jeudi 31 mai 2018

Veto contre vote [Actu]

Gros titre : "Direction : le veto"
La photo secondaire montre le président saluant la sélection nationale
avant le départ pour la Russie
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Comme on pouvait le deviner hier, le Sénat argentin a bien voté une loi d'urgence contre l'augmentation des prix de l'énergie (c'est son nom) pour mettre un frein aux augmentations brutales et très fréquentes du gaz et de l'électricité pour les particuliers, les professionnels et les entreprises, au point qu'elles mettent de plus en plus en danger la production et l'emploi, puisque les ateliers, les coopératives et les autres sociétés n'arrivent pas toujours à suivre.

La photo de une est réservée au départ des footeux, Messi en tête
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C'était au petit matin, après douze heures de débat, à l'initiative des péronistes, aujourd'hui dans l'opposition.

Quelques heures plus tard, la présidence de l'exécutif annonçait que Mauricio Macri avait déjà posé son veto sur cette loi, comme la constitution lui en donne le droit. Macri est un spécialiste de cette procédure : il n'a pas cessé de poser son veto sur les dispositions qui le gênaient lorsqu'il dirigeait la ville de Buenos Aires et il continue à la tête de l'Etat fédéral.

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Le vote avait pourtant été acquis par 37 oui contre 30 non, c'est-à-dire une majorité nette en faveur d'une limitation de ses mesures, qui sont décidées par le ministère de l'Energie et des Mines.

Página/12 a bouclé avant le vote de la loi mais il l'a anticipé avec ce montage

Il est très probable que la CGT appelle à la grève à la suite du veto présidentiel et qu'il y ait quelques manifestations contre le gouvernement dans les jours qui viennent puisque à nouveau, le président recherche visiblement la confrontation. Ce veto qui arrive après l'appel à l'armée pour renforcer la police, c'est fait exprès. Et d'autant plus qu'on apprend en même temps que l'entrée de l'Argentine à l'OCDE est reportée sine die (on s'en serait douté avec le recours au FMI) - voir l'article de La Nación - et que d'autres tarifs augmentent encore, comme ceux du train de proximité (le train grandes lignes n'existe pratiquement plus en Argentine, depuis la présidence de Carlos Menem qui a détruit tout le réseau construit depuis la fin du dix-neuvième siècle) - voir l'article de Página/12, qui se scandalise aussi des récents propos de la gouverneure de la Province de Buenos Aires qui dénie, devant un parterre mondain du Rotary Club, la légitimité des universités dans la banlieue de la capitale puisque "quand on naît pauvre, on n'y va pas" ! Quel aveu du refus de cette majorité d'améliorer les conditions de vie et les perspectives des classes défavorisées.

Pour aller plus loin :
lire l'article de Página/12 sur le vote
lire l'article de Página/12 sur le veto présidentiel
lire l'article de La Prensa sur le vote
lire l'article de La Prensa sur le veto
lire l'article de La Nación sur le vote
lire l'article de La Nación sur le veto
lire l'article de Clarín sur le vote
lire l'article de Clarín sur le veto

Ajout du 3 juin 2018 :
lire cet éditorial humoristique de Clarín (très hostile à la loi rejetée par le président)

mercredi 30 mai 2018

Missions de lutte contre le crime pour l'armée argentine [Actu]

Página/12 fait passer le ballon de campagne électorale du jeune canari du parti libéral (PRO)
au vert du treillis et du casque de camouflage
Gros titre : "Au pas de course"

Encore une décision qui heurte de front toute la gauche et son antimilitarisme, construit sur l'expérience des nombreuses dictatures militaires qui se sont succédé au gré des coups d'état de 1930 à 1976 en Argentine : hier, lors de la fête de l'armée de terre, au lycée militaire de El Palomar, dans la Province de Buenos Aires, le président Mauricio Macri a annoncé qu'il confierait à l'armée des missions d'appui logistique aux forces de police pour lutter contre le crime (surtout le trafic de stupéfiants et les agressions contre les personnes et les biens) et surveiller les frontières, une mission qui revient normalement à la gendarmerie et à la douane.
Au Brésil, Michel Temer, le très impopulaire et très discrédité président venu d'une manœuvre parlementaire qui s'avère des plus douteuses, a remis, lui aussi, les militaires dans le jeu politique et policier. Et cette imitation ne dit rien qui vaille en Argentine.

Bien entendu, ces déclarations sont saluées par une levée de boucliers dans les colonnes de Página/12. Et on ne peut plus croire Macri lorsqu'il prétend réconcilier les Argentins. A un moment où le pays est financièrement étranglé, où il a besoin que ses citoyens s'unissent et arrivent à dépasser leurs différends idéologiques, ramener l'armée dans les missions de police, ce n'est pas œuvrer à une réconciliation quelle qu'elle soit ! Mais dans Clarín, on lit ce matin que le gouvernement argentin mettrait en cause le corset dans lequel le pouvoir kirchneriste aurait emprisonné l'armée par pur hypocrisie. Donc non seulement, il ne cherche pas la réconciliation mais il dénie toute légitimité à une décision prise antérieurement par un gouvernement tout aussi démocratiquement et constitutionnellement mis en place que lui.

La Nación traite l'info en titre secondaire, à droite
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D'un autre côté, le président a annoncé aussi qu'il allait renforcer la participation argentine dans les missions de paix de l'ONU et que malgré la situation financière déprimée du pays, il allait revaloriser la solde.

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Trois des grands quotidiens nationaux ont traité l'information à la une, preuve qu'à droite comme à gauche, la décision remue. D'ailleurs, la loi en vigueur interdit aux forces armées de s'impliquer dans des opérations de police. Pendant ce temps, au sénat, l'opposition va sans doute obtenir le vote d'une loi qui rendrait illégales les récentes augmentations des prix de l'énergie et la Présidence se prépare à émettre son veto, comme la constitution le lui permet de le faire. De la même manière, l'opposition se bat pour que les conditions du prêt accordé demandé au FMI soient soumises aux parlementaires.

Pour aller plus loin :
lire l'article de Clarín (dans l'édition d'hier)
lire dans Página/12 la réaction de Estela de Carlotto, présidente de Abuelas de Plaza de Mayo, très hostile à cette mesure et présentée comme candidate au prix Nobel de la Paix (pour la sixième tentative)
lire toujours dans Página/12 celle de Adolfo Pérez Esquivel, prix Nobel de la Paix argentin
En revanche, Graciela Fernández Meijide, la troisième grande voix des droits de l'homme dans le pays, plutôt favorable à ce gouvernement mais nullement inconditionnelle, ne s'est pas encore manifesté dans la presse.

Ajouts du 31 mai 2018 :
Página/12 publie ce matin un article sur plusieurs réactions dans le monde politique et militant
Le chef d'Etat-Major des armées argentin a émis beaucoup de réserves sur la demande présidentielle en rappelant que la loi actuelle s'y oppose absolument et qu'il ne s'agit pas du métier pour lequel les militaires sont formés. C'est La Nación  qui s'est est fait l'écho ce matin.

Ajout du 6 juin 2018 :
lire l'article de Página/12 sur les nouvelles déclarations de la ministre Patricia Bullrich qui insiste pour intégrer les forces armées aux missions des forces de l'ordre, malgré les prises de position sans ambiguïtés non seulement du chef d'Etat-major général des armées que des représentants de la lutte pour les droits de l'homme.
La ministre appuie son raisonnement bancal sur la situation en France où les forces armées effectuent des missions de surveillance dans la rue mais 1) l'Argentine n'est pas visée par le terrorisme qui nous affecte et qui a provoqué cette réalité après les attentats dits des terrasses et 2) tout le monde sait que cette mission Sentinelle est tout sauf efficace et ne sert qu'à rassurer les civils, d'une manière très démagogique, en faisant perdre aux militaires leur temps, leur énergie et même leurs compétences spécifiques, puisqu'ils n'ont pas la disponibilité de s'entraîner aux situations de combat qu'ils doivent affronter en opex ! Un mimétisme d'autant plus crétin que la même ministre veut mettre en place le droit pour les forces de l'ordre de faire feu, y compris hors de la légitime défense... Et quand on sait ce qu'est le cadre légal de la légitime défense pour la police et la gendarmerie en France !

Ajout du 19 juin 2018 :
le gouvernement persiste et signe.
lire cet article de Página/12 sur les intentions du ministre de la Défense, Oscar Aguad, qui entend déroger aux règles pour élargir les compétences de l'armée aux actions de police

La France pourrait extrader vers l'Argentine Mario Sandoval [ici]

Mario Sandoval est un ancien policier argentin, soupçonné en Argentine d'avoir commis de nombreux crimes contre l'humanité sous la dernière dictature militaire, dans la prison clandestine tristement célèbre de l'ex-ESMA (Ecole supérieure de Mécanique de la Marine).
Au retour de la démocratie, en décembre 1983, il avait fui son pays et s'était réfugié en France, où, en cachant son passé, il avait obtenu l'asile politique en 1985, sous François Mitterrand, puis la nationalité française, en 1997. En 2008, il avait été démasqué par une enquête de Página/12 et la justice française, saisie par la République Argentine en 2012, avait, pour la première fois de son histoire, émis un arrêt favorable à son extradition en Argentine, alors que, par principe, la France n'extrade pas ses ressortissants. En l'occurrence, les magistrats avaient estimé que les faits qui lui étaient reprochés étant antérieurs à sa naturalisation, cela autorisait sa remise à l'Argentine.

Par la suite, Mario Sandoval a fait jouer toutes les procédures d'appel et de cassation qui étaient à sa disposition jusqu'au 24 mai dernier, quand la Cour de Cassation a définitivement rejeté son pourvoi, ce qui revient à valider l'ordonnance de la cour d'appel de Versailles qui permettait déjà son extradition. Néanmoins, il reste des obstacles dans la jurisprudence, qui en dispose autrement notamment dans le cas de plusieurs Rwandais, qui n'ont pas été renvoyés dans leur pays d'origine. La décision est désormais dans les mains d'Edouard Philippe et,  même si celui-ci valide l'extradition, il restera encore à Sandoval un ultime recours auprès du Conseil d'Etat. L'affaire n'est donc pas terminée.

En France, Mario Sandoval avait réussi une brillante carrière, non pas tant sur le plan académique que sur le plan mondain. Il a occupé des postes de recherche en sociologie dans deux universités et même, semble-t-il, à celui de conseiller auprès de Nicolas Sarkozy.

Pour aller plus loin :
lire l'article de Página/12 daté du 25 mai
lire l'article de La Nación ce matin.

Le nouveau visage de la Plaza de Mayo [Actu]

Seconde une d'hier de Clarín
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Avant-hier, c'est une énième version de la Plaza de Mayo qui a été inaugurée par le gouvernement de la Ville Autonome de Buenos Aires. Une place historique munie désormais de grilles un peu partout qui certes protègent les monuments des graffitis des vandales (et il n'en manque pas à Buenos Aires) et les pelouses du piétinement des passants mais tout de même, cette épidémie de grilles dans toute la ville commence à bien faire !

Les places sont toutes des petits poumons dans les villes argentines. Si elles sont toutes derrière les barreaux, la ville n'est plus vivable. Et celle-ci est en plus le plus fort symbole de toute l'histoire du pays. C'est là que Buenos Aires a été fondée par Juan de Garay en 1580 et c'est là qu'ont eu lieu tous les événements de la Semaine de Mai, du 18 au 25 mai, ceux de la Révolution qui a mis fin au régime colonial.

Les dalles représentant la ronde des Madres de Plaza de Mayo ont été enlevées autour du Pyramidion de la République. L'une d'entre elles a toutefois été préservées et elle est présentée un peu plus loin. C'est déjà ça. L'histoire récente n'a pas été reniée.

Clarín en a fait la photo de sa une d'hier.

Pour aller plus loin :
voir l'article de Clarín hier en vidéo et en galerie photos.

mercredi 16 mai 2018

Jacqueline Sigaut présentera son nouveau disque le 23 [Disques & Livres]


La chanteuse Jacqueline Sigaut enregistre beaucoup, presque un disque tous les deux ou trois ans, ce qui constitue un bon rythme si l'on compare à la plupart des artistes de tango à Buenos Aires de nos jours.

Son nouvel album, intitulé Resilencia Tango (décidément le mot est à la mode), sera présenté le mercredi 23 mai 2018 (pendant que Barrio de Tango sera à l'arrêt) (1), à 21h, au Centro Cultural Torquato Tasso, à San Telmo (Defensa 1575).

Entrée : 250 $ à la caisse le jour même (+ consommations) ou 200 $ ARG en cas de réservation à l'avance.

L'artiste reprendra son récital de présentation le mercredi 13 juin à 20h30, dans le cadre de Tango del Miércoles, au Centro Cultural de la Cooperación, avenida Corrientes 1543, dans le quartier de Balvanera.

Entrée : 200 $ ARG à la caisse du centre, jusqu'au jour du spectacle ou jusqu'à épuisement des places de la Sala Osvaldo Pugliese.



(1) Il y a des moments où il faut savoir lever le pied, même quand comme moi, on ne prend jamais de vacances, entre la tenue de ce blog depuis une dizaine d'années, mes agendas fous (a full) en Argentine et les préparations des différentes activités que vous connaissez (publications, voyages, conférences, etc.)

Hernán Genovese et Nicolás Ledesma se produisent au Borges [à l'affiche]

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Le chanteur Hernán Genovese et le pianiste Nicolás Ledesma, tous deux aussi compositeurs, présenteront le samedi 19 et le dimanche 20 mai 2018, à 19h, un nouveau spectacle commun, intitulé Pampa y París, au jazz club Borges 1975, dans la rue homonyme, dans le quartier de Palermo.

Il est conseillé de réserver.

Entrée : 200 $ ARG (notons qu'actuellement le cours de l'euro en Argentine donne un 1 € pour environ 30 $).

Prévoir les consommations en plus.

Vous pouvez découvrir l'établissement à travers sa page Facebook.

La AFA, nid de goujats sans vergogne [Actu]


C'est le pompon !

A l'heure où l'Argentine a besoin, davantage qu'à beaucoup d'autres moments de son histoire récente, de faire la preuve de toute sa dignité de pays souverain, voilà que les communicants de la Fédération de Football, AFA, multiplient les goujateries en tous genres sous prétexte de préparer le séjour de la Sélection nationale et des suporters en Russie.

L'équipe s'était qualifiée de justesse, il ne manquait plus que la fédération montre tout le mépris qu'elle éprouve à l'égard du peuple russe, de son dirigeant, des homosexuels en général, quelle que soit leur nationalité, et enfin des femmes, qui ne sont envisagées en Russie que pour leur potentiel sexuel.

Que faire pour arriver à ses fins avec une fille russe

La Fédération vient de publier un invraisemblable manuel à l'usage des membres de la délégation et des journalistes où quelques pages, sous le titre fallacieux de Langue et Culture russes, sont consacrées à des conseils pour entreprendre la drague la plus lourde, en vue de coucher avec les chicas (les filles) en Russie. Le texte est vulgaire à souhait, tout à fait dégradant pour les femmes, le propos est sans ambiguïté comme sans vergogne et cela n'a pas échappé à la presse qui dénonce la grossièreté du procédé dans les éditions de ce jour. D'autant plus que le guide en question semble avoir été validé par le ministère de l'Education.

La Nación y va même d'un éditorial où le journaliste rappelle l'ensemble des insanités produites par cette institution et qui montrent une Argentine écœurante.

Pour aller plus loin :
lire l'article de Página/12, qui a mis l'info en colonne de gauche sur sa une du jour
lire l'article de La Prensa, qui, publié plus tardivement, peut reprendre un communiqué d'excuse où la AFA qualifie ces pages du manuel d'"erreur involontaire".
Non seulement ce sont des gougnafiers mais en plus, ils prennent les gens pour des abrutis !

Ajout du 17.05.18 :
lire l'article de Página/12 sur les excuses présentées par la AFA

Le week-end prochain, ECuNHi fait son festival envers et contre tout [à l'affiche]


Depuis de nombreuses années, le centre culturel de Madres de Plaza de Mayo, à Palermo, propose un petit festival de tango. Depuis l'arrivée au pouvoir de l'actuelle majorité, les subsides publics ont disparu et la manifestation s'est appauvri d'autant. Mais l'association continue sa lutte, devenue désormais une lutte partisane et le festival en fait partie.

Ce sera sans doute d'autant plus le cas dans ces semaines d'incertitude politique et économique pour toute l'Argentine qui craint de retomber sous le joug humiliant et appauvrissant du FMI.

Ce sera deux jours pour écouter de la musique et danser, dans un ancien hangar de l'ex-Ecole Supérieure de Mécanique de la Marine (ex-ESMA), transformé en lieu de culture par les militants et militantes recrutés parmi les victimes de la dernière dictature militaire.

Hommage à Ferrer et Garello samedi prochain chez Jacqueline [à l'affiche]


Jacqueline Sigaut vous propose chez elle, dans le quartier de Palermo, à Buenos Aires, dans sa série de soirée ciné, la projection de ce très beau documentaire sur Raúl Garello (composition et bandonéon) et Horacio Ferrer (poésie et interprétation) intitulé Diálogo de Poeta y Bandoneón, de Adrián Lorenzo.

La projection sera suivie d'un débat avec le réalisateur.

Comme toujours dans ces circonstances, Jacqueline prépare un buffet typiquement portègne et à la bonne franquette (ce qui est un peu redondant).

Entrée gratuite.
Réservation obligatoire comme indiqué sur l'affiche numérique.

Une belle occasion de retrouver deux maîtres qui nous manquent beaucoup et qui s'étaient bien amusés en réalisant cet album, ce spectacle et ce film. Et cela se voit très bien à l'écran !

mardi 15 mai 2018

Página/12 persifle et signe [Actu]

Página/12 aujourd'hui

L'Argentine semble s'acheminer vers un scénario à la grecque. Sinistre perspective que dénonce Página/12 avec sa causticité et sa combativité habituelle, à coup de unes décoiffantes et de petits dessins de ses chroniqueurs humoristes, Daniel Paz, Rudy et Miguel Rep.

Miguel Rep, hier
"Non ! Pitié ! Je ne veux pas d'une nouvelle semaine comme les précédentes".
(Traduction et commentaires © Denise Anne Clavilier)
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Les autres journaux, bien que moins en verve et avec beaucoup moins d'humour, montrent aussi une inquiétude très nette et une perte de confiance incontestable dans le gouvernement, qui semble bien avoir mangé son pain blanc. C'en est fini de la lune de miel avec l'opinion publique, des cotes de popularité insolentes et assez peu cohérentes avec la cascade de mesures de rigueur et des victoires électorales qui paraissaient gagnées d'avance. Les élections de 2019, où Mauricio Macri doit remettre en jeu son mandat, ont pris du plomb dans l'aile en l'espace de quelques jours.

Une de Página/12 avant-hier
avec le calembour habituel : Fond noir fait allusion au FMI
(fonds et fond sont le même mot en espagnol)

Macri : "Ah, Dujovne*… Pendant que tu étais à l'étranger,
il y a eu des bonnes et des mauvaises nouvelles....
Le dollar a augmenté."
Dujovne à l'autre bout du fil : "Ouille ! Et la bonne ?"
Macri :" Le chocoarroz est toujours au même prix"**

* Dujovne est le ministre qui s'est rendu à Washington la semaine dernière prendre le premier contact avec le FMI
** Le chocoarroz est une sorte d'alfajor, un biscuit fourré traditionnel. C'en est une version à galettes de riz, sous prétexte qu'elle est ainsi adaptée aux intolérants et allergiques au gluten. C'est d'autant plus snob et stupide qu'une des recettes traditionnelles du alfajor se réalise avec de la farine de maïs, qui, par définition, ne contient pas de gluten. Le chocoarroz est l'un des snacks, très chers, que l'on achète dans les boutiques de parapharmacie, notamment celles de l'enseigne hégémonique Farmacity.
(Traduction et commentaires © Denise Anne Clavilier)


Le dollar a atteint hier les 26 pesos, l'euro flirtait avec les 31 pesos et la Banque Centrale continuait à puiser dans ses réserves en dollars US pour soutenir tant bien que mal le cours de la devise nationale. On en est arrivé à une telle perte de contrôle que le FMI accepterait de laisser flotter le cours du peso en dollar US tout en prêtant à l'Argentine, soumettant celle-ci (et surtout sa population) aux caprices du marché des capitaux. Le gouvernement commence tout juste à changer de discours et à reconnaître qu'il rencontre des difficultés, qu'il niait contre toute évidence jusqu'à ce week-end.

La journaliste : "En arrivant aux affaires, vous avez dit que si vous ne vous débrouillez pas bien,
le dollar monterait à près de 15 pesos".
Le ministre : "Oui".
La journaliste : "Et maintenant, il est à 24".
Le ministre : "Ben oui ! A 24, on est loin de 15".
(Traduction © Denise Anne Clavilier)

Très étonnamment, la rédaction de La Prensa a tourné
autour de la même idée que Página/12 sur le dollar
En bas, une image de la révolte de Gaza
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Un petit tour de la presse est instructif :
Dimanche :
lire l'article principal de Página/12 qui voit le gouvernement traverser sa pire crise (quand ce même gouvernement faisait savoir que la pire des situations qu'il avait eu à affronter avait été son arrivée aux affaires, avec le désastre qu'aurait été la gestion précédente... On croirait entendre du Trump dans le texte ! C'est à peu près aussi nuancé...)
lire l'éditorial de Página/12 qui analyse la fin du récit mis en place par le gouvernement depuis sa prise de fonction pour dénigrer l'étape politique antérieure
lire l'article de La Nación qui analyse les effets des turbulentes financières sur l'équipe économique du gouvernement, dont le peu de maîtrise des événements apparaît en pleine lumière
lire l'article de Clarín sur les conséquences de la crise sur la stratégie politique de Mauricio Macri
lire l'éditorial très caustique de Clarín sur le fonds monétaire international (l'humour en question est assez différent de celui qui se pratique à Página/12 mais il n'en est ni moins bon ni moins drôle – où le président Macri, confit en auto-satisfaction, parle au FMI davantage comme un président de club de foot, qu'il fut dans une vie antérieure, que comme un chef d'Etat qu'il est depuis deux ans et demi) (1)
lire l'article de Clarín sur les enquêtes d'opinion où l'image de Mauricio Macri coule à pic (l'article est illustré de nombreux graphiques très clairs)
Hier
lire l'article de Página/12 qui rappelle le calvaire récemment vécu par la Grèce, sous le pied du FMI (et de l'Union Européenne)
lire l'article de Página/12 sur les positions du président du syndicat des pilotes de ligne (on croirait lire un article sur la France de Macron ou sur la Belgique de Charles Michel)
Aujourd'hui
lire l'article de une de Página/12 sur la hausse folle du dollar
lire l'éditorial de Página/12 sur le discours apologétique du gouvernement
lire l'article de Página/12 sur un énième épisode judiciaire d'un scandale qui implique les intérêts économiques du groupe industriel et de la famille Macri et les décisions du président qui aurait favorisé les affaires familiales (c'est un sujet dont, depuis des mois, seul Página/12 traite )
lire l'article de La Nación sur le dollar flottant
lire l'article de Clarín sur l'actualité du change peso-dollar.



(1) En plus l'éditorialiste parvient à faire pas mal d'auto-dérision pour le groupe Clarín lui-même, avec des allusions à sa chaîne d'info en continu. Et il ajoute un petit coup de patte à Carlos Pagni, un journaliste-vedette de La Nación, concurrent mais néanmoins ami ! Chapeau, l'artiste.

Fito Páez, romancier engagé, à la Feria del Libro [à l'affiche]

Photo Martín Bonetto

La Feria del Libro a fermé ses portes hier soir avec un bilan mitigé. Sans doute la baisse du pouvoir d'achat des Portègnes et des banlieusards se fait-il sentir dans ces chiffres décevants pour le secteur. Et ce ne sont pas les événements récents qui ont pu aider les intellectuels à multiplier leurs achats, eux dont les métiers sont mis à la diète financière un à un par le gouvernement national ou par la Province...

C'est dans cette ambiance gâchée par la situation politico-économique que, pour le dernier week-end de la manifestation, le rockeur Fito Páez s'est rendu au parc des expositions de la Rural à Palermo et y a présenté son dernier livre, paru chez Emecé, un roman dont l'intrigue amoureuse s'installe dans le quartier de Constitución, à Buenos Aires, dans un milieu militant kirchneriste, une idéologie à laquelle l'artiste reste fidèle, malgré ses déboires électoraux.


D'après Página/12, la présentation a fait le plein de la salle José Hernández, du nom de l'auteur de la grande épopée El Gaucho Martín Fierro, qui est à l'Argentine ce que Don Quichotte est à l'Espagne (1). C'est le deuxième ouvrage de fiction du musicien, qui a repris son personnage masculin. Personnellement, je n'ai jamais lu le romancier Fito Páez. Je me contente de le connaître dans son univers sonore mais il est bien possible que, vraiment talentueux comme le dit Página/12 ou à plus surfait, comme le murmurent d'autres, l'actualité sombre du pays porte à son roman un beau succès, tant la nostalgie d'une Argentine sans FMI pourrait saisir ses compatriotes, même si les péronistes peinent encore à faire leur unité politique en dehors d'un ou deux votes au Congrès.

Après le nouvel album, sorti récemment, le livre a suscité quelques critiques dans la presse, dans les colonnes de Página/12 dimanche et dans celles de Clarín à deux reprises, le 8 mai dernier, pour annoncer la conférence de samedi, et le 13, juste après.



(1) Et pourtant José Hernández était le parfait représentant de la bonne bourgeoisie urbaine de la seconde moitié du XIXème siècle. Sa représentation des gens du peuple est tout à fait fantaisiste.

samedi 12 mai 2018

Avant son retour pour l'été en Espagne, dernier spectacle de Ariel Prat à Olivos [à l'affiche]


Le murguiste Ariel Prat, auteur-compositeur interprète, va donner ce soir, samedi 12 mai 2018, à 21h, un dernier concert argentin à Olivos, la ville de la banlieue nord où réside le Président de la Nation... Un joli pied de nez en cette période de crise politique de la part d'un artiste qui ne cache pas ses sympathies kirchneristes !

Entrée libre.
Participation volontaire (à l'enveloppe).
Réservation obligatoire.

Le recours au FMI n'éclaircit pas l'horizon [Actu]

Le responsable de la une a choisi une photo désavantageuse de Macri
Peut-être a-t-elle même été quelque peu photoshopée pour faire encore plus glauque !

A Buenos Aires, le dollar continue à grimper malgré les ventes de devises par la Banque Centrale de la République Argentine, qui se défait de ses réserves sans parvenir à arrêter l'hémorragie. Hier, la devise nord-américaine a brièvement dépassé le seuil de 24 pesos argentins avant de clore sur une valeur légèrement inférieure, tandis que l'euro flirte, quant à lui, avec les 30 pesos pour 1 euro (il n'atteignait pas tout à fait les 20 pesos au mois d'août dernier).

La Prensa a choisi d'afficher son pessimisme dans son gros titre
En-dessous, l'inauguration par vidéoconférence depuis le Vatican
du siège social portègne de la fondation du Pape François pour l'éducation
(Scholas Occurrentes)
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Et c'est un Mauricio Macri avec de grosses poches sous les yeux qui a réuni, hier, une poignée de chefs d'entreprise dans la résidence présidentielle de Olivos pour leur demander leur soutien. D'après le gouvernement, ce soutien lui serait acquis. Mais comme le gouvernement prend un peu trop souvent ses désirs pour des réalités depuis quelques jours (au point d'affirmer, en dépit de tout ce que les Argentins peuvent observer en faisant leurs courses, que les prix au détail n'ont pas augmenté ces derniers temps), il est difficile d'ajouter foi sans réserve à cette déclaration rassurante, d'autant plus qu'une douzaine d'entrepreneurs, même présidents de leurs fédérations respectives, ne saurait représenter l'intégralité de la corporation dans un pays d'un peu plus de 40 millions d'habitants.

Le gros titre de La Nación est moins alarmiste
mais pas plus optimiste
(Malgré le dollar qui grimpe,
le gouvernement tâche d'insuffler de la tranquillité)
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A la conférence épiscopale, le président de la pastorale sociale a lui aussi pris position et dénoncé l'écart entre les pétitions de principe du gouvernement et les réalités qu'il observe sur le terrain. Il accuse même les ministres d'avoir emprunté aux évêques leur vocabulaire("como que nos hubieran robado el término") pour en habiller ou plutôt en travestir leur politique, qui dans les faits dégrade les conditions de vie des plus humbles... Et c'est dans La Nación qu'on lit cette information que l'on aurait plus volontiers attendue dans les colonnes de Página/12, le journal de l'opposition.

Hier, dans une banque de Buenos Aires
(dans la rue San Martín ou Florida,
à ce que me rappelle l'immeuble qui se reflète dans la vitre
et que l'on voit aussi à la une de La Prensa)
Photo Guadalupe Lombardi pour Página/12

Pour aller plus loin :
lire l'article de La Nación sur la prise de position de Monseigneur Jorge Lugones
lire l'article principal de La Prensa
lire l'éditorial (très sévère) de La Prensa, qui souligne, de façon assez sarcastique, l'incapacité dans laquelle s'est mis Mauricio Macri en deux ans et demi au pouvoir de susciter la confiance en économie
lire l'éditorial très ambigu de Clarín sur le recours au FMI (l'éditorialiste semble vouloir attaquer un peu tout le monde, comme le font les populistes, or, comme pour Clarín, les populistes c'est toujours les autres !)

Ajouts du 13 mai 2018 :
lire cet article de Página/12 sur le refus que les représentants des entrepreneurs et du patronat argentin aurait opposé au président lors de la réunion à Olivos
lire cet article de La Prensa, où le Premier ministre, Marcos Peña, tente une analyse de la crise en cours et expose ce que l'Argentine peut attendre du recours au FMI, une prise de parole entourée de tout un discours lénifiant du gouvernement, qui tâche de relancer la confiance à coup d'affirmations peu crédibles

vendredi 11 mai 2018

La Milonga de la Uni vous attend ce soir à 21h [à l'affiche]


Une fois par mois, le CETBA (centre de formation au tango de Buenos Aires) propose une milonga gratuite avec deux pistes, l'une consacrée au tango traditionnel et l'autre au tango alternatif, avec cours pour les débutants d'abord, pour les autres ensuite, tombola, petite restauration et musique vivante.

Ce soir, vendredi 11 mai 2018, le thème du jour tourne autour du maquillage : cette animation sera confiée à Karin Marcado, l'une des enseignantes de l'institution.

Rendez-vous donc rue Agrelo 3231, dans le quartier de Almagro.

Le Quinteto Negro La Boca ce soir à La Trastienda [à l'affiche]


Le quintette de tango underground de La Boca présentera ce soir, vendredi 11 mai 2018, à 21h, à La Trastienda, Balcarce 460, son quatrième album, intitulé Cruces Urbanos (carrefours urbains). Le groupe a tenu à faire figurer le pont transbordeur du port de la Boca sur la jaquette du disque...

Entrée : de 250 à 500 pesos ARG (+ les consommations).

Le nouveau disque est un mélange entre le tango, la cumbia, le blues, le rock, le rap, le funk et le folklore, des genres différents qui tendent à fusionner dans la ville de Buenos Aires.

Le groupe a dix ans et dans ce nouveau disque, il a réuni de grands noms de la musique populaire argentine.


Ce matin, dans La Nación, c'est le chroniqueur musical et grand tanguero Gabriel Plaza qui a réussi à caser un petit article sur ses amis !

Pour aller plus loin :
lire la présentation de la soirée sur le site Internet de La Trastienda