vendredi 29 août 2025

Litto Nebbia reprend ses classiques à La Trastienda [à l’affiche]

Litto avant et maintenant sur ce bandeau de La Trastienda


L’auteur-compositeur interprète Litto Nebbia, un rocker d’origine qui explore depuis de nombreuses années tous les genres de la musique populaire argentine et sud-américaine, revient sur scène demain, samedi 30 août 2025, à La Trastienda, une salle de concert du quartier de San Telmo, à Buenos Aires.

Il avait disparu du paysage depuis une bonne année à cause d’une jambe cassée. Il fallait au moins cela pour tenir éloigné de la scène cet homme hyper-actif qui touche à tout en matière de musique et dirige en plus sa propre maison de production de disques, Melopea, du nom d’un de ses premiers succès.

Or c’est justement l’anniversaire de ce disque de jeunesse qu’il fêtera demain en reprenant les titres de cet album qui a marqué sa carrière et la mémoire du public.

Litto Nebbia est ici photographié à son piano
dans le studio de Melopea Discos, à Villa Urquiza
dans l'ouest de Buenos Aires
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Le récital est aussi programmé la semaine suivante. Et pourtant, les places sont chères à cause du désastre économique que Javier Mileí s’acharne à imposer au pays qui l’a élu : 20 000 $ ARG par personne ! Et rien n’empêchera cette salle d’être pleine, avec un public heureux de retrouver un artiste increvable et de première importance dans le paysage culturel argentin.

© Denise Anne Clavilier


Pour en savoir plus :

lire l’interview donnée à Página/12 et publiée il y a une semaine dans le supplément culturel quotidien dont elle constitue la Une
consulter le site de La Trastienda.

Ajout du 1er septembre 2025 :
Página/12 a rendu compte dans ses colonnes du formidable concert de samedi soir. J’aurais aimé y être !

jeudi 28 août 2025

Le chamamé est en deuil : Raúl Barboza s’en est allé [Actu]

Raúl Barboza, il y a de nombreuses années


Né à Buenos Aires d’un couple guaraní originaire de Curuzu Cuatiá, petite ville fondée en 1812, à l’époque de l’indépendance, par le général Manuel Belgrano dans la province de Corrientes, Raúl Barboza aura été l’un des grands représentants du chamamé, la musique traditionnelle du berceau familial, avec son accordéon, qui est l’instrument emblématique de ce genre musical auquel son père avait contribué et qu’il lui avait transmis.

Página/12 a préféré une photo emblématique
du scandale en cours : ces chaises roulantes sur Plaza de Mayo
En gros titre : "Les plus cruels des dessous-de-table"
En haut, à droite, la fuite honteuse du député en moto
En bas, à gauche, un petit titre : "L'accordéon en pleurs"
pour Barboza (c'est maigre, non ?)
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Le musicien, compositeur et interprète, était âgé de 87 ans. Installé à Paris depuis près de quarante ans, il s’est éteint hier dans son appartement de la Montagne Sainte-Geneviève, à deux pas du Panthéon. Cet exil explique sans doute le peu de place que lui laisse la presse argentine d’aujourd’hui, qui préfère titrer sur le caillassage en règle qu’ont subi hier Javier Mileí, son odieuse sœur et leur complice, José Luis Espert, dans les rues de Lomas de Zamora, dans la province de Buenos Aires, alors qu’ils prétendaient s’y faire acclamer (1).


Concert de Raúl Barboza à Buenos Aires en 2017
au Centro Cultural Kirchner

Pourtant Raúl Barboza n’avait pas trahi l’Argentine. a chaque été austral, il y retournait et ne manquait pas d’y faire une tournée et de participer à des festivals locaux, jusqu’à ce que le covid vienne chambouler la vie des artistes (et des autres).

Choix éditorial similaire à Clarín :
Le gros titre porte sur le scandale et sur les réfutations
pas très crédibles de Mileí, qui se défend d'être impliqué
En-dessous : la photo du caillassage à Lomas de Zamora
En haut, à droite du titre, Raúl Barboza a droit à sa photo
(en tout petit)
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Il nous laisse sa musique et ses disques, qui ne sont pas très difficiles à trouver en France. Il a d’ailleurs reçu chez nous de nombreuses récompenses du métier. Il a même été décoré, ce dont les journalistes ne semblent pas peu fiers aujourd’hui dans leurs nécrologies.

© Denise Anne Clavilier


Pour aller plus loin :

lire l’article de Página/12 qui n’a pas daigné lui consacrer la Une de son supplément culturel quotidien (à ma plus grande surprise, je l’avoue)
lire l’article de Clarín
lire l’article de La Nación




(1) Ils ont osé ce déplacement de campagne électorale en terre d’opposition en plein milieu d’un gigantesque scandale de dessous-de-table dont il est prouvé que le président en avait parfaitement connaissance, qu’il a laissé faire et que sa sœur en a largement bénéficié, le tout au détriment des handicapés dont ce petit clan mafieux est en train de détruire tous les droits et toutes les aides sociales. Cela fait peut-être un peu beaucoup, non ?
La colère des habitants qui les ont vu se pavaner dans leur rue a été telle que le couple présidentiel (puisque c’est bien ce que sont le frère et la sœur) et leur sycophante préféré ont dû fuir sans gloire, le couple en rentrant de manière précipitée dans l’habitable de sa voiture pour retourner dare-dare à la résidence de fonction et le député chauve en enfourchant, toute honte bue et sans casque, une moto qui a filé à toute allure pour semer les mécontents !

vendredi 22 août 2025

L’opposition s’oppose : le Sénat rejette 5 décrets et 2 veto présidentiels [Actu]

Sur fond de photo du Congrès, Página/12 présente
la victoire parlementaire comme un résultat de football
En haut, un nouveau scandale impliquant Mileí
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La Chambre basse s’était déjà prononcé il y a quelques semaines sur un certain nombre de décrets et de veto de Javier Mileí (voir mon article du 7 août dernier). Pour que les lois invalidées par le président retrouvent leur vigueur et que les décrets exécutifs (ce qu’on appellerait des ordonnances en droit français) soient définitivement écartés, il fallait que le Sénat vote.

Hier, jusque tard dans la nuit, la Chambre haute a débattu et voté et le groupe LLA, fidèle à Mileí, s’est retrouvé tout seul, tous les autres votant dans l’autre sens : les gauches, dont les péronistes toujours fidèles à la ligne de Cristina Kirchner, le centre, la droite libérale et les régionalistes.

"Le Sénat, grand bastion de l'immobilisme populiste",
vomit le quotidien de la droite catholique réactionnaire
Financer la recherche et réguler le fonctionnement d'un hôpital
de pointe, c'est "populiste" pour cette rédaction
En bas, la barbarie dont il est question fait référence
à la violence d'un groupe de supporters de foot
qui ont attaqué un carré de supporters chiliens
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Résultats des courses : le budget des universités est remis en selle et la loi qui concernait le grand hôpital pédiatrique Garrahan est désormais validée. Si Mileí respecte la constitution, ce qui n’est pas assuré. Et il faut encore qu’il les signe et qu’elles soient publiées au Bulletin officiel de la République argentine.

Le gros titre et les photos centrales portent
sur le scandale du match de foot qui se termine
en massacre entre des Argentins et des Chiliens
Notre affaire est traitée tout en bas :
"Avec plus de voix qu'attendu, l'opposition au Sénat
renverse cinq veto de Mileí"
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Du côté des décrets, les organismes supprimés devraient ressusciter, si, là encore, le président respecte la constitution. Les principaux organismes régulateurs de l’économie sont remis sur les rails : INTI (industrie), INTA (agriculture), Vialidad (gestion du réseau routier national et sécurité routière) et la Banque de Données génétiques (BNDG), qui permet d’identifier les adultes enlevés à leur famille dans leurs premières années ou à la naissance pendant la dictature militaire des années 1976-1983. Sont aussi remises sur les rails plusieurs institutions culturelles et savantes comme el Instituto Nacional del Teatro (qui soutient les théâtres, les festivals et la création contemporaine), el Instituto Nacional Sanmartiniano, consacré à la mémoire et à la recherche historique sur le général José de San Martín (1778-1850) et dont le siège devait être transformé en un musée inutile et particulièrement mal fichu (vu les dispositions des lieux), ainsi que d’autres instituts d’histoire consacrés à Evita Perón, Juan Manuel de Rosas et Hipólito Yrigoyen. En revanche, le sort de el Instituto Nacional Belgraniano n’a pas fait l’objet d’un débat ni d’un vote et la société savante qu’il abrite continue la construction de son projet alternatif : elle fait les démarches juridiques pour s’instituer en association afin de survivre quelles que soient les décisions que peut prendre l’exécutif national au gré du vent !

Le sort d’autres instituts reste encore à déterminer, comme celui consacré à un pionnier de l’aviation.

"Le Sénat rejette cinq décrets de Mileí
et approuve le financement des universités",
dit le gros titre au-dessus d'une sélection de photos
concernant le drame du stade de foot
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Tout cela rend Javier Mileí furieux. Il aime Donald Trump et il l’imite très bien ! Un vrai gamin incapable de supporter les frustrations… Qui plus est, il semble de plus en plus seul alors que les élections de mi-mandat s’approchent à grands pas.

© Denise Anne Clavilier


Pour aller plus loin :

lire l’article de La Prensa, très critique du vote des sénateurs, comme elle avait critique celui des députés
lire l’article de Clarín

jeudi 14 août 2025

Devinette politique de Miguel Rep [Humour]

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Le jeu du pendu :
Quel président a pendu l’Argentine ?
Suivent trois devinettes pour trois noms qui commencent pas un M
et comptent le même nombre de lettres.


Réponses : Menem, Macri, Mileí (dans ce sens-là, qui est le sens chronologique, ou dans n’importe quel autre, ça n’a aucune importance). Il s’agit des trois présidents de droite depuis le retour de la démocratie. Les trois ont provoqué des flambées d’inflation. Les trois ont endetté le pays. Les trois ont fragilisé l’État providence et les trois ont prétendu avoir sauvé l’Argentine en la réintégrant dans le monde.

© Denise Anne Clavilier


Miguel Rep est l’un des dessinateurs de presse qui travaillent à Página/12. Cette devinette est la publication de ce jour.

Guillermo Villas à la Une de Caras y Caretas de septembre [Disques & Livres]

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Caras y Caretas, le mensuel culturel patriotique du groupe médiatique de gauche Octubre, auquel appartient le quotidien Página/12, consacrera son prochain numéro au champion de tennis Guillermo Villas, qui doit fêter ces jours-ci son 73e anniversaire.

Ce nouveau numéro arrive après celui consacré au pilote de Formule 1 Juan Manuel Fangio… Le sport, le sport !

© Denise Anne Clavilier


Pour en savoir plus :

lire l’éditorial de Felipe Pigna, rédacteur en chef du magazine

mercredi 13 août 2025

Un suspect de meurtre poursuivi malgré la prescription : le parquet contourne l’obstacle [Actu]

Le jeune disparu dans une photo parue dans la presse en 1984


C’est un fait divers qui tient en haleine l’opinion publique argentine depuis le 20 mai dernier, lorsque des ouvriers du bâtiment sont tombés sur des ossements humains dans un petit jardin où ils faisaient des travaux pour construire un nouvel immeuble à Coghlan, un quartier excentré de Buenos Aires. Cette découverte macabre avait tout de suite retenu l’attention des médias parce qu’elle s’est produite sur une parcelle où avait vécu un temps un chanteur très populaire, décédé il y a quelques années. Or dès les premières constatations des techniciens de l’identité judiciaire, Gustavo Cerati, c’est son nom, avait été exonéré de tout soupçon car le corps était bien trop ancien pour correspondre au séjour du musicien à cette adresse. Très vite aussi, l’enquête a pu établir que ces ossements appartenaient à un homme jeune qui avait été tué à l’arme blanche, ce dont le médecin légiste a retrouvé la preuve sur une côte.

La semaine dernière, en faisant un rapprochement ADN, la justice a enfin pu mettre un nom sur cette victime : Diego Fernández Lima (ci-dessus). Au moment de sa mort, c’était un adolescent sans histoire de 16 ans. Il pratiquait le foot dans un club local et il aimait les motos comme tant et tant de ses semblables.

Clarín en parle en Une, à droite, au milieu de la colonne
avec photo du suspect au premier plan
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Il y a 41 ans, peu après le retour à la démocratie, Diego a disparu du jour au lendemain, le 26 juillet 1984 dans l’après-midi. Avant de sortir, il a demandé l’argent du bus à sa mère, il l’a embrassée et il n’est jamais revenu. Pendant de nombreuses années, ses parents ont remué ciel et terre, en vain, pour convaincre le commissariat local d’entamer des recherches : pour les policiers, l’adolescent avait rejoint une petite copine et allait bien, un jour ou l’autre, rentrer de son escapade amoureuse.

Après tant d’années, ce meurtre est maintenant prescrit. Aucun auteur présumé ne pourra jamais comparaître dans un tribunal et encore moins être condamné pour cet homicide. La maman de Diego, toujours en vie, et le reste de la famille étaient donc destinés à ne jamais savoir ce qu’il lui était arrivé, pourquoi il avait été poignardé et pourquoi on avait tenté de démembrer son corps avant de l’ensevelir sous 60 cm de terre dans un jardin privé, à proximité d’un arbuste, dans un quartier ordinaire, pas très loin de chez eux. Pourtant, presque aussitôt connu le nom de la victime, un suspect a été identifié. C’est un homme qui aurait l’âge de Diego si celui-ci était encore de ce monde. Il vit toujours au même endroit et s’occupe en bon fils de sa vieille maman, veuve et plus ou moins dépendante, qui habite au rez-de-chaussée de la maison. Cet homme était un camarade de classe de Diego, tous deux fréquentaient le même lycée professionnel qui a changé d’adresse depuis et il n’y a guère de doute que c’est chez lui que l’adolescent se rendait lorsqu’il a disparu.

Or cet homme, Cristián G. (la presse argentine donne son nom complet), a eu de bien curieuses réactions au moment de l’horrible découverte à deux pas de chez sa mère. Au jeune maçon qui venait de découvrir le squelette, il a aussitôt avancé avec assurance des explications sur leur présence à cet endroit improbable, peut-être pour le dissuader d’appeler la police. Intrigué par cette attitude, le jeune artisan, qui a dû avoir la peur de sa vie en découvrant les restes humains, a fini par rapporter ces propos à la police. De la part d’un voisin qui vient d’apprendre une nouvelle aussi traumatisante, un homme d’apparence pateline mais qui avait déjà fait beaucoup de bruit, il y a quelques années, lorsque d’autres travaux avaient percé une conduite d’eau municipale presque au même endroit et qui avait aussi exigé du chantier en cours -et d’un ton pas commode- qu’on ne touche pas à « cet arbre » parce qu’il était, paraît-il, très vieux, l’exposition aussi rapide d’explications toute prêtes au premier venu a également paru bizarre au commissariat local.

A la Une de La Nación, l'article est annoncé
de même à droite, au centre de la colonne
En photo, un scandale hospitalier :
des personnes ont trouvé la mort
après l'injection de phentanyl adulteré
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Selon ce que Cristián G. a raconté au jeune maçon, le corps aurait pu reposer là depuis le 19e siècle puisqu’à cet endroit, il y avait, dans les dernières décennies du siècle, une communauté religieuse qui aurait enterré ses morts dans le jardin autour de la chapelle ou dans la chapelle elle-même. A moins que ces restes humains n’aient été apportés là, sans que personne ne s’en soit alors aperçu (ce qui aurait déjà en soi été suspect), dans de la terre qu’il s’était fait livrer naguère pour réaliser des travaux de terrassement dans le jardin en vue d’y installer une piscine ! Or à Buenos Aires et dans ses environs, on n’a plus enterré personne ni dans les églises, ni dans les chapelles ni dans les jardins des couvents ou des monastères à partir de 1822, quand une loi a rendu obligatoire l’inhumation dans les cimetières publics dont le premier venait d’être ouvert à Recoleta, là où, le 4 août 1823, a été inhumée « l’épouse et l’amie du Général San Martín » à l’entrée du cimetière (c’est une des tombes les plus anciennes et les plus sobres, celle de « Remedios de Escalada, esposa y amiga del General San Martín ») et où reposent aujourd’hui plusieurs présidents argentins des 19e et 20e siècles, ainsi que Evita Perón après que son corps embaumé avait été retiré du siège social de la CGT où il était exposé comme une relique depuis 1952 et avait voyagé clandestinement à travers le monde pour éviter qu’il tombe entre les mains des anti-péronistes alors au pouvoir à Buenos Aires.

Ces explications données par Cristián G. étaient d’autant plus invraisemblables que le squelette, bien qu’incomplet, se présentait dans la disposition anatomique, ce qui fait immédiatement penser à l’inhumation d’un individu unique, analyse renforcée par la présence de vêtements et d’objets à proximité du corps ou en contact avec lui : des restes d’un jean et d’une chaussure, une cravate, identique à celle de l’uniforme porté par les élèves de ce lycée technique dans les années 1980, ainsi qu’une montre-calculette de marque Casio facile à dater et surtout totalement inconnue au 19e siècle. La cravate et la montre ont même pu être identifiées.

Par empathie envers la famille Fernández Lima en état de choc après ces tragiques révélations au bout d’une si longue attente et saisi de vertige devant l’injustice manifeste provoquée, dans ces circonstances si particulières, par une légitime prescription (20 ans), le procureur a cherché une voie pour contourner l’obstacle légal et il en a trouvé une. Il vient de demander au juge d’instruction l’inculpation de Cristián G. pour entrave aggravée à la justice constituée par ses mensonges, ses fausses pistes visant à égarer les enquêteurs et ses tentatives pour soustraire les preuves d’un crime. Sur le plan pénal, l’inculpé risque six ans de prison, une peine beaucoup plus légère que celle qu’il aurait encourue pour meurtre, peine qui aurait de toute façon été réduite pour cause de minorité au moment de la commission des faits. Cependant, outre la lumière crue qu’elle jette sur l’individu, dont le visage apparaît partout dans les médias, et le soupçon qui, en s’emparant d’une bonne partie de son entourage, risque de ruiner très vite sa vie sociale, cette mise en cause judiciaire permet de relancer, indirectement, la recherche de la vérité sur l’homicide lui-même.

En remontant très haut dans le temps, le juge d’instruction devrait pouvoir interroger le suspect et ses proches encore en vie sur l’enchaînement des faits ayant abouti à la présence d’un corps à cet endroit et, ce faisant, il pourra peut-être tirer au clair le pourquoi du comment du silence assourdissant de la famille G. (un père aujourd’hui décédé, une mère, une fille et ce fils) lorsque, soutenus par le club de foot local et désespérés au point d’en appeler à la presse, les parents d’un camarade de classe de Cristián cherchaient Diego partout et sans relâche. Diego, cet ado de la classe de leur fils et frère qui partageait la passion de celui-ci pour les motos.

Lorsque pour la dernière fois, Diego a été vu dans la rue par un de ses copains le jour de sa disparition, il marchait en effet vers la maison de son camarade de lycée.

© Denise Anne Clavilier


Pour aller plus loin :


Ajouts du 14 août 2025 :
lire cet article de La Prensa sur la prochaine présentation d’une proposition de loi sur initiative d’un député du PRO (droite libérale des affaires) qui déplacerait le début du décompte pour la prescription d’un crime au jour de la découverte du corps au lieu, comme aujourd’hui, de celui de la disparition de la victime,
sur le même sujet, lire l’article de Clarín
lire cet article de La Nación sur les langues qui se délient. Selon la déposition sous serment de l’un des maçons, Cristián G. semblait très tendu depuis le début des travaux dans cette parcelle encombré de bric-à-brac qui avait appartenu à la famille G. mais qui est maintenant mitoyenne.

samedi 9 août 2025

Jeudi, San Cayetano a connu les grandes foules [Actu]

"Le gouvernement est en guerre contre les travailleurs",
dit le gros titre reprenant des propos des manifestants
ici sur Plaza de Mayo
En haut : l'ancienne ministre des Affaires étrangères
de Mileí a fait des déclarations dévastatrices contre le président
Dans une interview, elle a estimé que l'appui de Mileí à la crypto-monnaie
qui fait scandale prouve "ou bien qu'il n'est pas très intelligent
ou bien qu'il est quelque chose comme corrompu"
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Le 7 août comme tous les ans, les Argentins ont fêté San Cayetano, le saint qui veille sur ceux qui ont besoin de pain et de travail. Comme tous les ans, l’affluence dans les sanctuaires et la participation aux processions servent de baromètre social et cette année, la San Cayetano a démontré qu’il y a vraiment beaucoup de monde qui cherche un toit, du travail, du pain. Les sanctuaires étaient pleins. A Buenos Aires, la file d’attente pour entrer dans la minuscule église du quartier de Liniers et faire ses dévotions au saint qu’elle honore faisait le tour de plusieurs pâtés de maison.

Les évêques ont souvent prononcé des homélies soulignant la nécessité d’une politique de redistribution des richesses et de soutien aux plus vulnérables, les pauvres, les chômeurs, ceux qui travaillent au noir, les handicapés, les retraités.

En bas, une photo qui prend soin de ne pas montrer la foule
avec cette citation épiscopale : "Personne ne se sauve seul"
En haut, le lancement de la campagne de LLA (le parti de Mileí)
dans un coin très pauvre de la province de Buenos Aires
avec ce slogan volé à la gauche : Plus jamais
Le mot d'ordre des militants des droits de l'homme contre
la dictature militaire de 1976-1983
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Les statistiques officielles prétendent que le taux de pauvreté est le plus bas jamais enregistré : il serait de 31 %. Ah bon ? Avec une telle foule à la San Cayetano ? On ne dirait pas.

Chose exceptionnelle : la journée s’est terminée par une grosse manifestation sur Plaza de Mayo, pour protester contre la politique de Mileí. Or Plaza de Mayo est située à l’autre extrémité de la ville. De San Cayetano de Liniers à Plaza de Mayo, on doit traverser Buenos Aires d’ouest en est sur plus d’une dizaine de kilomètres. Il est d’ailleurs probable que les gens n’étaient pas tous les mêmes aux deux endroits, les fidèles étaient sans doute plus nombreux à Liniers et les syndicalistes à Monserrat.

En bas, la banderole de LLA et son slogan cynique
En haut : "L'Eglise se joint à la revendication de l'opposition
en faveur des retraités et plus d'argent pour les handicapés"
Dans la colonne de droite, au milieu, les propos polémiques
de l'ancienne ministre des Affaires étrangères
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Trois quotidiens nationaux en ont fait leur Une hier. Clarín a soigneusement évité de mettre une photo. Quant à La Nación, elle n’en parle même pas en une et il faut fouiller dans le site pour trouver l’article qu’ils ont publié.

© Denise Anne Clavilier


Pour aller plus loin :

lire l’article principal de Página/12
lire l’article de Rosario/12, l’édition locale de Página/12, sur l’événement dans la province de Santa Fe
lire l’article de La Prensa
lire l’article de Clarín sur les prises de position des évêques
lire l’article de Clarín sur la manifestation de Plaza de Mayo
lire l’article de La Nación

vendredi 8 août 2025

Le tango en deuil : Osvaldo Piro nous a quittés [Actu]


Malgré les grandes et belles phrases avec lesquelles les journalistes en parlent, sa mort ne fait pas vraiment beaucoup de bruit. Osvaldo Piro, bandonéoniste, compositeur, chef d’orchestre et arrangeur, est partout décrit comme l’ex-mari de Susana Rinaldi, ce qu’il fut en effet mais si c’est pour cela qu’ils lui rendent hommage…

Il avait 88 ans et vivait à La Falda, une petite ville dans les montagnes de Córdoba. C’est là qu’il s’est éteint hier. La presse reste muette sur ses obsèques, ce qui n’est pas vraiment habituel.

Avec Susana Rinaldi, Piro avait eu deux enfants qui sur scène ont conservé son nom, Ligia et Alfredo. Elle fait carrière comme chanteuse de jazz et lui comme chanteur de tango. Après le divorce avec Rinaldi, il a eu trois autres enfants dont on n’entend pas parler.

Il est vrai qu’il avait surtout mené sa carrière hors de Buenos Aires, avec modestie et discrétion, même s’il avait, il y a deux ans, partagé la scène une nouvelle fois avec la Tana Rinaldi pour présenter un disque qu’ils avaient enregistré ensemble.

© Denise Anne Clavilier


Pour aller plus loin :

lire l’article de Página/12, qui ne lui a même pas consacré la Une de son supplément culturel quotidien Cultura & Espectáculos (j’avoue ma surprise !)
lire l’entrefilet de La Prensa
lire l’article très illustré de Clarín
lire l’article de La Nación

jeudi 7 août 2025

A la Chambre, l’opposition fait son boulot : elle s’oppose [Actu]

"Quand j'entends le mot Université, je sors mes pistolets",
dit le gros titre sur cette image de nouvelles violences policières
En haut à droite, le scandale de la $Libra rebondit !
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Hier, la Chambre a voté contre douze décrets présidentiels qui récemment ont fermé des instituts culturels ou économiques et privé de financement divers autres organismes fédéraux. L’ensemble de l’opposition s’est unie pour l’occasion, de l’extrême gauche aux radicaux, en passant par les kirchneristes et les régionalistes.

Pour plusieurs votes, on a frôlé la majorité qualifiée, celle qu’il est nécessaire d’atteindre pour renverser un veto présidentiel sur une loi déjà votée mais non publiée au bulletin officiel. Jusqu’à présent, l’opposition n’avait pas pu trouver cette majorité qualifiée pour entraver les veto de Javier Mileí. Cette fois-ci, l’espoir est permis.

Les douze décrets présidentiels invalidés hier par la Chambre portaient sur la fermeture et la disparition plusieurs instituts nationaux dépendant du ministère de l’Économie, l’institut agricole couvrant les cultures et l’élevage (INTA), l’institut techno-industriel (INTI), l’institut de la propriété industrielle (INPI), l’institut des exploitations agricoles familiales (les petites exploitations), celui des semences ainsi que la Agencia Canabis, dont l’examen du décret a recueilli 141 voix contre et 65 pour, la disparition de l’organisme directeur du réseau routier et de la Sécurité routière (Vialidad Nacional) par 138 voix contre et 65 voix pour, celle de diverses institutions dépendant du secrétariat d’État à la Culture, dont l’Instituto Nacional del Teatro ainsi que les instituts de recherche historique et mémorielle consacrés entre autres aux généraux et pères de la Patrie San Martín et Belgrano, par 134 voix contre et 68 pour, la réforme, en vue de dégrader ses compétences et de le rendre inopérant, du Banco Nacional de Datos Genéticos, la banque d’ADN qui permet d’identifier les adultes enlevés à leur famille dans l’enfance sous la dictature militaire de 1976-1983, par 133 voix contre et 69 pour, la restriction draconienne du droit de grève rêvée par Mileí et la réforme du régime de la marine marchande par 118 voix contre et 77 pour, la disparition des subventions à la recherche universitaire par 159 voix contre, 75 pour et 5 « courageuses » abstentions et enfin l’élimination des subventions publiques pour l’hôpital Garrahan, un établissement pédiatrique public réputé doté d’un service d’urgence indispensable dans une région très peuplée comme celle de la capitale argentine. Ce dernier décret a été rejeté par 159 voix (contre 67 qui ont voté pour son maintien). Depuis la publication de ce décret, l’hôpital pour enfants était en ébullition : mettre ainsi en péril la santé des plus jeunes et jusqu’à leur survie suscite légitimement un puissant rejet d’une large partie de l’opinion publique.

Pour que ces votes aient force de loi et renversent définitivement les décrets de Mileí, il faut maintenant que le Sénat les invalide lui aussi à la majorité.

"Champions des dépenses", dit le gros titre en bleu
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Par ailleurs, la Chambre a confirmé les conditions de mise en place d’une commission d’enquête sur le scandale $Libra, la monnaie virtuelle que Mileí avait promue à travers ses réseaux sociaux, un vendredi soir, avant que cette crypto s’effondre d’un coup vers minuit, entraînant de juteux profits pour ses promoteurs et quelques autres initiés et la ruine de milliers d’épargnants en Argentine mais aussi dans d’autres pays hispanophones, dont les États-Unis où des Latinos ont mordu à l’hameçon. Les enquêtes sur ce scandale, du côté judiciaire comme du côté journalistique, tant en Argentine qu’aux États-Unis, connaissent d’ailleurs des avancées impressionnantes. C’est ainsi qu’hier, on apprenait que Julián Peh, l’entrepreneur prétendument spécialisé et tout aussi prétendument singapourien que Mileí avait reçu pendant les préparatifs du lancement frauduleux, s’est baladé partout en Argentine sous un faux nom, ce que personne n’avait encore détecté : la justice argentine a en effet reçu de Singapour une réponse négative à ses demandes d’information ; la Ville-État asiatique ne connaît personne parmi ses ressortissants du nom de Julián Peh. Le type pourrait bien en fait s’appeller Baï Qihao. Mileí, ce « brillant » économiste qui se présente comme docteur alors qu’il n’a jamais dépassé le niveau de la licence et qui se décrit volontiers comme le sauveur de l’Amérique latine, et son épouvantable frangine fricotent donc avec des escrocs confirmés !

Enfin, les députés ont rétabli le système de répartition de l’argent fédéral aux provinces que Mileí a menacé de supprimer avant d’annoncer qu’il la réserverait désormais aux seules provinces dont les gouverneurs se soumettent à ses ordres et soutiennent sa politique.

Et pendant que la Chambre votait, le président, reclus dans sa résidence de Olivos, en lointaine banlieue de Buenos Aires, éliminait le secrétariat d’État à l’Industrie et au Commerce, tandis que dans la capitale, la police réprimait les manifestants venus contester les décrets présidentiels débattus au même moment dans l’hémicycle. Balles en caoutchouc et lances à eau sont entrées en action sur la place et dans les rues adjacentes, faisant comme d’habitude des blessés parmi les citoyens et les journalistes venus faire leur travail.

© Denise Anne Clavilier


Pour aller plus loin :

lire l’article principal de Página/12
lire l’article principal de La Prensa, dont la seule analyse est que les députés sont des vilains qui ne songent qu’à dépenser l’argent public. Pour un journal qui se prétend catholique, quelle honte !
lire l’article principal de Clarín
lire l’article principal de La Nación

mardi 5 août 2025

La semaine de San Cayetano [Actu]

Une de Cash dimanche dernier
avec un Mileí faussement christique
tel qu'il vient de se présenter
devant un think tank d'extrême-droite
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Depuis 1982, le 7 août, un grand pèlerinage, très encadré par les autorités diocésaines, conduit des foules denses un peu partout en Argentine vers les principaux sanctuaires de San Cayetano (pour nous, saint Gaëtan). En Argentine, il est le patron du pain et du travail. Au long des années, le pèlerinage s’est donc transformé en baromètre social puisqu’il rassemble tous les précaires du pays, les chômeurs, les travailleurs laissés pour compte, les retraités auxquels Mileí est en train de retirer le pain de la bouche, les sans-abris aussi, de plus en plus nombreux puisque des gens se font expulser de leur logement.

C’est aussi au cours de cette semaine que la Conférence épiscopale argentine célèbre ses journées de réflexion sociale avec, cette année, des ateliers très fournis en thématiques et en grands témoins.

Ces jours-ci, Página/12 consacre à ce sujet trois articles de fond. Pas les journaux de droite, qui sans doute feront quelques reportages pittoresques le 8 sur les rassemblements religieux de la veille, d’autant que cette année, ils s’accompagneront d’hommages au défunt pape François, qui sut si bien et si fort parler des laissés pour compte du monde capitaliste et du dérèglement économique croissant.

© Denise Anne Clavilier


Pour aller plus loin :

lire l’article de Página/12 sur la marche de San Cayetano 2025
lire l’article de Página/12 sur le programme des journées sociales de l’Église
lire l’article de Página/12, dans le supplément économique Cash, sur la planification du chaos qu’est la politique anti-sociale menée par Mileí

48 heures de grève pour défendre la recherche scientifique [Actu]

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Les chercheurs du CONICET, l’équivalent en Argentine du CNRS en France, se mettent en grève pour protester une nouvelle fois contre les pertes abyssales de budget pour la recherche fondamentale et appliquée en Argentine sous le gouvernement Mileí, qui hait tout ce qui relève du savoir et de la culture et qui voit dans ces chapitres budgétaires des dépenses inutiles et parasitaires, alors qu’il s’agit d’investissements dans l’avenir et dans le prestige international du pays.

La femme : Comme ça, "tout marche selon le plan" ?
C'est un vrai désastre, oui !
Mileí : Eh, c'est ça, le plan.
Dessin à la Poutine de Paz et Rudy, le 3 août dernier
Traduction © Denise Anne Clavilier
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Lui qui, comme Trump, prétend vouloir rendre à son pays le rôle de puissance mondiale que, d’après lui, l’Argentine avait au début du 20e siècle. Pure fantaisie de sa part puisqu’il confond puissance politique et économique avec le ratio du produit intérieur brut par tête. Certes, ce ratio PIB par tête était très élevé vers 1900 d’autant que le pays était beaucoup moins peuplé qu’aujourd’hui, mais la répartition très inégalitaire de cette richesse nationale ne profitait qu’à quelques centaines de familles richissimes. Rien à voir donc avec la puissance politique et économique qu’un pays peut exercer, pour de toutes autres raisons d’ailleurs, à l’échelle de la planète. Vers 1900, il y avait deux grandes puissances à l’échelle mondiale, c’était la Grande-Bretagne et la France, qui s’appuyaient sur des empires coloniaux gigantesques et une présence sur tous les continents. Des pays comme l’Allemagne, l’Autriche-Hongrie, l’Empire russe, la Belgique (avec le Congo) et les Pays-Bas (avec une série de possessions dans le Pacifique) venaient derrière. L’Empire ottoman n’en était plus, ni l’Espagne, ni le Portugal, ni la Chine, ni le Japon. Quant aux États-Unis, ils n’existaient même pas encore sur ce type de carte.

Aujourd’hui, c’est surtout Página/12, le quotidien de gauche, qui s’intéresse à cette protestation des scientifiques. Au point d’en faire sa une.

Le gars derrière : T'as vu ? Il y a des scientifiques du Conicet
au fond de l'eau
Le petit devant : Ouais, comme la majorité des Argentins
Dessin des mêmes auteurs, paru hier à la Une de Página/12
Traduction © Denise Anne Clavilier
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Il se trouve que depuis quelques jours, une équipe d’océanographes a mis en ligne un streaming en direct et en couleurs des fonds marins du Mar Argentino, qui longe la côte atlantique du pays. Et ce que les Argentins découvrent au fond de leurs eaux territoriales les émerveille à juste raison. Faune, flore, coraux, minéraux, ce que nous montre la caméra du Conicet jour après jour est à tomber à la renverse. Le streaming fait donc un carton !

Mais l’expression populaire « estar en el fondo del mar » ou « estar bajo el mar » (être au fond de la mer) correspond aussi à notre « être sous l’eau » : les deux expressions décrivent une situation précaire et presque sans issue. Ce avec quoi Daniel Paz et Rudy n’ont pas manqué ces jours-ci de jouer dans leurs vignettes à la une de Página/12.

Demain ou après-demain, on verra bien comment le reste de la presse traite cette manifestation des chercheurs, toutes disciplines confondues. Pour l’heure, c’est l’indifférence partagée.

© Denise Anne Clavilier


Pour aller plus loin :

lire l’article de Página/12 sur la manifestation, ses tenants et ses aboutissants
lire l’article de Página/12 reprenant une émission de la 750, la radio du groupe Octubre, sur le même sujet
lire l’article de La Prensa, seul journal de droite aujourd’hui à traiter cette information
lire l’article de La Nación sur l’un des poissons spectaculaires découverts à travers le streaming (il vaut le coup d’œil)
lire l’article de La Nación du 1er août sur la meilleure manière d’accéder au streaming

samedi 19 juillet 2025

Pour trouver des dollars, Mileí privatise le réseau d’eau potable [Actu]

"Envoie la flotte", dit le gros titre
avec l'étiquette "à vendre" qui pendouille
au robinet de la cour de la maison ou de l'immeuble
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Depuis des mois, de plus en plus empêtré dans différents scandales, Javier Mileí cherche à réalimenter l’économie argentine avec du dollar frais, puisqu’à l’inverse du discours officiel, l’économie du pays se porte très mal : les réserves sont très basses, le cours du dollar en hausse permanente, les PME industrielles et manufacturières ferment et licencient ou externalisent tout ou partie de leur production à l’étranger, les grandes enseignes internationales s’en sont déjà allées depuis un bon moment ou font planer le doute sur leur maintien dans le pays, le chômage sévit, la consommation s’est effondrée et ne se relève pas, comme on l’a vu de manière spectaculaire à la rentrée scolaire (en mars) et, plus récemment, lors de la fête des Mères puis celle des Pères, l’inflation résiste et, pour tâcher de le dissimuler, le gouvernement fait en vain modifier les listes de produits dont le prix est suivi par l’INDEC.

Il y a quelques mois, Mileí avait lancé l’opération du dolar-colchón (dollar-matelas), pour faire apparaître l’argent liquide conservé par des particuliers fortunés et le faire circuler dans l’économie officielle sans conséquence fiscale pour ces fraudeurs. En vain. Les billets verts n’ont pas montré le bout de leur nez.

Maintenant, avant les élections de mi-mandat, le président ne sait plus quoi faire pour sauver sa situation et éviter que les électeurs constatent l’échec de sa politique démente, aussi retentissant et rapide que prévisible. Il vient donc d’avoir l’idée, dont la nocivité a pourtant été prouvée il y a moins de trente ans, de privatiser la compagnie publique AySA, qui puise, traite et distribue l’eau potable dans tout le pays. Le président Carlos Menem, d'affreuse mémoire, qui avait précipité l’Argentine dans les faillites de Noël 2001, l’avait déjà fait dans les années 1990 et cela avait abouti à des pénuries en tout genre, dues à des détériorations du réseau faute d’investissement et à de l’eau non potable qui coulait au robinet...

Avec ce gouvernement de branquignols, d’affairistes corrompus et d’énergumènes vociférant sur les réseaux sociaux, on ne voit pas bien pour quelle raison cela se passerait mieux cette fois-ci !

© Denise Anne Clavilier


Pour aller plus loin :