samedi 18 mai 2019

Coup de théâtre : Cristina y va mais au second rang ! [Actu]

L'image construite par le Partido Justicialista pour soutenir la formule
avec ce slogan : l'unité est le chemin.
Rassembler la famille péroniste ne sera pas une mince affaire
mais c'est la condition sine qua non du succès électoral dans le paysage politique argentin actuel

Malgré le maintien de l’ouverture de son procès au 21 mai, la semaine prochaine, extorqué à la Cour suprême par le gouvernement (1), l’ex-présidente Cristina Kirchner a annoncé dans la matinée qu’elle se présenterait auprès d'un péroniste qui avait pris ses distances avec elle, Alberto Fernández, aux primaires, les PASO, qui auront lieu en août, pour un mandat vice-présidentiel (pour elle) et présidentiel (pour lui).

C’est une énorme surprise, même si on l’a vu, lui,:monter assez souvent en première lignes ces derniers jours pour soutenir la sénatrice et ex-présidente et critiquer le gouvernement actuel mais tout le monde pensait bien sûr que si elle se lançait, c’était pour la présidence. Et ce sera pour présider le Sénat où elle siège, à nouveau, depuis près de deux ans. La surprise est d’autant plus grande qu’il est arrivé à Fernández de critiquer la politique de Cristina et vertement.

Panique dans les rangs de la majorité, qui avait vraiment tout fait pour que rien de ce genre n’arrive. On va voir maintenant comment vont évoluer les sondages et quels crocs-en-jambe les deux camps se réservent l’un à l’autre.

Quand Cristina avait succédé à son mari Néstor à la présidence, son opposition, très machiste, y compris du côté des femmes, avait prétendu que c’était lui qui tirait les ficelles. Et puis Néstor Kirchner était mort, très tôt au cours du premier mandat de sa femme, et on avait dû se rendre à l’évidence : la politique, c’était bien la sienne. Aujourd’hui, cette opposition d’hier devenue majorité d’aujourd’hui (et peut-être pas de demain) ricane à nouveau en disant que si Cristina est candidate dans la formule, c’est que c’est elle qui conduira la politique d’un Alberto Fernández président pantin. Ben voyons !

Felipe Solá qui avait déjà annoncé sa candidature à la candidature vient d’y renoncer publiquement pour se rallier à la formule Fernández-Kirchner (2). Et Massa, qui semble naviguer à vue depuis six ans, a publié une déclaration très conciliante. Lui aussi a été, de manière éphémère, premier ministre de Cristina, avant de se rapprocher de Macri après l’élection de celui-ci puis de prendre ses distances.

Pour un coup de théâtre, c'est réussi. Du côté des kirchneristes, ce n’est pas le premier. Ils savent de temps à autre assommer ainsi pour un bon moment leurs adversaires politiques. Du côté de Mauricio Macri, les politiques sont plus prévisibles.

Pour aller plus loin :
lire l’article de Clarín qui dit que Cristina a renoncé à se présenter et proposé la place à Fernández (elle n’avait jamais annoncé de candidature jusqu’à présent)



(1) La preuve que la Cour suprême a été mise sous pression par le gouvernement est la précipitation avec laquelle elle a tempéré son arrêt, qui réclamait un supplément d’enquête, en publiant un communiqué à l’état de brouillon et en précisant que l’ouverture précoce du procès pourrait par la suite entraîner des nullités procédurales, que ce pouvait donc être un procès pour rien. Du coup, Cristina entre dans la bataille, via une vidéo de 12 minutes sur les réseaux sociaux, avant même de se présenter devant ses juges mardi matin. Avocate de profession, elle connaît la musique et ses conseils auront beau jeu au premier jour d’audience pour dire tout ce qu’ils pensent du choix de la date d’audiencement !
Or sur le plan politique, Cristina marche sur du velours : la politique néolibérale de la majorité de droite a envoyé le pays et ses classes populaires et moyennes (dans lesquelles se trouve le gros de son électorat) au tapis en deux ans et demi de mandat : perte de travail, perte d’exploitation pour les indépendants, crédits inaccessibles pour tous les particuliers qui ne peuvent pas acheter sans et une bonne partie des professionnels et des PME, change prohibitif avec le dollar interdisant d’aller passer des vacances à l’étranger, diminution ou disparition de toutes les aides sociales, cherté des médicaments notamment pour les retraités et les handicapés, réduction de la vie culturelle et scientifique avec des budgets en berne partout, fort mécontentement dans le monde du cinéma, de l’édition, de la recherche, de l’éducation et de la santé, des écoles publiques qui ne chauffent pas l’hiver et d’autres qui explosent parce que les infrastructures ne sont pas entretenues et déclarations de nombreuses personnalités médiatiques, politiques et économiques disant déçus de la politique de Macri.
(2) Si cette formule l’emporte en octobre, ce qui n’est pas invraisemblable, les deux mandataires, qui n’ont aucun lien de parenté, porteront le même patronyme. Elle s’appelle elle aussi Fernández. Kirchner est le nom de son mari (elle est en fait Cristina de Kirchner, ou comme la nomme Página/12 délibérément : CFK, Cristina Fernández de Kirchner).