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mercredi 25 juin 2025

Semana Gardeliana à Buenos Aires [à l’affiche]

Carlos Gardel
11 décembre 1890, Toulouse, France
24 juin 1935, Medellín, Colombie


Hier, c’était le 90e anniversaire de la disparition de Carlos Gardel, qui a trouvé la mort à Medellín, lors d’une collision de son avion au sol, alors qu’il allait décoller pour l’une des toutes dernières d’une grande tournée en Europe et en Amérique. Il avait 45 ans et il était au sommet de son art.

Sa voix a été classée au patrimoine de l’UNESCO. Il est considéré comme un trésor national par les Argentins.

Pourtant, cet anniversaire qui aurait dû revêtir quelque solennité, passe presque inaperçu. La ville de Buenos Aires (gouverné à droite et qui utilise le tango comme un atout économique plus que comme un patrimoine culturel) a mis en place une riche semaine d’événements en tout genre dans de nombreux espaces qu’elle contrôle, en particulier le réseau des théâtres municipaux. Le ministère portègne de la culture ne s’est toutefois même pas donner la peine de publier une affiche pour cette manifestation. Sur le site de la ville, une simple photo de l’artiste… Elle est dans le domaine public. Cela évite les frais, n’est-ce pas ? Ils n’ont aucune honte !

© Denise Anne Clavilier


Pour aller plus loin :
lire l’article de Página/12 sur l’ensemble des propositions de la semaine
lire l’article de Página/12 sur le spectacle qui s’est donné hier au CCK (rebaptisé aujourd’hui Palacio Libertad, parce que Mileí ne supporte pas que quoi que ce soit porte le nom de l’ancien président Néstor Kirchner)
lire l’article de La Prensa, par le président de la Fondation Gardel, un homme qui n’est pas à sa place dans cet univers gardélien, qui n’a guère de liens avec l’univers du tango et ses institutions, et qui présente ici un ouvrage complotiste qu’il a signé sur l’accident du 24 juin 1935 (cela fait 90ans que toutes sortes de théories fantaisistes et absurdes circulent sur cet accident, comme il y en avait beaucoup dans ces premiers temps de l’aviation)
lire l’article de Clarín

mardi 13 mai 2025

Réédition du premier livre consacré à Piazzolla [Disques & Livres]


La semaine dernière, il a fait l’objet d’un Plenario de la Academia Nacional del Tango au Palacio Carlos Gardel, siège de l’institution. Hier, il faisait l’objet d’un long article très approfondi dans les pages d’un supplément culturel hebdomadaire de Página/12, Яadar.


Con Piazzolla est le premier livre publié sur le grand compositeur et bandonéoniste auquel on doit la deuxième grande révolution du tango, celle de 1955, qu’il avait lancée en rentrant de son année d’études en France, à la Cité Internationale des Arts. La première avait eu lieu au cours des années 1910 quand la musique du tango s’était professionnalisée sous l’impulsion d’artistes comme les frères De Caro.


Con Piazzolla est paru en Argentine, aux Éditions Galerna, disparues depuis, en 1969, juste après le tonitruant succès de l’été 1968, Balada para un loco, sur des vers de Horacio Ferrer, chantés successivement par Amelita Baltar puis quelques semaines plus tard enregistrés par Roberto El Polaco Goyeneche avec un texte adapté et encore plus délirant (1) ! Pour les deux compères, Piazzolla et Ferrer, toujours accompagnés de l’épouse du premier, Amelita Baltar, 1969 fut une autre année pivot, celle de la création du premier opéra-tango, María de Buenos Aires. Avec un texte encore plus onirique, à la limite du compréhensible, et c’est en partie ce qui fit le succès de l’œuvre. Con Piazzolla est la synthèse des entretiens que l’auteur, un journaliste, a eus avec le musicien pendant l’hiver et le printemps 1968.


Voilà donc qu’on réédite, toujours en Argentine et en espagnol, ce livre de Arturo Speratti, avec une nouvelle couverture, chez Vademecum. Avec la parution originale, Piazzolla a fondé sa légende. Un certain nombre d’informations qu’il contient et que le journaliste a tirées de ses confidences sont donc historiquement fausses. Grâce à cet ouvrage, elles appartiennent désormais au mythe Astor Piazzolla et on les retrouve encore aujourd’hui un peu partout dans la presse, les promotions des disques lorsqu’ils sont réédités un peu partout dans le monde, les documentaires et autres biographies écrites à la va-vite. Un phénomène similaire existe avec Gardel… Rien de nouveau sous le soleil !

La réédition de l’ouvrage coïncide avec la Feria del Libro de Buenos Aires.

Son prix est d’environ 19 000 pesos argentins. Le prix du livre étant entièrement libre en Argentine, certaines librairies physiques ou en ligne accordent des rabais intéressants.

© Denise Anne Clavilier


Pour aller plus loin :
lire l’article de Página/12



(1) Ce tango phare fait bien entendu partie du corpus que j'ai publié aux Editions du Jasmin, Barrio de Tango, recueil bilingue de tangos argentins. En 2007, lors de mon premier voyage à Buenos Aires, j'avais eu la chance d'en soumettre la traduction à Horacio Ferrer lui-même qui m'en avait remerciée.

jeudi 8 mai 2025

Un projet pour le Museo Casa Carlos Gardel et tout le quartier ? [Troesmas]


Walter Santoro est un homme d’affaires à succès qui s’est pris de passion pour Carlos Gardel, son œuvre et son histoire. Les deux héritières de Armando Delfino, l’impresario et l’homme de confiance de Gardel, qui s’est occupé de sa succession, dans la seconde moitié des années 1930, puis de celle de sa mère, Berthes Gardés, décédée en 1943, qui l’a institué son héritier, lui ont remis tout ce qui reste de son patrimoine : meubles, photos, manuscrits, partitions, disques, vêtements...

Pour conserver ce précieux dépôt, au lieu de se l’approprier sans autre forme de procès, il a créé la Fondation Carlos Gardel qui en est propriétaire (dit-il) et dont il est le président. Dans La Prensa, il décrit aujourd’hui un projet très cohérent et plutôt séduisant pour restaurer la maison où Gardel a vécu ses dernières années à Buenos Aires dans l’état où le chanteur l’a connue et déployer des projets gardeliens dans l’ensemble du quartier, qui est celui qui a vu grandir Gardel et où son talent artistique a percé. La maison est devenue un musée public qui dépend du ministère de la Culture de la Ville Autonome de Buenos Aires. Il y a quelques années, cette tutelle a procédé à une pseudo-amélioration muséographique qui a détruit tout ce qu’il restait entre ces murs de la présence de Gardel et de sa mère : la maison est devenue un endroit sans aucune âme, aux espaces aseptisés et fonctionnels entre des murs uniformément blanchis, avec, unique atout du musée si l’on peut utiliser ce terme flatteur, des postes d’écoute à la demande. Un atout d’une faiblesse insigne puisque n’importe qui peut écouter les mêmes enregistrements n’importe où et même chez soi grâce à Internet où tout est répertorié. Ces travaux ruineux, qui ont bien dû faire la fortune de quelqu’un, ont donc abouti à un appauvrissement spectaculaire du musée qui n’a plus rien d’un domicile ni d’un creuset artistique alors qu’avant cette catastrophe institutionnelle, Gardel restait fortement présent dans cette maison qu’il avait habitée. J’en sais quelque chose : j’y ai fait une présentation de mon premier livre, Barrio de Tango, recueil bilingue de tangos argentins. En 2010, c’était un lieu magique !

Santoro voudrait donc revenir en arrière et reconstituer avec la plus grande exactitude ce qui a été ainsi détruit : remettre les papiers peints tels qu’ils sont attestés sur les photos et remettre à leur place dans la bonne pièce les meubles qui permettront aux visiteurs de se figurer le mode de vie finalement très simple de ce grand artiste qui avait pourtant fait une fortune légendaire.

Malheureusement pour ses projets, Santoro ne s’exprime presque jamais ailleurs que dans les colonnes de La Prensa, ce qui l’écarte radicalement du monde tanguero, qui s’inscrit plutôt à gauche (péroniste) tandis que ce journal a pour lectorat l’aile la plus réactionnaire de la droite catholique pour laquelle il n’hésite pas à verser, assez souvent qui plus est, dans les théories complotistes les plus rances (sur le covid, sur les vaccins, sur le climat, sur le pape François, sur les personnalités de gauche, etc.). Or Gardel se situait à l’opposé de tout cela… Pourtant, dans cette interview, Santoro se plaint aussi de ne pas avoir l’oreille des élus de droite qui font la pluie et le bon temps depuis plusieurs mandats à la tête de la Ville et qui ne répondent même pas à ses propositions. Celles-ci ne sont donc accueillies et soutenues ni à droite ni à gauche !

Et pourtant ce qu’il propose est loin d’être idiot. Sa stratégie quant à elle est très probablement erronée et le public qu’il touche ne doit pas non plus être le bon !

© Denise Anne Clavilier


Pour en savoir plus :
lire l’article de La Prensa

mardi 15 avril 2025

Ce soir, au Coliseo, un Piazzolla revisité [à l’affiche]

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Ce soir, mardi 15 avril 2025, à 20h30, Nico Sorín présente sa version du répertoire de Astor Piazzolla, une version techno ! Il ne fait pas le moindre doute que Piazzolla lui-même aurait aimé s’aventurer musicalement dans cette voie. Il aimait par-dessus jouer, arranger et composer hors des sentiers battus, il y a consacré toute sa carrière artistique ! Un moment, il avait même caressé l’idée iconoclaste de créer un bandonéon électrique sur le modèle de la guitare avant d’en être dissuadé par Osvaldo Pugliese qui lui avait remontré combien le souffle de l’instrument acoustique en était devenu l’âme tanguera…

Le concert sera donné au Teatro Coliseo, le théâtre de la République italienne à Buenos Aires, un magnifique théâtre à l’italienne (sans jeu de mots), qui se trouve dans le quartier de Recoleta, rue Marcelo Torquato de Alvear, 1125.

Les prix des places s’échelonnent de 15 000 (sans visibilité) à 45 000 pesos argentins. Il y a neuf catégories de fauteuil.

Concert unique, avec orchestre et plusieurs artistes invités dont le nom n’est pas annoncé. Au programme, la plupart des grands classiques de Piazzolla, chantés ou instrumentaux.

A cette occasion, Página/12 publie une interview de Nico Sorín qui évoque longuement l’initiative de ce concert, que l’on doit au petit-fils jazzman de Piazzolla, Pipi Piazzolla, qui s’est fait en quelque sort depuis quelques années le gardien de l’œuvre de son grand-père.

© Denise Anne Clavilier


Pour aller plus loin :
lire l’article de Página/12
voir la présentation du spectacle sur le site du théâtre

jeudi 10 avril 2025

L’Argentine dit adieu au peintre Luis Felipe Noé [Actu]

Le gros titre est consacré à la marche arrière de Trump
mais la photo est tout de même pour le disparu
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Luis Felipe Noé avait 91 ans. Il est décédé hier au terme d’une courte maladie. Il avait fait un AVC il y a quelques jours et ses deux enfants, qui sont installés en France, sont rentrés en Argentine en urgence et à temps pour être à ses côtés dans ses derniers jours.

Affiche d'une des rencontres publiques
en novembre dernier pour la présentation du livre
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Luis Felipe Noé était un artiste plastique essentiellement abstrait dont la palette chatoyante a fait la célébrité. Une explosion permanente de couleurs vives ! Il avait fait l’objet d’une exposition au sein du temple de la discipline : le Museo Nacional de las Bellas Artes, situé à Recoleta, dans le nord de Buenos Aires.

Une autre rencontre, un peu plus tard en novembre
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Son décès intervient alors que le pays se trouve plongé dans une grève générale qui semble connaître un beau succès. Página/12, dont les journalistes se joignent au mouvement de protestation, lui consacre un article en ligne mais ni Une ni sortie du supplément culturel quotidien qui lui aurait dans d’autres circonstances rendu hommage.

Même choix qu'à Clarín : un gros titre pour Trump
et une photo pour Noé
en l'occurrence dans son atelier de la rue Tacuarí
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Luis Felipe Noé avait publié un livre en novembre dernier et il en avait assuré lui-même la promotion à travers plusieurs rencontres publiques. Son titre : Asumir el caos (assumer le chaos). Le chaos des couleurs est sans doute un des traits les plus caractéristiques de son œuvre.

Jusqu’à son AVC, il vivait et travaillait chez lui dans un coin très simple du quartier de San Telmo, dans le sud de Buenos Aires, où vit la classe moyenne.

© Denise Anne Clavilier


Pour aller plus loin :
lire l’article de Página/12
lire l’article de Clarín
lire l’article de La Nación
visiter le site Internet de l’artiste

jeudi 6 mars 2025

Une Une qui cite Cambalache de Discépolo [Actu]

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Página/12 analyse ainsi une nouvelle interview factice que Mileí a accordée lundi pour tenter de se disculper dans le scandale de l’escroquerie à la monnaie cryptée : « Tu verras, tout ça c’est mensonges et compagnie » Verás que todo es mentira.

Vignette de Miguel Rep, parue hier dans Página/12
Les frontières de l'Argentine sont une chaîne humaine de sans-abri
Une image que n'aurait pas renié Discépolo
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Une citation du refrain de Cambalache (1), le chef d’œuvre de Enrique Santos Discépolo, auteur et compositeur anarchiste et presque nihiliste avant de plonger dans la militance péroniste, qui a créé une bonne partie du répertoire du tango-canción de la première moitié du 20e siècle. Dans Cambalache, Discépolo décrit le chaos moral et social dans lequel la société argentine a sombré pendant la Grande Dépression.

Comment-en-est-on-arrivé-làland
Dessin de Miguel Rep pour Página/12 lundi dernier
Une question qui vaut aussi pour la majorité des citoyens des Etats-Unis
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Le scandale suit son chemin : des instructions pénales sont ouvertes en Argentine et aux États-Unis qui pourraient l’impliquer comme instigateur ou complice de l’escroquerie qui a ruiné de très nombreux épargnants.

© Denise Anne Clavilier


Pour aller plus loin :
lire l’article de Página/12



(1) Cambalache fait partie des chansons que j’ai traduites dans mon ouvrage intitulé Barrio de Tango, recueil bilingue de tangos argentins, paru aux Editions du Jasmin et disponible en commande dans toutes les bonnes librairies et sur le site de l’éditeur.

mercredi 18 septembre 2024

Une conférence sur Gardel au Museo Mitre : rare ! [à l’affiche]

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Demain, jeudi 19 septembre 2024, à 18h, le Museo Mitre propose une conférence sur Carlos Gardel qui, à ses débuts, chantait surtout de la musique rurale et non pas du tango. A cette époque où il fallait qu’il se produise dans les restaurants fréquentés par la très bonne société de la fin de la Generación del Ochenta, une période politique qui s’étend de 1880 à 1916, année au cours de laquelle Gardel bascule dans le tango, le chanteur a mis à son répertoire une valse en hommage à Bartolomé Mitre (1821-1906), l’homme de lettres, l’érudit, le patron de presse et l’homme politique qui avait occupé la présidence argentine dans la période précédente (la República Conservadora, 1860-1880).

Il existe un enregistrement de cette valse intitulée A Mitre. C’est l’un des tout premiers disques de Carlos Gardel : il date de 1912.

La conférence de Mario Ezequiel Pérez portera donc sur les origines du tango dans la vie politique argentine du début du 20e siècle.

Le Museo Mitre est installé dans ce qui fut la demeure privée de ce personnage-clé dans la vie politique, institutionnelle et intellectuelle de l’Argentine. La visite vaut le coup, notamment pour l’impressionnante bibliothèque qu’il avait assemblée et lue tout au long de sa vie et le trésor archivistique que ce collectionneur passionné avait constitué, nous préservant de véritables trésors pour la recherche historique. C’est un des principaux musées d’histoire à Buenos Aires et bien entendu, sa direction est menacée par Mileí et son ignorance crasse (dont il a encore fait étalage cette semaine dans un long discours sur sa politique économique que presque personne n’a voulu écouter).

© Denise Anne Clavilier

vendredi 14 juin 2024

Página/12 cite Discépolo pour dénoncer le gouvernement et ses modes de répression [Actu]

"Tu verras : tout ça c'est des mensonges", dit le gros titre
sur cette image d'un manifestant maîtrisé par la police fédérale
Ce vers est tiré de Cambalache,
le grand succès de Enrique Santos Discépolo,
qui dans les années 1930 dénonçait déjà les violences étatiques
pendant la Grande Dépression qui fut aussi l'époque du premier
gouvernement putschiste depuis l'adoption de la Constitution
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Avant-hier, une manifestation de l’opposition devant le Congrès a tourné à l’émeute : on a vu des personnes masquées jeter sur la police des projectiles, notamment des bouteilles en verre, et d’autres renverser une voiture de presse et l’incendier. Le reste de la manifestation s’est passé comme d’habitude en Argentine : pas vraiment de violence mais beaucoup de papiers gras sur la chaussée, des cris, des slogans et le vacarme des tambours de marche, sans oublier la forêt de banderoles des syndicats et des associations de militances sociales comme Barrio de Pie (quartier debout).

Qui étaient les violents ? C’est assez difficile à dire. On peut bien sûr penser à d’authentiques manifestants, type Gilets jaunes. On peut aussi soupçonner des provocateurs ou des black-blocks ou autres perturbateurs internationaux. Toujours est-il qu’hier la presse de droite dénonçait l’opposition kirchneriste sans aucune preuve à cette distance des événements et que le gouvernement se félicitait du bon comportement de la police, qui a pourtant arrêté à tour de bras sans hésiter à tabasser tout ce qui passait à sa portée. La police argentine a une longue tradition de violence sur la voie publique, qui s’appuie sur des décennies de gouvernements putschistes dont quarante années de démocratie ne l’ont pas encore guérie (et ce n’est pas maintenant que ça va changer).

Le président Mileí s’est même félicité que les forces de l’ordre aient pu empêcher un coup d’État (sic) organisé par des « terroristes », n’hésitant pas à suggérer un rapprochement entre les scènes effarantes du 6 janvier 2021 à Washington et ce qu’il s’est passé avant-hier à Buenos Aires alors que le Sénat s’apprêtait à accepter, grâce à la voix de départage de la vice-présidente, la loi dite de Bases qui pourrait s’en prendre aux fondations de l’État argentin si les députés votent dans le même sens en deuxième lecture.

Página/12, qui soutient les manifestants, apporte ce matin quelques informations intéressantes : parmi les personnes arrêtées pour fait de violence en bande organisée, outrage à agents des forces de l’ordre et autres délits de sédition, il y a des marchands de sandwiches, une des grandes traditions des manifs argentines. Comme on marche beaucoup et qu’on reste ensuite toute la journée sur la place, il faut bien se sustenter. Le lieu où les manifestants se regroupent est donc plein de barbecues où de petits marchands ambulants font cuire, dans des conditions d’hygiène médiocrement engageantes, des saucisses qu’ils vendent dans un morceau de pain et d’autres qui proposent des sodas ou du café. Bien évidemment, il est assez facile de s’en prendre à eux : ils ne quittent guère leur échoppe de fortune et un policier a vite fait de leur mettre le grapin dessus.

La vignette du jour par Miguel Rep, dans Página/12
Grande banderole : "on en a vu d'autres et on s'en est tiré"
Les deux petites : enfin, jusqu'à présent
Traduction © Denise Anne Clavilier
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Comme les chefs d’inculpation retenus par le parquet sont exorbitants et les peines encourues redoutables (plusieurs années de prison ferme), la rédaction de Página/12 pose l’hypothèse qu’il y a probablement là une stratégie du gouvernement pour semer la panique parmi les opposants et les dissuader désormais de descendre dans la rue pour contester sa politique. Les journalistes envisagent aussi que la violence ait été intentionnelle afin d’éviter que l’image d’une manifestation fournie et tranquille fasse à nouveau la une de la presse à l’étranger, comme ce fut le cas il y a quelques semaines au lendemain des manifestations en faveur du système universitaire public.

Cette semaine, le président entreprend en effet sa septième tournée internationale : il a participé comme invité spécial de la présidente du Conseil italien au G7 dans les Pouilles et il prendre demain toute sa part au Sommet pour la Paix qui se tient ce week-end à l’initiative de la présidence ukrainienne en Suisse, tout en laissant à la maison sa ministre des Affaires étrangères (elle semble risquer une prompte disgrâce elle aussi : le turn-over des ministres est impressionnant depuis le 10 décembre dernier).

© Denise Anne Clavilier


Pour aller plus loin :

vendredi 19 avril 2024

Hommage symphonique à Piazzolla ce soir au Auditorio Belgrano [à l’affiche]


Ce soir, vendredi 19 avril 2024, à 21h, grand spectacle symphonique à partir du répertoire de Astor Piazzolla (photo sur l'affiche), à Auditorio Belgrano, l’une des grandes salles de spectacle du nord de la capitale argentine, à l’angle des rue Cabildo et Virrey Loreto, dans le quartier de Colegiales.

Orchestre symphonique placé sous la baguette du Maestro Andrés Robles. Soliste : la chanteuse Diana María, qui a donné ce matin une interview à ce propos à Página/12. Sans surprise, elle chantera les grands classiques du duo Piazzolla-Ferrer des années 1960 et 1970, époque de l’apogée du duo de créateurs.

Les places meilleur marché sont déjà à 10080 pesos (c’est ahurissant !). Ce matin, il y avait encore des places disponibles, ce qui est une bonne indication de la gravité de la crise que traverse le pays.

© Denise Anne Clavilier


Pour aller plus loin :

lire la présentation du spectacle sur le site de vente de spectacle Ticketek (qui reprend le texte de la salle)
lire l’article de Página/12

lundi 4 décembre 2023

Ce soir, un Plenario consacré au 120e anniversaire de la naissance de Piana [à l’affiche]


Ce soir, lundi 4 décembre 2023, à 19h, la Academia Nacional del Tango, Avenida de Mayo 835, ouvre ses portes pour rendre hommage à un grand compositeur de tango et de milonga, Sebastián Piana, avec la participation de son petit-fils.

Entrée libre et gratuite.

Sebastián Piana, moins connu que les musiciens qui ont dirigé des orchestres, est l’inventeur de la milonga ciudadana (milonga urbaine), en 1930, avec le poète Homero Manzi, avec Milonga Sentimental, bien connus de tous les danseurs de tango argentin partout dans le monde et ici chantée par Carlos Gardel, l’un des tout premiers à l’avoir interprétée. Tous deux cherchaient à faire revivre le passé afro-américain de la capitale argentine, dans l’élan donné à la nation par l’élection successive de deux présidents radicaux, Hipólito Yrigoyen et Marcelo de Alvear (1916-1930), dont le mouvement politique et idéologique venait tout droit de l’obédience rosiste qui avait gouverné Buenos Aires à l’époque romantique, pour se terminer tragiquement en 1852.

Quatre-vingts ans plus tard, la démarche des deux partenaires ne manquait pas d’audace et elle a été amplement couronné de succès puisque la milonga ciudadana a immédiatement fait ses racines dans le répertoire du tango.

© Denise Anne Clavilier


Pour aller plus loin :

consulter les pages consacrées à Sebastián Piana dans l’encyclopédie en ligne (et en espagnol) Todo Tango.

mardi 21 novembre 2023

Espèce en voie d’extinction, TV Pública diffuse la série Mordisquito [à l’affiche]

Premier épisode, aujourd'hui à 23h30
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Hier, le président élu a annoncé qu’il mettrait en œuvre son programme et qu’il le ferait d’un coup, sans mesure intermédiaire destinée à atténuer le choc et à permettre à tout le monde de s’adapter. Si le Congrès lui en laisse la possibilité (ce que sa nouvelle composition rend peu probable, d’autant que l’élu d’avant-hier ne veut pas d’une coalition de gouvernement), il commencera par privatiser YPF, la société publique centenaire qui exploite les gisements de pétrole en Patagonie et commercialise en Argentine les produits raffinés qui en sont issus (ça a déjà été fait dans les années 1990 au grand bonheur du pétrolier Repsol qui rapatriait tous les bénéfices en Espagne, comme au bon vieux temps des colonies). Les seconds sur la liste des condamnés sont les médias nationaux : l’agence de presse Telam et le groupe audiovisuel que forment TV Pública et Radio Nacional.

L'équipe du tournage au grand complet
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Ce que TV Pública va diffuser ce soir est donc l’une des toutes dernières productions que nous pourrons apprécier du service public argentin. Il s’agit d’une série de quatre épisodes d’un peu moins d’une heure chacun qui raconte, sur un mode romancé, les derniers mois de Enrique Santos Discépolo (1900-1951), le poète et compositeur génial de tangos comme Uno, Cafetín de Buenos Aires, Cambalache ou Chorra (1). Anarchiste convaincu toute sa vie, le poète finit, une dizaine d’années avant sa mort, par se laisser convaincre, comme presque tout le secteur tanguero de son époque (2), par le projet souverainiste et social de Juan Domingo Perón dont il servit la campagne électorale pour son deuxième mandat, en 1951. Dans ce cadre, il écrivit une série de conversations imaginaires avec un opposant dont on n’entend jamais les arguments et qu’il surnomme Mordisquito (ce qui sonne un peu comme « Mais c’est qu’il me mordrait ! »). Ces sketches, qui n’ont pas pris une ride, il les interpréta lui-même à la radio à laquelle seuls les partisans de Perón avaient alors accès pendant la campagne (3).

Les quatre interprètes principaux dans le décor
Au mur on reconnaît les portraits du couple présidentiel, Evita et Perón
(Je pense que le bas filé au premier plan a échappé au regard du service de presse)
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Mordisquito, a mí no me la vas a contar (Mordisquito, tu ne vas pas me la faire à moi !) est donc un travail éminemment péroniste, avec une reconstitution très fidèle des décors des années 1940-1950, et on n’est pas prêt d’en revoir de sitôt tant que le dingue occupera la Casa Rosada (4). Ce ne sont pas les médias privés qui iront dans ce sens. Si le groupe Octubre résiste économiquement à la tempête qui s’annonce, il sera bientôt le seul à s’y consacrer.

"Soutiens la sélection sur TV Pública", dit le gros titre
Aujourd'hui, à partir de 19h30
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En première partie de soirée, la chaîne diffusera le match entre la Scaloneta et la Seleçao, qui se jouera au stade de Maracana, au Brésil. Tant qu’elle est encore en vie, TV Pública a en effet les droits de retransmission des matches de l’équipe nationale.

© Denise Anne Clavilier


Pour aller plus loin :

lire l’article de Página/12
lire la présentation sur le site Internet de TV Pública
visiter la section de Todo Tango sur Enrique Santos Discépolo, pour découvrir l’ampleur du personnage.
Sur le sort des médias publics argentins :
lire l’article de La Prensa

Ajout du 29 novembre 2023 :
lire cet article de La Nación




(1) Une dizaine de ses textes, soit autant de classiques du répertoire, sont disponibles en version bilingue dans l’anthologie que j’ai publiée aux Éditions du Jasmin, Barrio de Tango, recueil bilingue de tangos argentins.

(2) On exclura de cette vague Osvaldo Pugliese qui resta toujours fidèle au parti communiste, lequel était hautement suspect aux yeux de Perón puisque suspecté non sans raison de recevoir ses ordres du Kremlin.
(3) Napoléon III faisait la même chose : seuls les candidats dits officiels, les siens, avaient le droit de tenir des réunions politiques. Sous De Gaulle et Pompidou, la France gardait encore bien des traits du Second Empire.
(4) Façon de parler car Mileí a fait savoir hier qu’il vivrait et travaillerait à Olivos, dans la résidence présidentielle de campagne, devenue la résidence habituelle du chef de l’État sous les Kirchner mari et femme, et qu’il ne mettrait pas les pieds à la Casa Rosada. Cela vaut peut-être mieux pour lui : cela lui évitera d’entendre, sur Plaza de Mayo, les cris des manifestants qui ne tarderont pas, avec autant d’insultes qu’il en a dites au cours de ses campagnes électorales, à lui exprimer leur mécontentement, dès la rentrée de mars et même peut-être avant, dès qu’ils auront constaté tout ce qu’ils ont perdu en l’ayant élu !

mercredi 15 novembre 2023

Sortie d’un documentaire sur Roberto El Polaco Goyeneche [à l’affiche]


Roberto Goyeneche, surnommé El Polaco à cause de ses cheveux blonds, est considéré comme le plus grand chanteur de tango après Carlos Gardel. A juste raison.

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Son petit-neveu lui consacre un documentaire long-métrage, qui sort en salle cette semaine.

La première projection aura lieu au Gaumont de Buenos Aires, le siège de l’INCAA, l’institut du cinéma, demain, jeudi 16 novembre 2023, à midi. Deux cinémas du centre de Buenos Aires l’auront à l’affiche dans deux rues parallèles, avenue Rivadavia et plus au nord, l’avenue Corrientes, qui est toujours la grande artère du spectacle et de la culture.


Le lendemain, une première projection aura lieu à Mar del Plata.


Le documentaire fait intervenir tous les témoins de la vie de chanteur et différents artistes contemporains confits en émotion et en admiration bien légitimes. Página/12 interviewe le réalisateur ce matin dans ses pages culturelles. Reste à voir le film pour savoir s’il est à la hauteur de ses promesses ! En la matière, la bonne volonté, l’arbre généalogique, l’affection et l’admiration ne suffisent pas à garantir la qualité...

© Denise Anne Clavilier


Pour aller plus loin :

lire l’article de Página/12
visiter la page Facebook du film
visiter la page de Todo Tango consacrée au chanteur (enregistrements à écouter et articles à lire – tout en espagnol)

jeudi 7 septembre 2023

Gardel et Le Pera, c’est du solide. La preuve en est à ND Teatro [à l’affiche]

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C’est un spectacle que le groupe Los Amados a présenté au début de cette année à Buenos Aires puis un peu partout dans le pays, sous la direction artistique de Alejandro Viola.

Le groupe entend rendre hommage au duo créateur phare du tango première période, Carlos Gardel, compositeur et chanteur, et Alfredo Le Pera, son dernier parolier, le plus mythique de tous.

Los Amados le font avec leur style particulier, fait de kitch déchaîné et de rythmes de l’Amérique tropicale et afro. Et ça donne quelque chose qui se tient ! Il faut aimer, bien sûr, mais ça se tient !

Très costaud, ce répertoire !



Le spectacle, de retour à Buenos Aires, est à voir tous les samedis de septembre à partir de cette semaine, au ND Teatro, Paraguay 918, dans le quartier de Retiro.

© Denise Anne Clavilier


Pour aller plus loin :

lire l’article de Página/12 aujourd’hui
lire l’article de La Nación du 8 février dernier
voir la présentation du spectacle sur le site Internet du groupe

lundi 4 septembre 2023

Prochain hommage à la compagne de Atahualpa Yupanqui, compositrice de plusieurs de ses chansons [à l’affiche]

 

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Cette semaine, du 7 au 9 septembre 2023, dans la ville de Córdoba, où il était né, se tiendra un congrès académique autour de l’œuvre de Atahualpa Yupanqui, le grand poète, le grand maître de ce qu’on appelle en Argentine l’Intérieur au 20e siècle (l’Intérieur c’est tout le pays sauf Buenos Aires).

Cette première édition de cette manifestation culturelle de haut niveau rendra un hommage à la compagne de l’artiste, une artiste elle-même, puisqu’elle a composé, sous un pseudonyme masculin, Pablo del Cerro, un bon nombre de ses chansons.

Nennette Pepín Fitzpatrick a travaillé et vécu incognito, dans l’ombre du grand homme, alors qu’elle est en partie responsable de son succès et de sa renommée.

Entrée libre et gratuite dans les deux lieux où se tiendront les rencontres, à Córdoba intra-muros et en dehors de la ville, au Cerro Colorado, l’un des meilleurs atouts naturels de la région.

© Denise Anne Clavilier


Pour aller plus loin :
lire l’article de Página/12
lire la communication officielle de la fondation Atahualpa Yupanqui qui co-organise l’événement
lire le communiqué de présentation sur le site Internet du ministère de la Culture provincial

mercredi 23 août 2023

Le Festival de Tango commence à Buenos Aires [à l’affiche]


Aujourd’hui, commence le Festival de Tango officiel de Buenos Aires dont c’est la 30e édition.

Avec son centre principal situé à La Boca, au centre culturel La Usina del Arte, la manifestation se déploie cette année dans toute la ville. Les spectacles, milongas, projections, conférences, ateliers, cours et autres activités occuperont jusqu’à trente lieux différents tout au long des dix jours du festival. Une durée plus courte qu’il y a quelques années, quand la manifestation durait une bonne quinzaine.

Au programme, très chargé, on notera un hommage au poète Horacio Ferrer, qui aurait eu 90 ans en juin dernier et un autre hommage, en forme de spectacle, à la chanteuse et actrice Tita Merello, une des figures préférées de ces rappels historiques.

Quelques artistes bien connus des lecteurs fidèles de Barrio de Tango seront présents, notamment le chanteur Walter Laborde, dit El Chino.

Le quotidien de la droite catholique réactionnaire
est le seul quotidien national à avoir mis l'événement
à la une
En haut, une photo de l'un des supermarchés pillés
dans cette folle journée d'hier
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Le festival se déroule cette année dans une atmosphère fort désagréable, au milieu d’une campagne électorale assez peu reluisante, elle-même éclaboussée par un nombre effarant de faits divers tous plus terribles les uns que les autres, depuis ce féminicide dont on parle encore il y a un mois jusqu’au saccage et au pillage d’un grand nombre de supermarchés hier, un peu partout dans le Gran Buenos Aires.

Comme toujours le festival se mêle au Mundial del Tango, la compétition internationale de danse qui fait référence pour le tango, avec ces trois catégories vedettes, le tango-salón avec un concours pour les danseurs jeunes et et un autre pour les moins jeunes, et le tango de scène, réservé aux professionnels.

La plupart des activités sont gratuites. Pour plusieurs spectacles, les places doivent être réservées à l’avance en ligne avec une quantité limitée par personne.

© Denise Anne Clavilier


Pour aller plus loin :

visiter la page du festival sur le site des festivals officiels de Buenos Aires.