La session d'hier, en visioconférence comme d'habitude Photo Sénat de la Nation argentine |
Hier, juste
avant que le pays ne plonge dans le pont du 8 décembre, le Sénat a
adopté deux mesures emblématiques de l’actuelle majorité :
une contribution exceptionnelle sur les gros patrimoines et une loi
qui interdit de modifier l’affectation des terres après qu’elles
auront été détruites par un incendie.
Les deux nouvelles lois font grincer des dents à droite. Pourtant, dans la triple crise, financière, sanitaire et climatique, qui met le pays à genoux, elles paraissent relever du simple bon sens.
La
contribution sur le patrimoine va toucher de 10 à 12.000 personnes
qui ont déclaré un patrimoine supérieur à 200 millions de pesos.
A priori, pas vraiment des gens qui ont été comptabilisés dans le
récent rapport de l’Observatoire de la Dette Sociale de la UCA !
Cela n’empêche pas l’opposition de préparer des recours
judiciaires contre ce qu’elle qualifie de frein à
l’investissement. Aucune pudeur !
Ce que voit la présidente ! Cela ne doit pas être facile tous les jours...
Photo Sénat de la Nation argentine
La loi qui empêche la spéculation foncière répond, quant à elle, à une situation catastrophique depuis plusieurs années où de gigantesques incendies, presque incontrôlables, ont détruit une quantité astronomique d’hectares de forêt, de garrigue ou de steppe dans le nord du pays, à l’est comme à l’ouest. La province de Córdoba a été la plus récemment sinistrée. Il s’agit de protéger ces terres, avec la biodiversité animale et végétale qu’elles abritent, épargner à l’atmosphère de se charger de fumées polluantes et éviter que les pompiers mettent en danger leur vie ou leur santé simplement parce que des propriétaires peu scrupuleux désirent lancer sur les territoires ainsi dévastés d’ambitieux projets immobiliers ou agricoles très rémunérateurs dans les deux cas (culture de soja transgénique à grand renfort d’intrants chimiques, par exemple). Les terrains incendiés cette année sont concernés par l’interdiction.
Espérons que la mesure sera efficace. En France, dans les années 1970, la Côte d’Azur a été protégée d’innombrables feux de forêts estivaux dès que la législation a interdit aux promoteurs de construire sur les terrains incendiés. Comme par hasard, d’une année sur l’autre, après ce vote, les Provençaux et les touristes ont beaucoup moins entendu hurler les sirènes de tous les villages à trente kilomètres à la ronde et quand ils les entendaient encore, le feu n’était pas aussi systématiquement en train de ravager d’admirables coteaux plongeant dans la mer et de faire partir en fumée tout un patrimoine végétal de conifères et de chênes verts. Quelle coïncidence, non ?
Toujours est-il que là encore l’opposition argentine hurle à la mort et crie à l’inconstitutionnalité de la mesure. Il est donc probable que les parlementaires de la majorité ont visé juste. La pire réaction est le titre pernicieux que La Prensa a donné à son article sur le sujet : « Approbation d’une loi que le kirchnerisme a présentée sous prétexte d’éviter les spéculations sur les champs incendiés ». On ne fait pas plus cynique !
Pour aller
plus loin :
lire l’article de Página/12
lire l’article de La Prensa