samedi 9 décembre 2023

L’Argentine dit adieu à Ramón Ayala [Actu]

Página/12 a choisi cette photo datée
pour rendre hommage à l'artiste disparu
"Le rythme d'un peuple"
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Ramón Ayala était un artiste aux multiples talents : musique et peinture… Il a succombé à une pneumonie avant-hier à la clinique Güemes de Buenos Aires, à l’âge de 96 ans. Veillé dans la journée d’hier dans une chapelle funéraire de Almagro, il sera incinéré aujourd’hui au cimetière de la Chacarita.

La Nación a mis l'info en titre secondaire
avec la même photo ancienne
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Natif du village de Garupá dans la province de Misiones, à l’extrême nord-est de l’Argentine, il a mis en valeur la musique du Litoral dans sa version nordique à un moment où le chamamé était dominé (il l’est toujours) par la province limitrophe de Corrientes, plus au sud.

Compositeur, parolier, guitariste, chanteur, arrangeur, il s’était formé, seul, à Buenos Aires où sa mère s’était installée après la mort de son père. De là, il a noué différents partenariats avec d’autres musiciens, à commencer par un chanteur de l’autre bout du pays.

Le faire-part et l'invitation aux obsèques
ont été publiés sur Instagram
et toujours la même photo !

Vivant presque toute sa vie loin de son berceau, il a toutefois enrichi la tradition de sa région natale avec un riche patrimoine de chansons que tous les Argentins connaissent.

La même préoccupation qu'à la une de La Nación :
le prix du carburant qui promet un avenir incontrôlable...
La Nación a préféré montrer les files d'attente à une station-service
En haut à droite : "Le poids de la mémoire et de la lutte"
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Son décès à quelques jours d’un changement de gouvernement plutôt chaotique n’est pas salué par la presse à la hauteur de son talent et de sa contribution à la culture populaire du pays. Clarín n’a rien fait figurer en une sur le sujet.

© Denise Anne Clavilier


Pour aller plus loin :

jeudi 7 décembre 2023

Clásica y Moderna va renaître [Actu]

En bas, on lit encore très bien le nom du bar-librairie !
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La libraire-restaurant-concert Clásica y Moderna, l’un des Bares Notables de la ville de Buenos Aires, situé à l’angle de l’avenue Callao et de la rue Paraguay, dans le quartier de Recoleta, avait fermé ses portes en 2019, peu après la mort de sa directrice, Natu Poblet, fille du fondateur qui l’ouvrit il y a quatre-vingt-cinq ans.

Le fonds de la librairie, intact...
Une image plus qu'émouvante
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Il y a quelques temps, une autre femme, Raquel Rodrigo, a choisi de relever le gant et de relever le rideau de fer qui enfermait depuis toutes ces années le riche fonds de la librairie, la vaisselle et le piano qui avaient vu passer dans ces murs les grands artistes de la musique populaire argentine. Je me souviens en particulier d’y avoir vu les chanteurs Susana Rinaldi, Horacio Molina et Amelita Baltar.

Clarín y consacrait hier un grand article richement illustré avec une longue interview de la nouvelle patronne.

La façade a elle aussi survécu, avec des vitrines où étaient placés
quelques livres à mettre en valeur
et sa plaque d'hommage posée par la Legislatura
lorsqu'elle avait nommé d'intérêt culturel ce lieu-phare
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La réouverture de la salle doit avoir lieu lundi prochain en présence de quelques hautes personnalités du nouveau gouvernement.

© Denise Anne Clavilier


Pour aller plus loin :

Publication du dernier volume de La Verdad los hará libres [Disques & Libres]

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Les trois historiens de la UCA, l’université catholique d’Argentine, viennent de présenter le troisième et dernier volume de leur gigantesque enquête sur le rôle de l’Église dans la dictature militaire de 1976-1983.

L’ouvrage s’intitule La Verdad los hará libres (la Vérité vous rendra libres), une citation évangélique, et il est en vente sous forme numérique.

Les deux volumes précédents

Il paraît au moment où l’Argentine va marquer le quarantième anniversaire du retour à la démocratie et où va prêter serment une vice-présidente catholique traditionnaliste et ferme négationniste des crimes du régime putschiste.

© Denise Anne Clavilier


Pour aller plus loin :

lire l’article de Página/12
lire l’article de Infobae (le premier quotidien en ligne du pays)
lire la dépêche de AICA, l’agence de presse de la Conférence épiscopale argentine.

Sortie du documentaire sur la victoire à la Coupe du monde de Football [à l’affiche]

Sortie le 7 décembre, dit l'affiche en bas


Elijo creer, j’ai choisi de croire, tel est le titre du documentaire très attendu en Argentine sur la victoire il y a un an de la Sélection nationale à la Coupe du Monde de football. Le film a eu son avant-première hier devant le ban et l’arrière-ban du sport et des vedettes à Buenos Aires.

La sortie officielle a lieu aujourd’hui dans de nombreuses salles.

"Champions encore une fois", dit le gros titre

Página/12 lui consacre la une de ses pages culturelles.

© Denise Anne Clavilier


Pour aller plus loin :

mardi 5 décembre 2023

Ce soir, récital à la Academia Nacional del Tango [à l’affiche]

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Ce soir, mardi 5 décembre 2023, à 19h, à la Academia Nacional del Tango, avenida de Mayo 835, le chanteur Luis Filipelli animera la soirée de fin d’année de l’atelier d’interprétation de l’institution.

Participation aux frais : 1 500 $ ARG.

Les grandes vacances d’été arrivent et la Academia ne va pas tarder à fermer ses portes pour un repos bien mérité et très certainement avec une lourde valise de doutes quant à la pérennité des activités puisque le gouvernement qui s’installe ce week-end est particulièrement hostile au service public dans le domaine culturel (et tous les autres domaines d’ailleurs).

© Denise Anne Clavilier

Un documentaire sur Taty Almeida pour les 40 ans de la démocratie [à l’affiche]

Taty Almeida devant les photos des trente-mille disparus
pendant la dictature militaire de 1976-1983


Taty Almeida est une figure emblématique de l’association Madres de Plaza de Mayo Línea Fundadora, issue de la scission de l’association originale Madres de Plaza de Mayo. C’est un groupe très politisé et partisan qui a conservé le nom le plus connu dans le monde.

Taty Almeida est issue d’une famille d’officiers, ce qui n’est pas le plus fréquent parmi les militantes de la cause. Elle est née à Mendoza en 1930, elle a fait des études pour être enseignante et elle a exercé le métier pendant quelques années. Le 17 juin 1975, son fils Alejandro a disparu. Un an avant le coup d’État de Videla et consorts, c’était en effet une organisation fondée par Isabel Perón, la dernière femme de Perón, la Triple A (alliance anticommuniste argentine) qui faisait régner la terreur parmi les militants des droits de l’homme et de l’État de droit. Ce n’est que quelques années après le putsch militaire que Taty Almeida a rejoint les rangs de Madres, l’organisation des mères qui exigeaient de savoir ce qu’il était advenu de leurs enfants disparus.

Le 10 décembre prochain, l’Argentine, ou du moins une partie d’entre elles, va marquer le quarantième anniversaire du retour de la démocratie, le jour même où un président qui n’en est pas vraiment un partisan acharné prêtera serment au Congrès.

A l’occasion de ce qui devait être de grandes festivités, un cinéaste, Claudio de Sautu, avait préparé un documentaire pour faire le portrait de cette femme exceptionnelle à base d’archives dans lesquelles elle s’exprime et d’interviews notamment de ses deux enfants vivants, Jorge et Fabiana.

Le documentaire vient d’être présenté lors d’une projection très discrète à la Casa de las Madres à Buenos Aires devant un public trié sur le volet. On ne peut pas dire que dehors règne le respect pour la lutte de ces femmes désormais très âgées et régulièrement insultées et menacées par des nervi de la droite et de l’extrême-droite argentine qui en ce moment se sentent pousser des ailes.

Comme de bien entendu, Página/12 est le seul quotidien d’envergure nationale qui en parle aujourd’hui.

© Denise Anne Clavilier


Pour aller plus loin :

lundi 4 décembre 2023

Ce soir, un Plenario consacré au 120e anniversaire de la naissance de Piana [à l’affiche]


Ce soir, lundi 4 décembre 2023, à 19h, la Academia Nacional del Tango, Avenida de Mayo 835, ouvre ses portes pour rendre hommage à un grand compositeur de tango et de milonga, Sebastián Piana, avec la participation de son petit-fils.

Entrée libre et gratuite.

Sebastián Piana, moins connu que les musiciens qui ont dirigé des orchestres, est l’inventeur de la milonga ciudadana (milonga urbaine), en 1930, avec le poète Homero Manzi, avec Milonga Sentimental, bien connus de tous les danseurs de tango argentin partout dans le monde et ici chantée par Carlos Gardel, l’un des tout premiers à l’avoir interprétée. Tous deux cherchaient à faire revivre le passé afro-américain de la capitale argentine, dans l’élan donné à la nation par l’élection successive de deux présidents radicaux, Hipólito Yrigoyen et Marcelo de Alvear (1916-1930), dont le mouvement politique et idéologique venait tout droit de l’obédience rosiste qui avait gouverné Buenos Aires à l’époque romantique, pour se terminer tragiquement en 1852.

Quatre-vingts ans plus tard, la démarche des deux partenaires ne manquait pas d’audace et elle a été amplement couronné de succès puisque la milonga ciudadana a immédiatement fait ses racines dans le répertoire du tango.

© Denise Anne Clavilier


Pour aller plus loin :

consulter les pages consacrées à Sebastián Piana dans l’encyclopédie en ligne (et en espagnol) Todo Tango.

Boca Juniors sort dans la rue pour soutenir Riquelme contre Macri [Actu]

"Macri a peur", dit le titre en moquant
le slogan des électeurs de Mileí : "la casta tiene miedo"
(l'élite [de ceux qui nous gouvernent] a peur)
Debout à gauche, sur la voiture, Román Riquelme
venu soutenir et saluer ses partisans
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Hier, une marée humaine est descendue dans la rue, dans le quartier de La Boca, pour soutenir la candidature de Román Riquelme à la tête du club Boca Juniors, l’un des bastions culturels et sociaux du quartier, et rejeter celle de Mauricio Macri, qui se présente derrière le candidat titulaire, Andrés Ibarra.

Au début de la semaine dernière, une juge, qui vient d’ailleurs de se retirer du dossier (une victoire du camp Riquelme), avait interdit la tenue des élections à la tête du club qui devaient se tenir hier pour de soi-disant irrégularités dans les listes électorales du club. Jeudi, l’audience de conciliation entre l’équipe dirigeante Riquelme et celle de Macri n’avait abouti à rien (il était en fait impossible qu’elle débouchât sur autre chose qu’un échec).

Riquelme a droit à la photo centrale de La Prensa
"Une multitude pour le défilé aux drapeaux"
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Les supporters et les adhérents font en effet face à une élection importante pour l’institution : il est clair qu’avec Riquelme, le sport et le quartier, sa vie, son développement humain seront prioritaires et qu’avec Macri et consorts, le but est soit de faire de grasses affaires sur le dos des adhérents (ce que dénonce Riquelme) soit de transformer le club en un trempoline politique pour un retour de Macri à une position de force sur l’échiquier politique national.

Or dans ses manœuvres pour noyauter le futur gouvernement de Javier Mileí, après de flamboyants débuts, Macri semble être en train de se planter dans les grandes largeurs. Certes il a bien obtenu d’imposer dans l’organigramme gouvernemental certains de ses poulains, en premier lieu Patricia Bullrich, désormais confirmée au ministère de la Sécurité, qu’elle a déjà occupé sous la présidence Macri. Or aussitôt qu’elle a été confirmée, l’ancienne et future ministre s’est affranchie de son encombrant parrain. Elle navigue désormais seule à la barre de ses propres intérêts de carrière, en politicienne madrée et avide de pouvoir. Cette semaine, elle a fait à Macri un splendide (et assez réjouissant) pied de nez qui en a laissé plus d’un bouche-bée parmi les observateurs de la vie politique argentine.

Sur cette une, l'info est reléguée en info secondaire
la photo tout en haut à droite
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Par ailleurs, la foule qui est sortie hier pour soutenir Riquelme et que celui-ci, vivement applaudi, a rejointe, laisse peu de doute planer sur l’ampleur du soutien dont il jouit et permet de deviner qu’en effet, comme il a déjà été dit par plusieurs personnalités, Macri a fait jouer la justice pour gagner du temps car il était à peu près sûr de perdre le scrutin tel qu’il s’engageait la semaine dernière.

Affaire à suivre.

© Denise Anne Clavilier


Pour aller plus loin :

lire l’article de Página/12
lire l’article de La Prensa, qui fait aussi sa une sur cette manifestation populaire (à marquer d’une pierre blanche !)
lire l’article de Clarín

Ajout du 5 décembre 2023 :

Página/12 publie aujourd’hui un portrait de la nouvelle juge en charge du dossier et cela se présente assez mal. Elle aurait déjà bénéficié de largesses de Mauricio Macri et elle est adhérente de première catégorie (socia) du club. Elle est donc juge et partie.
Pour aller plus loin :

Ajouts du 6 décembre 2023 :

La deuxième juge, une fois mise en difficulté parce que le club de Boca a révélé qu'elle était l'une de ses socia, s’est récusée. Elle a donc été remplacée par l’un de ses confrères, le troisième magistrat en une semaine sur cette affaire !
Pour aller plus loin :
lire l’article de Página/12
lire l’article de La Prensa
lire l’article de Clarín
lire l’article de La Nación

"Temps additionnel", lit-on sous une pendule
aux couleurs du club Boca Juniors
sur la une du 7 décembre 2023

Ajouts du 7 décembre 2023 :
Macri a tenu une conférence de presse pour discréditer Riquelme : il a laissé entendre que ses partisans avaient menacé sa fille de douze ans et porté plainte au civil, une plainte qui sera instruite par la juge qui s’est prononcé il y a une semaine contre la tenue des élections pour cause d’irrégularités dans la liste électorale du club. Macri exige aussi de la justice qu’elle écarte des affaires courantes l’actuel bureau d’administration, parce que son mandat est échu, et place Boca Juniors sous tutelle jusqu’à l’élection du nouveau bureau, élection qui pourrait avoir lieu le 17 décembre au plus tard (après, l’Argentine tombe dans les longues vacances d’été).
Pour aller plus loin :
lire l’article de Página/12
lire l’article de Clarín
lire l’article de La Nación

jeudi 30 novembre 2023

Le premier signal de ralliement vient de Scioli [Actu]


Le premier à venir à la soupe n’aura donc pas été un radical ou un libéral du PRO (mises à part les personnes désignées par Macri pour noyauter le prochain gouvernement et veiller à ses intérêts économiques) mais un allié de longue date de Cristina Kirchner et Alberto Fernández : dès les premiers jours qui ont suivi le second tour, la future ministre des Affaires étrangères avait fait savoir, à la stupeur générale, qu’elle souhaitait maintenir à son poste l’actuel ambassadeur d’Argentine au Brésil, Daniel Scioli (photo ci-dessus), ancien vice-président de Néstor Kirchner, ancien gouverneur péroniste de la Province de Buenos Aires et ancien candidat malheureux à la présidence (contre Macri, d’ailleurs).

Le week-end dernier, elle a fait le voyage pour prendre des contacts sur place et essayer de réparer les dégâts provoqués par les déclarations incendiaires du candidat libertarien pendant la campagne. Celui-ci avait même parlé de rompre les relations diplomatiques avec ce pays gouverné « par un communiste corrompu ». Charmant, n’est-ce pas ? Une fois au Brésil, la future ministre a renouvelé son offre à Scioli qui n’a pas même fait mine de la refuser. Il n’a publié aucun communiqué dans ce sens. Pas de démission à l’horizon non plus.

Daniel Scioli a donc accepté de servir ce nouveau gouvernement qui va faire tout l’inverse de ce sur quoi il a construit toute sa carrière politique. Comment voulez-vous sauver la mise aux politiques de ce camp devant une telle capitulation venant de si haut dans le spectre du mouvement ?

Comme l’a dit Alberto Fernández à la radio avant-hier, on ne voit pas bien comment un même homme peut servir les deux programmes politiques à la suite l’un de l’autre (1). Tout cela, a-t-il conclu, doit être réglé par Scioli lui-même et regarde sa conscience.

© Denise Anne Clavilier


Pour aller plus loin :




(1) On parle d’un homme politique ici, il ne s’agit pas d’un diplomate de carrière ! Les diplomates professionnels peuvent et doivent avoir d’autres lignes de conduite.

mercredi 29 novembre 2023

La Cour de Cassation émet des arrêts partisans [Actu]

Sur le front de Macri, le slogan classique (Ce sera justice)
est retournée : Ce sera injustice
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La Cour de Cassation nationale vient d’annuler le non-lieu qui avait été prononcé en faveur de Cristina Kirchner il y a quelques mois dans l’affaire dite de la « Route de l’argent K » (Ruta del dinero K), un scandale de corruption qui implique l’ancienne chef d’État et actuelle vice-présidente sortante dans un trafic de blanchiment de pots-de-vin divers et variés pour lequel le ministère public peine à présenter des preuves irréfutables.

Cependant de l’autre côté, cette même institution prononce un non-lieu au bénéfice de Mauricio Macri dans l’affaire du San Juan, où les preuves ont bel et bien été produites par l’instruction et par le ministère public : c’est en effet sous la présidence de Macri (2015-2019) que le sous-marin ARA San Juan a disparu corps et biens avec l’intégralité de son équipage, soit 44 morts en service qui n’ont pas reçu le moindre hommage national avant l’arrivée au pouvoir de son successeur, le président sortant Alberto Fernández au cours de l’été 2020. C’est aussi sous sa présidence (2015-2019) qu’un certain nombre de familles des sous-mariniers disparus, en majorité des personnes aux revenus modestes et d’humble extraction, ont été espionnées, leurs téléphones mis sous écoute illégale, alors qu’elles réclamaient avec véhémence à l’État qu’il fasse son devoir envers les militaires décédés dans l’accident et leurs ayant-droits (ils ont d’abord réclamé qu’on retrouve l’épave, ensuite qu’on rende justice à leurs maris, femme, fils ou pères morts dans les profondeurs du Mar Argentino). La logique démocratique voudrait que ces événements s’étant produits alors que l’État se trouvait sous la responsabilité de Macri, seul un débat contradictoire devant une instance de jugement puisse établir la vérité judiciaire dans cette affaire. Quand bien même Macri ne serait pas le commanditaire des écoutes, il devrait s’en expliquer puisque ceux qui les ont été conduites travaillaient en dernière instance sous ses ordres. La Cour de Cassation a préféré exempter l’ancien président d’avoir à répondre de ses actes devant un tribunal. C’est minable et cela augure très mal, une nouvelle fois, de l’évolution des pratiques judiciaires en Argentine pendant la présidence échevelée qui s’annonce !

Cristina Kirchner n’a pas tardé à faire connaître son analyse des faits et il est difficile de lui donner tort sur les principes, même si, comme tout responsable politique en Argentine, elle n’est pas au-dessus de tout soupçon.

"Frein à l'impunité de Cristina : réouverture
d'un dossier pour blanchiment", dit le gros titre
au-dessus de ce selfie collectif de Mileí à la Maison Blanche
Quinze ans d'âge mental !
Au lieu de se contenter des photos du service de presse
de leurs hôtes...
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Sur ces affaires comme sur les autres, la presse se partage en deux : d’un côté Página/12, qui dénonce une justice du deux poids, deux mesures et de l’autre, les titres de droite qui se réjouissent que les délinquants, qui, bizarrement, sont toujours des gens de gauche (allez savoir pourquoi !), soient renvoyés devant la justice tandis que les braves gens comme Macri sont enfin libérés des complots de la gauche…

De son côté, à l’issue d’une assez longue commission d’enquête, la majorité parlementaire sortante a accouché hier d’une accusation contre la Cour suprême dont elle prétend démontrer la partialité partisane lors d’un futur éventuel procès politique en vue de la destitution des quatre magistrats qui la composent (ils ont majoritairement été nommés par Macri). Ceci dit, le Congrès sera renouvelé le 10 décembre prochain, quand les élus d’octobre prendront leurs fonctions et prêteront serment. La procédure n’est donc pas prête d’aboutir à quoi que ce soit.


© Denise Anne Clavilier


Pour aller plus loin :

lire l’article principal de Página/12, qui en a fait sa une en soulignant l’alignement des décisions de justice dans le même sens
lire l’article de La Prensa, qui préfère faire sa une sur le prétendu « retour [de l’Argentine] dans l’Occident » grâce à la visite-éclair du président élu aux États-Unis
lire l’article de La Nación qui se félicite de la reprise du procès contre Cristina Kirchner
Quant à Clarín, ce matin, il réserve ses analyses à ses abonnés (je ne donne donc pas le lien qui aboutit à une page blanche pour le grand public).

Susana Rinaldi et Osvaldo Piro font un retour sur scène [à l’affiche]


La chanteuse Susana Rinaldi et son ex-mari, le compositeur, chef d’orchestre et bandonéoniste, Osvaldo Piro, partageront demain, jeudi 30 novembre 2023, à 21h, la scène du Teatro El Coliseo, Marcelo T. de Alvear 1155, dans le quartier de Retiro à Buenos Aires.

Il y a plusieurs mois, Susana Rinaldi avait annoncé son adieu aux planches mais l’appel de la scène est la plus forte.

Une du supplément culturel de Página/12
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Au programme : des grands classiques du tango, au répertoire de Rinaldi depuis ses débuts, et des créations originales de Piro.


Capture d'écran de la page de réservation du théâtre
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Prix des places (exorbitants mais c’est eux !) : de 1 500 à 6 000 pesos argentins. Néanmoins il y a fort à parier que le spectacle se donnera à guichets fermés.

© Denise Anne Clavilier


Pour aller plus loin :

lire l’interview parue ce matin dans Página/12 qui en fait la une de son supplément culturel quotidien
lire le communiqué du Teatro Coliseo

La droite soutient Macri jusque dans le foot [Actu]

Pendant que Mileí prend la pause à la Maison Blanche,
la majorité sortante lance un procès en destitution
contre la Cour suprême, ce qui fait la majeure partie de la une
Boca est traité en titre secondaire, dans la colonne de droite
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La justice portègne vient de reporter sine die les élections du bureau d’administration du Club Boca Juniors, l’un des clubs de quartier les plus puissants de la capitale argentine avec une équipe de football professionnelle de premier niveau.

Deux listes s’opposent. L’une est menée par Ibarra en tandem avec Mauricio Macri, ancien président du pays et ancien président du club dont il s’était servi comme d’un marchepied pour propulser sa carrière politique. L’autre est menée par Román Riquelme, un grand footballeur retraité de fraîche date, dont il est fort probable qu’il avait de bonnes chances d’arriver en tête du scrutin qui devait se tenir dimanche prochain.

Saisie par Macri et consorts, une juge en a donc décidé autrement : il y aurait des irrégularités dans l’organisation des élections, qui ne peuvent donc pas se tenir en l’état.

Cette décision aussitôt connue, une foule de partisans de Riquelme a rejoint le stade et une manifestation bruyante s’est tenue dans la rue en soutien au candidat et ancien joueur.

Lequel dans une conférence de presse a donné son analyse : il s’agirait d’une poignée de « messieurs » qui veulent s’emparer du club pour en faire une affaire commerciale privée, ce qui supprimerait les instances dirigeantes actuelles et permettrait de faire de l’institution une plateforme d’influence politique et économique de droite. Or Mauricio Macri a déjà investi le futur gouvernement de Javier Mileí qu’il a contraint à nommer à des postes clés plusieurs de ses affidés (Caputo, Bullrich et tutti quanti). Il est clair que Macri veut retrouver rapidement et coûte que coûte une position de pouvoir et qu’il utilise le club à cet effet.

La presse se divise sur le sujet : Página/12 prend, sans surprise, le parti de Riquelme, censé représenter les adhérents du club, donc des habitants de ce quartier très populaire de Buenos Aires auquel Boca Juniors apporte une grande quantité de services (une école primaire, des cours du soir pour les adultes, un dispensaire médical pour tous les âges, des conférences et autres activités culturelles), tandis que La Prensa, Clarín et La Nación prennent le parti de Macri avec une analyse qui fait de Riquelme un homme politique qui s’accrocherait au pouvoir et prendrait en otages les adhérents… Une espèce de monde à l’envers, non ? Tout dans leurs colonnes se passe comme si, à chaque fois, la droite représentait la sincérité et l’honnêteté et la gauche les combines systématiques et les magouilles.

Cela promet pour l’année à venir.

© Denise Anne Clavilier


Pour aller plus loin :

lire l’article de Página/12 sur l’arrêt judiciaire
lire l’article de Página/12 sur la manifestation des adhérents
lire l’article de Página/12 sur les demandes de Macri devant le juge

mardi 28 novembre 2023

Six Argentins libérés de leur captivité à Gaza [Actu]

En haut, le gros titre dit : "Mileí tente d'écarter
les soupçons aux Etats-Unis et obtenir l'aide du FMI"
En-dessous, la photo des otages relâchés
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Hier, parmi les onze otages libérés, se trouvaient des Franco-israéliens comme les Français l’ont célébré en France et le célèbrent encore aujourd’hui, ainsi qu’une Argentine adultes et cinq jeunes Israélo-argentins, dont deux jumelles de trois ans.

Pour les Argentins, il manque encore une personne, la plus symbolique pour les Israéliens, les Argentins et toutes les personnes qui ont quelques grammes d’humanité en elles : un bébé enlevé dans un kibboutz à l’âge de neuf mois, qui en a donc maintenant dix, Kfir Bibas, dont les autorités gazaouites disent qu’elles ne savent pas où il est retenu, d’où son absence hier dans le contingent des libérations.

Seuls Clarín et La Nación ont traité ce matin l’info en une.

"Geste de soutien des Etats-Unis : Mileí a été
reçu par le conseiller de Biden pour la région",
dit le gros titre
En-dessous, un autre choix de photos des otages
alors qu'ils sont remis à la Croix Rouge, dans la Bande de Gaza
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Selon le quotidien que l’on choisit de lire, les chiffres varient. Certains parlent de 5 otages argentins libérés quand d’autres en comptent bel et bien six. J’ignore pourquoi les premiers en soustraient un.

La Prensa a préféré faire sa une sur la visite new-yorkaise de Mileí à la tombe d’un rabbin violemment anti-communiste (1), puisqu’il a fini par se rendre cette nuit aux États-Unis où il a été reçu à déjeuner par Bill Clinton dans un grand hôtel de la ville. Le président élu s’entretiendra avec un conseiller de Biden, Jack Sullivan, à la Maison Blanche avant de rentrer en Argentine, laissant ses conseillers et futurs ministres en rendez-vous avec le FMI et autres institutions.

Quant à Página/12, il a choisi de consacrer sa première page à un énième scandale urbanistique qui implique Macri et ses affidés du Boca Juniors dont l’ancien président argentin, à la manœuvre dans la composition du futur gouvernement, tâche de retrouver la présidence, histoire peut-être de se rajeunir de quelques décennies.

L'affiche concernant Kfir Bibas
En bas en rouge : Prenez une photo de cette affiche
et partagez-la.
S'il vous plaît, aidez-nous à les ramener vivants à la maison
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© Denise Anne Clavilier


Pour aller plus loin :

lire l’article de Página/12
lire l’article de La Prensa
lire l’article de Clarín
lire l’article de La Nación
lire l’article de La Nación sur la famille Bibas (sous la plume de la correspondante permanente à Rome Elisabetta Piqué).

Ajouts du 29 novembre 2023 :

Hier, le Hamas a libéré quatre autres Israélo-argentins parmi les douze personnes remises à la Croix-Rouge mais le sort du bébé reste inconnu. À ce sujet :
lire l’article de Página/12
lire l’article de La Prensa




(1) Mileí serait en cours de conversion au judaïsme dans l’obédience la plus réactionnaire fondée par ce lettré. En Argentine, sa démarche religieuse ne devrait pas pouvoir être reconnue. En effet, depuis les années 1930 et le retentissant scandale de la fausse synagogue servant d’honorable vitrine à un épouvantable réseau de proxénétisme au détriment de jeunes femmes polonaises, les autorités juives locales n’acceptent aucune conversion sur le territoire argentin et refusent même de reconnaître celles qui sont célébrées à l’étranger, quel qu’on soit le motif et l’obédience.