mercredi 30 octobre 2019

La Vierge de Luján pèlerine du retour [Actu]

Le pape entre les deux évêques après l'échange des statues
à la droite du Saint-Père, le Britannique
avec la nouvelle statue qui sera vénérée à la cathédrale aux armées d'Adelshot
à sa gauche, l'Argentin
avec l'effigie emportée comme trophée de guerre par les vainqueurs en 1982

Ce matin, sur la place Saint-Pierre, sous une grosse pluie d’automne, le pape François a donné son habituelle audience générale en présence des évêques aux armées d’Argentine et de Grande-Bretagne et sous la présidence de Notre-Dame de Luján dont l’effigie était à la place d’honneur à la gauche du pontife. Cette statue de l’Immaculée Conception, célèbre dans toute l’Argentine et un peu au-delà et reconnaissable au premier coup d’œil grâce à sa mante bleu ciel et blanche, est celle qui a accompagné les jeunes bidasses que la junte militaire avait envoyés au case-pipe en avril 1982 dans l’archipel des Malouines et que le haut commandement britannique a emportée à Londres à la fin du conflit.

Une de L'Osservatore Romano paru ce soir et daté de demain
Cliquez sur l'image pour une haute résolution

Cette statue va rejoindre la ville de Luján et sera exposée sur le monument aux soldats morts aux Malouines qui se trouve à l’entrée de la ville, au bord de la grande avenue qui mène tout droit au sanctuaire. Ce matin, par l’intermédiaire du pape, elle a été remise à Monseigneur Olivera, ordinaire militaire, qui à son tour a offert une copie, légèrement différente, de la sainte Patronne de l’Argentine à son homologue britannique.

L'article de L'Osservatore Romano, ce soir, à la page 7, consacrée à l'audience générale
Cliquez sur l'image pour une haute résolution

Une procession devrait venir accueillir la statue à l'aéroport de Ezeiza dans les jours qui viennent et la porter jusqu’à Luján.

Avant l'échange
Monseigneur Olivera est à droite sur l'image

Pour en savoir plus :
lire l’article de Clarín, avec vidéo intégrée
lire l’article de Vaticannews en français
lire l’article de Vaticannews en espagnol sur l’échange d’aujourd’hui
lire l’article de Vaticannews en espagnol sur la statue à la cathédrale du diocèse aux armées à Aldershot en Grande-Bretagne
lire l’article de Vaticannews en anglais, nettement moins dissertant

En Argentine aussi, Astérix a 60 ans [Disques & Livres]

Je ne vous traduis pas le gros titre ! il se comprend tout seul

Les Argentins se reconnaissent aussi en Astérix. Cela n’a rien d’étonnant puisque René Goscinny avait grandi à Buenos Aires et que bien des traits d’humour de ses scénarios plongent dans ses racines argentines, à peu près autant que ses racines françaises et la tradition yiddish reçue de sa famille.

Le grand Obélix rond comme une queue de pelle dans un célèbre album

Página/12 a choisi de mettre le duo des Gaulois à la une de ses pages culturelles et publie trois articles sur le sujet :
un article sur l’histoire d’Astérix et deux billets où des fans racontent leur relation avec cette bande dessinée devenus universelle, sous le titre Dans mes bras, Obélix, d’après une scène d’ivrognerie des Lauriers de César et El secreto de lapoción mágica, que je ne vous ferai pas l’insulte de traduire.

Pour Cristina : un non lieu prononcé et une incrimination confirmée [Actu]

A la une de Clarín ce matin

Ce qui était drôle (1) ce matin dans la lecture de la presse, c’est le traitement des affaires judiciaires contre Cristina Kirchner qui change selon que le journal est à droite ou à gauche.

Cristina Kirchner a en effet bénéficié d’un non-lieu dans l’affaire des cahiers qui avait été relancée à la fin de la semaine dernière, à quelques heures de la fin de la campagne électorale. Et bien entendu, seul Página/12 en parlait ce matin.

Par ailleurs, une chambre pénale a confirmé son inculpation dans un volet d’une autre affaire de corruption. Et là, les trois autres quotidiens ont fait leur article (voire plusieurs) : La Nación, La Prensa et Clarín.

Allez savoir ce qu’il en est !



(1) Enfin, "drôle", c’est vite dit ! La médiocrité de l’administration de la justice et la difficulté de la presse à se montrer objective que cette actualité rappelle sont à faire pleurer.

lundi 28 octobre 2019

En Argentine, sans surprise : GANÓ ALBERTO comme disent ses soutiens en fête [Actu]

"Le sol se lève pour tous", dit le gros titre
Le soleil est un symbole de l'indépendance nationale
Il figure depuis 1818 sur le drapeau argentin.
Il a été l'emblème du slogan de campagne du tandem.
En haut, à gauche : la vignette de Daniel Paz et Rudy

"Alberto" a gagné et avec un beau score : 48,10 % des votes alors qu’il n’en faut que 46 pour être élu au premier tour. De l’autre côté, Mauricio Macri a réussi à mobiliser ses électeurs, puisqu’il a fortement réduit l’écart creusé par les PASO (16 points) et les sondages successifs depuis le 11 août (21 points). Macri a atteint les 40 % de votes. La participation a été très élevée (environ 80% des inscrits, soit plus que les 75% des PASO - ce sont donc probablement des électeurs de droite qui ont décidé cette fois-ci de ne pas faire l'isoloir buissonnier).

"Enfin seuls", dit Macri à sa chaise longue
On l'a beaucoup vu sur ce type de siège dans le sud du pays
où il a pris soin de se faire photographier lors de ses nombreuses vacances
et Página/12 n'a pas raté une seule occasion de se moquer de lui
pour le peu de temps qu'il consacrait aux affaires publiques
au regard des exigences de ses fonctions

Comme d’habitude, la Province de Buenos Aires a voté comme la majorité nationale, Axel Kiciloff gagne le gouvernorat à La Plata et inflige une défaite humiliante à María Eugenia Vidal, longtemps apparue comme la jeune leader souriante de la droite libérale (et qui a échoué tout comme Macri, en chutant elle aussi dans l’impopularité, à cause de son discours socialement stigmatisant). Et comme d’habitude aussi, la Ville Autonome de Buenos Aires a voté dans le sens opposé : Rodrigo Larreta Rodríguez, le champion local du néolibéralisme, l’emporte haut-la-main, avec presque 56 % des voix, sur l’ancien président de Atlético Club de San Lorenzo (1), Matías Lammens (35 %). Buenos Aires est toutefois entourée par une double ceinture de gauche presque complète : son immédiate banlieue et la grande banlieue n’ont que des municipalités de la couleur du gouverneur, sauf deux villes au nord-ouest. Cela n’augure rien de bon pour l’harmonie du Gran Buenos Aires et de toutes les infrastructures qu’il faudrait administrer en commun : le système routier, les transports en commun, les universités, les hôpitaux, les ressources en eau, la lutte contre la pollution et le réchauffement climatique.

Cliquez sur l'image pour une haute résolution

Página/12 a offert aux internautes une carte très parlante qui montre la ceinture de droite qui sépare en deux la carte de l’Argentine, avec les provinces gagnées par l’alliance néolibérale-UCR : Entre-Rios (au nord de Buenos Aires), Santa Fe, Córdoba, San Luis et Mendoza (2), ce à quoi il faut mettre une petite nuance, puisque ces derniers jours, le gouverneur réélu de San Luis, un potentat local qui n’a d’étiquette que lui-même, a appelé à voter pour Alberto Fernández ou sans doute plutôt contre Mauricio Macri.

Carte des résultats
Capture d'écran ce matin (très tôt pour les Argentins) de Página/12
Cliquez sur l'image pour une meilleure résolution

La surprise est donc venue de Santa Fe, où Alberto Fernández avait gagné les PASO (avec 10 points d’avantage) et où une majorité de votes de droite vient de s’imposer d’un cheveu (moins d’un point de différence) dans ces élections nationales (les élections provinciales se sont jouées plus tôt dans l’année, portant au gouvernorat l’ancien sénateur national Omar Perotti, une figure péroniste, qui a mis fin à douze ans de domination socialiste dans cette province) (3).

Carte des résultats
Capture d'écran ce matin (heure française) de La Nación
Cliquez sur l'image pour une meilleure résolution

La banque centrale argentine (BCRA) a aussitôt renforcé le contrôle des changes pour éviter une plus grande perte de ses réserves en dollars, déjà largement entamées depuis l’arrivée au pouvoir de Mauricio Macri et la levée immédiate des mesures protectrices prises par l’ancienne présidente Cristina Kirchner : elle vient de limiter à 200 USD par personne la capacité mensuelle de change des résidents argentins. Ce qui va bien entendu favorisé le marché noir des devises, qui s’est installé à nouveau dès les premières mesures de ce genre par Mauricio Macri au cours du mois d’octobre, après la désastreuse chute du peso argentin après les PASO et la victoire prévisible de la gauche, que les marchés détestent là-bas comme ici.

Il n'existe pas de meilleure résolution

Le 10 décembre prochain, Cristina Kirchner deviendra la présidente du Sénat, perchoir qui revient de droit au vice-président de la Nation. Pour la première fois dans l’histoire du pays, une femme va succéder à une femme à ce poste prestigieux. La majorité absolue au Sénat dépend maintenant des qualités de négociateurs de FF qui devront aboutir à l’unité des péronistes puisque les sénateurs élus sous ce type d’étiquette sont partagés entre plusieurs formations partisanes. Le perchoir de la Chambre des Députés, où la répartition entre majorité et opposition est encore indécise, devrait revenir, si la majorité présidentielle emporte bien celle des sièges de la chambre basse, à Sergio Massa, un ancien premier ministre de Cristina puis dissident du kirchnerisme, revenu sagement à la maison pour ces élections (il avait senti le vent tourner avant les PASO, il faut dire qu’il soufflait fort).

Hier, Miguel Rep, l'un des dessinateurs de Página/12, avait béni les urnes à sa façon
En Argentine, la coccinelle est un porte-bonheur...
Cela a marché dans son sens !
Cliquer sur l'image pour une haute résolution

Alberto Fernández, futur président argentin, est un juriste universitaire : il enseigne le droit pénal à l’Université de Buenos Aires, la plus prestigieuse du pays. Au début septembre, il a fait à ce titre une tournée en Espagne, dans plusieurs universités publiques où il a donné des conférences. Il en a profité pour prendre des contacts politiques avec Pedro Sánchez, le président socialiste du Conseil espagnol, et sans aucun doute avec d’autres personnalités. Alberto Fernández avait été bien accueilli partout où il est passé dans la Péninsule et ces dernières semaines, les grands journaux de référence comme The New York Times ou El País (en Espagne) avaient lâché Macri pour faire de lui des portraits sinon élogieux du moins non repoussants, ce qui est beaucoup pour ces titres. Il a un désavantage certain : sa voix, très douce, et sa diction, parfois mal articulée, sortent des standards habituels du paysage politique argentin, surtout du côté péroniste, habitué à des ports de voix tonitruants et autoritaires. Le président élu vit, sans être mariée, avec une femme de vingt ans plus jeune que lui, ancienne correspondance locale de CNN español et actrice de théâtre et de cinéma, qui a joué sur scène cette année, Fabiola Yáñez. Elle a même participé au mouvement Metoo argentin, avec un flot d’actrices qui ont dénoncé publiquement le harcèlement, voire les viols, dont elles ont été victimes. Elle a été très discrète au cours de la campagne mais elle nourrirait des rêves de maternité (4). Si le couple ne régularise pas sa situation, ce serait la première fois que la première dame argentine n’est pas l’épouse du chef de l’État. De son côté, Alberto Fernández est un musicien amateur de très bon niveau. Ils font donc tous deux la paire et on peut espérer que le secteur culturel et artistique sera mieux traité que sous le mandat qui s’achève.

En haut : "Ce n'est pas un chèque en blanc"
En bas : "Remontée surprise"
Cliquez sur l'image pour une haute résolution

Reste à savoir maintenant deux choses :
  • Ce qu’il va se passer sur le plan judiciaire, puisque Cristina Fernández est poursuivie dans plusieurs dossiers de corruption, sans que jamais la preuve formelle de son implication ait été apportée dans aucune instruction ouverte (tout est à l’état d’indices), et qu’elle comparaît actuellement devant une première instance de jugement dont les séances devaient reprendre dans la première semaine de novembre. Sur ce point, on a déjà une petite idée puisque la justice, dans plusieurs affaires impliquant des personnalités de l’opposition et la nouvelle majorité, a déjà tourné casaque. Dans le même ordre d’idées, on observera avec intérêt le retour ou non en Argentine de Florencia Kirchner Fernández, sa fille, soignée à Cuba pour des désordres psychiques à répercussions physiques, dont on soupçonne qu’ils expriment l’angoisse de la jeune femme devant une éventuelle condamnation à de la prison ferme pour des actes d’abus de biens publics, de recel d’abus et de complicité avec sa mère (et son défunt père) pour lesquelles elle est poursuivie avec son frère et leur mère, désormais non plus simple sénatrice mais vice-présidente élue. De méchantes langues ont dit aussitôt après les PASO que Florencia avait commencé à récupérer, ce qui n’est pas prouvé puisque ses médecins ne tiennent pas des conférences de presse tous les quatre matins et pourrait n’être que le résultat d’une bonne prise en charge médicale puisqu’à Cuba, en général, le système sanitaire est le plus performant de la région (à la hauteur des deux systèmes européens, français et néerlandais, dans les Caraïbes et la Guyane) ;
  • Comment va se dérouler la transition jusqu’à la prestation de serment le 10 décembre. En 2015;celle entre Cristina Kirchner et Mauricio Macri avait été inexistante, en grande partie parce que Cristina n’en voulait en aucune manière et en partie (peut-être moindre) parce que Macri s’était montré peu conciliant, voulant de son coté écraser et humilier l’opposition, persuadé qu’il était que c’était l’alternance politique qui allait apporter, comme par magie, la prospérité au pays, et convaincre les investisseurs du monde entier de venir risquer leurs capitaux en Argentine (5). Hier soir, en reconnaissant sa défaite, Macri a appelé son adversaire à une transition en bon ordre et dans le dialogue, mais rien ne permet d’assurer qu’il la veuille vraiment. Alberto Fernández, quant à lui, après s’être montré très conciliant au lendemain des PASO, avait suspendu tous les contacts il y a plusieurs semaines en constatant que la majorité sortante cherchait à le compromettre dans les mesures qu’elle prenait et à transformer cette étrange transition anticipée en un co-gouvernement dans lequel la presse hégémonique (de droite) sautait à pieds joints, trop heureuse elle aussi de contribuer à compromettre l’opposition haïe. Alberto Fernández s’était donc prudemment retiré du dialogue. Comment va-t-il conduire cette transition ? Pour l’heure, il a nommé 40 négociateurs chargés de se rapprocher de chaque département du gouvernement (ministères et agences d’État, comme les médias, le centre de statistiques et les grandes directions structurelles) et, à l’invitation du président sortant, il a pris son petit-déjeuner avec lui.


Pour en savoir plus :
lire l’article principal de Página/12, qui va redevenir un journal soutenant la majorité



(1) club historique des quartiers de Boedo et Almagro dont le pape François était adhérent, la fameuse équipe de foot des Cuervos (les corbeaux), surnommés ainsi à cause de la soutane du fondateur, un prêtre salésien desservant la basilique San Carlos y María Auxiliadora, où Carlos Gardel fit ses classes de chanteurs dans la chorale paroissiale.
(2) A Mendoza, le gouverneur est le chef de l’UCR qui dominera encore cette fois-ci la majorité provinciale, mais l’UCR a bien failli lâcher l’alliance électorale avec Mauricio Macri. Ce ne sont donc pas des alliés très solides pour la future opposition néolibérale. En revanche, l’UCR est l’adversaire traditionnelle du péronisme depuis l’apparition de celui-ci en 1943.
(3) Pour le dire vite, les péronistes, ceux du Parti Justicialista (PJ) comme ceux du Frente de Todos (FdT) mené par le tandem FF (Alberto Fernández-Cristina Fernández de Kirchner), constituent une gauche anti-marxiste et souverainiste, spécifiquement argentine, sans équivalent ailleurs, qui veut un État qui partage les richesses et compense les inégalités sociales par la mise en place d’un service public de qualité (santé, éducation, transports publics, énergie, droit du travail et marché alimentaire régulé ou soutenu, pour éviter que les productions agricoles soient vendues sur les marchés internationaux pour d’énormes profits privés au détriment de la population argentine, dont les besoins vitaux ne sont pas toujours satisfaits). Les partis socialistes, qui n’ont jamais fait leur unité en Argentine, sont des partis de gauche, minuscules et internationalistes, tantôt marxistes ou post-marxistes tantôt socio-démocrates, qui veulent un État redistributeur des richesses, avec un bon service public couvrant tous les secteurs déjà énumérés, et affiliés à l’Internationale Socialiste avec le PS français, le Labor Party britannique, le SPD allemand ou le PSOE espagnol. En Amérique du Sud, continent de pays qui se sont émancipés de leurs puissances coloniales il n’y a que deux siècles pour les plus anciens, le nationalisme est une idéologie de gauche, une valeur progressiste, alors que dans nos vieux pays d’Europe, structurés en états-nations depuis à peu près la Révolution française, c’est une aspiration tournée vers le passé, nostalgique, voire réactionnaire et/ou agressive, dont la valeur du patriotisme a toutes les peines du monde à se détacher. En effet, les nations américaines ne sont pas au terme de leur gestation car ce processus anthropologique s’étale sur plusieurs siècles. A droite, le patriotisme se présente comme un chauvinisme à tendance souvent xénophobe (Mauricio Macri l’a très bien montré et chez Bolsonaro, c’est encore plus évident) et la construction nationale y prend la forme plus ou moins marquée d’une confrontation avec les pays voisins (qui peut aller jusqu’aux hostilités armées, dont l’actuelle gestion de la forêt amazonienne brésilienne est une forme maquillée), tandis qu’à gauche, cette construction est tournée vers l’élaboration, plus ou moins harmonieuse ou ratée, d’une solidarité nationale pour un développement économique et social à l’échelle du pays tandis que la diplomatie vise sur le continent à constituer la Patria Grande (une association des pays frères qui permette de repousser les pressions des puissances impérialistes ou pour le moins hégémoniques traditionnelles, États-Unis et Union Européenne, dont le rejet conduit de plus en plus ces États à privilégier des relations avec la Chine, qui a pourtant elle aussi une stratégie très impérialiste à leur égard). Au cours de ces quinze dernières années, la Patria Grande a rencontré une première réalisation institutionnelle, à l’initiative de feus Néstor Kirchner et Hugo Chávez, dans l’alliance politique de l’UNASUR, aujourd’hui agonisante car attaquée par les dirigeants de droite néolibérale au pouvoir, et l’alliance économique plus restreinte du Mercosur, dont seuls ont survécu les accords qui favorisent une certaine proportion de libre-échange entre les pays partenaires et dont Bolsorano a promis de fermer la porte à l’Argentine si, ce week-end, celle-ci portait Alberto Fernández au pouvoir.
(4) A 38 ans, il faudrait qu’elle se dépêche et un berceau à la Casa Rosada ou à Olivos, ça ne manquera pas de faire jaser dans les gazettes.
(5) Les premiers mois et jusqu’au-delà de la première année, toute sa politique a été construite sur une pluie de capitaux étrangers qui allaient venir demain matin et qui ne sont jamais venus. Et tout s’est écroulé ensuite donnant au bout de quatre ans de mandat la crise que nous connaissons.

En Uruguay, comme prévu, le Frente Amplio vire en tête au premier tour [Actu]

Etrange gros-titre de El País :
"Lacalle Pou tire son avantage pour le second tour"
En haut, les résultats à l'heure du bouclage dans la nuit
Cliquez sur l'image pour une haute résolution

En Uruguay, on attendait un second tour et on l’a : le candidat de la majorité sortante, celle du Frente Amplio, aujourd’hui représentée par Tabaré Vázquez, qui aux termes de la constitution ne peut pas être candidat à sa propre succession, a été porté en tête du premier tour. Le Frente Amplio est une vaste coalition qui rassemble toute la gauche uruguayenne qui en est à son troisième mandat consécutif, avec Vázquez, puis Pepe Mujica et à nouveau Vázquez.

La coalition est née, titre El Observador,
en référence aux résultats parlementaires
La gauche et la droite vont devoir négocier.

Mais si Daniel Martínez est arrivé assez loin devant son adversaire de droite, Luis Lacalle Pou, qui accumule les défaites électorales comme candidat à la première magistrature du pays, le Frente Amplio semble n’avoir au Parlement qu’une majorité relative qui devrait l’obliger à négocier des alliances. Cela ne va pas être facile, même si les Uruguayens sont, parmi tous les peuples d’Amérique du Sud, celui qui montre la plus grande maturité démocratique depuis plusieurs années.

"Le Frente Amplio dépasse les 40% mais il y aura un second tour"
Une à comparer avec celle de El País! Eclairant.

Le second tour de l’élection présidentielle aura lieu dans un mois, le 24 novembre, pour une prise de fonction qui est fixée traditionnellement au 1er mars.

Pour en savoir plus :

dimanche 27 octobre 2019

Mon prochain salon du livre [ici]


Les samedi 9 et lundi 11 novembre 2019, je serai au Salon L’Autre Livre, à Paris, à la Halle des Blancs-Manteaux, 48 rue Vieille du Temple, M° Saint-Paul.

Je dédicacerai mes ouvrages sur la culture populaire de l’Argentine sur le stand des Editions du Jasmin, le samedi 9 de 11h à 13h, et le lundi 11 de 15h à 18h.

Entre libre et gratuite.

Comme d’habitude, mate argentin sur le stand.

jeudi 24 octobre 2019

Amelita Baltar revient sur scène [à l’affiche]


La grande chanteuse Amelita Baltar nous avait fait très peur au début du mois de septembre lorsqu’elle a été hospitalisée d’urgence à cause d’un accident cérébral qui ressemblait à un AVC mais n’en était pas un. Quelques jours plus tard, elle refaisait une apparition publique dans l’émission d’une célèbre animatrice de télévision, Mirtha Legrand.

Demain, vendredi 25 octobre 2019, à 22h (ouverture des portes pour le repas, 20h30 – la consommation est obligatoire), elle se produira au Centro Cultural Torquato Tasso, Defensa 1575.

Entrée (hors consommation) avec réservation : 450 $ pour 1 personne ou prix réduit pour 2 entrées conjointes 500 $ ARG.
Sans réservation : 500 $ ARG ou 550 pour deux entrées conjointes.

lundi 21 octobre 2019

Hommage à Roberto Alvarez ce soir à la Academia Nacional del Tango [à l’affiche]


Ce soir, lundi 21 octobre 2019, à 19h30, la Academia Nacional del Tango rend hommage à un bandonéoniste qui a débuté dans l’orchestre de Osvaldo Pugliese, l’un des rares musiciens de cette formation toujours de ce monde.

Il y a trente ans, Roberto Alvarez a fondé sa propre formation, Color Tango, où il fait vivre le style Pugliese.

L’interprète, chef d’orchestre, arrangeur et compositeur recevra le Gobbi de Oro pour l’ensemble de son œuvre et dialoguera avec le président Gabriel Soria avec qui il évoquera les souvenirs de sa carrière et de ses rencontres artistiques.

Comme d’habitude, entrée libre et gratuite, au 833 avenida de Mayo, 1er étage.

D'ici une ou deux semaines, je devrais pouvoir reprendre le rythme habituel d'animation de ce blog... Un autre livre sera arrivé chez son éditeur.

mercredi 16 octobre 2019

Cacho Castaña est mort et le scandale reprend de plus belle [Actu]

« Si je te prends avec un autre, je te tue, je te passe à tabac et je m’enfuis après », ce programme amoureux criminel est celui que Cacho Castaña avait osé décliner dans l’une de ses chansons. Inutile de vous dire que depuis hier après-midi, la mort de ce chanteur de variété machiste, bas de plafond et collectionneur d’épouses de plus en plus jeunes, mais doté d’une voix agréable, qui lui a valu de nombreux et surtout de nombreuses fans, ne fait pas l’unanimité dans les nécrologies et encore moins sur les réseaux sociaux, où, pas encore enterré, il en prend assez souvent pour son grade.

Une de Clarín ce matin
La rédaction a choisi la photo du public attendant
de pouvoir s'incliner sur le cercueil de Castaña,
sous la pluie, dans la rue Perú, devant la Legislatura
Cliquez sur l'image pour une haute résolution

Cet ostrogoth, semblant sorti d’un autre temps, aura tout de même donné deux chefs-d’œuvre au répertoire du tango chanté : Café La Humedad, en hommage à un restaurant de quartier qu’il fréquentait assidûment, et Garganta con arena, en hommage à un chanteur, génial celui-là, El Polaco Roberto Goyeneche (1). Pour le reste, il était supporter du Club San Lorenzo de Almagro/Boedo (on ne choisit pas ses supporters !) et il avait exercé, pendant quelque temps, comme marabout ubamda, l’une des religions issues du syncrétisme historique entre les cultes d’Afrique sub-saharienne et le catholicisme portugais, un rite qu’il avait contrefait pour donner à l’un de ses nombreux et très éphémères mariages une touche exotique qui fasse causer dans les gazettes.

Cacho Castaña s’est éteint hier, à l’âge de 77 ans, l’organisme détruit par le tabagisme. A Buenos Aires, je connais l’une de ses admiratrices que j’aime bien et je pense à son chagrin aujourd’hui. Le chanteur, très en vogue dans les années 70, avait renoué avec le succès et son public depuis une dizaine d’années. Malgré ses dérapages fréquents, dont certains étaient particulièrement odieux, il remplissait toujours des salles immenses. Depuis environ dix ans, il était presque aussi souvent hospitalisé qu’à l’affiche et les derniers temps, il montait sur scène avec les tuyaux d’une aide respiratoire fixés sur le visage, manipulé, au dire d’un de ses amis animateur de radio, par des producteurs sans scrupule désireux de presser le citron jusqu’à la dernière goutte alors que le chanteur avait perdu beaucoup de ses moyens (il semblait sous-entendre qu’il n’était plus tout à fait le maître de ce qu’il disait et faisait).

Cacho Castaña était retourné en clinique il y a peu pour soigner une pneumonie qui l’a emporté. La semaine dernière, les médecins ne cachaient pas leur pessimisme sur son pronostic vital. Son décès hier n’a donc surpris personne.

Cliquez sur l'image pour une haute résolution

Sa veillée funéraire, qui a attiré de nombreux visiteurs, artistes, politiciens et personnalités mondaines, s’est tenue dans l’un des salons de la Legislatura Porteña qui en avait fait, il y a plusieurs années, une personnalité marquante de la Ville.

Pour en savoir plus :
lire la nécrologie de Página/12, très critique sur les prises de position machistes et violentes du personnage
lire l’article de Página/12 sur les réactions des Internautes à l’hommage Twitter du secrétariat d’État à la culture, alors que le président Mauricio Macri lui-même vient de balancer une vanne misogyne et bien vulgaire dans sa campagne électorale, comparant la politique de ses adversaires péronistes à une femme qui ferait chauffer sans limite la carte de crédit de son mari (cela aussi, ça relève le niveau)
lire la nécrologie de Clarín qui consacre un véritable album en ligne à l’événement
lire la nécrologie de La Nación, au titre qui dénote un mépris de classe qui ne se cache pas : Cacho Castaña, l’essence du populaire.



(1) Les deux textes figurent dans mon anthologie Barrio de Tango, recueil bilingue de tangos argentins, Éditions du Jasmin, 2010.

vendredi 4 octobre 2019

Un autre lieu emblématique menacé par la spéculation immobilière [Actu]


Depuis une dizaine de jours, le café notable Plaza Dorrego, sur la place du même nom à San Telmo, dans le sud du centre historique de Buenos Aires, est fermé. Le bail est arrivé à échéance, le propriétaire du fonds de commerce ne se montre plus et celui des murs veut faire un autre usage de ce local tandis que le personnel tente de constituer une coopérative pour continuer à exploiter ce café, inscrit sur la liste des Bares Notables et idéalement situé, même si depuis quelques mois, la ville a interdit à la Feria de San Telmo d’investir cette section de la rue Defensa.


Le personnel a disposé deux petites affichettes en espagnol et en anglais
pour expliquer la situation aux passants, dont beaucoup de touristes.

C’est une partie du patrimoine culturel et même touristique de la capitale argentine qui est ainsi mis en danger, sans que le gouvernement de la Ville semble lever le petit doigt. En pleine campagne électorale, c’est à n’y pas croire. En revanche, la Commission national du patrimoine envisagerait actuellement à inscrire l’établissement au catalogue des Biens d’Intérêt historique national, ce qui le protégerait.

Un jour, il y a déjà quelques années, j’ai pris un verre dans ce café si authentique et si simple avec le compositeur et clarinettiste Néstor Tomassini qui a son studio de travail à deux pas de là… Excellent souvenir.

Pour aller plus loin :
lire l’article de Página/12 du 30 septembre
lire l’article de Clarín du 2 octobre
lire l’article de La Nación du 2 octobre
lire l’article de Clarín du 3 octobre

Ajouts du 7 octobre 2019 :
lire cet article de Clarín sur la reprise d'activité au café le jour et les tours de veille que se répartissent les salariés pour empêcher la saisie des locaux de nuit
lire l'article de La Nación sur le même sujet.

Reprise de El Farmer au Teatro La Comedia [à l’affiche]


C’est une pièce qui a été créée au Teatro San Martín en 2015 et adaptée d’un roman historique qui médite sur la vie d’un personnage historique très important surtout à Buenos Aires où il a fait toute sa carrière politique, Juan Manuel de Rosas (1793-1877), chef du courant fédéraliste portègne et tyran de Buenos Aires de 1835 à 1852. Vaincu le 3 février 1852, il s’enfuit sur un navire britannique et termina sa vie comme fermier d’un riche propriétaire anglais de la région de Southsampton.



Pompeyo Audivert joue Rosas vieux dans sa modeste ferme anglaise et Rodrigo de La Serna, le beau gosse du cinéma et du théâtre argentin, interprète le personnage à l’époque de sa gloire.

La pièce reprend ce soir, au Teatro La Comedia, Rodríguez Peña 1062, à 22h30.
Représentations tous les vendredis et samedis.
Prix des places : 1.000 $

Pour aller plus loin :

Circuit court sur Plaza de Mayo [Actu]


Avant-hier, la Plaza de Mayo a retrouvé son statut initial de marché alimentaire de la fondation de la ville aux premières décennies de l’indépendance : des producteurs sont venus vendre fruits, légumes, yerba mate, pain ou farine au public et à moitié prix par rapport à ceux pratiqués dans la distribution traditionnelle…
40 tonnes de produits agricoles ont ainsi été distribuées par des petits propriétaires exploitants, des coopératives et des réseaux alternatifs de l’économie sociale.

Seul Página/12 a fait écho hier à cette manifestation, qui n’a pas trouvé place dans les autres journaux, tous à droite.

mardi 1 octobre 2019

La Ruta del Libro, un festival de la lecture cette semaine [à l’affiche]

La plus ancienne librairie en activité au monde
Elle a été fondée (pas tout à fait à cet endroit) en 1785

Le quartier de San Telmo (qui a annexé une partie de Monserrat) propose pendant toute la semaine un circuit autour du livre avec des rencontres, des conférences, des visites commentées, des salons du livre et des pauses gourmandes dans les bars historiques du quartier.

Infographie de La Nación
Cliquez sur l'image pour une haute résolution

Un quartier considéré comme très touristique mais qui reste, heureusement, un quartier ordinaire du centre-ville de Buenos Aires...

Pour aller plus loin :
consulter la page de la manifestation sur le site Hola San Telmo (salut, San Telmo)

Prochaine libération d’une Vierge de Luján prisonnière de guerre à Londres [Actu]

La Vierge de Luján, avec sa grande chape bleu ciel et blanche
à gauche, la prière à la Sainte Patronne de l'Argentine

Pendant la guerre des Malouines, l’aumônier général de l’armée de l’air argentin avait emporté dans la campagne une réplique de la Vierge de Luján, qui est la sainte patronne de l’Argentine. Le 8 mai, la statue domine la messe et la procession de la fête mariale célébrées sur l’une des deux îles puis elle disparaît dans la défaite apocalyptique de l’armée argentine, composée majoritairement d’appelés qui n’avaient que quelques semaines de classe. En reprenant le contrôle de l’archipel, les Britanniques ont trouvé la statuette. Il n’était pas question de laisser sur place un objet qui portait les couleurs du pays vaincu qui venait de flanquer une frousse inouïe aux habitants, pas vraiment d’accord pour passer sous le joug de la Junte militaire qui terrorisait le continent…

La statue s’est donc retrouvée à Londres dans ce qui est maintenant la cathédrale catholique aux armées (les aumôniers généraux des armées sont maintenant évêques dans l’Église catholique). Les Argentins ont réussi à savoir où elle était retenue ainsi, comme prise de guerre (même si bien entendu, les Britanniques rejettent cette expression… Mais s’il ne s’agissait pas d’un trophée, pourquoi l’ont-ils gardée ? Après les hostilités ou après le retour à la démocratie, un an plus tard, ils auraient pu la remettre à l’Argentine puisque il y a un ambassadeur à Buenos Aires et à Londres).

Un petit groupe de militants, conduits par mon amie Marcela Hernández, qui m’invite à chaque séjour à rencontrer ses élèves dans les collèges et lycées où elle enseigne, vient d’obtenir le retour de l’image pieuse : ils sont passés par Rome en profitant du fait que l’évêque de cette ville européenne est un Argentin depuis le 13 mars 2013… La statue va donc transiter par le Vatican avant de retrouver le sol de la patrie. De l’aéroport d’Ezeiza où elle doit atterrir, elle sera ensuite transportée en procession à la Basilique de Luján, à côté de laquelle deux associations locales de vétérans des Malouines ont érigé deux monuments du souvenir. Le premier miracle du Negro Manuel et du Père Salvaire ? (cf. mon article précédent sur Luján).

Le quotidien d’obédience catholique (de droite) La Prensa rend compte aujourd’hui de cette ultime péripétie de la guerre des Malouines

Comme dit le slogan d’une des deux associations lujenses de vétérans des Malouines qui m’a si chaleureusement accueillie le 18 août dernier : ¡Prohibido olvidar! (Interdit d’oublier).

Un air de fin de règne [Actu]

Les chiffres en rouge se comprennent tous seuls
En haut, à droite, le jeu de mots du jour :
"Il n'est pas resté dans le moule",
dit-on du procureur Moldes (moules [à gâteau] en espagnol)

Les derniers chiffres de l’INDEC, l'institut national des statistiques, sont désespérants et montrent, comme le dit Página/12, que l’actuel gouvernement aura été "une usine à pauvreté" : hausse de la pauvreté et de l’indigence, quantité record de mineurs vivant sous le seuil de pauvreté, pertes de postes de travail, etc. Et en plus, le président vient de réduire les indemnités du salarié pour les accidents de travail !

Ces chiffres ne semblent pas de nature à renverser les tendances électorales que montraient les sondages avant les PASO et que ces derniers ont confirmées : le candidat de l’opposition péroniste a de fortes chances de l’emporter à la fin du mois, au premier tour de l’élection présidentielle, même si Mauricio Macri a repris, il y a quelques jours, une campagne un peu difficile à suivre.

Est-ce pour cette raison que le procureur Germán Moldes vient de présenter sa démission ? Depuis quatre ans, il est le principal accusateur de tous les kirchneristes qu’il peut impliquer dans des scandales de corruption. Il a tout tenté pour faire accuser Cristina Kirchner pour la mort du procureur Alberto Nisman, qui semble toujours s’être suicidé malgré les efforts pour prouver le contraire, à tel point que même la tutrice de ses filles mineures s’est désistée de sa constitution de partie civile… Moldes avance des problèmes de santé. Página/12 a une toute autre interprétation : il fait valoir ses droits à la retraite avant que l’alternance ne risque de lui valoir des ennuis quand on ira regarder d’un peu plus près ses procédures quelque peu forcées…

Pour en savoir plus :
sur les statistiques socio-économiques
lire l'article de Clarín sur la modification par décret du régime des indemnités d'accident du travail
sur la démission de Germán Moldes