C'est
la cent-quatorzième personne qui retrouve son identité familiale de
naissance en Argentine après les rapts de bébé sous la dictature de 1976-1983. Il est un musicien, c'est un auteur-compositeur interprète de jazz, qui
enseigne aussi au conservatoire et dirige l'école municipale de
musique de Olivarría, une ville de la Province de Buenos Aires. On
le connaît sous le nom de Ignacio Urban. A sa naissance, le 26 juin
1978, à l'hôpital militaire de Buenos Aires, où fonctionnait alors une
maternité clandestine pour les prisonnières politiques, sa mère,
Paula Carlotto Barnes lui avait donné le prénom de Guido. On sait
désormais le nom réel de son père, un militant clandestin comme sa
mère : c'est Walmir Oscar Montoya, lui aussi disparu sous la
dictature.
C'est
donc le petit-fils de la présidente de Abuelas de Plaza de Mayo qui
a été identifié.
Hier,
lors d'une grande conférence de presse, la grand-mère a elle-même
annoncé la nouvelle.
Tous
les amoureux de l'Argentine peuvent se réjouir aujourd'hui car
Estela de Carlotto a beaucoup donné de sa personne pour cette cause.
Toutes les grand-mères méritent de retrouver leurs petits-enfants
mais quand c'est à elle que cela advient, c'est un peu à tous les
Argentins de bonne foi aussi tant elle a su incarner ce combat et lui
donner un visage avenant et pacifique.
C'est
le grand sujet de Página/12 aujourd'hui avec une multitude
d'article, sur la grand-mère, sur le petit-fils, qui se posait des
questions depuis plusieurs années et a fait le premier pas en juin
dernier, sur la tante, Claudia Carlotto, qui est à la tête de la
Commission nationale pour le Droit à l'Identité (CONADI) et qui, à
ce titre, a eu à annoncer hier la nouvelle à son neveu, comme elle
le fait pour toutes les personnes qui se sont manifestées
spontanément chez Abuelas, à cette seule différence qu'il a fallu
opérer par téléphone à cause des fuites immédiates qui se sont
produites au tribunal, d'où la nouvelle a été lancée à la presse
et au public avec tous les détails qui d'habitude sont gardés
confidentiels pour permettre à la personne identifiée de prendre
les choses à son rythme et selon ses besoins psychiques.
Comme
il est musicien, il s'était rapproché du programme culturel de
Abuelas Música para la Identidad, pour lequel il a écrit au moins
une chanson, le 24 mars dernier. Il a été recueilli par des
personnes de bonne foi qui n'avaient rien à voir avec le régime
répressif de la dictature. Il a donc été élevé dans des idées
qui ne le tiennent pas opposé à sa famille, comme cela arrive
parfois lorsque les enfants ont été adoptés (frauduleusement) par
des sbires de la Junte.
Mais
ce n'est pas comme d'ordinaire que Página/12 qui fait la fête
aujourd'hui. Toute la presse est au diapason. Et la Présidente a
bien entendu félicité officiellement (et de façon privée aussi)
Abuelas. Et elle a pleuré lorsqu'elle a su, en appelant le siège d'Abuelas, que la nouvelle, qui courait déjà dans tous les médias, était exacte.
Pour
en savoir plus :
lire
l'article où La Nación voit -enfin- en Estela de Carlotto un symbole de la Justice
lire
l'article principal de La Prensa, dont la une n'est pas disponible.