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Sur le front de Macri, le slogan classique (Ce sera justice) est retournée : Ce sera injustice Cliquez sur l'image pour une meilleure résolution |
La Cour de Cassation nationale
vient d’annuler le non-lieu qui
avait été prononcé en faveur de
Cristina Kirchner il y a quelques mois dans l’affaire dite de la
« Route de l’argent K » (Ruta
del dinero K), un
scandale de corruption qui implique
l’ancienne chef d’État et actuelle vice-présidente sortante
dans un trafic de blanchiment de pots-de-vin divers et variés pour
lequel le ministère public peine à présenter des preuves
irréfutables.
Cependant de l’autre côté,
cette même institution prononce un non-lieu au bénéfice de
Mauricio Macri dans l’affaire du San Juan, où les preuves ont bel
et bien été produites par l’instruction et par le ministère
public : c’est en effet sous la présidence de Macri
(2015-2019) que le sous-marin ARA San Juan a disparu corps et biens
avec l’intégralité de son équipage, soit 44 morts en service qui
n’ont pas reçu le moindre hommage national avant l’arrivée au
pouvoir de son successeur, le président sortant Alberto Fernández
au cours de l’été 2020. C’est aussi sous sa présidence
(2015-2019)
qu’un certain nombre de familles des sous-mariniers disparus, en
majorité des personnes aux revenus modestes et d’humble
extraction, ont été espionnées, leurs téléphones mis sous écoute
illégale, alors qu’elles
réclamaient avec
véhémence à l’État
qu’il fasse son devoir envers les militaires décédés dans
l’accident et leurs ayant-droits (ils ont d’abord réclamé qu’on
retrouve l’épave, ensuite
qu’on rende justice à
leurs maris, femme, fils ou pères morts dans les profondeurs du Mar
Argentino). La logique
démocratique voudrait que ces événements s’étant
produits
alors que l’État se trouvait
sous la responsabilité de Macri, seul un débat contradictoire
devant une instance de jugement puisse établir
la vérité judiciaire dans
cette affaire. Quand bien
même Macri ne
serait pas le
commanditaire des écoutes, il devrait
s’en expliquer puisque
ceux qui les ont été
conduites travaillaient en
dernière instance sous
ses ordres. La Cour de Cassation a préféré exempter l’ancien
président d’avoir à
répondre de ses actes
devant un tribunal. C’est minable et cela augure très mal, une
nouvelle fois, de l’évolution des pratiques judiciaires
en Argentine pendant la présidence échevelée qui s’annonce !
Cristina Kirchner n’a pas tardé
à faire connaître son analyse des faits et il est difficile de lui
donner tort sur les principes, même si, comme tout responsable
politique en Argentine, elle n’est pas au-dessus de tout soupçon.
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"Frein à l'impunité de Cristina : réouverture d'un dossier pour blanchiment", dit le gros titre au-dessus de ce selfie collectif de Mileí à la Maison Blanche Quinze ans d'âge mental ! Au lieu de se contenter des photos du service de presse de leurs hôtes... Cliquez sur l'image pour une haute résolution |
Sur ces affaires comme sur les
autres, la presse se partage en deux : d’un côté Página/12,
qui dénonce une justice du deux poids, deux mesures et de l’autre,
les titres de droite qui se réjouissent que les délinquants, qui,
bizarrement, sont toujours des gens de gauche (allez savoir
pourquoi !), soient renvoyés devant la justice tandis que les
braves gens comme Macri
sont enfin libérés des
complots de la gauche…
De son côté, à l’issue d’une
assez longue commission d’enquête, la majorité parlementaire
sortante a accouché hier d’une accusation contre la Cour suprême
dont elle prétend démontrer la partialité partisane lors d’un
futur éventuel procès politique en
vue de la destitution des
quatre magistrats qui la composent (ils
ont majoritairement été
nommés par Macri). Ceci
dit, le Congrès sera
renouvelé le 10 décembre prochain, quand les élus d’octobre
prendront leurs fonctions et prêteront serment. La
procédure n’est donc pas prête d’aboutir à quoi que ce soit.
© Denise Anne Clavilier
Pour aller plus loin :
lire l’article
principal de Página/12,
qui en a fait sa une en soulignant l’alignement des décisions de
justice dans le même sens
lire l’article
de La
Prensa,
qui préfère faire sa une sur le prétendu « retour [de
l’Argentine] dans l’Occident » grâce à la visite-éclair
du président élu aux États-Unis
lire l’article
de La
Nación
qui se félicite de la reprise du procès contre Cristina Kirchner
Quant à Clarín,
ce matin, il réserve ses analyses à ses abonnés (je ne donne donc
pas le lien qui aboutit à une page blanche pour le grand public).