jeudi 16 mai 2019

Pour le fair-play, peut mieux faire [Actu]

"Vous êtes sur les nerfs ?"
ou "Ils sont sur les nerfs ou quoi ?", fait mine de s'inquiéter Página/12
au sujet de cinq membres d'un groupe de réseau social imaginaire
baptisé "Bureau Judiciaire"
regroupant les ténors de la majorité cités par leur prénom,
avec un certain Mauricio comme administrateur

Ce n’est pas un jeu, tout le monde est d’accord là-dessus. Mais il y a des règles tout de même, en démocratie. Et parmi ces règles, l’impartialité de la justice ou, au moins, sa capacité à prendre des décisions sans chercher à plaire au gouvernement tient une place primordiale. Et c’est là que ça coince depuis avant-hier en Argentine, où le pouvoir et ses alliés ne digèrent pas la décision de la Cour Suprême de demander un complément d’enquête sur le dossier de Cristina Kirchner et de quelques uns de ses ministres dans une affaire de travaux publics avec dessous-de-table.

"La Cour indigne", dénonce le gros titre avec des grosses ficelles
fond rouge et... photo du chef de l'Etat !
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Depuis que la décision est connue, présidents, ministres et députés de la coalition rivalisent de petites phrases assassines à l’endroit des juges, des inculpés ou de leurs défenseurs. Spectacle pitoyable après une chute présidentielle abyssale dans les sondages et huit défaites de la majorité dans diverses élections locales, où certaines provinces ont déjà élu leur nouveau gouverneur ou organisé les PASO (primaires obligatoires) locales, dont la dernière, dimanche, a été retentissante (le gouverneur de l’opposition nationale a été élu à près de 55 % dès le premier tour). La situation est si dangereuse que plusieurs caciques de la majorité envisagent sérieusement et publiquement que Mauricio Macri soit obligé de renoncer à se présenter ou doive participer aux PASO en ayant des concurrents de Cambiemos, sa coalition électorale puis de gouvernement.

A la une de Página/12, le duo humoristique Daniel Paz (dessin) et Rudy (texte) se régale de ces déclarations violentes et assez cyniques (tant elles trahissent l’acharnement de la majorité sur l’ancienne présidente et les siens) et cela donne une vignette qui exagère à peine.

Le ministre (qui ressemble beaucoup à Germán Garavano, le ministre de la Justice) :
Nous n’aimons pas l’arrêt de la Cour parce qu’il n’est pas impartial.
Il est en faveur de Cristina
La journaliste : Et quand donc un arrêt est-il impartial ?
Le ministre : Quand il est en notre faveur.
Traduction © Denise Anne Clavilier

Toute la presse commente ce dernier avatar de la campagne électorale et c’est peu dire que les journaux de droite sont remontés contre la Cour qui a sans doute ouvert la course électorale à Cristina, qui aurait eu du mal à se présenter si elle avait dû en même temps comparaître devant un tribunal, comparution qui, dans l’état, n’est que reportée à plus tard et certainement pas annulée.


Pour aller plus loin :