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Conférence de presse depuis Kyiv par Zoom |
En Argentine, c’est à Clarín
et à La Nación
que l’on doit cette audace : les deux quotidiens publient
aujourd’hui, sans faire beaucoup de bruit autour de cette première,
le contenu d’une conférence de presse assez longue qu’a tenue
hier le ministre des Affaires étrangères ukrainien, Dmitro Kuleba
(retranscrit Kuleva en espagnol).
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Tout en bas, la correspondante à Rome, Elisabetta Piqué, est retournée en Ukraine un an plus tard et a envoyé un article qui commence en une Cliquez sur l'image pour une haute résolution |
Dans l’édition papier de
Clarín,
l’article, qui n’est pas annoncé en une, occupe pourtant un peu
plus d’une page, dont un encart non négligeable accueille une
belle photo du ministre (canciller
ucraniano).
La Nación,
quant à elle, a choisi la discrétion pour mettre l’Ukraine à la
une, sans annoncer pour autant l’intervention du ministre dans ses
colonnes.
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Une minuscule annonce existe juste en-dessous de la photo de Raquel Welsh Cliquez sur l'image pour une haute résolution ou sortez une loupe ! |
Hier, Kuleba s’adressait donc
par Zoom à des journalistes convoqués par la Société
Interaméricaine de Presse (SIP). Au cours de cette rencontre en
ligne, il a instamment invité les Latino-Américains à ne pas se
tromper sur le sens du conflit en cours et à se mettre « du
bon côté de l’histoire » en « abandonnant leur
neutralité » erronée. En particulier, il a souligné qu’il
prêtait attention à plusieurs signes en politique étrangère,
notamment le fait de voter les condamnations du comportement de la
Russie à l’ONU et le fait de serrer ou non la main de Poutine ou
de Lavrov. Il estime en effet que leurs mains sont tâchées du sang
des civils ukrainiens et on sait jusqu’où Kyiv pousse ses
exigences en matière d’exclusion de toute représentation
officielle russe dans la vie internationale.
Ces déclarations, que les
journalistes argentins ont pris pour leur pays, arrivent au moment où
en effet, le président Alberto Fernández et son ministre des
Affaires étrangères, Santiago Cafiero, sont bien embarrassés
devant une demande de visite officielle que vient de leur adresser
Sergueï Lavrov (qui devant être reçu prochainement à Cuba et au
Venezuela aimerait pousser jusqu’à Buenos Aires et Santiago du
Chili). Or le gouvernement argentin, qui a voté les résolutions de
l’ONU, n’est guère désireux d’accepter cette déplaisante
visite. De là à le dire clairement, il y a un grand pas qu’ils
semblent ne pas être en mesure de faire. Pour compenser l’amertume
de ses propos, Kuleba a tenu à souligner les excellentes relations
qu’il entretient avec Rafael Grossi, qu’il désigne par son
prénom, ajoutant qu’il souhaitait que le diplomate argentin qui
dirige l’Agence internationale de l’Energie atomique puisse lire
cette affirmation dans la presse de son pays. Ce qui est fait !
Ce propos devrait aller droit au cœur des Argentins, qui se sentent
tous très honorés par le prestige mondial qui auréole leur
souriant et sympathique compatriote (qu’on prend souvent à tort
pour un Italien par chez nous).
De surcroît, Dmytro Kuleba a
annoncé que l’Ukraine allait s’occuper cette année de
développer sur les plans culturel, technico-scientifique, économique
et politique, ses jusqu’à présent maigres relations avec
l’Amérique latine (l’année dernière, elle l’a fait auprès
des pays d’Afrique où dont les dirigeants lui ont opposé les
mêmes préjugés anti-impérialistes, avec en prime Wagner rôdant
dans le paysage). En 30 ans d’indépendance, l’Ukraine ne s’était
pas encore vraiment tournée vers cette partie du globe. Aujourd’hui,
le fait est que sa diplomatie s’est mise en ordre de marche pour se
déployer à l’échelle de la planète. L’Argentine, le Chili
comme le Pérou ont parcouru le même chemin dans les pénibles
décennies qui ont suivi leur propre indépendance, à cette
différence près qu’ils ont dû faire face non pas à une guerre
extérieure mais à de féroces et longues guerres civiles.
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En haut, à droite, en-dessous du titre, appel de l'article sur l'orchestre ukrainien Cliquez sur l'image pour une haute résolution |
Sans surprise, on ne trouve pas
un mot de cette conférence de presse dans Página/12,
qui n’y a probablement pas participé et reste solidement planté
dans le camp soi-disant anti-impérialiste qui reconnaît la Russie
comme son champion ! Leur profonde rancune envers les terribles
États-Unis
de la Guerre froide leur interdit d’entendre en 2023 le
raisonnement du droit international.
Et maintenant, à quand
l’interview exclusive de Zelensky lui-même comme partout ailleurs
dans les pays démocratiques ?
© Denise Anne Clavilier
La Prenssa
a fait un choix singulier : elle met en
une
non pas le ministre ukrainien dont elle ne dit pas un mot mais le
travail de l’Orchestre philharmonique d’Ukraine qui a enregistré
en 2021 des morceaux rarissimes de César Franck avec la
participation de deux musiciens argentins. Le CD sort en ce moment !
Pour aller plus loin :