"Cela a été une erreur très ponctuelle" a déclaré la nouvelle ministre de la Santé (en photo) |
Ils n’étaient donc pas
seulement neuf comme on l’a cru à la fin de la semaine dernière
mais beaucoup plus à s’être fait vacciner sur passe-droit du
Ministère de la Santé à l’hôpital Posadas qui a dû rendre des
comptes devant la nouvelle ministre et subir une perquisition en
règle ordonnée par la juge d’instruction ! Le gouvernement
qui ne peut donc pas être accusé de protéger les brebis galeuses
de sa majorité a publié une liste de 70 personnes, dont certaines
ont été vaccinées en toute légalité et toute transparence. C’est
le cas du premier nom de cette liste : celui du chef de l’État
lui-même, qui a reçu son injection devant les caméras comme tant
et tant de mandataires dans le monde pour montrer l’exemple et
légitimer le vaccin (en l’occurrence Sputnik V).
"Inculpation et perquisitions" déclare le gros titre au-dessus d'une photo de la Maison Blanche en deuil |
Dans cette liste, on découvre le
nom de plusieurs ministres dont, si on veut bien déposer les armes
partisanes, il n’est pas scandaleux qu’ils aient bénéficié
d’un traitement de faveur. Après tout, ce sont des
personnalités-clé dans l’État, leur santé importe au bon
fonctionnement des institutions, surtout dans cette double crise
sanitaire et économique. Dans la liste, il y a en particulier une
personne pour qui on ne peut pas parler de passe-droit : Daniel
Scioli, ambassadeur au Brésil, qui a donc profité de ses vacances
d’été dans son pays pour se protéger du virus. Tout le monde
devrait l’accepter dès lors que l’état sanitaire catastrophique
qui règne dans le pays voisin est largement connu ! Pourquoi un
diplomate devrait-il prendre des risques pour sa santé et même pour
sa vie alors qu’il exerce une mission pour son pays ? Un
ambassadeur argentin est déjà mort du covid ; il vivait en
France et représentait son pays à l’UNESCO, le cinéaste Fernando
Solanas décédé cet été. Ce matin, en pièce jointe de son
article principal, Clarín inclut la liste complète.
Il apparaît clairement que
certaines personnes impliquées dans les vaccinations à passe-droit,
y compris les soignants qui y ont procédé, étaient au fait du
caractère contestable du processus puisque ils ont falsifiés le
motif de certaines injections. C’est ainsi qu’un homme politique
qui compte dans le courant kirchneriste est inscrit dans les
registres de vaccination comme personnel de santé, ce qu’il n’a
jamais été !
"Zannini, Scioli et famille de Massa entre plusieurs dizaines de vaccinés VIP" hurle le gros titre au-dessus d'une photo de la perquisition au ministère de la Santé hier |
L’ancien ministre de la Santé
et son neveu, qui avait des fonctions officielles dans son cabinet
quand le scandale a éclaté, sont d’ores et déjà inculpés. Pour
ces quelques resquilleurs et leurs bienfaiteurs, la justice n’a
donc pas traîné ! La droite n’est pas en reste. Toute une
palanquée de ténors et de divas de l’opposition s’est déjà
porté partie civile dans cette affaire, comme si cette démarche
était nécessaire après que le parquet se soit emparé du dossier.
Une de Página/12 dimanche dernier Le président entouré de l'ancien et de l'actuelle ministres de la Santé |
Hier, Página/12 tentait de tourner la page en évoquant à la une un scandale privé au sein de la famille Macri : l’une des sœurs de l’ex-président a été écartée de l’héritage par ses frères et sœurs et réclame maintenant son dû, comme dans la famille Etchevere, celle de l’ex-ministre de l’Agriculture, si représentative de ces clans de grands propriétaires agraires qui se sont toujours crus au-dessus des lois et professent un machisme d’un autre âge. Pourtant, malgré cet effort du quotidien de gauche pour passer à autre chose ou allumer un contre-feu, c’est bien le scandale des vaccinations qui rebondit ce matin en cette toute fin d’un été miné par la pandémie et la carence de vaccins alors que le président est au Mexique, pour une rencontre au sommet à l’occasion du bicentenaire de l’indépendance du pays. Il n’est pas interdit de penser que la presse de droite fait d’autant plus de bruit autour des vaccinations passe-droit qu’elle pourrait vouloir détourner l’opinion des ennuis judiciaires qui s’accumulent sur la tête de Mauricio Macri, le champion du néo-libéralisme : procès privé avec sa sœur cadette et malversations diverses et variées qui pourraient être imputées à l’ancien président pour ses agissements à la tête du pays ou pour son action comme actionnaire du groupe industriel familial, titulaire de plusieurs concessions de service public bizarrement administrées.
Pour aller plus loin :
lire l’article principal de La Prensa
lire l’article principal de Clarín
lire l’article principal de La Nación
Dimanche dernier, Página/12 publiait en une un reportage sur le président Alberto Fernández et de ses réactions et processus de décision face à ce scandale de corruption qui fait tant de mal à sa majorité.