dimanche 27 août 2023

Fleurs Noires en tournée en Argentine [à l’affiche]


Fleurs Noires est un orchestre féminin fondé en France en 2003 par une pianiste et compositrice argentine, Andrea Marsili, qui a suivi une formation musicale à Rosario, dont elle est native, puis s’est perfectionnée en France, où elle a aussi fait un cursus universitaire de haut niveau.

Les dix musiciennes présentent depuis hier leur nouveau disque, le quatrième de l’orchestre, Tangos en Aleph, en Argentine avec un demi-douzaine de concerts dans plusieurs villes.

Le premier de ces spectacles a été donné hier à la Casa de Tango de Rosario, à 300 km au nord de Buenos Aires, dans la province de Santa Fe. Ce soir, elles seront au Centro Cultural Torcuato Tasso, Defensa 1575 dans le sud de San Telmo, à 21 h.

Puis elles descendront à San Pedro, dans l’extrême sud de la Province de Buenos Aires, avant de changer de cap pour se rendre au nord-ouest, à San Juan, au pied des Andes, dans la province homonyme, où elles se produiront dans le prestigieux et magnifique Teatro del Bicentenario. Elles sont attendues le 2 septembre à Río de la Paz, dans la province de Entre Ríos, où elles joueront dans le cadre d’un festival. La tournée se terminera le lendemain, à Buenos Aires, dans le prestigieux cadre de la Manzana de las Luces, tout récemment réouverte au public après de longues années d’un interminable et chaotique chantier de restauration et de réhabilitation de ce site historique fondé par la Compagnie de Jésus au 17e siècle.

Tout au long du circuit, nos Fleurs Noires seront accompagnées sur scène par le percussionniste argentin établi en France et très connu dans son pays d’origine Minimo Garay et le chanteur Aureliano Marín.

Le disque bénéficie quant à lui de surcroît de la participation de Daniel Melingo, bien connu du public argentinophile français.

A cette occasion, qui ne se présente pas tous les jours, Página/12 publie aujourd’hui une interview de Andrea Marsili dans les pages de son supplément culturel quotidien, Cultura & Espectáculos.

© Denise Anne Clavilier


Pour aller plus loin :

vendredi 25 août 2023

Ariel Prat and friends au CAFF [à l’affiche]

Une une particulière du supplément culturel quotidien
de Página/12 : sans gros titre (peut-être une erreur de la rédaction en ligne)
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Ce soir, 25 août 2023 à 21 h, le murguero Ariel Prat termine au CAFF, Sánchez de Bustamante 772, dans le quartier de l’Abasto, une première série de récitals où il a partagé la scène avec des amis de longue date, chanteurs, compositeurs ou instrumentistes, en vue de la sortie d’un nouveau disque intitulé Pratanguero.

Une nouvelle série est d’ores et déjà annoncée en octobre.

Très engagé politiquement, à gauche toute, Ariel Prat a donné une interview à Página/12 qui s’achève sur les inquiétudes qu’il manifeste devant le risque de voir arriver au pouvoir une droite très proche de l’idéologie que défendait la dictature militaire, puisque les deux candidats en lice dans ce camp politique, Bullrich et Mileí, parlent l’un et l’autre d’annuler les peines de prison prononcées contre les sbires de la Junte et de détricoter tout ou partie du service public et du secteur non-marchand (santé, éducation, culture, etc.).

Prix des places : 2500 pesos avec réservation préalable

3000 $ ARG au guichet à l’ouverture des portes, à 20 h.

© Denise Anne Clavilier


Pour aller plus loin :

L’Argentine rejoint les BRICS. Dernier succès diplomatique pour la majorité sortante ? [Actu]

Une enthousiaste du quotidien pro-gouvernemental
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L’annonce est tombée hier de Johannesburg et sa précocité (elle n’était pas attendue avant plusieurs semaines) aurait surpris le gouvernement argentin dont ce sera sans doute le dernier exploit diplomatique avant les élections générales d’octobre, lesquelles ne se présentent pas au mieux : l’Argentine intègre les BRICS avec cinq autres pays dont le moins qu’on puisse dire est qu’ils ne sont pas majoritairement des démocraties.

"L'Argentine rejoint une alliance contre le dollar", dit le gros titre
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Il semblerait que Lula ait pesé de tout son poids en faveur du pays voisin et (encore) ami pour qu’il rejoigne ce club qui veut offrir une alternative à la domination économique des États-Unis, représentée par le G7, et le règne universel de leur devise.

En pleine campagne électorale, les contradictions de la majorité sortante éclatent en plein jour : on se réjouit de l’entrée dans ce club dominé par des dictatures, dont deux sont même des régimes totalitaires, tout en attaquant dans les programmes de l’opposition les futures atteintes aux droits de l’Homme et les menaces contre les droits sociaux qui ont été si difficiles et si longs à conquérir en Argentine.

Clarín évoque en bas à droite
les soupçons d'assassinat concernant Prygojine
comme si cela n'était pas évident pour ses lecteurs
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La une des journaux témoignent d’ailleurs de la division idéologique et politique du pays à ce sujet. Clarín n’a même pas jugé utile d’en faire mention.

Les deux candidats de droite actuellement en lice pour le premier tour en octobre, Patricia Bullrich (droite officiellement libérale) et Javier Mileí (droite libertaire fascisante), dénoncent cette évolution internationale de leur pays, l’une parce qu’il ne faudrait pas, selon elle, intégrer le club tant que la Russie mène une guerre illégale contre l’Ukraine (elle ne nous avait pas habitués à tant de sollicitude internationale), l’autre parce que les BRICS seraient dominés par des communistes (comme d’ailleurs un nombre considérable d’institutions internationales, selon les analyses fanatiques de Mileí).

"L'Argentine rejoint les Brics mais Bullrich
et Milei refusent l'alliance", dit le gros titre
au-dessus d'une photo de famille de la droite libérale

Quoi qu’il en soit, les discours enthousiastes des responsables politiques de la majorité, qui passent sous silence le médiocre poids des démocraties en son sein, jettent comme un voile sur les préparatifs d’un 10 décembre qu’il était prévu de transformer en grande célébration pour fêter les quarante ans du retour de l’État de droit en Argentine après sept années de la plus cruelle dictature militaire de son histoire.

© Denise Anne Clavilier


Pour aller plus loin :

lire l’article de Página/12
lire l’article de La Prensa (droite catholique réactionnaire)
lire l’article de Clarín (droite populaire), article qu’il faut chercher dans les pages économiques du journal et non ses pages politiques !!!!
lire l’article de La Nación (droite libérale grand-bourgeoise), qui ne correspond pas à son titre de une
lire le communiqué de la Casa Rosada et le discours du président Alberto Fernández hier lorsque la nouvelle a été confirmée officiellement

mercredi 23 août 2023

Le Festival de Tango commence à Buenos Aires [à l’affiche]


Aujourd’hui, commence le Festival de Tango officiel de Buenos Aires dont c’est la 30e édition.

Avec son centre principal situé à La Boca, au centre culturel La Usina del Arte, la manifestation se déploie cette année dans toute la ville. Les spectacles, milongas, projections, conférences, ateliers, cours et autres activités occuperont jusqu’à trente lieux différents tout au long des dix jours du festival. Une durée plus courte qu’il y a quelques années, quand la manifestation durait une bonne quinzaine.

Au programme, très chargé, on notera un hommage au poète Horacio Ferrer, qui aurait eu 90 ans en juin dernier et un autre hommage, en forme de spectacle, à la chanteuse et actrice Tita Merello, une des figures préférées de ces rappels historiques.

Quelques artistes bien connus des lecteurs fidèles de Barrio de Tango seront présents, notamment le chanteur Walter Laborde, dit El Chino.

Le quotidien de la droite catholique réactionnaire
est le seul quotidien national à avoir mis l'événement
à la une
En haut, une photo de l'un des supermarchés pillés
dans cette folle journée d'hier
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Le festival se déroule cette année dans une atmosphère fort désagréable, au milieu d’une campagne électorale assez peu reluisante, elle-même éclaboussée par un nombre effarant de faits divers tous plus terribles les uns que les autres, depuis ce féminicide dont on parle encore il y a un mois jusqu’au saccage et au pillage d’un grand nombre de supermarchés hier, un peu partout dans le Gran Buenos Aires.

Comme toujours le festival se mêle au Mundial del Tango, la compétition internationale de danse qui fait référence pour le tango, avec ces trois catégories vedettes, le tango-salón avec un concours pour les danseurs jeunes et et un autre pour les moins jeunes, et le tango de scène, réservé aux professionnels.

La plupart des activités sont gratuites. Pour plusieurs spectacles, les places doivent être réservées à l’avance en ligne avec une quantité limitée par personne.

© Denise Anne Clavilier


Pour aller plus loin :

visiter la page du festival sur le site des festivals officiels de Buenos Aires.

mardi 22 août 2023

Le nouveau champion du monde d’alfajor est un couple d’artisans de Campana [Actu]

Affiche de la marque championne du monde : Quiero (j'aime)
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Le week-end dernier, se tenait au centre des expositions de La Rural à Palermo, le plus grand quartier de Buenos Aires, dans le nord de la ville, le deuxième championnat du monde de l’alfajor, cette gourmandise fourrée à deux ou trois étages typique de l’Argentine et des pays voisins.

En haut, en jaune clair, la crème de cacahuète
En-dessous, perdu entre ses deux couches de biscuit chocolaté,
une épaisse couche de dulce de leche
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Cette année, le prix le plus prestigieux, celui de l’alfajor triple artisanal au dulce de leche, a été remporté par un couple d’artisans de Campana, petite ville tout au nord de la Province de Buenos Aires. Cette recette combine un fourrage au dulce de leche maison et un autre à la ganache de cacahuète, le tout recouvert d’un nappage de chocolat noir fondant en bouche (c'est écrit ci-dessus). Tout est fabriqué maison : les trois biscuits, les deux fourrages et l’enrobage.

Le jeune couple d'artisans juste après l'annonce des résultats
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Une belle saison s’annonce pour le jeune couple : les consommateurs vont se ruer sur leur boutique (en tout cas, les gens qui ont assez de moyens pour s’offrir ce modeste luxe).

© Denise Anne Clavilier


Pour aller plus loin :


Mise à jour du 23 août 2023 :
lire cet article de La Prensa


Mise à jour du 24 août 2023 :
lire cet article de Página/12 (en une sur l’édition de la Province de Buenos Aires)

En haut, au-dessus du titre :
"Le meilleur alfajor du monde
vient de la province"
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Comme d’habitude, ce sont les plus pauvres qui payent les pots cassés de l’inflation [Actu]

Synthèse du rapport de l'INDEC
en rose tyrien, le seuil d'indigence
en bleu-violet, le seuil de pauvreté
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Alors que l’inflation en juillet s’est élevée à 6,3 % (mensuel), le seuil d’indigence a quant à lui augmenté de 7,1 %. Ce seuil est défini par un panier de produits alimentaires de base dont les prix au détail sont relevés dans Buenos Aires et sa banlieue (en Argentine, c’est la plus forte concentration de personnes vivant au seuil de pauvreté et en-dessous).

Le seuil de pauvreté est quant à lui défini par ce même panier completé par une sélection de services de première nécessité. Ce seuil a connu le mois dernier le même taux d’inflation. Ce qui est très rare.

En cumul sur douze mois, cela donne une augmentation de plus de 120 % l’an alors que l’inflation tourne autour de 115 % sur la même période.

Comme pour le taux d’inflation publié mardi la semaine dernière, l’actualité politique et électorale jointe aux inondations qui ont affecté la province de Buenos Aires ont fait passer par pertes et profits cette information dans la presse écrite nationale lorsqu’elle a été connue dans la journée du 17 août.

© Denise Anne Clavilier


Pour aller plus loin :

lire le rapport complet de l’INDEC, l’institut national des statistiques argentin.

samedi 19 août 2023

L’Argentine fait ses adieux à Chico Novarro [Actu]

Une du supplément culturel quotidien de Página/12
"Des chansons qui appartiennent à tout le monde"
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Chanteur, pianiste, percussionniste, compositeur, parolier et même acteur, Chico Novarro était tout cela à la fois. Il est décédé hier matin à près de 89 ans après plusieurs alertes de santé. Le moins que l’on puisse dire est qu’il aura marqué la musique populaire en Argentine, puisqu’il a touché à presque tous les genres : le tango, le pop, le jazz, un peu de folklore sans oublier le boléro et la cumbia entre autres rythmes empruntés à la diversité latino-américaine, bref il ne s’est laissé impressionner par aucune limite conventionnelle.

Le choc politique que subit le pays depuis le début de cette semaine restreint sans aucun doute le traitement de la nouvelle dans la presse. Sans cela, sa photo ferait la une de presque tous les quotidiens. Il n’a droit qu’à des manchettes.

La une est consacrée à l'interdiction judiciaire du vote
électronique à Buenos Aires : son usage dimanche dernier
s'est révélé catastrophique (ça ne marchait pas)
En bas, la police empêche des sans-abri de s'installer
dans des immeubles vides dans un quartier de Buenos Aires
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Chico Novarro était le fils d’un cordonnier juif venu d’Ukraine. Sa mère venait de Roumanie. Il était né à Santa Fe, dans le nord de l’Argentine, sur les rives du fleuve Paraná. Bref, une situation plutôt classique pour un artiste populaire argentin.

La une est consacrée aux échanges entre
le candidat arrivé en tête (Mileí) et le FMI
En-dessous, : les inondations à La Plata le 17 août
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Il nous laisse plus de 700 chansons et une discographie impressionnante, mais aussi des souvenirs de scène, de théâtre et de télévision à la pelle. De ses quatre enfants, deux ont suivi ses traces et font carrière comme acteurs, Pablo Novak, qui s’est chargé de rendre publique la triste nouvelle, et Julieta Novarro.

Chico Novarro était Ciudadano Ilustre de la Ville de Buenos Aires depuis 2014.

© Denise Anne Clavilier


Pour aller plus loin :

mercredi 16 août 2023

Quand Mileí menace de fermer le Conicet : la recherche, on s’en fiche [Actu]

"Mileí (le chevelu) : Le FMI a pris contact avec nous
Le gros capitaliste derrière lui : Qu'est-ce que tu vas leur dire
à ces marxistes ?
Mileí : Je ne sais pas... Je n'en ai pas encore parlé à mon chien"
Dessin de une de Página/12 ce matin
Traduction © Denise Anne Clavilier


Mileí est le spécialiste de la Trumperie ! Dans son programme électoral, on ne compte plus les aberrations comme celle de se passer d’une devise nationale pour adopter le dollar états-unien. Qu’a-t-on à faire de la souveraineté monétaire, n’est-ce pas ? Le candidat vient d’intégrer dans son équipe de campagne un économiste spécialiste de cette stratégie discutable.

Président, Mileí privatiserait aussi Aerolíneas Argentinas, la compagnie d’aviation fondée par Juan Domingo Perón lorsqu’il a rassemblé sous une même bannière publique plusieurs petites compagnies antérieures, comme le Front Populaire avait fait en créant la SNCF. Le même sort est promis à YPF, la compagnie pétrolière nationale (extraction, raffinerie et distribution), créée par un autre président de gauche, Hipólito Yrigoyen, bien plus tôt, au début du 20e siècle. Deux entreprises récupérées par l’État sous la présidence de Cristina Kirchner pour que les décisions et les éventuels bénéfices reviennent au pays et non pas à des capitalistes résidents à l’étranger (en l’occurrence, des holdings espagnoles).

Le type paraît fou à lier, à moins qu’il ne soit un excellent simulateur.

Le journal a mis l'info à sa une, juste au-dessous du gros titre
à l'intérieur de la fenêtre qui lui est consacrée :
"Mileí veut 8 ministères et vendra le Conicet"
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Il vient de provoquer un nouveau scandale en annonçant urbi et orbi que lui président, le CONICET disparaîtrait en tant qu’institution publique. Tout passerait au secteur marchand. Le ministère de la Recherche disparaîtrait lui aussi. Or le CONICET, c’est le grand établissement multidisciplinaire national. Il rassemble toute la recherche publique, fondamentale et appliquée, dans les sciences exactes comme dans les sciences sociales, similaire au CNRS en France, et travaille en partenariat avec les universités publiques nationales de tout le pays (il y en a au moins une par province). Les paléontologues qui font des découvertes d’importance mondiale en explorant les inépuisables gisements de fossiles de dinosaures en Patagonie ainsi que les médecins et biologistes qui en ce moment mettent au point un vaccin anti-covid dont la phase n°1 vient d’être validée tout comme les ingénieurs qui conçoivent et construisent les satellites argentins que mettent en orbite les Russes, les Chinois ou les Européens (Kourou) travaillent au sein d’unités du CONICET et émargent donc à son budget, qui couvre aussi les es moyens de la recherche.

Cette décision d’un démagogue fascisant, ignare et inculte, serait donc bel et bien désastreuse pour l’avenir du pays, comme 99 % de son programme. Beaucoup de ces projets sont de toute manière anticonstitutionnels.

© Denise Anne Clavilier


Pour aller plus loin :

lire l’entrefilet de Clarín, dont la rédaction semble prendre la mesure des inquiétants résultats de dimanche dernier
lire l’article de La Nación sur cette proposition folle du candidat (La Nación elle aussi prend, au moins sur certains points comme celui-ci, la mesure du désastre qui s’annoncerait si le premier tour devait confirmer le résultat des PASO)
lire l’article de La Nación sur la réponse que lui a faite la directrice générale du CONICET.

Une du 17 août 2023
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Mise à jour du 17 août 2023 :
lire cet article de une de Página/12 (édition nationale - ci-dessus)
lire cet article de une de Rosario/12 (édition santafesine - ci-dessous)

Une du 17 août 2023
Edition dans la capitale culturelle et économique
de la Province de Santa Fe
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Mise à jour du 19 août 2023 :
lire ce nouvel article de une de Página/12 sur une manifestation de scientifiques contre les propositions délirantes du candidat libertaro-fasciste.

"Avec le science", titre le journal sur cette photo
d'une manifestation qui s'est tenue hier devant le ministère

En juillet, l’inflation s’est renforcée [Actu]

"A 6,3% en juillet, l'inflation a pris de la vitesse
et le dollar reste incontrôlé", dit le gros titre
au-dessus d'une photo du chaos à l'aéroport intérieur de Buenos Aires
où les bagagistes se sont mis en grève sans préavis
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En un mois, en moyenne générale nationale, tous postes de dépenses confondus, l’inflation argentine est passée de 6 % en juin à 6,3 % en juillet. L’INDEC, l’institut public des statistiques nationales, n’a pas eu le temps de publier ce chiffre avant la première phase des élections générales dimanche dernier. Les données ont été rendu publiques hier dans l’après-midi (le 15 août n’étant pas un jour férié). Aujourd’hui, elles ne sont pas toujours commentées dans les éditions imprimées des quotidiens. Plusieurs d’entre eux ne proposent donc qu’un article en ligne.

Synthèse générale sur l'inflation en juillet
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Ce nouveau rapport mensuel donne une variation interannuelle de 113,4 % et un cumul depuis janvier de 60,2 % (pour sept mois consécutifs). Rien qui puisse aider l’électorat à calmer sa rage contre les partis de gouvernement même si la variation interannuelle est bel et bien inférieure à celle du mois dernier (115,6%), ce qui fait espérer que le ralentissement observé en mai et juin pourrait se confirmer à plus long terme en pesos constants (le peso vient d’être dévalué lundi, pour éviter une catastrophe post-électorale sur les marchés).

Synthèse des variations dans le temps et l'espace
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En juillet, l’alimentation (hors boissons alcoolisées) présentait en moyenne nationale une augmentation de 5,8 %. Les deux valeurs extrêmes, respectivement 3 % et 12,2%, se situaient pour la plus basse dans le poste de l’habillement et pour la plus élevée dans les dépenses de communication (téléphonie, Internet).

Tableau des variations régionales
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En ce qui concerne les variations régionales, on observe peu d’écarts flagrants avec les moyennes nationales, à l’exception notable des transports publics en Patagonie, dont les tarifs ont augmenté de 20 %, ce qui fait monter aussi la moyenne globale de cette région. Elle dépasse d’un point la moyenne nationale. En plein hiver ! L’époque où les dépenses de chauffage sont particulièrement lourdes (tandis qu’en été, ces dépenses ne sont que peu compensées par les coûts de l’air conditionné).

Le rayon de la viande de bœuf dans un hypermarché
avec ses offres promotionnelles affichées sur les vitres
Photo Emmanuel Fernández

© Denise Anne Clavilier


Pour aller plus loin :

lire le rapport complet de l’INDEC (téléchargeable gratuitement en format pdf).

lundi 14 août 2023

Quarante ans après le retour de la démocratie, la catastrophe n’est pas impossible [Actu]

"Octobre en feu", dit le gros titre
(en général, on pense "octobre en fleurs", puisque c'est le printemps)
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Hier se tenait la première phase des élections générales en Argentine, les PASO, système de sélection des candidats admis au premier tour, lequel se tiendra en octobre et auquel il suffit d’obtenir 45 % des voix pour être élu président de la Nation.

Les sondages accordaient autour de 20 % au candidat le plus éloigné de l’État de droit et de l’ordre constitutionnel, l’anarcho-libertaire bolsonaro-trumpien et nettement fascisant Javier Mileí. Depuis hier soir, il se trouve en tête du personnel politique argentin puisqu’il a recueilli 30 % des voix exprimées, dans un contexte d’absentéisme record. Seuls 68 % des électeurs se sont en effet déplacés dans un pays où le vote est pourtant obligatoire.

"La nuit du Lion", titre le quotidien des ultra-catholiques
Hier, ils avaient titré triomphalement : "Demain, ce sera un autre pays"
C'est bien un autre pays, mais je ne suis pas sûre
qu'ils puissent s'en réjouir
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Derrière Mileí et son effrayant programme dont la justice sociale, considérée comme une escroquerie, est bannie et la vente des organes largement permise, arrivent la droite libérale officiellement constitutionnelle, désormais représentée par Patricia Bullrich, qui veut libéraliser le port d’armes et mise sur une présomption d’innocence pour tout policier qui sort son arme et tue quelqu’un, et, en troisième place, Sergio Massa, l’actuel ministre de l’Économie, représentant le péronisme de gauche (ou de centre-gauche).

Trois points séparent ces trois courants de pensée mais si l’on calcule à partir des voix qui se sont portées sur chaque candidat et non plus famille politique par famille politique, l’ordre et les marges sont différents : Mileí arrive toujours en tête mais c’est Sergio Massa qui le suit avec 21 % des voix. Il précède donc Bullrich qui n’a obtenu que 17 % des suffrages.

"Milei a créé la surprise dans tout le pays
Bullrich a gagné chez Juntos por el Cambio"
(ensemble pour le changement)
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Reste à savoir comment va s’opérer le transfert des voix. Il n’est pas sûr que les 11 % qui, dans la droite libérale, ont voté hier pour Horacio Rodríguez Larreta, le chef de l’Exécutif municipal de Buenos Aires qui reçoit un camouflet électoral spectaculaire après avoir longtemps figuré comme le champion naturel et évident de son camp, acceptent tous comme un seul homme de voter pour la très droitière et très violente Patricia Bullrich tant les positions des deux concurrents sont incompatibles sur bien des points.

Il est possible aussi que des électeurs de Mileí, dont personne ne pensait qu’il arriverait en tête, se repentent devant les résultats effectifs et votent différemment au premier tour en octobre. Peut-être ne le feront-ils pas tous pour Bullrich tant il y avait de colère qui s’exprimait dans ce pré-scrutin sans effet décisif et considéré donc comme négligeable ou accessoire par bon nombre de citoyens argentins.

A gauche, eu égard aux enjeux imposés par cette double droite triomphante de cette nuit, il est probable que le report des voix qui sont allées à Juan Grabois, un syndicaliste qui représente une gauche façon « insoumise » avec un programme peu réaliste en Argentine mais indéniablement ambitieux sur le plan social, soit très large en octobre. Le candidat battu a lui-même montré l’exemple en allant rejoindre Sergio Massa, dès la fin de son propre discours, pour lui apporter sur le champ tout son soutien, comme il l’avait promis en se présentant contre lui au dernier moment. Or il a remporté 6 % des suffrages exprimés, ce qui nous donne un bloc de 27 %, soit un score assez peu éloigné de Mileí et dix points au-dessus de celui obtenu par Bullrich.

"Choc électoral : Milei gagne, Bullrich l'emporte sur Larreta
et le kirchnerisme arrive troisième"
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Et qu’en sera-t-il des abstentionnistes d’hier ? Iront-ils voter en octobre ?

Au niveau local, deux résultats secouent aussi le paysage local et national :

- le kirchnerisme, mouvement lancé par le défunt mari de l’actuelle vice-présidente Cristina Kirchner, perd le poste de gouverneur de la province de Santa Cruz qu’il détenait depuis plus de trente ans, depuis la toute première victoire électorale dudit Néstor Kichner, dont la sœur, Alicia Kirchner, occupe le siège depuis des temps immémoriaux et jusqu’à la toute prochaine prestation de serment du vainqueur d’hier, un syndicaliste de l’industrie pétrolière, dissident du kirchnerisme ;

- à La Plata, capitale de la province de Buenos Aires, en revanche, c’est le gouverneur kirchnériste qui devrait rempiler, Axel Kiciloff, dont les oreilles ont pourtant dû siffler ces derniers jours, à la suite de plusieurs faits divers particulièrement sordides qui ont fait mettre en doute sa politique de sécurité publique. Il vient pourtant d’engranger un très beau score. Depuis quatre ans, Kiciloff a mené une politique plutôt cohérente dans sa gigantesque province et il semble en avoir retiré les fruits électoraux hier. Ce qui met du baume au cœur de son camp, étrillé par ces résultats nationaux cauchemardesques.

Cette fin d’hiver et ce début de printemps promettent donc d’être très durs pour les Argentins qui ont en quelque sorte vécu hier soir leur 21 avril 2002, avec de surcroît un président sortant qui n’a pas pu se représenter, comme Hollande en 2017.

Le 10 décembre prochain, journée internationale des Droits de l’Homme, l’Argentine doit célébrer les quarante ans du retour de la démocratie. Ce sera aussi le jour où le nouveau chef d’État prêtera serment.

© Denise Anne Clavilier


Pour aller plus loin :

mardi 8 août 2023

San Cayetano : un grand millésime, hélas ! [Actu]

Fidèle à la tradition humoristique et calembouresque
de sa une, Página/12 inverse ce matin l'expression consacrée :
au lieu du Santo del Trabajo (le saint patron du travail),
le journal iconoclaste et irrévérencieux titre :
"le travail du saint", sur cette photo
de la statue du saint, à main droite en entrant dans l'église
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En Argentine, San Cayetano, connu en français comme saint Gaëtan, est le saint patron du pain et du travail. Sa fête, tous les 7 août, est l’occasion de grands pèlerinages dans les sanctuaires qui lui sont dédiés. Il y en a partout. Chaque province, pour ne pas dire chaque diocèse a le sien. Et par les temps qui courent, ceux où la nourriture coûte de plus en plus cher avec une inflation qui dépasse désormais les 100 % l’an, nul ne peut s’étonner qu’hier le pèlerinage ait connu un grand succès. Le 7 août est un véritable baromètre socio-économique dans tout le pays.

A Buenos Aires, la paroisse San Cayetano est située à Liniers, un quartier très populaire à la limite ouest de la ville. L’église se trouve tout près de l’autoroute, la General Paz, qui ceinture le côté occidental de la capitale. Tout autour d’elles, s’est établi un essaim de petits commerces qui ne payent pas de mine. Les façades sont un peu déglinguées. Les enseignes très colorées ont été peintes à la main par le patron lui-même à la fois en cuisine et au comptoir. Il y a peu, le quartier était intensément animé par les abattoirs aux bœufs qui ont depuis déménagé en très, très grande banlieue.

Autre journal, autre appartenance politique,
autres choix éditoriaux !
En gros titre, le cours du dollar (la devise nationale dévisse)
Juste à côté, à droite, un petit appel au sujet de l'homélie de l'archevêque
En dessous : la photo censée illustrer l'union de la droite avec
l'ancien président Mauricio Macri, son cousin qui se présente à l'exécutif de Buenos Aires
et qui tient le téléphone pour faire ce selfie,
l'actuel chef de cet exécutif, qui vise la présidence,
et la patronne du PRO, le parti de la droite ultra-libérale
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Cette année, à Buenos Aires, c’était la première grande manifestation catholique pour le tout nouveau primat d’Argentine nommé au lendemain de la fête nationale du 25 mai, Monseigneur García Cuerva, connu pour son ouverture aux questions sociales. Inutile de dire qu’il était attendu au tournant pas les observateurs politiques dans cette toute dernière ligne droite avant les primaires obligatoires et générales (PASO) qui vont déterminer dans quelques jours ceux des candidats qui auront le droit de se présenter au premier tour en octobre, les uns parce qu’ils arriveront en tête de leur mouvement politique, les autres parce qu’ils auront dépassé le seuil légal qui a été fixé afin d’écarter les candidatures beaucoup trop marginales.

Copie conforme ou inversement avec La Nación
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Le très jeune archevêque n’a pas déçu : dans son homélie, il a parlé travail, salaire, inflation et coût de la vie devant une assemblée pleinement concernée, le pèlerinage amenant au sanctuaire tout ce que la ville et parfois la banlieue sud compte de laissés pour compte du marché du travail et des comptes en banque tranquilles : « Aucune bourse n’est à la hauteur [de l’inflation des prix], a-t-il déclaré. On en peut pas vivre juste avec de la polenta et du riz ».

En bon pasteur, fidèle au modèle de François, il a aussi fait une tournée des petits commerces et des ateliers du coin pour bénir le travail des diocésains. D’où quelques images pittoresques et néanmoins pleinement authentiques dont les journaux se régalent ce matin.

"Ce que tu as dans ton porte-monnaie,
cette maudite inflation le mange", dit le gros titre en jaune
sur une autre photo d'une autre statue du saint
dans la même église de Liniers
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Par ailleurs, la délégation amérindienne venue à pied de Jujuy il y a quelques jours pour réclamer à cor et à cri aux pouvoirs publics fédéraux l’annulation de la réforme constitutionnelle dans leur province a, elle aussi, accompli le pèlerinage en vue de faire entendre ses revendications sur ses terres que le très droitier et de plus en plus autoritaire gouverneur entend livrer à l’avidité sans foi ni loi des grandes multinationales minières pour l’exploitation du lithium contenu dans le sous-sol de ces splendides montagnes. Or Liniers est habité par des très nombreux Argentins venus des provinces pauvres du nord-ouest (dont Jujuy) ainsi que des pays voisins, Paraguay, Bolivie et Pérou. Les commerces locaux le montrent très bien. Ce secteur de la mégalopole est plein de petites cantines boliviennes et péruviennes où des habitués viennent (ou venaient) manger sur le pouce : ouvriers du bâtiment ou des travaux publics, habitants du quartier, chiffonniers en route pour leurs bidonvilles et jusqu’à il y a peu, peones (ouvriers agricoles) des abattoirs voisins.

© Denise Anne Clavilier


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