Le
prêtre et historien Juan Guillermo Durán, un vrai scientifique
rigoureux, a sorti au mois de mai un livre très originale : une
biographie du Negro Manuel (circa 1604-1686), un esclave né en
Guinée et affranchi pour 250 pesos (1), qui a dédié sa vie à
veiller sur la petite statue de la Vierge Marie dont la vénération
a donné naissance à la ville de Luján, dans la province de Buenos
Aires, après un miracle (2) qui s’est produit en mai 1630 (3) et
dont l’historicité a été démontrée dans la deuxième partie du
dix-neuvième siècle, le prêtre des Missions étrangères de Paris,
le père Georges Marie Salvaire (1847-1899).
Mgr
Juan Guillermo Durán, éminent membre du prestigieux comité
d’histoire de l’Église, est aussi le postulateur de la
canonisation du Negro Manuel, procédure lancée par le cardinal
Poli, archevêque de Buenos Aires, et Mgr Anunciado Serafini,
archevêque de Mercedes-Luján.
Les prières proposées à la piété privée des fidèles pour l'un et l'autre candidat Cliquez sur l'image pour une haute résolution |
L’ouvrage
de 298 pages fait donc partie du travail qu’un postulateur doit
faire pour que le vénérable serviteur de Dieu dont il sert la cause
soit connu des fidèles et que ceux-ci recourent à lui dans leurs
prières privées. Le Negro Manuel a été déclaré Serviteur de
Dieu en août dernier, le dimanche même des PASO. Il manque encore
un miracle reconnu pour sa béatification et un second pour sa
canonisation. D’où l’importance de la prière privée des
fidèles.
Le
livre est en vente à la maison d’édition, une maison
confessionnelle, au prix de 738 pesos argentins.
Souvent
considéré comme une invention folklorique hors de l’Église
catholique, ce personnage historique est assez important dans le
roman national argentin, car le pays a longtemps, contre toute
évidence, nié l’existence de l’esclavage et des Africains sur
son sol. Sur le plan spirituel, c’est un modèle d’humilité et
de spiritualité mariales. Il pourrait devenir le saint patron des
sacristains au moins en Argentine sinon dans le monde entier.
Image pieuse de Luján avec la phrase attribuée au Negro Manuel : "J'appartiens à la Vierge, c'est tout" En haut, la statue de la Vierge telle qu'elle est aujourd'hui |
La
cause en béatification du Père Salvaire a été ouverte le même
jour que celle pour le Negro Manuel. Mgr Durán est aussi le
postulateur de cette autre cause. Les deux procès sont intimement
liés l’un à l’autre sur le plan historique et spirituel.
Pour
aller plus loin :
lire
la dépêche de AICA (l’agence de presse catholique argentine)
lire
le communiqué de l’archidiocèse de Mercedes-Luján
consulter
la page du livre sur le site Internet des Editions Agape
voir
les données sur le Negro Manuel sur la page Candidats du site Inteernet Causas
de los Santos en Argentina.
(1)
Le prix normal d’un esclave mâle en bonne santé.
(2)
Le terme de miracle est celui de l’époque. L’événement a
consisté en l’arrêt sur place du chariot sur lequel la petite
statue en terre cuite, produite à Rio de Janeiro et destinée à une
petite chapelle privée du nord-est argentin (Santiago del Estero),
se trouvait. Le chariot n’a pu repartir que lorsque la statue fut
déchargée. Le même type d’incident s’est produit à nouveau il
y a quelques années avec une copie de la statuette. La statue
originale est exposée dans le chœur de la basilique de Luján, qui
s’élève sur le lieu où la tradition situe la tombe du Negro
Manuel.
(3)
C’est la première fois que je vois citer ce mois de mai. Si c’est
historique, c’est vraiment très lourd sur le plan symbolique.
L’Argentine est censée être née le 25 mai 1810 et son drapeau a
emprunte, par des chemins indirects, les couleurs du manteau de cette
Vierge, qui représente Notre-Dame de l’Immaculée Conception !