lundi 7 décembre 2020

Tabaré Vázquez dans la presse argentine [Actu]

Le gros titre est pour l'actualité argentine
la photo pour l'enterrement à Montevideo
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Seul Página/12 a publié dans son édition de ce matin d’autres articles que ceux mis en ligne sur son site Internet hier dimanche.

La rédaction rend ainsi compte des obsèques hier à Montevideo et du grand concours populaire qui a accompagné le cercueil jusqu’au cimetière de La Teja.

En haut : les élections au Venezuela (environ 70% d'abstention)
En bas : "Un gentleman de la politique"
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Pour les autres titres, la situation est étrange : les unes de l’édition imprimée tiennent compte de ce qu’il s’est passé hier mais ce n’est pas le cas des sites Internet. Et en ce qui concerne La Nación, c'est encore plus étrange : les articles de la version imprimée, qui sont différents des articles numériques d'hier, étaient introuvables sur le site Internet ce matin lorsque j'ai préparé cette note.

Même structure que pour La Prensa :
en haut, le Venezuela
en bas, l'Uruguay
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© Denise Anne Clavilier

Pour aller plus loin :

lire l’article principal de Página/12 qui n’a toutefois pas fait l’information principale de sa une de ce lundi.

dimanche 6 décembre 2020

Trois jours de deuil national en Uruguay [Actu]

Une belle photo ! et si typiquement uruguayenne !
Tan oriental...

Aujourd’hui, l’Uruguay dit adieu à son premier président de gauche. La mort de Tabaré Vázquez, à 3h cette nuit (heure uruguayenne), n’est pas du tout une surprise : la famille avait annoncé il y a une dizaine de jours que sa santé s’était brutalement dégradée et que le cancer dont il souffrait avait méchamment métastasé. Le 15 novembre, il avait enregistré sa dernière interview, diffusée seulement il y a quelques jours, à travers laquelle tout le monde avait pu comprendre la gravité de la situation dont il était parfaitement conscient.

La très belle photo choisie par son fils, Alvaro Vázquez Delgado,
pour annoncer la mort de son père très tôt ce matin sur Twitter

Les quotidiens avaient déjà bouclé leurs éditions papier lorsque la nouvelle a été connue. Les unes ne reflètent donc pas cette actualité mais ni le dimanche ni la proximité de la solennité mariale de mardi n’empêchent les rédactions d’être actives sur la toile : tous les journaux uruguayens se sont remplis au fil des heures d’articles nécrologiques et de messages des personnalités et des chefs d’État qui affluent vers Montevideo. Les journaux argentins sont moins réactifs, y compris Página/12 pour laquelle Vázquez était une des grandes figures politiques du continent (tout le monde est en long week-end en Argentine).

Tabará Vázquez sur les gradins d'un stade.
Il venait d'une famille ouvrière et n'avait pas oublié ses racines populaires

Comme l’épidémie de covid-19 frappe fortement le pays, qui s’était tiré à moindre frais de la première vague, la famille a décidé de ne pas faire la moindre veillée. Un cortège réduit devait se former à 13h, sur le parvis de la mairie de Montevideo (dont Vázquez fut le maire), pour emporter le corps jusqu’à sa dernière demeure et les Uruguayens étaient invités à y assister au mieux sur le trottoir sans créer d'attroupement ou, faute d'habiter le long du parcours, de leur salon, à travers le direct que les chaînes de télévision ont retransmis. Le cortège s'est rendu au cimetière de La Teja où l’inhumation s'est tenu dans la plus stricte intimité, comme il convient dans les circonstances sanitaires présentes.

Demain, les journaux feront leur une sur le disparu, qui aura brisé le plafond de verre qui avait empêché depuis l’indépendance à une formation de gauche de prendre les rênes du pays. Tabaré Vázquez aura été président à deux reprises, de 2005 à 2010 puis en 2015 jusqu’à la fin février de cette année lorsqu’il a transmis le pouvoir au champion de la droite, Luis Lacalle Pou, qui a tenu à aller s’incliner devant le cercueil à midi.

Un message d'une famille d'origine grecque
"Bon voyage, président. Pour toujours, Tabaré"

Même élu à la tête du pays, il n’avait pas renoncé à exercer son métier de médecin, qu’il considérait comme une seule et même vocation avec l’engagement politique : s’occuper des gens. C’était un éminent oncologue qui s’était notamment formé à Gustave Roussy, à Paris. Souriant, affable, fraternel, calme et d’une honnêteté qui dénote dans le paysage politique sud-américain où la relation à l’argent est généralement assez malsaine, c’était aussi un fervent catholique qui avait tenu à confesser sa foi et à manifester ses convictions après le premier vote de dépénalisation de l’avortement par le parlement en Uruguay, ce qui obligea son successeur, Pepe Mujica, à relancer le débat quelques années plus tard, alors que l’idée avait fait son chemin.

Le cortège funéraire avec beaucoup de drapeaux du Frente Amplio
aux couleurs choisies par le héros révolutionnaire et indépendantiste Artigas
Sur cette photo, on ne voit pas de drapeau national

Tabaré Vázquez aurait eu quatre-vingts ans le 17 janvier prochain.

Avec beaucoup de dignité, le président en fonction a décrété un deuil national jusqu’à mardi prochain. Les deux communiqués successifs de ses services insistent sur le fait qu’il s’agit pour « tout le pays » d’honorer la mémoire d’un « président de tous les Uruguayens ». En Uruguay, à droite, il reste encore en effet une tentation de rejeter le défunt pour des raisons bêtement et bassement partisanes et idéologiques comme l’ont montré certains commentaires en ligne, assez hideux, à sa si digne dernière interview télévisée.

© Denise Anne Clavilier

Pour aller plus loin :
dans la presse uruguayenne
lire l’article principal de El País
lire l’article principal de La República (qui a annoncé le décès en publiant le communiqué officiel du Frente Amplio)
sur le site Internet de la Présidence uruguayenne
lire le communiqué sur les trois jours de deuil national
lire le communiqué sur les propos de Luis Lacalle Pou au sortir du domicile des Vázquez

samedi 5 décembre 2020

Felipe Pigna aborde le mythe et l’histoire de Gardel [Disques & Livres]

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L’historien revisionista (1) Felipe Pigna a sorti, il y a moins d’un mois, une biographie de Carlos Gardel à travers laquelle il entend présenter aussi un tableau du tango qui arrive à l’âge adulte grâce notamment à un artiste comme ce chanteur et compositeur génial.

Página/12 propose ce matin, en tête de son supplément culturel quotidien, une interview de l’auteur qui tient une place importante dans le groupe Octubre dont ce journal fait partie. Felipe Pigna est en effet le directeur général de Caras y Caretas, une revue mensuelle (2) et un centre culturel appartenant au même groupe. Pourtant, ce n’est pas là que Felipe Pigna présentera son nouvel ouvrage samedi mais avec Alejandro Dolina, dans l’émission de radio que l’humoriste anime sur la 750 AM, la radio du groupe, toutes les nuits du mardi au samedi, La venganza será terrible (la vengeance sera terrible). Felipe Pigna sera son invité jeudi 10 décembre 2020 et vous pourrez l’écouter en replay sur le site Internet de la radio.

"Un autre Gardel", titre Página/12
sur une photo du reflet de l'auteur

La maison d’édition, Planeta Argentina, propose le livre en format papier et en Ebook.

Certaines plateformes européennes commercialisent la version digitale.

© Denise Anne Clavilier

Pour aller plus loin :

lire l’article de Página/12
lire la présentation sur le site de la maison d’édition qui propose aussi gratuitement la lecture d’une vingtaine de pages au début de la biographie.

Mise à jour du 12 décembre 2020 :
lire cette interview de Felipe Pigna dans Clarín au sujet de Gardel dont on fêtait hier l'anniversaire de naissance.



(1) Felipe Pigna est l’une des grandes figures de ce courant, une lecture péroniste et de plus en plus kirchneriste de l’histoire argentine. En histoire événementielle, très peu d’acteurs argentins savent séparer en eux le citoyen, qui a des prises de positions idéologiques et partisanes, et le chercheur, qui, en bonne méthodologie, devrait garder ses distances avec cette actualité brûlante. Ce livre comme les autres n’échappe pas à cette règle qui est le propre de tous ces pays neufs qui forment l’Amérique latine. A noter que si aux États-Unis, l’histoire événementielle a su accéder à une méthodologie scientifique rigoureuse, c’est parce que la puissance économique du pays lui a permis de laisser au cinéma et aux arts en général le soin de développer le « roman national » indispensable pour constituer la nation.

(2) Sans rapport historique avec l’hebdomadaire illustré des années 1890-1930 dont le groupe Octubre a récupéré le titre, tombé dans le domaine public faute d’un héritier légal.

La UCA suit la ligne du pape François [Actu]

"64% des enfants argentins sont pauvres"
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L’Observatoire de la Dette Sociale de l’université catholique argentine (UCA) a présenté avant-hier son nouveau rapport sur la pauvreté et l’indigence dans le pays.

Pour la période qui va de juin à octobre 2020, l’organisme universitaire relève un taux de 44,1 % de pauvreté dans le pays, soit 20 millions de personnes, et de 10,1 % d’indigence, ce qui recouvre 4,1 millions d’individus, dans un pays de 46 millions d’habitants. En ville, le taux est encore plus élevé. Pour la pauvreté, il s’élève à 44,2 %, soit un total de 18 millions d’individus.

Six enfants sur dix souffrent du phénomène d’appauvrissement généralisé.


"La pauvreté touche 44,2% de la population
et 64,1% des gamins, selon la UCA"
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Dans un pays dont les habitants ont toujours eu beaucoup de ressources pour trouver ou créer de l’activité, quand bien même ce serait de façon informelle et dans le système D, on compte aujourd’hui 14,2 % de chômeurs. Pour les travailleurs, le pourcentage de personnes qui occupent des postes précaires a notablement augmenté dans l’intervalle étudié. Seuls 74,1 % des gens qui avaient un emploi stable au début de l’année ont conservé à la fin de la période une situation semblable.

L’étude observe que 55,5 % de la population a touché au moins une aide publique depuis le début de la crise sanitaire. Sans ces mesures sociales, le taux de pauvreté serait aujourd’hui de 53,1 % et celui de l’indigence de 27,9 %.

Clarín a préféré traiter l'info en titre très secondaire
(dans la colonne droite, au milieu)
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Même les journaux de droite relèvent ce détail, ce qui n’allait pas de soi avant la pandémie. Doit-on voir là une prise de conscience d’une nécessaire intervention de l’État pour amoindrir les effets de la crise sur les plus fragiles ?

© Denise Anne Clavilier

Pour aller plus loin :

lire le rapport de l’observatoire de la UCA (téléchargeable en quatre documents pdf).

L’ISF one-shot est adopté, la loi contre les incendies de promoteurs aussi [Actu]

La session d'hier, en visioconférence comme d'habitude
Photo Sénat de la Nation argentine


Hier, juste avant que le pays ne plonge dans le pont du 8 décembre, le Sénat a adopté deux mesures emblématiques de l’actuelle majorité : une contribution exceptionnelle sur les gros patrimoines et une loi qui interdit de modifier l’affectation des terres après qu’elles auront été détruites par un incendie.

Les deux nouvelles lois font grincer des dents à droite. Pourtant, dans la triple crise, financière, sanitaire et climatique, qui met le pays à genoux, elles paraissent relever du simple bon sens.

La contribution sur le patrimoine va toucher de 10 à 12.000 personnes qui ont déclaré un patrimoine supérieur à 200 millions de pesos. A priori, pas vraiment des gens qui ont été comptabilisés dans le récent rapport de l’Observatoire de la Dette Sociale de la UCA ! Cela n’empêche pas l’opposition de préparer des recours judiciaires contre ce qu’elle qualifie de frein à l’investissement. Aucune pudeur !

Ce que voit la présidente ! Cela ne doit pas être facile tous les jours...
Photo Sénat de la Nation argentine

La loi qui empêche la spéculation foncière répond, quant à elle, à une situation catastrophique depuis plusieurs années où de gigantesques incendies, presque incontrôlables, ont détruit une quantité astronomique d’hectares de forêt, de garrigue ou de steppe dans le nord du pays, à l’est comme à l’ouest. La province de Córdoba a été la plus récemment sinistrée. Il s’agit de protéger ces terres, avec la biodiversité animale et végétale qu’elles abritent, épargner à l’atmosphère de se charger de fumées polluantes et éviter que les pompiers mettent en danger leur vie ou leur santé simplement parce que des propriétaires peu scrupuleux désirent lancer sur les territoires ainsi dévastés d’ambitieux projets immobiliers ou agricoles très rémunérateurs dans les deux cas (culture de soja transgénique à grand renfort d’intrants chimiques, par exemple). Les terrains incendiés cette année sont concernés par l’interdiction.

Espérons que la mesure sera efficace. En France, dans les années 1970, la Côte d’Azur a été protégée d’innombrables feux de forêts estivaux dès que la législation a interdit aux promoteurs de construire sur les terrains incendiés. Comme par hasard, d’une année sur l’autre, après ce vote, les Provençaux et les touristes ont beaucoup moins entendu hurler les sirènes de tous les villages à trente kilomètres à la ronde et quand ils les entendaient encore, le feu n’était pas aussi systématiquement en train de ravager d’admirables coteaux plongeant dans la mer et de faire partir en fumée tout un patrimoine végétal de conifères et de chênes verts. Quelle coïncidence, non ?

Toujours est-il que là encore l’opposition argentine hurle à la mort et crie à l’inconstitutionnalité de la mesure. Il est donc probable que les parlementaires de la majorité ont visé juste. La pire réaction est le titre pernicieux que La Prensa a donné à son article sur le sujet : « Approbation d’une loi que le kirchnerisme a présentée sous prétexte d’éviter les spéculations sur les champs incendiés ». On ne fait pas plus cynique !

© Denise Anne Clavilier

Pour aller plus loin :

sur la contribution exceptionnelle
lire l’article de Página/12
sur la loi contre les incendies
lire l’article de La Prensa

Alberto Fernández clôt la Conférence industrielle de la UIA [Actu]

"C'est un moment pour refonder notre pays", cite le gros-titre

Le président Alberto Fernández a tenu à rencontrer une nouvelle fois les entrepreneurs de la UIA (union industrielle argentine) en allant clore leur vingt-sixième conférence annuelle.

Il est allé leur rappeler que le relèvement économique du pays est en bonne partie entre leurs mains. Il a insisté sur le caractère sanitaire et planétaire de la crise traversée en 2020 en leur faisant remarquer, et il semble qu’il faille le dire à tous les dirigeants économiques partout dans le monde, que pour une fois, elle n’était ni conjoncturelle ni seulement nationale.

Il a rappelé l’état socialement et financièrement catastrophique dans lequel il a trouvé le pays en prenant ses fonctions il y a un an et tenté de les convaincre que l’Argentine a besoin d’un État social, qui soutienne les plus démunis et les chômeurs, et aussi, surtout, d’un entreprenariat patriote et inventif qui investisse et embauche. Ce qui est étonnant, c’est de constater que ce matin, la plupart des journaux titrent en reprenant cette partie du discours au lieu d’aller chercher la bagarre comme le font d’ordinaire les quotidiens mainstream… Pourtant, le président de l’UIA avait au cours de cette dernière soirée dit son refus de l’impôt sur la fortune, en discussion finale au Sénat, dont il prétend qu’il pénalise la production (autrement ce qu’on appelle industria en Argentine) et qui a été effectivement voté le lendemain.

Seul Página/12 a toutefois titré sur la volonté du président de faire surgir de la crise un pays nouveau. Il est aussi le seul à traiter l’information sur sa une, tandis que La Prensa a préféré faire allusion sur sa première page à l’intervention pas vraiment aimable d’Angela Merkel, qui faisait partie des invités de clôture et qui a exigé que l’Argentine envoie un signe politique, usant à nouveau envers ce pays de la violence qu’elle avait su montrer en son temps à l’égard de la Grèce. Quand on voit comme elle a changé son fusil d’épaule en Europe, c’est à n’y pas croire !

© Denise Anne Clavilier

Pour aller plus loin :

lire le communiqué officiel de la Casa Rosada
voir l’ensemble des interventions sur le site Internet de la UIA

jeudi 3 décembre 2020

Souvent fédé varie, bien fol est qui s’y fie (1) [Actu]

En gros-tire jaune, pour annoncer le numéro spécial :
"C'est pour toi : le Dix du peuple"
En bas à gauche, sous le mot "Racisme"
l'annonce du revirement de la UAR
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Assaillie par les réclamations de toutes parts, émises en premier lieu par les joueurs sélectionnés pour l’actuel tournoi et par les autres, qui sont restés en Argentine, par des joueurs nationaux retraités, par divers clubs, en premier lieu ceux des joueurs, dont le très sélect Club de San Isidro, en banlieue nord-ouest de Buenos Aires, la ville la plus chic, la plus riche peut-être de toute l’Argentine et ce depuis l’époque coloniale, l’UAR, la fédération argentine de rugby, a finalement retiré, au bout de seulement deux jours, les sanctions temporaires qui frappaient, en attente du conseil de discipline, les trois rugbymen auteurs de tweets insultants, racistes, xénophobes et sexistes… Ils ne seront pas poursuivis. Il ne s’est rien passé !

L'information est traitée en bas
en deux titres côte à côte.
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Les bonnes intentions de l’institution n’auront donc pas tenu très longtemps.

Toutefois les trois joueurs incriminés ne participeront pas à la rencontre de samedi contre les Wallibis, ni comme titulaires, ni comme remplaçants. C’est un moindre mal.

L'information est traité tout en haut : "Marche arrière"
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La Nación, qui avait été le quotidien le plus discret sur l’affaire lundi dernier, se rattrape ce matin en publiant sur son site Internet une demi-douzaine d’articles différents, dont un éditorial d’un ancien capitaine des Pumas, Hugo Porta (voir la une), qui vient défendre ses trois jeunes confrères sous prétexte que tout ça, c’est vieux et qu’il faut passer à autre chose !

L'information est traitée en haut à droite
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Certes, ces vieux tweets ne sont pas réapparus ainsi par miracle. Il est plus que probable qu’il s’agit de représailles de certains Argentins révulsés par le peu d’empressement des Pumas à s’associer au deuil national pour la mort de Maradona. Le retrait des sanctions sans même une audition des intéressés est ahurissant. Le scandale avait largement débordé de l’Argentine. Il avait éclaté un peu partout en ovalie, à commencer par l’Australie, offensée puisqu’elle accueille la compétition, et Paris, puisque le capitaine argentin joue toute l’année au Stade Français.

L'information est traitée en bas à droite

© Denise Anne Clavilier

Pour en savoir plus :




(1) Pour mes lecteurs sud-américains : « souvent femme varie, bien fol [fou] est qui s’y fie », une déclaration sexiste attribuée au roi de France François 1er (1494-1547) par… Victor Hugo (1802-1885), qui l’avait lui-même empruntée en partie à l’abbé-mémorialiste Brantôme (c. 1537-1614), dont la phrase apocryphe fut enrichie par le médecin Jean Bernier. Comme quoi, Twitter n’a pas inventé le retweet citation-pillage, il s’est contenté d’aggraver massivement le phénomène.

Líbero rend hommage à Maradona [Actu]


Sans surprise, le supplément sportif du lundi de Página/12, Líbero, est consacré à Diego Maradona.

Il est décrit et célébré sous toutes les coutures et par toute sorte de plumes : éditorialistes, chroniqueur culturel (et pas n’importe qui, ni plus ni moins que Cristián Vitale), ancien compagnon d’armes (un ancien joueur de Boca Juniors converti en commentateur sur une grande chaîne privée de sport) et même dix sportives de haut niveau dont des footballeuses…

© Denise Anne Clavilier 

Pour aller plus loin :

consulter le contenu de Líbero du 30 novembre 2020
lire l’article de dernière page : une psychanalyste argentine analyse ce que représente la figure de Diego Maradona (Página/12, 3 décembre 2020).

Mise à jour du 5 décembre 2020 :
l'un des magazines mensuels du groupe Octubre, El Planeta Urbano, propose une autre une avec un autre article, dont le titre emprunte à Víctor Hugo Morales : Barrilete cósmico, de que planeta viniste (cerf-volant cosmique, de quelle planète viens-tu ?)

mardi 1 décembre 2020

De l’Au-delà, Maradona a shooté dans le tas [Actu]

"Parfois, il est sali" (allusion à la phrase de Maradona,
lorsqu'à ses adieux à la carrière de joueur, il a présenté
ses excuses pour ses comportements déviants
en expliquant que le ballon lui n'avait pas été sali :
"la pelota no se mancha"
(voir mon article du 7 octobre 2009 sur cette citation)

Vendredi, en Australie, juste avant leur match contre les Pumas argentins, le beau geste chevaleresque des All Blacks a ému le monde entier (voir mon article de samedi dernier) mais il a eu assez peu d’effet sur les Pumas eux-mêmes dont la froideur à cette occasion a choqué leurs compatriotes, d’autant plus que Maradona, de son côté, patriote comme pas deux, admirait cette autre équipe nationale qui fait briller les couleurs argentines à travers le monde. L’opinion publique en a été assez frappée, tant et si bien que le résultat du match lui-même, désastreux pour l’Argentine, est très vite passé au second plan, tout le monde relevant ce manque d’émotion et s’interrogeant sur ce qu’il signifiait surtout de la part d’une équipe nationale engagée à l'étranger dans une compétition internationale.

Le gros-titre vise Cristina Kirchner
mais la photo met au pilori les trois rugbymen !
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En Argentine, le rugby est, depuis toujours, un sport de l’élite sociale et économique, comme le golf et le polo. Très longtemps il n’a été pratiqué que dans des écoles privées d’origine britannique par des fils à papa qui regardaient de très haut le reste de la société. Très longtemps, il a été commun que les clubs de rugby soient interdits, tacitement ou par écrit dans les statuts ou le règlement intérieur, à telle ou telle catégorie de personnes, notamment les juifs.

Cet été, le 18 janvier, le rugby a montré l’une de ces facettes pour le moins odieuses lorsqu’un groupe de pratiquants de ce sport, des jeunes gens tous au début de la vingtaine, tous très arrogants, ont assassiné, en meute, un autre jeune homme qu’ils ont insulté et assailli pour la seule et unique raison qu’il était homosexuel et qu’ils ont massacré en s’acharnant sur lui, au moment où il sortait de boîte dans la nuit estivale. On attend la comparution au tribunal de huit d’entre eux, deux autres ayant été mis hors de cause par l’instruction, ce qui a provoqué bien des commentaires désobligeants sur la justice et la manière dont elle est rendue.

En haut, première visio-conférence de Alberto Fernández avec Joe Biden
en bas, le scandale des Pumas
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Or hier soir, brutalement sont ressortis publiquement des tweets postés il y a huit ou neuf ans par trois des joueurs de la sélection nationale de rugby dont le capitaine, qui joue au Stade Français, Pablo Matera (1). Dans les tweets incriminés, les trois hommes tiennent des propos racistes, antisémites et xénophobes. Deux d'entre eux ont présenté des excuses mais le scandale est plus que grand en Argentine.

La fédération argentine de rugby (UAR) a aussitôt sanctionné les joueurs incriminés. Ils ont tous trois été suspendus de l’équipe nationale et ils passeront en commission disciplinaire dès leur retour au pays. Samedi prochain, l’équipe jouera sans eux. La presse considère qu’ils sont d’ores et déjà exclus de la sélection nationale et il est plus que probable en effet qu'ils ne pourront plus jamais y jouer.

C'est la une la plus discrète sur le sujet
mais il est bien là : en bas à droite
La photo illustre le début de la saison estivale
pendant laquelle le masque restera obligatoire
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Ce matin, le scandale figure à la une de tous les journaux nationaux, y compris La Nación, qui est le quotidien de la classe sociale qui est le berceau de la discipline en Argentine. La crise ne fait sans doute que commencer. La discipline va probablement devoir faire le ménage dans ses traditions, ses recrutements, ses pratiques quotidiennes dans les clubs locaux, etc.

© Denise Anne Clavilier

Pour aller plus loin :


Ajout du 2 décembre 2020 :
lire cet article de La Prensa sur la réaction indigné du ministre fédéral des Sports, un ancien président d'un fameux club de football de Buenos Aires (San Lorenzo de Almagro)



(1) Il aura d’ailleurs à s’expliquer devant les instances disciplinaires lorsqu’il sera de retour à Paris. Aussitôt le scandale déclenché, Matera a supprimé son compte Twitter. Il a publié via un autre réseau social un long message d’excuse adressé au public, aux compagnons d’équipe et à sa famille. Il prétend qu’il n’avait pas conscience en 2012 de la portée de ses propos. Qu’est-ce à dire ? Beaucoup de muscle et peu de cervelle ?