lundi 31 mai 2021

Eh non ! La radio n’a pas cent ans ! [ici]

Une image conçue l'année dernière en Argentine
On y voit le théâtre Coliseo, les quatre techniciens et leur matériel
ainsi que la localisation du théâtre à Buenos Aires
En haut : "Cent ans après la prouesse des fous de la terrasse"


Eh non ! La radio n’est pas née à Paris il y a cent ans grâce à la Tour Eiffel comme le chantent, le célèbrent et le clament les médias français depuis quelques jours.

Les quatre héros du 27 août 1920

La première émission de radio du monde s’est produite le 27 août 1920, il y a donc bientôt cent un ans. Cela s’est passé à Buenos Aires, si, si ! Cela blesse notre ego d’Européens et de Français mais c’est la vérité historique. Et je l’ai d’ailleurs raconté sur ce blog à la bonne date. Cherchez, vérifiez...

Leurs photos et leurs noms !
"Les gars du Coliseo"

Une petite bande de quatre jeunes gens fous de technique s’était installée sur le toit d’un théâtre, le Coliseo, où l’on jouait Parsifal de Wagner et ils ont retransmis cet opéra en direct, ce jour-là, à partir de 21h. C’était la naissance de Radio Nacional Argentina.

On les a surnommé Los locos de la azotea (les fous du toit terrasse).

"Un jour comme aujourd'hui, quatre fous
réussissaient un tour de magie depuis une terrasse
27 août : fête de la Radiodiffusion argentine"

De nos jours, en Argentine, le 27 août est la fête de la Radio dans tout le pays.

© Denise Anne Clavilier

Pour aller plus loin :

voir cet article de France Culture qui se rapporte, à tort, à une « première » émission de radio en 1921. Et c’est France Culture, la radio la plus savante du PAF !

dimanche 30 mai 2021

Les agendas parlent et la télé couvre [Actu]

"Qui se ressemble s'assemble", dit le gros titre


Dans la bataille féroce qui fait rage à un peu plus de 3 mois des primaires de mi-mandat, prévues en septembre, Página/12 sort ce matin un scoop concernant les scandales qui entachent le mandat de l’ancien président Mauricio Macri, suspecté de diverses malversations dont plusieurs sont maintenant attestées par des documents difficilement contestables et que vient de confirmer la fuite inattendue d’une de ses éminences grises, un étrange avocat qui a demandé l’asile politique à l’Uruguay (où il semble bien qu’il ne l’obtiendra pas).

Il y a une dizaine de jours, la fuite de Fabián Rodríguez Simón, dit Pepín (ci-dessus), a été évoquée par toute la presse et tout l’arc politique, non sans gêne à droite car personne ne peut sans rougir approuver la lâcheté de ce comportement, sauf Macri lui-même qui parle de chasse aux sorcières et donne raison à son ancien conseiller d’avoir cherché refuge à l’étranger. Puis, tandis que Página/12 continuait à battre ce fer tant qu’il était chaud, le reste de la presse, plutôt de droite, passait à d’autres sujets, la querelle de l’ouverture de l’école en plein confinement à Buenos Aires constituant d’ailleurs un formidable motif pour remplir les pages des quotidiens d’autres thématiques. Or "Pepín" est soupçonné d’avoir mené de sombres opérations pour compromettre les principales figures de l’opposition, qui par ailleurs étaient sous écoutes illégales, et d’avoir monté de toutes pièces contre elles des dossiers judiciaires. Au moment de sa fuite à Montevideo, l’homme était sans doute sur le point d’être convoqué par les juges pour de premières auditions désagréables.

Or Página/12 vient d’avoir accès aux agendas officiels du bonhomme et de Mauricio Macri lui-même alors qu’il était président (on se croirait en plein dans une enquête de Médiapart ou du Monde). La rédaction en fait sa une ce matin, à la veille d’un déconfinement plus que précoce, contestable et contesté dans la ville de Buenos Aires, toujours terriblement affectée par l’épidémie. Le journal a analysé les informations qu’ils contiennent et montre, reproductions de certaines pages à l’appui, que des réunions secrètes se sont tenues entre l’ancien président et son conseiller, notamment à l’étranger, en particulier à New York en marge de rencontres avec Christine Lagarde au FMI,, et que le second prenait en Argentine et à l’étranger des contacts qui n’auraient pas dû être de son ressort, ce qui tend bien à prouver l’existence de manœuvres pas très catholiques, surtout quand ces données sont rapprochées du calendrier des opérations judiciaires intentées contre Cristina Kirchner, ses proches, ses ministres et ses conseillers sous la présidence de son successeur et opposant ainsi que de l’identité des magistrats qui sont alors intervenus dans ces dossiers (pas vraiment des militants de gauche).

Mauricio Macri a-t-il eu vent de l’imminente sortie de cette enquête explosive ? Peut-être. A-t-il voulu faire diversion ou allumer un contre-feu ? Ce n’est pas impossible car il était hier soir l’invité exclusif d’une très célèbre émission de télévision, La Noche de Mirta Legrand, sur Canal 13, une chaîne commerciale de droite.

La Noche de Mirta Legrand se présente comme un dîner chichiteux et ampoulé, qui ne ressemble en rien à ce qu’il se passe ordinairement dans les foyers argentins où l’on regarde l’émission : fleurs sur la table (en marbre, vrai ou faux), argenterie, jeux de verres en cristal pour l’eau et le vin, vaisselle clinquante, service à l’assiette et en gants blancs, menus aussi prétentieux que dans un restaurant européen trois étoiles au Michelin, avec les mêmes petites portions dans un pays où il est pourtant d’usage de servir les convives avec une générosité pantagruélique. Cette impudence du luxe inaccessible et du raffinement frelaté fait sans doute rêver le public. Il est possible aussi que tant de splendeur l’impressionne et qu’elle l’écrase à peu près autant que l’apparence toujours spectaculaire de la présentatrice. Mirta Legrand, qui a plus de 90 ans, affecte en effet d’en avoir cinquante de moins à grand renfort de fards et de tenues extravagantes, tout en fourreaux, paillettes, strass, boas et couleurs écarlates, façon reine d’Angleterre (bijoux compris). Au début de la pandémie, cette vedette hors d’âge a laissé sa place au haut-bout de la table à sa petite-fille, Juana Viale, qui a repris l’émission de Mémée telle quelle : même décor, même style artificiel au-dessus des moyens du téléspectateur tant par le service, le contenu de l’assiette et les tenues des convives, même parti-pris idéologique et même positionnement partisan, résolument de droite. Notez aussi qu’alors que, dans la vraie vie, tous les restaurants sont fermés pour le commun des mortels au risque de mettre la clé sous la porte et que les Argentins ont interdiction de s’inviter les uns chez les autres afin de limiter l’expansion de la maladie, au studio, on continue à bâfrer comme si de rien n’était (1).

Photo tirée de l'émission d'hier

Hier, Mauricio Macri était donc le seul invité et il a eu toute latitude pour s’exprimer sans contradicteur. Les sujets qui fâchent vraiment (comme les questions entourant le scandale Pepín) n’ont pas été abordés. Au propre et au figuré, l’animatrice s’est contentée de lui servir la soupe avec la même élégance affectée que sa grand-mère. Dans ces conditions confortables, l’ancien président ne s’est pas gêné pour faire le panégyrique de sa gestion des affaires publiques, pour discréditer ad libitum son successeur et l’actuel gouvernement qui se démènent, malgré la pandémie, pour sortir le pays de la dette contractée par lui-même sur la fin de son mandat auprès du FMI et pour justifier tout ce qu’il voulait comme il le voulait, y compris sa récente et très polémique vaccination dans une pharmacie de Miami avec le mono-dose de Johnson & Johnson, en contradiction avec certaine promesse faite aux Argentins quelques mois plus tôt sur Twitter.

Or, chose curieuse, dans ces conditions idéales pour soutenir la campagne électorale de son camp et marteler ses arguments, il a laissé paraître des doutes. Il a en effet déclaré : « je suis pessimiste à court-terme mais optimiste pour le long terme ».

Un aveu de défaite avant même la tenue des élections ? Avouez que c’est plutôt inattendu à ce stade de la campagne...

© Denise Anne Clavilier

Pour aller plus loin :

Sur le contenu des agendas :
Il n’est pas fait mention de cette affaire dans les autres titres de la presse quotidienne, qui ne parlent plus de Pepín depuis environ une semaine
Sur l’émission de Canal 13 :
lire l’article (doucement ironique) de Página/12
lire l’article de Clarín
lire l’article de La Nación
Les trois journaux ont choisi d’intégrer dans leur site Internet des extraits de l’émission.



(1) En Europe, les plateaux de télévision se sont presque tous adaptés à la règle générale et les émissions avec repas, comme C à Vous sur le service public (France 5), ont rangé les assiettes au placard en attendant des jours meilleurs.

Une touche d’humanité dans la campagne électorale [Actu]

"Sur mon état de santé"
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Esteban Bullrich est un sénateur de Juntos por el Cambio, la formation électorale montée pour faire réélire Mauricio Macri il y a deux ans (raté) et qui fait actuellement la guerre au gouvernement en tentant d’empêcher toutes ses initiatives, quelles qu’elles soient. Il fut ministre de l’Éducation sous la présidence Macri. Sur le terrain politique, il s’est toujours fait remarquer par ses fréquentes gaffes et son peu d’élévation d’esprit sur à peu près tous les sujets qu’il aborde.

Il y a un mois, avec une dignité qu’on ne lui connaissait pas encore, il a fait savoir publiquement qu’il était atteint d’une maladie dégénérative du système nerveux qui affecte progressivement et irrémédiablement ses fonctions musculaires et commence à entraver sa parole, lui qui n’a jamais été un bon orateur.

Au cours d’une interview, il vient de révéler que la présidente du Sénat, Cristina Kirchner, vice-présidente de la République et co-chef d’une majorité parlementaire qu’il combat avec la même hargne que les autres élus de droite, l’avait appelé pour prendre de ses nouvelles et qu’ils avaient tous les deux parlé de la consolation qu’apporte la foi en Dieu dans ces épreuves et de la force qu’elle donne pour les surmonter. Esteban Bullrich a reconnu publiquement que cet appel l’avait touché aux larmes.

Il n’est pas mauvais de découvrir qu’au milieu du détestable jeu de « tous les coups sont permis » que pratique l’opposition au milieu de la pandémie, de la difficulté à vacciner la population, de la dette publique à restructurer d’urgence pour que le pays survive, il existe quelques îlots où l’humanité l’emporte sur les autres considérations.

© Denise Anne Clavilier

Pour aller plus loin :

lire l’article de Clarín, où le radical Rodolfo Terragno tente de ramener l’opposition à la raison (le covid, affirme-t-il, n’est pas une maladie radicale ou péroniste). Terragno a été l’ambassadeur de Mauricio Macri à l’UNESCO, il a quitté son poste en 2019 dès qu’il a appris que les péronistes revenaient au pouvoir. C’est vous dire l’aisance avec laquelle il aborde lui- même l’alternance en politique.

samedi 29 mai 2021

Avec qui partir en vacances ? Napoléon ou San Martín ? Je vous réponds depuis la bibliothèque de l’Ambassade [ici]

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Hier, à l’Ambassade d’Argentine à Paris, comme le savent mes lecteurs assidus, j’ai donné une conférence : l’on m’avait invitée à vous présenter Napoléon (1769-1821) et San Martín (1778-1850), deux contemporains qui ont profondément marqué les pays où ils ont agi. Une proposition quelque peu acrobatique que j’ai acceptée avec enthousiasme puisque je ne suis pas de ceux ni de celles qui font du Napoléonbaching. Je ne me vois pas partir en vacances avec un bonhomme pareil, aussi génial que difficile à vivre au quotidien, mais l’aimer ou ne pas l’aimer, telle n’est pas la question pour un historien. Napoléon fait irréductiblement partie de notre histoire et la France comme l’Europe porte toujours l’empreinte de son passage sur cette Terre. La comparaison entre les deux s’est donc imposée il y a déjà un peu plus de deux cents ans. Du vivant de Napoléon. Il était donc tout à fait pertinent d’en tenter une étude comparée.

Le Bonaparte franchissant les Alpes de David
qui a imprimé sa marque dans l'iconographie sanmartinienne
Ici, la version commandée par Carlos IV et rapportée de Madrid
par Joseph Bonaparte jusqu'à la Malmaison en 1814

Pour relever ce défi carabiné (1), j’ai donc adopté le principe du jeu des 7 erreurs. Cela permet de dresser une présentation synthétique et structurée. La conférence a été donnée via Zoom, en direct sur les chaînes Facebook et Youtube de la représentation argentine, depuis la bibliothèque, une grande pièce dégagée que nous avons pris le soin d’aérer en ouvrant porte et fenêtres (nous avons ainsi profité des premières douceurs du printemps sur le quartier de l’Arc de Triomphe). A quatre personnes vaccinées dans la pièce, nous n’avons retiré nos masques qu’au dernier moment et les avons remis aussitôt l’enregistrement achevé (la quatrième personne présente est toujours restée hors champ, assise de l’autre côté de la large table centrale ; elle a soigneusement conservé son masque pendant toute l’opération, croyez-moi sur parole).


La semaine prochaine, sur la chaîne de l’Ambassade et sur sa page Facebook, la Semaine de l’Amérique latine et des Caraïbes se poursuit avec en particulier un regard sur le tango comme patrimoine de l’Humanité, une candidature que l’Argentine (Buenos Aires) et l’Uruguay (Montevideo) avaient présentée conjointement et avec succès en 2009 auprès de l’UNESCO.

Plaza San Martín à Mendoza
Il s'agit d'une copie d'une statue commandée
à un Français, Louis Daumas

A la rentrée, il est possible que l’Ambassade vous propose à nouveau l’une de mes causeries aux alentours des Journées Européennes du Patrimoine. De plus amples informations dans Barrio de Tango dès que les choses auront pris forme, ce qui reste impossible à cette heure : nous devons comme tout le monde attendre que l’été passe en espérant que la vaccination généralisée aura alors apporté à tout le monde un peu de calme et de tranquillité. Vivement que cela arrive pour que je puisse renouer aussi avec le public à travers les salons du livre qui me manquent cruellement depuis mars 2020.

© Denise Anne Clavilier
www.barrio-de-tango.blogspot.com

D’ici quelques jours (du moins, je l’espère), je mettrai cette nouvelle conférence en ligne sur ma chaîne Dailymotion mais pour cela, il faudra d’abord que je procède à une coupure et à de menus travaux de montage, la plateforme française n’acceptant pas de vidéos de plus de 60 minutes.



(1) Et bien sûr, j’étais sûre que dans cette occasion à un moment ou à un autre ma langue allait fourcher. Et ça n’a pas manqué. Donc erratum : le capitaine Bonaparte a été promu au généralat à 25 ans (et non pas 20), à Toulon qu’il venait de libérer des Britanniques, sous la Terreur. C’est San Martín qui avait 20 ans lorsqu’il a séjourné à Toulon en 1798. Mais il n’était encore que lieutenant !

La paix scolaire n’aura pas fait long feu ! [Actu]

"Présent", répond le petit virus, déguisé en écolier
à l'appel du professeur


Entre le gouvernement de la Ville de Buenos Aires et le gouvernement fédéral, il y a eu depuis une semaine une trêve au milieu de cette campagne électorale de mi-mandat dans laquelle la droite ne recule devant aucune manœuvre, fût-ce au détriment de la sécurité sanitaire.

Mais c’est déjà fini. Horacio Rodríguez Larreta vient en effet d’annoncer que la capitale argentine, dont il dirige le gouvernement local, reprendrait dès lundi prochain les cours en présentiel en maternelle et dans le primaire, en format mixte pour les deux premières années du secondaire et uniquement à distance à partir de la troisième année du secondaire. L’Argentine vient pourtant de franchir un seuil supplémentaire dans cette deuxième (ou troisième) vague de l’épidémie : on a enregistré hier 560 morts et 39 207 nouveaux cas positifs (sur près de 11 100 tests effectués). Le taux d’occupation des lits est de 77,1 % sur l’ensemble du pays. Le total des morts depuis mars 2020 s’élève à 76 693 dans un pays de 44 millions d’habitants qui se répartissent de façon très inégale entre de nombreux noyaux urbains et d’immenses zones rurales particulièrement dépeuplées. Les variants anglais et brésilien (celui de Manaus surtout) font des dégâts dans tout le pays.

Le chef du gouvernement de la Ville Autonome de Buenos Aires va aussi desserrer l’étau sur les autres mesures : un couvre-feu qui passera de 18h à 20h, les restaurants qui pourront rouvrir avec quatre convives ou la totalité d’un même foyer à la même table en terrasse, la possibilité de faire du sport en groupe sans contact, celle de pratiquer des activités cultuelles et religieuses et la reprise du travail pour plusieurs professions jugées non essentielles au niveau national.

"Les écoles rouvrent dans la ville
et les mesures se durcissent dans la province", dit le gros titre
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La campagne est donc sans pitié. Tout se passe comme si la droite n’avait plus désormais que faire des morts supplémentaires si c’est le prix à payer (par le pays) pour qu’elle retrouve le pouvoir !


La journaliste : Les cours en présentiels reviennent ?
Le ministre portègne : C’est la Cour suprême qui a décidé ça.
Elle : Et si le système de santé ne peut plus faire face ?
Lui : J’espère que la Cour aura des lits disponibles.
Traduction © Denise Anne Clavilier


Página/12
, le quotidien de gauche, souligne que pour jouer ainsi avec la santé, elle ne doit pas avoir grand-chose de concret à proposer à ses électeurs. Larreta s’obstine en effet à de désolidariser de la Nation et de la Province limitrophe tandis que Patricia Bullrich relance sa campagne de diffamation contre le gouvernement en reprenant (toujours sans aucune preuve) les accusations qu’elle avait démenties il y a deux jours et selon lesquelles les négociations avec Pfizer n’avanceraient pas parce que le gouvernement exigerait des contreparties financières (entendez des dessous-de-table). Ce qui a été formellement démenti par le laboratoire pharmaceutique. L’accusation est grave. Mis en cause personnellement, le président a chargé son avocat d’intenter une action civile contre Bullrich et le ministère national de la Santé la poursuit devant une autre juridiction pour obstacle à la politique sanitaire, entrave à la négociation commerciale en cours avec le laboratoire et création dans la population des conditions de développement d’une défiance vis-à-vis de la vaccination.

© Denise Anne Clavilier

Pour aller plus loin :

lire l’article de Página/12, qui a choisi une nouvelle fois de faire passer son analyse de la situation par l’humour
lire l’article de La Prensa
lire l’article de Clarín
lire l’article de La Nación

Ajout du 30 mai 2021 :
lire cet article de Página/12 sur les déclarations provocatrices de la ministre portègne de l'Education (non commentées par la presse de droite)

Chocobar s’en sort libre comme l’air [Actu]

L'information est traitée à travers la photo principale
qui montre le condamné dans la rue du tribunal
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On attendait le verdict dans le procès attenté à Luis Chocobar, ce policier qui, se trouvant en repos et en dehors de sa juridiction, a tué un délinquant qui lui tournait le dos et s’enfuyait et qui, en outre, en récompense de son acte qui brillait par sa lâcheté, avait été reçu en 2017 avec tous les honneurs au palais présidentiel par le président Mauricio Macri, aujourd’hui dans l’opposition.

En première instance, la sentence se révèle très légère eu égard à la gravité des faits. Il est reconnu coupable (c’est déjà ça) mais il n’écope que de deux ans de prison avec sursis assortis de cinq ans d’interdiction d’exercer une fonction publique (il ne pourra plus être employé par l’État pendant ce temps, que ce soit au niveau fédéral, provincial ou municipal).

Photo centrale à la une de La Nación
"Chocobar condamné mais il n'ira pas en prison"
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L’homme est ressorti du tribunal et dehors il a été accueilli par une assez grosse foule de sympathisants qui l’ont chaleureusement acclamé. Il ne regrette rien de l’affaire qui a coûté la vie à un jeune qui n’avait pas encore 18 ans, mort d’une balle dans le dos, après avoir agressé à l’arme blanche un touriste à qui la médecine argentine a rendu toute sa santé.

Jamais en retard d’un propos provocateur alors que la campagne électorale de mi-mandat bat déjà son plein, l’ancien président Mauricio Macri et la présidente de son parti, Patricia Bullrich, se sont précipités pour dire tout le mal qu’ils pensaient de cette décision de justice et regretter qu’un homme « qui a fait son devoir en protégeant les honnêtes gens » ait été condamné par un tribunal argentin. Pourtant, l’ancien policier a bel et bien été reconnu coupable d’avoir précisément fait dans ces circonstances un usage abusif de la notion de devoir professionnel.

Article secondaire à la une de Página/12
"Faites attention parce qu'il est libre"
Une citation de Chorra, un grand classique du tango,
que l'on doit au génie de Enrique Santos Discépolo
(Je l'ai traduit dans Barrio de Tango, recueil bilingue de tangos argentins)
L'image montre l'étreinte que Patricia Bullrich est allée donner à l'ex-policier
et oubliez les gestes barrières

Elle aussi mécontente de cette décision, la défense du condamné a déjà fait savoir qu’elle entendait faire appel pour obtenir la relaxe pure et simple et que cette affaire irait, si besoin était, jusqu’à la Cour suprême. Stupéfiante et consternante impudence !

Une de La Prensa, hier.
Le verdict est suggéré en haut à droite
et il est faux : Chocobar a été reconnu coupable
En gros titre, en rouge : "Des chiffres qui font froid dans le dos"
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Les organismes de droits de l’homme sont vent debout contre ce blanc-seing donné à la violence policière dans un État de droit. Les journaux quant à eux sont surpris et même à droite, on ne cautionne pas vraiment ce laxisme, sauf La Prensa, qui avait titré hier, avant que le verdict ne soit connu, que Chocobar était tout à fait innocent (« reinocente »). Et c’est un journal catholique !

© Denise Anne Clavilier

Pour aller plus loin :

lire l’article principal de Página/12 (qui en publie une demi-douzaine sur le sujet)
lire l’article de La Prensa aujourd’hui
lire l’article de Clarín qui essaye tant bien que mal de ne fâcher personne
lire l’article de La Nación qui se demande ce qu’il faut faire lorsqu’un malfaiteur armé prend la fuite.

Ajouts du 30 mai 2021 :
lire cet article de Página/12 sur les réactions du secrétaire d'Etat aux Droits de l'Homme
lire cet article de Página/12 sur la version corporatiste des faits réaliser pour défendre l'ancien policier, rejetée par l'instruction et publiée à la veille du verdict pour tâcher de faire pression sur la cour

Ajout du 13 juin 2021 :
lire cet article de Clarín (Chocobar demande la révision de son procès et espère passer devant un jury populaire)

Une nouvelle émission pour rire de l’actualité à la télé [à l’affiche]

"Eloge du rire", titre Página/12 en tête de son supplément


De mil humores (au sujet de mille humours), c’est le titre d’une toute nouvelle émission qui sera diffusée à partir de demain, tous les dimanches soir à 23h, pour rire au moins un peu de l’actualité en ces temps où elle est si peu drôle.

L’émission a pour producteur un spécialiste de la question, Claudio Villaruel. Elle passera sur Canal 9, une chaîne commerciale pour laquelle Página/12 a les yeux de Chimène (Claudio Villaruel anime déjà une émission sur la radio généraliste du groupe Octubre, propriétaire du quotidien). Le journal consacre donc la une de ses pages culturelles de ce samedi à cette nouvelle réjouissante (pour qui aime ce type d’humour, qui ne va pas à tout le monde) et à une interview du collègue radiophonique et bientôt à nouveau télévisuel.

Il s’agira en effet d’analyser l’actualité. Il est probable qu’avec ses actuels micmacs de campagne électorale où tous les coups sont permis, la droite va en prendre pour son grade. Âmes sensibles s’abstenir !

© Denise Anne Clavilier

Pour en savoir plus :

jeudi 27 mai 2021

Demain, les vies parallèles de San Martín et de Napoléon, par Zoom, depuis l’Ambassade [ici]


Demain, vendredi 28 mai 2021, à 16h, dans le cadre du bicentenaire français de la mort de Napoléon et celui de la Semaine de l’Amérique latine et des Caraïbes, je donnerai une conférence en ligne qui sera diffusée en direct sur la page Facebook de l’Ambassade argentine à Paris.

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Il s’agira d’une étude comparée de la vie et de l’œuvre politique et militaire de San Martín que nous connaissons si peu en Europe et notamment en France où il a pourtant vécu les 19 dernières années de son assez longue vie (1778-1850) et Napoléon, qui est plus connu, encore que son souvenir soit chargé de beaucoup de projections anachroniques de notre sensibilité et de nos valeurs du début du 21e siècle qui l’aurait laissé stupéfait. Il est toujours dommage de ne pas contextualiser la vie d’un homme dans sa société et son temps. Nous allons donc nous attacher demain à éviter ces erreurs, même si à ce compte-là, San Martín est sans conteste plus proche de nous.

Rendez-vous donc en ligne demain sur Zoom.

Connexion ID : 827 3191 6699

Code : 881796

Demain, à La Villette, à Paris, s'ouvrira la grande exposition Napoléon du Bicentenaire qui rassemble des pièces historiques venus de plusieurs musées un peu partout en France !

© Denise Anne Clavilier

Pour cette raison, il n’y aura pas de publication demain sur ce blog.

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Pour en savoir plus :
lire l'article de présentation de l'événement sur ce blog

Ajout du 30 mai 2021 :

mercredi 26 mai 2021

Version argentino-mexicaine d’un vaccin oxfordien [Actu]

Même pas besoin de traduire !


L’annonce en a été faite hier très officiellement en presque direct à la télévision publique argentine : l’Argentine et le Mexique ont réussi à sortir les premières doses latino-américaines du vaccin Astra-Zeneca. L’Argentine a produit le principe actif, l’a expédié au Mexique qui est en charge des excipients et assure le conditionnement en flacons.

A peine les dernières notes du Te Deum national expédiées en direct depuis une cathédrale de Buenos Aires réservée au maigre clergé résident, TV Pública a enchaîné sur un flash spécial : la retransmission en très léger différé d’une annonce faite ensemble par visioconférence par le président Alberto Fernández depuis sa résidence de Olivos (dans la banlieue nord-ouest de Buenos Aires) et le président Andrés Manuel López Obrador à Mexico.

Le pays de l’hémisphère nord expédie actuellement les 80 000 premières doses, qui vont compléter la panoplie vaccinale de son partenaire de l’hémisphère sud et assurer aux deux pays et à leurs voisins un début d’autonomie en la matière dans la présente crise.

"Assez de mesquineries", a demandé
l'archevêque de Buenos Aires,
primat d'Argentine
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Si Página/12 claironne la nouvelle et en fait sa une, il va sans dire que les autres titres de la presse quotidienne sont bien en peine d’y faire écho. C’est d’ailleurs le signe indubitable qu’il s’agit bien là d’un grand succès du gouvernement. Ou plus exactement de l'alliance de deux pays gouvernés à gauche. Difficile d’y faire allusion en pleine campagne électorale lorsque les quotidiens sont ouvertement partisans (tout prétendant être objectifs, bien entendu).

Un gros titre qui se réfère au paiement de la dette argentine
et une photo des "manifestations et marches contre les restrictions"
en marge, à droite, l'homélie du cardinal
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Les autres journaux préfèrent donc tenter de convaincre leurs lecteurs que le gouvernement rate tout ce qu’il fait, même quand le dernier grossier mensonge de cette opération va de faire flop : des accusations grossières portées par Patricia Bullrich, la très trumpienne présidente du PRO (le parti néolibéral constitué par et autour de Mauricio Macri), contre le gouvernement prétendant que celui-ci tâchait d’obtenir des dessous-de-table de Pfizer et que c’était là la raison pour laquelle le vaccin de ce laboratoire se faisait attendre en Argentine. Tout s’est dégonflé, le laboratoire lui-même s'empressant de démentir fermement ces propos et leur auteure étant obligée de se rétracter récemment devant la menace d’un procès en diffamation. La presse mainstream s’est donc mise en quête d’autres motifs pour discréditer la majorité en place.

Elle fait donc son beurre aujourd’hui avec l’homélie d’hier du cardinal Mario Poli qui a appelé tous les responsables politiques à taire leurs différends stériles et à mettre un peu de bonne volonté dans la résolution de la crise, le tout en citant Manuel Belgrano (mais cause toujours, tu m’intéresses : la sagesse du révolutionnaire est complètement instrumentalisée par l’opposition au profit des intérêts à court terme de la droite). Elle se repaît aussi de quelques marches qui se sont produites ici ou là, très peu massives à en croire les photos et les vidéos qui sont publiées : non contents de violer le confinement et de hurler sans masque dans l’espace public mais avec des grands drapeaux (dont on ne voit pas bien quel rapport ils ont avec la diffusion massive d’un virus), les manifestants répandaient leurs théories conspirationnistes, anti-vaccin, anti-distanciation. Délire sévère répandu par la branche argentine d’une association de médecins complotistes fondée en Espagne contre Bill Gates et répandue dans toute l’ère hispanophone (médicos para la verdad Argentina).

Mêmes choix rédactionnels que Clarín
Avec un plus : les manifestations sont qualifiées de "larges"
Il suffit de regarder la photo pour s'en convaincre !
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Les hommes sont donc les mêmes sous toutes les latitudes et ils n’ont guère progressé en sagesse depuis les grandes épidémies du Moyen-Age. Les mêmes paniques, les mêmes défaites de la raison, la même agressivité contre tout ce qui ressemble à de la diversité intellectuelle et culturelle parmi leurs semblables. Il a fort à parier que ces gens vont reprendre leur cirque le 20 juin prochain (pour la fête du drapeau) et le 9 juillet (pour la fête de l’Indépendance).

© Denise Anne Clavilier
www.barrio-de-tango.blogspot.com

Pour aller plus loin :

sur Astra-Zeneca
lire l’article de Página/12
lire l’article de La Prensa, qui met plus en avant la participation mexicaine que celle de l’Argentine (au lendemain de la fête nationale, il faut oser !)
sur l’homélie du Te Deum hier
sur les manifestations à Rosario et ailleurs
lire l’article de La Nación qui dresse, sans complaisance, le portrait du fondateur argentin de l’association complotiste

Ajout du 27 mai 2021 :
lire cet article de Página/12 sur l'arrivée d'une nouvelle cargaison de plus de 50.000 doses d'Astra Zenenca.