mercredi 7 décembre 2022

Six ans de prison, inégibilité à vie et coup de théâtre [Actu]

"Ma condamnation vient de l'Etat parallèle et
de la mafia judiciaire", dit le gros titre
citant Cristina Kirchner hier soir
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Comme on s’y attendait, l’intéressée la première, Cristina Kirchner a été condamnée hier en première instance à six ans d’incarcération criminelle et à l’inéligibilité à vie pour abus de fonds publics (dans une affaire de travaux publics en province de Santa Cruz). La cour était composée de trois juges dont l’impartialité est très discutée (à juste titre, vu les amitiés qu’ils cultivent dans le milieu politique de droite) et qui ont dû abandonner en route l’un des chefs d’inculpation, celui d’association illicite (avec ses co-inculpés), une accusation à laquelle la droite semblait tenir beaucoup.

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Cette décision, dont l’arrêt écrit ne sera connu que dans trois mois, est susceptible d’appel devant la cour de Cassation à partir du moment où les juges rendront public la rédaction effective de leur décision. Il fait très peu de doute que Cristina, avocate de formation, fera jouer tous les mécanismes de la procédure pénale argentine et qu’elle ira donc en cassation. D’ici là, elle reste libre de ses mouvements et conserve son mandat électif (elle est actuellement vice-présidente) et beaucoup d’eau va couler sous les ponts avant qu’elle ne risque physiquement d’être jetée en prison.

"Verdict historique : Cristina condamnée à
6 ans pour corruption. Elle annonce qu'elle
ne sera candidate à rien en 2023", dit le gros titre
au-dessus de cette photo qui exprime la rage
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Comme elle l’avait aussi annoncé, la vice-présidente a aussi pris la parole depuis le Sénat, qu’elle préside ès qualité. Comme on s’y attendait, elle a démoli les raisonnements des juges, invoqué un complot judiciaire contre elle (comme il en a existé au Brésil contre Lula et il n’est pas sûr qu’elle n’ait pas raison) et insulté les magistrats en évoquant une mafia judiciaire qui couvrirait ceux qui ont tenté de l’assassiner il y a quatre mois. En cela, elle est d’ailleurs secondée par de nombreuses personnalités en vue, comme Estela de Carlotto, présidente de Abuelas de Plaza de Mayo, qui dit la même chose. Mais, ô surprise, elle a aussi annoncé qu’elle ne serait candidate à rien l’année prochaine, alors qu’il y aura des élections législatives nationales et provinciales et des élections pour les exécutifs : on votera pour les gouverneurs des provinces ainsi que pour choisir le président de la Nation.

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Or tout le monde avait cru comprendre ces derniers jours qu’elle se préparait à annoncer sa candidature à la présidence, ce qui aurait constitué une parfaite trahison envers le président actuel, Alberto Fernández. Véritable coup de théâtre donc qui stupéfie les péronistes, dont les plus enflammés comptaient déjà sur elle pour relever le gant de la Casa Rosada, bouleverse les plans du président en exercice et déboussole complètement la droite (dans l’opposition). Plutôt bien joué sur le plan tactique. Le plus étonnant reste toutefois qu’elle renonce ainsi à toute immunité parlementaire.

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L’information remplit bien naturellement les unes et les pages intérieures de tous les journaux argentins avec deux interprétations opposées selon que le quotidien est de gauche (Página/12) ou de droite (les trois autres).

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C’est en tout cas la première fois dans l’histoire du pays qu’un ancien chef d’État est jugé et condamné. Est-ce pour autant un progrès de la démocratie ? Ce n’est pas sûr. L’opposition a fêté le verdict avec joie, comme cela aurait été le cas des péronistes dans la situation inverse. Ce n’en est pas moins une manifestation obscène, d’autant que des suspicions qui sentent encore plus mauvais pèsent sur Mauricio Macri, l’ancien président de droite qui parvient quant à lui à mettre la magistrature dans sa poche. Bizarre, non ?

"Cristina Kirchner n'ira pas en prison", dit le second titre
Une du journal de gauche uruguayen, ce matin
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© Denise Anne Clavilier


Pour aller plus loin :

en Argentine
en Uruguay