C’est une vieille tradition qui remonte à la
fin du dix-neuvième siècle (1)
que la pandémie met à bas cette année : le pèlerinage
national à la basilique de Luján. A Buenos Aires, cette marche à
pied part du sanctuaire de Liniers, à l’ouest de la capitale
fédérale, pour gagner la cité mariale, située à 70 km plein
ouest.
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Traditionnellement,
le pèlerinage se tient le week-end le plus proche de la fête de
Notre-Dame du Rosaire, quand le printemps est là, au début du mois
d’octobre.
Hier,
en sa qualité de primat d’Argentine, le cardinal Mario Poli a
annoncé que ces célébrations n’auront pas lieu eu égard à la
situation sanitaire du pays où l’épidémie fait rage. Il en a
appelé à la foi des catholiques qu’il invite à faire le
pèlerinage dans leur cœur puisque, selon ses propres déclarations,
« La Vierge écoute en quelque lieu [que nous soyons] ».
Seul
La Prensa
se fait l’écho de cette décision et le journal catholique la met
à sa une de ce matin.
Pendant
ce temps-là, histoire de mettre de l’huile sur le feu comme la droite dure dont je parle dans mon article précédent, certains
représentants (de droite) de la communauté juive (politiquement partagée) ont demandé, pour raison liturgique, à bénéficier d’un allègement
des mesures sanitaires pendant les trois semaines qui viennent (fêtes
de Roch-Hachana, Yom Kippour et Soukot, d’autant plus
démonstratives qu’en Argentine, elles correspondent au début
du printemps, au moment où la chaleur revient). Qu'ils sont pénibles avec leur perpétuelle politisation de la religion : l’État d’Israël lui-même, pourtant gouverné par une
coalition droite libérale, centre et droite religieuse, reconfine
précisément pour éviter que ces fêtes donnent lieu à de grandes
réunions festives qui provoqueront des contagions en pagaille !
Pour
aller plus loin :
lire
la dépêche de l’agence de presse confessionnelle AICA (agence de
la Conférence des Évêques
d’Argentine) avec message vidéo où le cardinal s’exprime avec à
côté de lui une réplique de la statue iconique de Notre Dame de
Luján et une image du serviteur de Dieu (2),
le Negro Manuel.
(1)
Le pèlerinage national a été inventé et promu par un prêtre
français, le père Georges Marie Salvaire, nommé curé de Luján.
Il fut le grand historien du sanctuaire dont l’origine remonte à
un fait miraculeux de 1630. Salvaire s’inspira du pèlerinage de
Chartres dont la cathédrale servit de référence pour l’actuelle
église de style néogothique. Le procès en canonisation de Salvaire
a été ouvert à Rome, en même temps que celui du Negro Manuel,
l’esclave africain qui fut donné par son maître à la Vierge, à
la suite du miracle, pour veiller sa vie durant sur la petite statue
de terre cuite que les fidèles vénèrent à Luján depuis bientôt
quatre siècles.
(2)
Serviteur de Dieu : premier stade de reconnaissance officielle
par l’Église catholique des vertus spirituelles et de la foi d’un
baptisé dont s’engage le procès en béatification. Pendant cette
étape, le candidat à la béatification peut être honoré par les
fidèles dans une prière privée selon une formule de demande de
grâces diffusée par le promoteur de la cause (en l’occurrence, le
diocèse de Mercedes-Luján, en province de Buenos Aires).