Le président argentin, Alberto Fernández, professeur de droit pénal de son métier (à la prestigieuse Université de Buenos Aires), a décidé de déposer à la barre comme témoin de la défense à l’un des procès pour corruption intentés à Cristina Kirchner, sa vice-présidente qui fut elle-même présidente pendant huit ans jusqu’en 2015.
Ce procès implique ou s’efforce d’impliquer l’ancienne chef d’État dans un scandale de travaux publics destinés à la construction de routes dans la province de Santa Cruz, dont son défunt mari, Néstor Kirchner, était natif et dont il avait été gouverneur avant d’être élu à la magistrature suprême en 2002 (c’est d’ailleurs là-bas qu’il est enterré dans un mausolée particulièrement imposant sans rien d’extraordinaire pour un ancien chef d’État).
Alberto Fernández, qui a
témoigné en faveur de sa vice-présidente, malgré les désaccords
politiques fréquents et de plus en plus manifestes entre eux, s’est
rendu au tribunal fédéral où se tiennent les audiences, moitié en
présentiel moitié en visioconférence pour raison sanitaire. Il
aurait pu témoigner de chez lui, par Zoom, comme la prévenue restée
chez elle et parfois invisible à l’écran. Le président a donc
voulu donner à son témoignage beaucoup de solennité en faisant
ostensiblement ce déplacement inaccoutumé.
Dans cette enceinte judiciaire, Alberto Fernández a tenu à rappeler quelques enjeux de l’État de droit, notamment celui qui établit que des actes politiques d’exécution du budget de la Nation ne peuvent pas être poursuivis par la justice pénale puisqu’ils sont effectués dans le cadre d’une loi votée par le Congrès, lequel exerce par représentation la souveraineté nationale.
C’est la deuxième fois qu’il rappelle publiquement ces principes fondateurs de la démocratie face à une droite qui supporte très mal de voir la gauche au pouvoir et s’en venge une fois qu’elle récupère le contrôle de l’État. La première fois, il l’avait fait devant la presse. Maintenant, il se rend dans une salle d’audience pour s’adresser à un procureur fédéral, dans ce même palais de justice dont les magistrats sont connus pour leurs positions partisanes de droite et auxquels la cour de Cassation vient de confier, en la dépaysant, la cause des écoutes illégales contre les parties civiles de l’accident du sous-marin ARA San Juan dans laquelle l’ancien président de droite, Mauricio Macri, est gravement impliqué (avec des preuves incontestables).
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