Depuis 2005, l'Argentine
n'avait plus d'évêque aux Armées. En effet, le prélat désigné
était suspect aux yeux de Néstor Kirchner de sympathie pour la
dictature militaire et pour les méthodes d'assassinat mises en
œuvres (contre la politique libertaire en matière de mœurs
attribuée à Kirchner, il aurait utilisé une citation évangélique
qui faisait allusion à des mises à mort par noyade qui ont été
assimilées aux vols de mort du Plan Condor). Par décret, le
président avait donc empêché l'évêque de prendre possession de
son diocèse, ce qui est possible dans un pays où l'Eglise n'est pas
séparée de l'Etat, où les nominations doivent se faire d'un commun
accord entre le Saint-Siège et le Gouvernement, où c'est l'Etat qui
salarie les membres du clergé catholique (comme en Belgique par
exemple ou les départements concordataires dans l'est de la France) et où un évêque a rang de sous-secrétaire d'Etat au
regard du protocole comme à celui des émoluments sur les deniers
publics. L'Eglise n'avait jamais accepté ce décret présidentiel,
intervenu après l'accord sur la nomination, à cause d'un
courrier envoyé par le prélat au ministre de la Santé et dans lequel il
manifestait son désaccord éthique avec des décisions gouvernementales. Et comme il ne faisait pas bon
être dans l'opposition sous les Kirchner, surtout si on appartenait
au clergé, soupçonné a priori de pencher à droite...
Achives La Nación |
Après le retrait pour
limite d'âge de l'évêque aux Armées empêché, un simple prêtre
avait assumé la fonction au titre d'un vicariat général. Il se
trouve que ces évêchés thématiques et non pas territoriaux ont
été développés par Jean-Paul II dans tous les pays et surtout les
pays démocratiques. La France dispose elle aussi d'un évêque aux
Armées qui assure l'autorité hiérarchique sur tous les aumôniers
catholiques dans les régiments et les écoles militaires du pays. La
création d'un tel diocèse n'a donc rien à voir avec une quelconque
légitimation de généraux putschistes, comme tâche de le suggérer
Washington Uranga, sur Página/12, avec ses éternels procès
d'intention envers l'Eglise.
Hier, François a désigné
un nouvel ordinaire pour les militaires, à la suite d'une consultation qui se réalise entre Rome et le ministère des Affaires étrangères qui est aussi celui des cultes, dirigé par la diplomate de carrière Susana Malcorra.
L'élu est l'actuel évêque de Cruz del Eje, Monseigneur Santiago Olivera, dans la province de Córdoba. C'est lui qui vient de mener à bon terme la canonisation du Cura Brochero, célébrée à Rome en octobre dernier, le tout premier saint argentin (voir les articles que j'ai consacrés à ce très beau personnage populaire de la fin du dix-neuvième siècle). Or Santiago Olivera est un prélat jeune, plutôt ouvert et simple, proche des fidèles, un pasteur qui porte sur lui l'odeur du troupeau, pour reprendre une expression devenue fameuse du pape au Jeudi Saint 2013 à la basilique Saint-Pierre du Latran.
L'élu est l'actuel évêque de Cruz del Eje, Monseigneur Santiago Olivera, dans la province de Córdoba. C'est lui qui vient de mener à bon terme la canonisation du Cura Brochero, célébrée à Rome en octobre dernier, le tout premier saint argentin (voir les articles que j'ai consacrés à ce très beau personnage populaire de la fin du dix-neuvième siècle). Or Santiago Olivera est un prélat jeune, plutôt ouvert et simple, proche des fidèles, un pasteur qui porte sur lui l'odeur du troupeau, pour reprendre une expression devenue fameuse du pape au Jeudi Saint 2013 à la basilique Saint-Pierre du Latran.
Annonce dans L'Osservatore Romano, daté du 29 mars 2017 (mais paru hier après-midi) |
Santiago Olivera est
d'ailleurs actuellement dans la Ville Eternelle et doit être reçu
demain par le Pape François auquel il est lié par leur passé
commun dans l'Eglise argentine et au sein de la Conférence
épiscopale du pays.
Página/12, qui déteste
tout ce qui est militaire autant que ce qui est catholique, voit dans cette nomination un signe
politique envoyé par François en faveur de l'alliance de gouvernement Cambiemos et de la ligne
suivie par Mauricio Macri, qu'il a en ligne de mire depuis la semaine
dernière, puisque le Président argentin n'a pas participé aux
célébrations du 24 mars, jour hommage aux victimes de la Dictature
militaire de 1976-1983.
Le ton est plus
raisonnable dans La Nación, sous la plume de Mariano de Vedia, l'un
des chroniqueurs religieux de la rédaction, et sur le site Internet de AICA, l'agence de presse catholique liée à la Conférence
épiscopale argentine.