dimanche 29 septembre 2019

Macri part en faisant tout ce qu’il critiquait chez Cristina [Actu]

Le ministre au peintre : "Dépêchez-vous, monsieur Coyote.
Nous avons besoin que ce tunnel soit terminé demain.
Ah oui ! Et puis, de la lumière au fond !"
Traduction © Denise Anne Clavilier

Pendant sa campagne en 2015, le président Mauricio Macri avait critiqué le contrôle des changes imposé par Cristina Kirchner pour forcer à abandonner la référence constante au dollar dans beaucoup d’actes de la vie : l’achat d’une voiture ou d’un bien immobilier, la valorisation d’une épargne ou d’un portefeuille d’actions, etc. Depuis un mois, l’Argentine connaît un contrôle des changes assez sévère qui conduit aujourd’hui à sanctionner des acteurs financiers qui auraient acheté trop de dollars pour sécuriser leur trésorerie.

Mauricio Macri avait déclaré que l’inflation, alors à 25 %, était le symptôme d’une incapacité à gouverner correctement. L’inflation frôle les 53 % pour ce qui correspond à 2019.

La une de La Prensa, le 25 septembre
En haut, Macri attendant d'intervenir à la tribune de l'ONU à New York
En bas, l'échafaudage effondré à Ezeiza
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Le gouvernement de Macri n’avait pas eu de mots assez durs contre son prédécesseur pour l’inauguration précoce du Centre Culturel Kirchner, le CCK, une magnifique infrastructure qui tient debout et qui fonctionne très bien à l’heure qu’il est. Mauricio Macri a fait accélérer plusieurs chantiers dans l’espoir de faire des inaugurations qui redore son blason avant le premier tour. Résultat : cette semaine, un échafaudage surchargé s’est effondré dans le futur nouveau terminal de l’aéroport international qui devait être partiellement inauguré demain. L’effondrement a fait un mort et treize blessés. Quelques jours avant, les 300 PME et leurs ouvriers qui avaient accéléré leur rythme de travail pour terminer un grand viaduc ferroviaire, dûment inauguré par le président-candidat à sa réélection, ont manifesté… parce qu’ils ne sont pas payés !

Alors bien entendu, à un mois du premier tour, Página/12 fait un résumé en dessin sur sa une ce matin…

Pour en savoir plus :
lire l’article de Página/12 du 25 septembre sur l’accident de l’échafaudage à Ezeiza, dont toute la presse a parlé ce jour-là
lire l’article de Página/12 du 24 septembre sur le viaduc de la ligne San Martín

samedi 28 septembre 2019

Les jeunes Argentins se joignent aux Vendredis pour le Futur [Actu]

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Les jeunes sont sortis hier, en grand nombre, pour défiler dans les rues d’une trentaine de villes en Argentine pour manifester leur préoccupation pour le climat et tâcher d’alerter leurs politiciens, encore moins sensibles à la question que leurs homologues européens. Il n’y a pas vraiment de parti écologiste dans le paysage politique argentin.

Le départ de la manifestation sur la place du Congrès
En arrière-plan, le siège des deux chambres nationales

Peut-être le climat politique, chaud-bouillant depuis le 11 août, et la saisine du comité des droits de l’enfant de l’ONU par Greta Thunberg et son équipe internationale de jeunes militants a frappé les esprits. La saisine dénonce cinq pays, dont la France, le Brésil et l’Argentine. Et il est vrai que la création d’un ministère de l’écologie par Mauricio Macri a été une mascarade et le rabbin-ministre a démontré depuis quatre ans son incompétence et son inutilité totale… A part son déguisement en végétal il y a deux ans, on n’a jamais entendu parler de la moindre action de sa part depuis sa prise de fonction !

L'arrivée du cortège sur la Place de Mai
à l'arrière-plan, avenida de Mayo

En revanche, j’ai été frappée à Buenos Aires et même à Villa Mercedes, petite ville au milieu de la campagne de la province de San Luis, par l’apparition d’enseignes bio et par la variété des produits proposés à la vente. On est encore loin de la fréquence de ce type de magasins à Paris et de l’offre alimentaire et non alimentaire mais le progrès est très marqué par rapport à il y a deux ans.

Deux journaux ont mis la manifestation de Buenos Aires à leur une, La Nación et Clarín, qui a choisi d’illustrer son article (mais pas sa une) avec une photo d’une marche pour le climat à… Milan !

Pour aller plus loin :
lire l’article de Clarín

Ajout du 29 septembre 2019 :
lire cet article de La Nación sur une opération initiée par un jeune militant pour nettoyer les rives du Río de la Plata (la manière dont les Argentins jettent dans la nature du plastique et des déchets rappellent ce qu'était la France, ses chemins, ses routes, ses plages, ses aires de pique-nique, il y a 50 ans, quand il y avait moins d'emballages. Du coup, l'Argentine est encore plus sale !)

Universo Daniel Melingo au CCK [à l’affiche]


Deux week-ends autour de Daniel Melingo pour découvrir son univers musical et poétique, c’est ce qu’offre le CCK, Sarmiento 151, ce soir, demain et samedi et dimanche prochain, les 5 et 6 octobre.

Entrée libre et gratuite.

Le poète Luis Alposta, auteur de nombre de ses chansons les plus emblématiques, est lui aussi au programme (1).

Pour en savoir plus :
lire l’interview de Melingo dans Clarín (on y parle beaucoup de l'accueil que lui fait le public français)
consulter la page de la série sur le site Internet du CCK


Ajout du 30 septembre 2019 :
lire cet article de Página/12, qui a mis Melingo à la une de son supplément culturel de ce lundi (ci-dessus)



(1) Luis Alposta, qui est devenu un ami personnel très cher, est présent dans mes deux anthologies bilingues de tango, Barrio de Tango aux Editions du Jasmin, qu'il a bien voulu préfacer, et Deux cents ans après, chez Tarabuste Editions.

lundi 23 septembre 2019

Teasing pour un docu saignant [Actu]

Une des pages culturelles de Página/12, avec son jeu de mots :
"MACRIse culturelle"
et sur la photo : Culture en deuil

María Laura Cali, ancienne salariée de l’ex-ministère de la Culture, rétrogradé au rang de Secrétariat d’État il y a un peu plus d’un an, scandalisée par la manière dont le titulaire du maroquin l’a vidé, révoquant des salariés et dissolvant un grand nombre d’entités culturelles, a pris sa caméra et recueilli les témoignages et les analyses des acteurs du secteur. Il en ressort un documentaire qui sortira le 1er octobre à 19h30 au Centro Cultural Padre Mugica, Piedras 720, dans le quartier de Monserrat.

Le film s’intitule Los ñoquis, crónica de una resistencia presente (les ronds-de-cuir, chronique d’une résistance qui n’a jamais cessé). Il emploie le terme dépréciatif de ñoqui, les gnocchis (comme les pâtes italiennes), surnom méprisant donné aux employés de l’État qu’on accuse de buller et de toucher des sous, aux frais des contribuables. Cette insulte a été amplement utilisée par la majorité actuelle lorsqu’elle a pris le pouvoir et sabré dans les effectifs de l’administration nationale, y compris dans ceux des orchestres, des corps de ballet et des différentes instances opérationnelles comme le CePia, le centre de production et de recherche audiovisuels, dissous par le ministre Pablo Avelluto et dévalisé par sa fiancée de tout son matériel audiovisuel dès le 5 janvier 2016, alors que le ministre avait pris ses fonctions le 10 décembre 2015. On n’a jamais retrouvé ces équipements très performants qui avaient été payés par de l’argent public. Le documentaire intègre les images des caméras du défunt CePia. On y voit et on y entend parfaitement le vol ordonné et orchestré par l’actuelle compagne du ministre !

Affiche du film

Les quelques minutes de vidéo-surveillance font un tabac sur les réseaux sociaux depuis qu’ils ont été diffusés en avant-première par la chaîne de télévision du groupe Octubre (C5N) le 19 septembre dernier. A ce jour, ni Avelluto ni son épouse n’ont commenté ces images accusatrices.

Bon appétit ! messieurs ! –
(Tous se retournent. Silence de surprise et d'inquiétude,
Ruy Blas se couvre, croise les bras,

et poursuit en les regardant en face).
O ministres intègres !
Conseillers vertueux ! voilà votre façon
De servir, serviteurs qui pillez la maison !
Donc vous n'avez pas honte et vous choisissez l'heure,
L'heure sombre où l'Espagne agonisante pleure !
Donc vous n'avez ici pas d'autres intérêts
Que d'emplir votre poche et vous enfuir après !
Soyez flétris, devant votre pays qui tombe,
Fossoyeurs qui venez le voler dans sa tombe !
Victor Hugo
(Ecoutez cette tirade jouée par Gérard Philippe,
dans une archive de l'INA)

En pleine campagne électorale, la sortie du film ne va pas aider Mauricio Macri à rattraper son retard sur le candidat de l’opposition arrivé en tête des PASO, le 11 août dernier, Alberto Fernández.

Pour en savoir plus :
lire l’entrefilet de Página/12 sur le vol du matériel du CePia avec vidéo embedded dans l’article en ligne (édition de vendredi dernier)
lire l’article de Página/12 sur le documentaire (édition d’aujourd’hui)
lire l’article du site Notinett sur le documentaire

Alfredo Arias se paye Isabel Perón [à l’affiche]


Depuis samedi, Alfredo Arias est à l’affiche du Teatro San Martín, sur Avenida Corrientes, avec une pièce de Gonzalo Demaría intitulé Happyland et consacré à une satyre de la figure détestée de Isabel Perón, qui fut la vice-présidente de son mari, à leur retour en 1973, et qui lui succéda à la présidence après son décès et jusqu’au coup d’État de Videla en mars 1976. Avant cela, elle n’était qu’une danseuse de revue dans un théâtre à Panamá, où Perón la rencontra dans les errances de son exil. Elle vit aujourd’hui recluse dans une grande propriété en Espagne. La justice argentine a émis contre elle un mandat d’arrêt international auquel l’Espagne ne défère pas contre une vieille dame, qui de nos jours ssemble inoffensive, mais qui n'en pas pas moins installé un début de dictature à Buenos Aires, avant qu'un régime militaire la renverse elle-même.

Le grand style Arias, comme d'habitude

Le metteur en scène et l’auteur en font un personnage caricatural au milieu d’une évocation fantaisiste, fantasmatique et caustique de l’Argentine des années 1950 à 1970, avec ses acteurs -chanteurs-danseurs fétiches : Alejandra Radano, qui joue le rôle de Isabel, Marcos Montes, María Merlino, Carlos Casella et Adriana Pegueroles.

Isabelita, la vraie, avec son chignon légendaire,
saluant la foule depuis le balcon de la Casa Rosada,
en grand deuil, en 1974 (document Clarín)

Alfredo Arias a donné ces derniers jours plusieurs interviews, à Clarín, à La Nación entre autres. Il est parfaitement conscient du contenu politique de ce retour vers un épisode tragique de l’histoire argentine et qu’en pleine campagne électorale, son propos est encore moins indifférent que d’habitude.

Le spectacle se donne du mercredi au dimanche, de 20h30 à 22h. Les places sont à 140 $ ARG en semaine et à 280 le week-end.

Pour en savoir plus :
consulter la page du spectacle sur le site Internet du théâtre.

Ajout du 6 octobre 2019 :
lire cette nouvelle critique de La Nación

Ajout du 13 octobre 2019 :
lire cette longue interview d'Alfredo Arias dans La Nación

samedi 21 septembre 2019

Negro Manuel : un livre sur cet esclave serviteur de la Vierge de Luján [Disques & Livres]


Le prêtre et historien Juan Guillermo Durán, un vrai scientifique rigoureux, a sorti au mois de mai un livre très originale : une biographie du Negro Manuel (circa 1604-1686), un esclave né en Guinée et affranchi pour 250 pesos (1), qui a dédié sa vie à veiller sur la petite statue de la Vierge Marie dont la vénération a donné naissance à la ville de Luján, dans la province de Buenos Aires, après un miracle (2) qui s’est produit en mai 1630 (3) et dont l’historicité a été démontrée dans la deuxième partie du dix-neuvième siècle, le prêtre des Missions étrangères de Paris, le père Georges Marie Salvaire (1847-1899).

Mgr Juan Guillermo Durán, éminent membre du prestigieux comité d’histoire de l’Église, est aussi le postulateur de la canonisation du Negro Manuel, procédure lancée par le cardinal Poli, archevêque de Buenos Aires, et Mgr Anunciado Serafini, archevêque de Mercedes-Luján.

Les prières proposées à la piété privée des fidèles
pour l'un et l'autre candidat
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L’ouvrage de 298 pages fait donc partie du travail qu’un postulateur doit faire pour que le vénérable serviteur de Dieu dont il sert la cause soit connu des fidèles et que ceux-ci recourent à lui dans leurs prières privées. Le Negro Manuel a été déclaré Serviteur de Dieu en août dernier, le dimanche même des PASO. Il manque encore un miracle reconnu pour sa béatification et un second pour sa canonisation. D’où l’importance de la prière privée des fidèles.

Le livre est en vente à la maison d’édition, une maison confessionnelle, au prix de 738 pesos argentins.

Souvent considéré comme une invention folklorique hors de l’Église catholique, ce personnage historique est assez important dans le roman national argentin, car le pays a longtemps, contre toute évidence, nié l’existence de l’esclavage et des Africains sur son sol. Sur le plan spirituel, c’est un modèle d’humilité et de spiritualité mariales. Il pourrait devenir le saint patron des sacristains au moins en Argentine sinon dans le monde entier.

Image pieuse de Luján
avec la phrase attribuée au Negro Manuel :
"J'appartiens à la Vierge, c'est tout"
En haut, la statue de la Vierge telle qu'elle est aujourd'hui

La cause en béatification du Père Salvaire a été ouverte le même jour que celle pour le Negro Manuel. Mgr Durán est aussi le postulateur de cette autre cause. Les deux procès sont intimement liés l’un à l’autre sur le plan historique et spirituel.

Pour aller plus loin :
lire la dépêche de AICA (l’agence de presse catholique argentine)
lire le communiqué de l’archidiocèse de Mercedes-Luján
consulter la page du livre sur le site Internet des Editions Agape
voir les données sur le Negro Manuel sur la page Candidats du site Inteernet Causas de los Santos en Argentina.



(1) Le prix normal d’un esclave mâle en bonne santé.
(2) Le terme de miracle est celui de l’époque. L’événement a consisté en l’arrêt sur place du chariot sur lequel la petite statue en terre cuite, produite à Rio de Janeiro et destinée à une petite chapelle privée du nord-est argentin (Santiago del Estero), se trouvait. Le chariot n’a pu repartir que lorsque la statue fut déchargée. Le même type d’incident s’est produit à nouveau il y a quelques années avec une copie de la statuette. La statue originale est exposée dans le chœur de la basilique de Luján, qui s’élève sur le lieu où la tradition situe la tombe du Negro Manuel.
(3) C’est la première fois que je vois citer ce mois de mai. Si c’est historique, c’est vraiment très lourd sur le plan symbolique. L’Argentine est censée être née le 25 mai 1810 et son drapeau a emprunte, par des chemins indirects, les couleurs du manteau de cette Vierge, qui représente Notre-Dame de l’Immaculée Conception !

Un juge droit dans ses bottes - Un baroud d’honneur ? [Actu]

"L'audience qui ne commencera jamais ?"
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A six semaines du premier tour, qui pourrait bien voir le ticket Fernández et Fernández gagner l’élection présidentielle, le juge fédéral Claudio Bonadio vient de clore son instruction et de renvoyer devant le tribunal Cristina Fernández de Kirchner, candidate à la vice-présidente, et ses supposés complices dans une affaire de corruption, dite des carnets photocopiés. Les carnets en question donnent l’intégralité d’un circuit de corruption active au sein du gouvernement Kichner quand Cristina était présidente.

"Cristina est renvoyée au tribunal
pour l'affaire des Cahiers des dessous-de-tables"
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Dans un premier temps, lorsque ces documents sont sortis, ils apparaissaient comme des preuves accablantes. Aujourd’hui, la défense des personnalités impliquées a pu instiller le doute sur l’authenticité de tout cela.

Toujours est-il que le juge n’aura pas le temps d’obtenir la levée de l’immunité parlementaire pour Cristina car le Sénat ne pourra pas la traiter, d’autant que l’opposition fera barrage. Et si Cristina est élue le 27 octobre, ou même en novembre, s’il y avait besoin d’un second tour, elle ne passera pas en jugement sur ce renvoi à l’instance de jugement. En revanche, si elle n’est pas élue, ce qui serait une énorme surprise, elle pourrait se retrouver une nouvelle fois devant les juges à l’automne austral.

Pour aller plus loin :
lire l’article de La Nación qui met à disposition, en ligne, l’intégralité des cahiers incriminés.

vendredi 20 septembre 2019

Un taux de chômage record même en Argentine [Actu]

"Un 10+ en chômage", dit le gros titre
en forme de commentaire de prof sur une copie
En haut, en jaune : "La prochaine fois, je te reçois en tant que président"
dit Evo Morales à Alberto Fernández en tournée dans les pays limitrophes de gauche
En haut à droite : "Fumer est un plaisir", début d'un célèbre tango (Fumando espero),
mais ici, c'est à propos de cannabis

L’institut national de statistiques, l’INDEC, vient de publier les chiffres du chômage pour juillet : 10,6 % de la population active. Il faut remonter à quatorze ans, dans les premières années du mandat de Néstor Kirchner, pour retrouver des chiffres pareils ! Cela correspond à un peu plus de deux millions d’adultes, dans un pays où il y a beaucoup d’enfants et de jeunes. Chez les femmes jeunes (14-29 ans), ce taux de chômage atteint 23,4 %.

En haut, une phrase accusatrice d'un évêque sur la faim en Argentine
(la faim est une réalité et elle fait honte à toute la gouvernance)
En bas : "Le péché de détruire des emplois",
un gros titre qui vise la justice.
Elle empêche une compagnie aérienne low-cost
d'opérer sur l'aéroport secondaire de El Palomar
Tout aussi orienté que Página/12 mais dans l'autre sens !

Ces chiffres ont été établis pour une période antérieure aux PASO, les primaires obligatoires qui devancent de près de trois mois le premier tour (élections présidentielle, législatives et sénatoriales). Or la crise économique s’est aggravée dès le lendemain, lorsque les marchés ont pris peur devant la perspective de la victoire électorale d’un « gauchiste » au lieu de néo-libéral actuellement au pouvoir. Attendons-nous à un autre chiffre catastrophique dans un mois. Cela tombera mal pour la majorité sortante : le premier tour des élections se tiendra le 27 octobre. Et Alberto Fernández (le « gauchiste » qui affole le business) a encore gagné des points sur Mauricio Macri si l’on en croit les instituts de sondage. Il avait 15 points d’avance le 12 août, au lendemain des PASO. Il en aurait maintenant 20. Si c’est exact, c’est irrattrapable pour Macri.

Pour Alberto Fernández, ce sera un terrible héritage.

Pour en savoir plus :

La loi d’urgence alimentaire est votée [Actu]

"Sortie de secours", dit le gros titre
sur fond de manifestation sociale sur Plaza del Congreso
(le Congrès lui-même étant en travaux comme vous pouvez le constater)

Avant-hier, le Sénat a voté à l’unanimité la proposition de loi déposée par l’opposition reconnaissant l’urgence alimentaire. Cette loi permettra de consacrer de l’argent public aux soupes populaires et autres restaurants sociaux, pour les enfants ou les adultes, appelés comedores et meriendores, qui servent des repas (comida) et des goûters (merienda). Le président avait promis que sa majorité soutiendrait la proposition, ses sénateurs ont tenu sa promesse au-delà des attentes !

"Presque 8.000 millions de pesos pour les soupes populaires",
dit le gros titre

Página/12 en a fait sa une hier. La Prensa a consacré une partie de sa une à l’information. Ni Clarín ni La Nación n’ont jugé bon d’y faire allusion à la une, Clarín ne mettant même pas un seul article sur le sujet dans sa version en ligne.

Pour en savoir plus :
lire l’article de La Nación sur les réactions des organisations sociales à l’annonce du vote
lire l’article de La Nación sur la malnutritions chez les enfants qui vont dans les soupes populaires (lesquelles manquent d’argent pour proposer une alimentation équilibrée et adaptée à l’âge de leurs convives).

mercredi 18 septembre 2019

Daniel Ruggiero revisite les classiques au bandonéon [à l’affiche]



Demain, jeudi 19 septembre 2019, à 20h, la Orquesta Filarmónica de Buenos Aires offrira un concert gratuit dans le cadre d’une série intitulée Divertimentos y Pasiones, à la Usina del Arte, dans le quartier de La Boca.

Les places sont à retirer à partir d’aujourd’hui, 18h, au guichet du Teatro Colón, à raison de deux places par personne.

Ce concert proposera de nouvelles orchestrations de grands classiques du répertoire : Divertissement pour cordes, Sz 113, de Béla Bartok, Une nuit sur le Mont-Chauve de Modest Moussorgsky, Suite pour orchestre de Jazz n° 1, opus 38a de Dimitri Chostacovich et le Double concerto pour violon, bandonéon et orchestre de Daniel Ruggiero, un bandonéoniste et compositeur qui a de qui tenir (c’est le fils du musicien qui fut le premier bandonéoniste historique de l’orchestre de Osvaldo Pugliese).

C’est la première fois que Daniel Ruggiero se produit avec cette formation classique. Il a donné à ce propos une interview publiée dans Quinto Elemento Web.

Pour aller plus loin :
lire le communiqué du ministère de la Culture de la Ville Autonome de Buenos Aires.

La musique et la recherche en mode SOS [Actu]

"Rends-toi, Université publique.
Tu es cernée !"
Traduction © Denise Anne Clavilier

Alors que le Congrès débat actuellement du budget national 2020 et que l’opposition a décidé de reporter son vote à la fin octobre, après le 1er tour (quand on saura à quoi s’en tenir pour l’avenir), différents secteurs de la culture et de l’économie du savoir manifestent leur malaise : l’éducation nationale, qui est en grève chronique depuis la rentrée d’hiver et dont les syndicats appellent à un arrêt de travail d’une journée jeudi prochain, la musique, avec cette manifestation (ci-dessous), avant-hier, de la Orquesta Sinfónica Nacional, sur la scène du CCK, le grand complexe inauguré par Cristina Kirchner et géré aujourd’hui par Hernán Lombardi, et le monde scientifique dont plusieurs chercheurs sont présents dans les médias de l’opposition (Página/12, C5N, AM 750), à travers la publication de billets et d’interviews…

Photo Ricardo Ceppi (cédée à Página/12)

Le budget de la recherche proposé par le nouveau ministre de l’Economie a été raboté de 21 % par rapport aux demandes élaborées par le Conseil Inter-universitaire National.

Lundi, les étudiants ont commémoré un nouvel anniversaire d’une révolte estudiantine à l’Université de Buenos Aires, encore dans les murs de la Manzana de las Luces, il y a 43 ans : la « nuit des crayons », qui résonne avec la nuit des longs couteaux (quand le 30 juin 1934, Hitler fit assassiner par les SS les SA, qui l’avaient jusqu’alors fidèlement servi). Cette actualité et cette histoire a inspiré Daniel Paz qui dénonce les coupures budgétaires en tout sens, dans son dessin d’hier : la nuit des longs ciseaux…

Le conseiller (debout) : Les cliniques et les centres de convalescence privés vont mal.
Macri : Qu’est-ce qui se passe ? On était supposé venir détruire seulement l’assistance publique !
Página/12 ce matin
Traduction © Denise Anne Clavilier

Pour aller plus loin :
lire l'article de Página/12 sur l'orchestre
lire l'article de Página/12 sur le budget des universités

lundi 16 septembre 2019

Un Plenario consacré au débat Tango versus Folklore à la Academia Nacional del Tango [à l’affiche]


Ce soir, lundi 16 septembre 2019, à 19h30, la Academia Nacional del Tango consacre sa séance publique à la présentation d’un ouvrage sur le Tango et le Folklore et la concurrence qui se joue entre eux, entre la ville (le tango) et les champs (le folklore).

Les auteurs, Alejandro Molinari et Roberto Luis Martínez, viendront parler de leur travail, paru à Editorial de la Cultura Urbana, qu’ils ont fondée et qu’ils dirigent.

Le ballet folklorique de l’Université Nationale des Arts animera la seconde partie de la soirée.

Entrée libre et gratuite, au Palacio Carlos Gardel, avenida de Mayo, 835, 1er étage.

Ma prochaine dédicace : le salon du livre de Saint Arnoult en Yvelines [ici]


C’est la rentrée avec son lot de salons. Samedi, j’étais à la Fête de l’Humanité. Dimanche prochain, le 22 septembre 2019, de 10h à 18h, je serai présente au 3e salon du livre de Saint-Arnoult en Yvelines (78), dans la Salle Le Colombier, sur le stand des Editions du Jasmin.

Entrée libre et gratuite.

Comme toujours, j’apporte le mate (la yerba vient directement de l’Argentine, où j’ai passé une bonne partie du mois d’août).

jeudi 12 septembre 2019

La Justice prend le virage [Actu]

La photo de une est un montage montrant un Macri soucieux
lisant le télégramme que la Justice vient de lui envoyer
pour lui notifier la décision de la juge
(le télégramme est l'équivalent procédural de notre accusé de réception)

Avertie par les résultats spectaculaires des PASO, qui ont placé, le 11 août dernier, le candidat péroniste très au-dessus du président qui tente de se faire réélire (+ 15 points), la Justice, comme on pouvait s’y attendre, retourne sa toge.

Cristina Kirchner reste poursuivie et le procès en cours continue mais d’autres causes ont été d’ores et déjà abandonnées.

Et hier, la Chambre commerciale de la Cour d’appel vient de prendre position dans le scandale de Correo Argentino, la poste argentine, qui avait été privatisée au profit du groupe Macri en 1997, quand le père de l’actuel président dirigeait l’entreprise qu’il avait fondée et qui porte son nom. La concession avait été accordée pour 30 ans et pendant 5 ans, la SOCMA (société Macri) a vidé l’ancienne poste de service public, ne réussissant qu’à faire des dettes au lieu de développer la société. Correo Argentino a été renationalisé en 2003 par Néstor Kirchner et le groupe Macri est resté depuis débiteur des dettes qu’il avait contractées.

Devant les difficultés à obtenir de la SOCMA le paiement de ces montants faramineux, la juge du droit des affaires qui enquête sur le scandale vient de mettre Correo Argentino sous tutelle pour mieux surveiller la comptabilité peut-être entretenue par l’administrateur nommé par le gouvernement qui lui a peut-être confié la mission de rendre illisible l’état du dossier comptable.

Par ailleurs, une instruction pénale est ouverte sur la même affaire contre le groupe Macri et le président lui-même dont on attend de voir ce qu’elle va devenir dans les semaines et les mois qui viennent.

Pour en savoir plus :

Des écrivains et des entrepreneurs s’adressent à Alberto Fernández [Actu]


Avant-hier, un collectif d’écrivains s’est adressé à Alberto Fernández, le candidat péroniste qui a de grandes probabilités d’être élu président le 27 octobre prochain : ils veulent sensibiliser le futur chef d’État aux enjeux du secteur du livre, qui a beaucoup souffert de la politique de l’actuelle majorité, et à ceux, plus généraux, de la culture, dont ils demandent que le portefeuille soit rétabli au rang de ministère. Il y a de fortes probabilités qu’un gouvernement Fernández s’en occupe : l’homme vit actuellement de son métier de professeur de droit pénal à l’Université de Buenos Aires (UBA) et non des émoluments d’un mandat électif ou de fonctions partisanes et c’est un passionné de musique (il fait lui-même de la musique et plutôt bien !).

Le même jour, le candidat consultait les dirigeants de l’union patronale des industriels argentins, qui avaient soutenu, du bout des lèvres, Mauricio Macri il y a quatre ans et qui condamnent aujourd’hui sa politique qui a conduit au désastre que vit le pays depuis plus d’un an.

Pour aller plus loin :
lire l’article de Página/12 sur la lettre ouverte du collectif d’écrivains
lire l’article de Infobae sur le même sujet
lire l’article de Página/12 sur la rencontre entre le candidat et le président de l’UIA
lire l’article de Clarín sur le même sujet.

L’Argentine, dépotoir du monde ? [Actu]

Macri le chiffonnier, titrait Página/12
en référence aux ramasseurs d'ordures qui sillonnent la ville de Buenos Aires
mais quand ils ont des voitures, ils la partagent à dix
et elle est nettement rutilante que ce 4x4 typique du patronat rural

Le président Mauricio Macri vient de signer un décret qui autorise l’importation de déchets en Argentine sans contrôle sanitaire. En voilà une bonne solution pour redresser la barre de l’économie nationale : transformer son pays en poubelle du monde !

Et il est arrivé au pouvoir en promettant d’ouvrir l’Argentine au monde et d’en faire un pays respecté par les autres membres de l’ONU. C’est réussi.

Bien entendu, les humoristes de la gauche s’en donne à cœur joie, surtout dans le groupe médiatique Octubre : les maquettistes de Página/12 qui ont toujours beaucoup de talent, le duo Daniel Paz et Rudy, auteurs de la vignette de la une, et le journaliste et payador de la AM 750 (la radio du groupe), Hugo Paredero, que je vous invite à aller découvrir dans ce billet en musique qu’il a lancé lundi dernier à l’antenne (je l’ai pas mal écouté lorsque j’étais à Buenos Aires en août et c’est un excellent chansonnier).


La bourgeoise debout : Regarde-moi ce désastre ! A quoi ressemble la rue quand ils s’en vont après chaque manifestation ? Plein d’ordures partout !
Sa copine assise : Eh attention ! Des ordures mais importées !
La bourgeoise debout : Tant mieux ! Enfin nous nous ouvrons au monde !
Página/12, 10 septembre 2019
Traduction © Denise Anne Clavilier

Pour aller plus loin :
écouter la payadita basurera (petite payada ordurière) de Hugo Paredero sur le site de la AM 750.

Les circuits alternatifs se développent [Actu]

Foire de l'économie populaire, samedi dernier, à La Boca

Devant la crise économique qui fait fondre le pouvoir d’achat des Argentins, ceux-ci s’organisent avec le sens du système D qui les caractérise : des circuits de distribution solidaire se montent dans plusieurs zones, à Buenos Aires et dans sa proche et grande banlieue, où se concentre la majorité de la population du pays.

Un panier alimentaire de base à 300 pesos argentins

Le circuit solidaire Me.Co.Po (Mercado de Consumo Popular), créé en 2016 comme réponse associative à la politique néolibérale du Pro (parti majoritaire de l’alliance de gouvernement Cambiemos aujourd’hui au pouvoir), connaît un certain succès depuis le 12 août, lendemain cataclysmique des élections qui ont laissé deviner qu’il va y avoir alternance au pouvoir à Buenos Aires le 10 décembre prochain (voir mes précédents articles sur le sujet).

Le vendredi 6 septembre, Página/12 en a fait sa une.


Hier, le circuit, qui dispose d’une page Facebook, proposait un panier de 10 produits de base pour le prix modique de 300 pesos (divisez par 61 environ pour avoir le montant en euros) : des pâtes sèches, de la farine, des lentilles, de la mayonnaise (très appréciée dans les sandwichs et avec des légumes pour faire une salade russe), de l’huile de tournesol, du maïs sec (à faire tremper et à cuire à l’eau ou à la vapeur), de la sauce tomate, du riz et du lait entier. Au prix actuel, ça peut monter à 1000 euros dans un supermarché conventionnel. En matière d’épicerie sèche, il manque encore la yerba mate, le café ou le thé… Sans parler de la confiture et du dulce de leche, qui font partie de la diète ordinaire de l’Argentin moyen.


La journaliste : Les gens souffrent de la faim.
Durán Barba (conseiller ultra-libéral de Mauricio Macri honni par la gauche) : Bon, OK ! On a tout raté du côté du pain mais pour le cirque, personne ne peut se plaindre !
Página/12 de ce matin, vignette de une par Daniel Paz et Rudy
Allusion au chaos politique qui a suivi les résultats des pré-élections des PASO le 11 août avec des déclarations intempestives et contradictoires de la part de nombreux membres du gouvernement et de l’alliance gouvernementale Cambiemos.
Traduction © Denise Anne Clavilier

Le Congrès débat actuellement d’une proposition de loi d’urgence alimentaire déposée par l’opposition. Le gouvernement de Mauricio Macri a promis d’apporter son appui à ces nouvelles mesures législatives mais la ministre de la Sécurité, la très droitière Patricia Bullrich, s’en moque à la manière d’une Marie-Antoinette de caricature (1) et le candidat à la vice-présidence qui accompagne Macri pour le renouvellement de son mandat, le péroniste dissident Miguel Pichetto (qui découvre depuis un mois qu’il a joué le mauvais cheval), prétend que la notion de faim ne peut pas s’appliquer dans la société argentine.

Pour en savoir plus :
lire l’article de Página/12 du 6 septembre 2019
lire l’article de Página/12 du 12 septembre sur les déclarations de Patricia Bullrich
lire l’article de Clarín du 12 septembre sur celles de Miguel Pichetto
lire l’article de La Nación du 12 septembre sur la décision du gouvernement concernant la loi d’urgence alimentaire



(1) "Pour les gens qui ont faim, il y a la soupe populaire !" (Il est de notoriété publique que les comedores, ou soupes populaires, sont tenus en général par des organisations que Cambiemos empêchent de travailler par esprit partisan -ce sont des opposants- et qu'ils manquent tous d'argent, même ceux qui sont organisés par des militants proches de Cambiemos, comme Margarita Barrientos qui elle-même s'est plainte récemment du manque de moyen).