Gotan Tropic est
l'émission qu'un groupe d'artistes très talentueux, mené par
Facundo Radice, Patricia Malanca et Gabriel Bartolomei, produit et
anime à UrbanaTeVé, la télévision communautaire du Barrio Carlos
Mujica dans la Villa 31, le bidonville qui longe le nord de Retiro,
de l'autre côté de la gare routière.
L'équipe au grand complet dans son studio de fortune |
Aujourd'hui, l'émission
compte une dizaine de numéros d'une bonne heure chacun et clôt
cette toute première année par une grande fête à la porte du
studio, une fête ouverte à tous les habitants avec milonga,
concert, récital, de 13h à 15h. Le tout sera retransmis en direct
sur les ondes de AM 750, la radio du groupe Octubre, propriétaire de
Página/12 et de Caras y Caretas (le nouveau magazine, pas l'original
de Fray Mocho d'avant la seconde guerre mondiale).
La cabine technique : un ordinateur, trois écrans plats, une table de mixage et beaucoup d'huile de coude et de jus de cerveau |
L'émission est
excellente, vivante, joyeuse et bien sûr militante (et de gauche –
c'est difficile qu'il en soit autrement dans le paysage
politico-médiatique actuel en Argentine). Son ton est le vrai ton
populaire qu'on expérimente dans le monde tanguero de Buenos Aires
(en dehors des milongas du centre-ville, qui sont de plus en plus formatées pour
attirer les touristes et s'adressent beaucoup moins aux danseurs
portègnes). Le débit est celui d'une mitraillette comme d'habitude.
Le petit studio est aménagé dans un appartement en étage dans un
immeuble de bric et de broc typique de ce type d'agglomération.
Parfois la caméra n'a pas assez de recul, le cadrage déraille ou le
son disparaît mais il faut voir dans quelles conditions ces
techniciens travaillent. Le résultat est émouvant et d'autant plus
brillant que ces gens ne se laissent pas vaincre par le manque de
moyens : ils y vont, à la guerre comme à la guerre... Et avec
du tango d'aujourd'hui, des danseurs qui viennent avec leurs
vêtements de tous les jours et pas avec des fringues clinquantes que
tant de monde croit indispensable pour danser le tango. Et regardez
la belle danse que c'est, simple, inspirée, musicale... Idem pour
les instrumentistes et les chanteurs. Un journaliste de Página/12
collabore avec l'équipe, c'est souvent le cas car les rédacteurs du
journal sont tous des militants de la culture populaire et ils
n'hésitent pas à rejoindre ces projets audacieux qui correspondent
en profondeur à leurs convictions politiques et sociales.
Tournage dans le studio, avec vue sur la terrasse en briques brut de décoffrage et un grand drapeau national dans un coin, comme tout le monde en Argentine ! |
L'émission devrait
reprendre l'année prochaine, en mars, après la rupture de l'été.
sur une autre longueur d'ondes hertziennes nouvellement attribuée à
la chaîne de télévision, qui optimise les avancées technologiques
pour diffuser ses émissions : chaîne Youtube, pages Facebook
et utilisation de Whastapp pour sa gratuité.
Le même jour, La Nación
propose dans ses Conversaciones une interview vidéo du ministre du
développement social de la Ville de Buenos Aires, qui nous dit que
la Villa 31 est rentrée dans la normalité et qu'on peut s'y
promener comme dans n'importe quel autre coin de la capitale
argentine, dans des rues qui se respectent, sur le plan de la sécurité comme sur les autres (1).
Pour aller plus loin :
consulter la page Facebook
de l'émission
visionner la chaîne Youtube de Gotan Tropic
consulter les pages Idea
consacrées à l'émission.
Vous pouvez également
écouter l'interview du ministre portègne à La Nación.
(1) Il faut dire aussi que
ce n'est pas vraiment difficile vu l'état normal des rues normales
dans Buenos Aires : trottoirs défoncés, dalles arrachées ou
disjointes, fondrières en tout genre, sauf dans les quartiers
huppés, Palermo, Recoleta, Belgrano et le top du top en matière de
voirie impeccable, Puerto Madero...