu respecter dans mon recueil, Contes animaliers d'Argentine, paru en juin 2015 (Editions du Jasmin) : le nord-ouest (autour de Tucumán, Salta et Jujuy, premier noyau de présence chrétienne dans l'actuelle Argentine), le nord-est appelé aussi Litoral ou Mesopotamia entre les fleuves Paraná et Uruguay, marqué par les républiques agraires et largement métissées des Missions jésuites (Entre Ríos, Corrientes et Misiones), le Centre ou les Pampas avec les Provinces actuelles de Santa Fe, Buenos Aires, La Pampa et Córdoba, Cuyo autour de Mendoza, San Juan et San Luis et l'immense Patagonie qui va jusqu'au cercle polaire avec la Tierra de Fuego. A chacune de ces régions correspondent des musiques spécifiques, bien reconnaissables, des spécialités gastronomiques, des événements historiques marquants, des productions agricoles qui dépendent du paysage et du climat, donc des modes et des rythmes de vie différents...
(10) Cela semble être déjà la réalité au moins sous des aspects non directement culturels. Je n'ai pas souvenir d'avoir vu Cristina aller visiter des provinces sinistrées s'il ne s'agissait pas de provinces qui lui étaient proches, par des liens personnels ou des liens politiques. Je ne me souviens pas de l'avoir vu visiter une province dont le Gouverneur ne soit pas dans son alliance ou son parti. En quinze jours depuis son investiture, Mauricio Macri s'est rendu dans trois provinces affectées par des catastrophes sociales ou naturelles sans s'arrêter à des considérations partisanes. C'est une rupture avec la pratique précédente.
(11) Si cela se fait, ce sera une véritable et profonde rupture. L'Argentine officielle sous les Kirchner était très autarcique dans ces domaines comme en d'autres. Ce qui est très péroniste. A ceci près que Perón a gouverné en pleine guerre froide et au tout début de l'existence de l'ONU, ce qui est un contexte très différent de celui qui prévaut aujourd'hui.
(12) 2016 sera la dernière année des six au cours desquelles l'Argentine aura célébré sa révolution et son indépendance. Le 9 juillet 2016, ce sera le bicentenaire de la Déclaration d'indépendance (votée à Tucumán). Le 15 janvier 2017, on fêtera sans doute celui du départ de la plus grande épopée de cette période fondatrice, le départ de l'Armée des Andes, sous la conduite de José de San Martín. Il va falloir voir comment l'Argentine va célébrer le bicentenaire de la victoire de Chacabuco, le 12 février 2017. La bataille s'est produite sur le sol chilien, à quarante kilomètres environ au nord de Santiago. En tout cas, pour la nouvelle majorité, c'est une occasion qu'elle n'espérait même pas avoir de mettre sa marque sur ces célébrations à si haute valeur symbolique pour un jeune pays.
(13) Ce ministère n'existe plus dans l'actuel organigramme gouvernemental.
(14) Canal Encuentro est la chaîne de télévision culturelle généraliste. Paka Paka une chaîne culturelle et éducative pour les enfants. DeporTV est la chaîne de télévision consacrée au sport.
(15) Ley de medios : une des lois les plus emblématiques du gouvernement précédent, qui s'efforce de limiter la constitution de groupes hégémoniques dans le monde des médias et des fournisseurs d'accès Internet. Le Président Macri a d'ores et déjà annoncé qu'il voulait lui apporter des modifications profondes, voire la rendre tout à fait inefficace et revenir à la situation antérieure. C'est en tout cas ce que le Groupe Clarín, encore et toujours hégémonique, attend de lui pour prix du soutien à sa campagne électorale.
(16) En Argentine, on donne toujours leur titre universitaire aux gens. Ingeniero est ici l'un de ces titres. Mauricio Macri porte lui-même ce titre.
(17) Mariano Recalde a été le candidat au Gouvernement portègne. Jusqu'au 10 décembre 2015, il était aussi le PDG d'Aérolineas Argentinas. Vous voyez un peu le cumul des fonctions ! Qu'on ne nous dise pas après ça que Radio Nacional était un bastion du pluralisme en Argentine, comme osait le prétendre María Seoane dans une note de service que j'ai lue il y a deux ans et demi, après des élections de mi-mandat, pendant que j'attendais un journaliste dans un couloir : elle y félicitait le personnel d'avoir su rendre compte des résultats en respectant l'indispensable pluralisme. Je n'en croyais pas mes yeux.
(18) 6,7, 8 était un programme de débat tous les soirs en semaine mais un débat entre des participants tous d'accord sur le fond pour soutenir la politique de Cristina Kirchner et ridiculiser l'opposition. C'était censé être une émission de réflexion sur la manière dont les médias rendaient compte de l'actualité. Parmi les participants réguliers, il y avait la journaliste de Página/12, Sandra Russo, qui a écrit l'une des biographies de Cristina de Kirchner, il y a quatre ans. J'ai regardé une ou deux fois l'émission : c'était vif et plein d'esprit (d'esprit méchant) et il est sûr qu'à la longue, tous les soirs du lundi au vendredi, et encore plus si vous étiez du bord opposé, cela ne pouvait que devenir très vite absolument insupportable. L'émission a été diffusée à l'antenne pour la dernière fois mercredi dernier et dimanche, les animateurs vedettes se sont retrouvés dans un parc de Buenos Aires en plein air pour faire une nouvelle émission, non diffusée, mais qui a rassemblé une foule de militants kirchneristes. La page Facebook de l'émission est d'ailleurs toujours alimentée et conserve son ton querelleur et clivant.
(19) Cela peut faire sourire de voir des gens classés à droite dire cela mais c'était l'analyse que faisait déjà Georges Pompidou, grand connaisseur de l'art contemporain, lorsqu'il était président de la République, installé dans un conservatisme tranquille sans une once de pensée de gauche...
(20) Quel mépris ! Il y a pourtant beaucoup de journalistes kirchneristes ou péronistes ou plus globalement de gauche ou anti-libéraux qui le sont non pas parce qu'ils ont été achetés mais parce que ce sont leurs convictions. C'est très grave de dire que les autres expriment une pensée adverse parce qu'on les a achetés. Or c'est une théorie qui était déjà celle de l'opposition avant les élections. Sur ce point, ils n'ont pas changé.
(21) C'est intéressant qu'un journaliste de La Nación pose la question. Comme si les journalistes qui travaillent dans les grands médias publics en Europe par exemple étaient contraints de travailler à la soviétique ou à la chinoise. Il a beau de se réclamer de l'ouverture, ce bonhomme n'a même pas pris la peine d'étudier la manière dont ses confrères étrangers excercent leur métier. Ce n'est pourtant pas difficile de s'informer. Il lui suffirait de s'informer auprès des correspondants à l'étranger de la rédaction (Elisabetta Picqué, à Rome, pour ne citer qu'un nom) et d'étudier un tout petit peu les sites Internet de RTVE (sans sortir de l'espagnol), de la RAI (l'italien, ce n'est pas bien difficile pour un Argentin) ou d'aller regarder du coté de la BBC ou des radio-télévisions irlandaise, belge, française, autrichienne, etc. Il est aussi recroquevillé derrière les frontières nationales que les kirchneristes qu'il déchire à belles dents et avec tant de gourmandise malsaine.