mercredi 26 janvier 2011

Le Gouvernement fédéral prend le taureau par les cornes [Actu]

Prenant appui sur un arrêt de la Cour Suprême ordonnant la viabilisation des bidonvilles qui sont établis dans la zone d'urbanisation Matanza-Riachuelo, qui chevauche la limite sud entre la Capitale Fédérale, administrée par le Gouvernement portègne dirigé par le libéral Mauricio Macri, et la Province de Buenos Aires, administrée par le Gouvernement provincial dirigé par le péroniste Daniel Scioli, Amado Boudou, le sémillant ministre fédéral de l'économie et candidat à la candidature au Gouvernement portègne pour le Partido Justicialista (1) vient d'annoncer que l'Etat fédéral va se substituer à la Ville de Buenos Aires et investir 3173 millions de pesos argentins pour construire 17 771 logements dignes de ce nom, puisque Mauricio Macri fait montre en la matière d'une redoutable mauvaise volonté. Il a bien lancé un chantier depuis de nombreux mois mais les travaux sont à l'arrêt depuis longtemps.

On l'a vu dernièrement, le manque de logement accessibles aux couches populaires s'aggrave à Buenos Aires depuis trois ans que Mauricio Macri est aux affaires et y privilégie la spéculation immobilière et les projets de construction fasteux, tout en menant une politique d'intimidation des plus pauvres, pour qu'ils fuient vers la Province, et d'expulsions systématiques des familles pauvres qui s'abritent dans des immeubles à l'abandon, promis à la démolition pour faire place à quelque pharaonique opération sonnante et trébuchante. Cette spéculation immobilière est en train de détruire et de défigurer les quartiers périphériques, comme Villa Urquiza et Villa Pueyrredón, dont les chalets familiaux disparaissent progressivement au profit d'immeubles sans âme. Et au mois de décembre, la crise du logement a provoqué des émeutes paroxystiques dans le quartier très populaire de Villa Soldati, dans des circonstances particulièrement troubles, qui flirtent avec le crapuleux (voir mes articles sur ces événements de fin 2010).

Il est possible que l'initiative de Amado Boudou en début de semaine soit liée à ses ambitions politiques. C'est en tout cas l'interprétation qu'en faisait hier le quotidien Clarín (on ne s'attendait pas à une autre prise de position de sa part). Bien entendu, le journal concurrent et opposé, pro-gouvernemental quant à lui, Página/12, y voit une mesure juste et une prise d'initiative bienvenue de la part du Gouvernement, dont on pourrait dire qu'il empiète sur les prérogatives des autorités locales (l'Argentine est un état fédéra). Les critiques très dures émises par Boudou contre Mauricio Macri et sa gestion négligente ont rebondi le lendemain, c'est-à-dire hier, en une nouvelle bagarre portègne entre députés PRO (fidèles à Macri), Coalición Cívica, une alliance électorale de droite et centre-droit, qui est désormais dans l'opposition au niveau portègne, et Proyecto Sur, le mouvement socialiste dirigé par Pino Solanas, qui est, lui, candidat à la Présidence de la République, après avoir fait en juin 2008 une belle percée sur Buenos Aires (3 millions d'habitants). Les élections législatives, présidentielle et provinciales, doivent avoir lieu en octobre prochain. Certaines, notamment les élections locales à Buenos Aires, pourraient être avancées au mois de juin.

Pour comprendre les enjeux sur lesquels se battent les hommes politiques et qui sont de véritables enjeux de société, cliquez sur les mots-clés "GCBA" et gob argentin, dans le bloc Pour chercher, para buscar, to search, ci-dessus, pour accéder aux articles que j'ai déjà consacrés à la vie politique au niveau de la ville de Buenos Aires (GCBA) et à ceux qui portent sur la vie politique au niveau fédéral (nacional, disent les Argentins), avec le mot-clé "gob argentin".

Pour aller plus loin :
Lire l'article de Página/12 du 25 janvier 2011
Lire l'article de Clarín du 25 janvier 2011
Lire l'article de Página/12 du 26 janvier 2011, sur les rebondissements de la querelle.

(1) PJ : le parti péroniste. Il est en concurrence avec le sénateur Daniel Filmus, un éléphant du PJ, dirait-on en vocabulaire de gauche, en France.