"Vache versant une larme", dit le gros titre Dans la manchette (haut, droite) : "Les taux montent et le dollar aussi" |
Hier après-midi, heure argentine, les trois grands quotidiens
nationaux de droite se faisaient l’écho de la grogne du patronat
agraire, le plus traditionnel et le plus puissant en Argentine (et en
Amérique du Sud en général), contre l’actuel gouvernement. Il
s’agissait d’une sorte de table-ronde diffusée par la télévision
de la Sociedad Rural où des dirigeants actuels et passés du secteur
disaient leur inquiétude face à l’évolution de l’Argentine et
leur rancœur envers un président dont ils avaient appuyé la
candidature, qu’ils avaient soutenu et qui venaient de leur
remettre les taxes à l’exportation instaurées par Cristina
Kirchner, contre laquelle ils avaient bataillé pendant huit ans, en
usant de tous les moyens et même de tous les mensonges.
Ce qui est le plus
troublant, c’est de voir que le retour des taxes leur crée plus de
soucis que la situation globale du pays, avec cette dette envers le
FMI et la politique de rigueur dont souffrent la classe moyenne et
les plus défavorisés. Ces grands patrons reprochent en particulier à Mauricio Macri la priorité qu'il a donnée à la finance, au lieu de privilégier les intérêts agro-industriels qui sont les leurs propres et aussi ceux de leur secteur. Ce qui est vrai : les secteurs agraires, agro-industriels et industriels tout court payent un lourd tribut à la crise en ce moment.
Et alors que Página/12
a mis l’information en une, avec cette vache (emblème de
l’élevage, la partie la plus puissante du secteur agraire) qui
pleure, sur les autres titres, on a beau faire de longues recherches,
impossible de retrouver ce matin les articles d’hier sur Clarín,
La Nación et La Prensa. Sans doute préfèrent-ils ne pas trop insister sur ce lâchage symptomatique.
L’organisation
patronale de l’industrie a déjà marqué ses distances avec le
gouvernement il y a quelque temps à cause de l’ouverture des
frontières à l'importation qui a mis en difficulté beaucoup de petites et moyennes
entreprises qui ont perdu des parts de
marché à cause de cette concurrence sauvage, concurrence déloyale puisqu'elle fait s'affronter des produits qui ne répondent pas aux mêmes normes techniques et sociales (parce que l'Argentine est l'un des pays les plus avancés de son continent dans ce domaine). Cette fragilisation des PME empêche de stabiliser le tissu industriel et manufacturier dans le pays. Les
patrons de l'industrie locale avaient eux aussi soutenu Mauricio Macri contre
Cristina Kirchner, dont ils se sont aperçus par la suite qu’elle
n’avait peut-être pas que des défauts.
Quelques sondages
viennent de révéler que Mauricio Macri, s’il se représente, ce
qui semble acquis, pourrait bien perdre l’élection d’octobre dès
le premier tour et à coup sûr au second. Il peut encore se passer
bien des choses avant le scrutin. Pour le moment, on n’a aucune
idée de qui se présentera face à Macri pour la gauche de
gouvernement, qui est encore très loin d’être en ordre de
bataille !
Pour aller plus loin :
lire l’article de Página/12, qui intègre, ô exception ! la vidéo de la
table-ronde.