Une du 30 juillet (à comparer avec celle du lendemain) L'image centrale se rapporte à des désaccords dans une alliance électorale |
Comme
partout ailleurs dans le monde occidental, la conférence de
presse improvisée par le Pape dans l'avion Rio-Roma, dans la
nuit de dimanche à lundi, a fait et continue de faire pas mal
de vagues dans la presse argentine. Comme presque partout ailleurs
aussi, c'est surtout les déclarations sur l'homosexualité
qui retiennent l'attention des journalistes (ça tourne à
l'obsession dans la corporation).
Página/12
semble avoir été pris de court par les propos de
François dont ce journal avait fait un homophobe aguerri, voire vindicatif, et
qui se rend compte d'un seul coup que c'est faux. Il ne l'a jamais
été et ses propos authentiques pendant la campagne
d'opinion qui a précédé le vote de la loi du "mariage égalitaire" en Argentine ne l'ont jamais été
non plus, mais ça, Página/12 ne peut pas le savoir :
ses journalistes n'ont jamais écouté (ni lu) ce qu'il disait
quand il était archevêque de Buenos Aires.
Du
coup, la rédaction ouvre ses colonnes aux organisations
militantes d'homosexuels et de transsexuels, qui se révèlent
partagés, les uns se réjouissant de ce ton officiel nouveau à
leur égard, les autres tombant à bras raccourcis sur ce
Pape qui commet le crime (à leurs yeux) de ne pas adopter sans
réserve leurs arguments pour faire de leurs sexualités
atypiques des normes sociales avec assimilation totale à la
monogamie hétérosexuelle, dans une complétude biologiquement féconde.
Dès
hier, Clarín pour sa part a exploité la lettre qu'un
ancien prêtre de Mendoza a envoyée à Rome pour réclamer
cette assimilation des pratiques homosexuelles à la norme
(pastorale et canonique) hétérosexuelle. Le bonhomme a lui-même quitté
son ministère lorsqu'il s'est rendu compte, dit-il, que son
goût pour les hommes ne lui permettait pas de vivre dans la
chasteté.
A part l'album en ligne des cent meilleures photos de François aux JMJ, toute la stratégie éditoriale du journal autour du Pape relevait hier de cette thématique.
A part l'album en ligne des cent meilleures photos de François aux JMJ, toute la stratégie éditoriale du journal autour du Pape relevait hier de cette thématique.
Presque rien, sauf cette manchette sur le côté gauche où le Pape fait le pendant avec un transfert dan s le foot ! |
La Prensa a fait un peu plus original en revenant sur la nostalgie de sa bonne ville de Buenos Aires que le Pape a exprimée, brièvement et sobrement, aux journalistes qui voyageaient avec lui.
Le gros titre est pour le nouveau chef d'Etat-major qui serait compromis dans un méchant scandale financier |
Et
c'est La Nación qui emporte le pompon grâce à sa
correspondante à Rome, Elisabetta Piqué, qui, comme je
le devinais lundi (voir mon article), volait effectivement avec le Pape et s'est dépêchée,
dès qu'elle a atterri à Fiumicino, d'envoyer son papier, qui
a paru en ligne lundi matin à Buenos Aires, après
le bouclage de l'édition papier. Elle et sa rédaction
traitent cette info comme on le ferait d'une exclusivité
(alors que ce n'en est pas une mais elle a tout de même pu prendre la parole elle-même, aux côtés de l'un de ses confrères argentins).
Pour
aller plus loin
Résumé de la conférence de presse en français par Radio
Vatican, la source la plus fiable, avec L'Osservatore Romano.
L'édition du quotidien, datée d'aujourd'hui mais parue hier, publie le
contenu intégral, en italien, sur trois pages et une colonne et
demie. Un travail de Romain, c'est le cas de le dire ! On peut y accéder sur le site Internet du journal.
Página/12
:
l'article de Elena Llorente, qui ne sait plus bien à quel saint se vouer
devant une abondance de matière si peu habituelle dans ces
exercices jusqu'à présent très calibrés
et très circonscrits
l'article sur les réactions des associations gays argentines (l'article est plutôt rabat-joie et les réactions contrastées, à la limite de l'embarras)
l'article de Washington Uranga : très tendancieux, il tente une
explication de texte de quelques paragraphes du catéchisme de l'Eglise catholique
(avec une grille de lecture politique qui ne peut être pertinente sur des considérations spirituelles) –
Voilà pour hier.
Ce
matin :
l'article sur la lettre de l'ex-prêtre homosexuel mendocin (traitée
par Clarín hier)
le billet d'opinion publié par un pasteur luthérien très
hostile au Pape. Il lui reproche de s'ériger illégitimement
en juge des mœurs de ses contemporains (alors que selon les normes catholiques, le Pape est avant tout un évêque et comme évêque, il est en effet un juge en même temps
qu'un pasteur). Cette polémique anachronique semble arriver tout droit de la
Renaissance lorsque, le schisme n'étant pas encore consommé, les protestants avaient besoin de déconsidérer les
institutions catholiques pour construire, contre elles, leur identité naissante. Mais enfin, un demi-millénaire plus tard et à l'heure de l'œcuménisme, quel
intérêt des luthériens auraient-ils à
s'en prendre à ces signes distinctifs de l'identité catholique et à enfoncer une telle porte ouverte ? Au regard de la cordialité qui a
régné entre les différentes confessions
chrétiennes et les trois religions dites du Livre pendant cette semaine des JMJ, je pense qu'on peut voir dans ce billet la volonté acharnée du journal de trouver des motifs de critique à un moment où tous les gens un
tant soit peu ouverts et tolérants, croyants ou non, expriment
tous la même satisfaction et le même soulagement autour
d'une voie (et d'une voix) de consensus sur un sujet difficile et
douloureux pour tout le monde.
Clarín
L'article sur l'ex-prêtre mendocin et épistolier (précédent
de 24h l'article de Página/12 sur le même sujet)
L'album-photo
du Pape François à Rio.
La
Prensa
L'entrefilet sur les sentiments du Pape envers sa ville natale et sa décision de privilégier l'Asie ou le Moyen-Orient pour son prochain voyage
L'article sur l'ensemble des propos tenus par le Pape dans l'avion
La
Nación
L'analyse de l'éditorialiste Mariano de Vieda sur le changement de
discours mais non de doctrine, avec vidéo de la conférence
intégrée (Mariano de Vieda est l'auteur d'une très récente biographie du Pape, trop rapidement sortie pour
constituer un travail sérieux mais en Argentine aussi, on fait des coups éditoriaux)
L'article de Elisabetta Piqué qui a bien fait de s'inscrire sur ce vol !
(Je plaisante mais il est très chouette, son article. Il y perce une euphorie très naturelle, toute humaine). C'est le papier le plus complet de tous. Il est probable qu'elle a passé tout le vol à bosser au lieu de dormir pour livrer sa contribution à temps pour une parution à Buenos Aires dans la matinée !