jeudi 29 mai 2025

Les scientifiques dans la rue et à la rue [Actu]

Affiche appelant à la manifestation
"Personne ne se sauve soi-même.
Une neige toxique est en train de détruire
la science et l'université", dit-on en haut de l'affiche
C'est une allusion au début du premier épisode
(celui de 1958), lorsqu'une neige étrange recouvre Buenos Aires
(où il ne neige presque jamais)
Comme si en France, on appelait à la manifestation ainsi :
"Nous sommes en 50 avant Jésus Christ.
Toute la Gaule est occupée.
Toute ? Non ! Un village peuplé d'irréductibles Gaulois..."
En bas : "Agissons dès maintenant"


Hier, de nombreux scientifiques du CONICET, le centre national de recherche scientifique et technologique argentin, se sont rassemblés au Pôle Scientifique de Buenos Aires pour manifester leur colère et exprimer leurs revendications en faveur d’un service public de la recherche, une nécessité si l’Argentine prétend compter dans le monde.

Or ce n’est pas du tout le chemin choisi par Javier Mileí dès sa prise de fonction. Tout au contraire : suppression des bourses de recherche, coupes claires dans les budgets des universités et des laboratoires du Conicet, suppression de postes en quantité astronomique, fermeture de départements entiers. Et maintenant, dénigrement des études supérieures sur la chaîne de télévision publique destinée aux enfants, Paka Paka nouvelle mouture !

Avec cela, le ministre de la Santé vient de dérouler le tapis rouge à son homologue des États-Unis, le plus catastrophique rejeton de la dynastie Kennedy, et ils ont annoncé tous les deux que l’Argentine confirmait son retrait de l’OMS. Mileí suit Trump dans tous ses délires !

Il se trouve qu'une vague de froid roule sur l'Argentine
et qu'il a neigé dans certaines provinces du sud
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Les manifestants ont profité du succès du film El Eternauta, adaptation d’une célèbre bande-dessinée de science-fiction homonyme, signée par un scénariste disparu en 1977 sous la dernière dictature militaire, Héctor Germán Oesterheld, et dont le premier épisode est paru en 1958, alors qu’un gouvernement à la main des États-Unis dirigeait l’Argentine, après le coup d’État contre Perón, pourtant démocratiquement élu pour un second mandat. Or il se trouve que l’acteur qui joue le rôle principal, Ricardo Darín, ne cache pas son opposition au gouvernement en place. Tout s’aligne donc pour que les allusions à l’œuvre soient très lisibles pour tout le monde là-bas (un peu moins pour nous en Europe). C’est de là que viennent ces masques de plongée ou de scaphandre arborés par les manifestants, un attirail propre à la bande dessinée, et ce slogan, qu’ils lui ont emprunté : « Personne ne se sauve soi-même ».

La manifestation dans la ville de Tucumán, au nord-ouest du pays
La photo est prise devant la belle maison coloniale et patricienne
où a été proclamée l'indépendance le 9 juillet 1816 !
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Et preuve que l’inquiétude se répand dans le monde intellectuel argentin : même certains journaux de droite font écho à la manifestation là où, il n’y a pas longtemps, seul Página/12 en aurait parlé.

© Denise Anne Clavilier


Pour aller plus loin :
lire l’article de Une de Página/12, sur la manifestation
lire l’article de Página/12 sur la réaction du Forum latino-américain pour le droit universel à la santé contre l’alignement de l’Argentine sur les positions criminelles de Trump et ses ministres en la matière
lire l’article de La Prensa
lire l’article de Clarín