jeudi 21 mars 2019

Le gouvernement pourrait perdre l’appui du patronat agraire [Actu]

"Vache versant une larme", dit le gros titre
Dans la manchette (haut, droite) : "Les taux montent et le dollar aussi"

Hier après-midi, heure argentine, les trois grands quotidiens nationaux de droite se faisaient l’écho de la grogne du patronat agraire, le plus traditionnel et le plus puissant en Argentine (et en Amérique du Sud en général), contre l’actuel gouvernement. Il s’agissait d’une sorte de table-ronde diffusée par la télévision de la Sociedad Rural où des dirigeants actuels et passés du secteur disaient leur inquiétude face à l’évolution de l’Argentine et leur rancœur envers un président dont ils avaient appuyé la candidature, qu’ils avaient soutenu et qui venaient de leur remettre les taxes à l’exportation instaurées par Cristina Kirchner, contre laquelle ils avaient bataillé pendant huit ans, en usant de tous les moyens et même de tous les mensonges.

Ce qui est le plus troublant, c’est de voir que le retour des taxes leur crée plus de soucis que la situation globale du pays, avec cette dette envers le FMI et la politique de rigueur dont souffrent la classe moyenne et les plus défavorisés. Ces grands patrons reprochent en particulier à Mauricio Macri la priorité qu'il a donnée à la finance, au lieu de privilégier les intérêts agro-industriels qui sont les leurs propres et aussi ceux de leur secteur. Ce qui est vrai : les secteurs agraires, agro-industriels et industriels tout court payent un lourd tribut à la crise en ce moment.

Et alors que Página/12 a mis l’information en une, avec cette vache (emblème de l’élevage, la partie la plus puissante du secteur agraire) qui pleure, sur les autres titres, on a beau faire de longues recherches, impossible de retrouver ce matin les articles d’hier sur Clarín, La Nación et La Prensa. Sans doute préfèrent-ils ne pas trop insister sur ce lâchage symptomatique.

L’organisation patronale de l’industrie a déjà marqué ses distances avec le gouvernement il y a quelque temps à cause de l’ouverture des frontières à l'importation qui a mis en difficulté beaucoup de petites et moyennes entreprises qui ont perdu des parts de marché à cause de cette concurrence sauvage, concurrence déloyale puisqu'elle fait s'affronter des produits qui ne répondent pas aux mêmes normes techniques et sociales (parce que l'Argentine est l'un des pays les plus avancés de son continent dans ce domaine). Cette fragilisation des PME empêche de stabiliser le tissu industriel et manufacturier dans le pays. Les patrons de l'industrie locale avaient eux aussi soutenu Mauricio Macri contre Cristina Kirchner, dont ils se sont aperçus par la suite qu’elle n’avait peut-être pas que des défauts.

Quelques sondages viennent de révéler que Mauricio Macri, s’il se représente, ce qui semble acquis, pourrait bien perdre l’élection d’octobre dès le premier tour et à coup sûr au second. Il peut encore se passer bien des choses avant le scrutin. Pour le moment, on n’a aucune idée de qui se présentera face à Macri pour la gauche de gouvernement, qui est encore très loin d’être en ordre de bataille !

Pour aller plus loin :
lire l’article de Página/12, qui intègre, ô exception ! la vidéo de la table-ronde.