Milongas en las Plazas (Milongas sur les places) est une initiative de la Ville de Buenos Aires et plus précisément de son Ministère de la Culture, qui possède aussi dans ses attributions les affaires touristiques.
Ce cycle va se déployer sur six vendredis soir dans différents quartiers de Buenos Aires et différents espaces verts de la ville (plaza, en Argentine, c’est une place arbolée. S’il n’y a pas l’ensemble arbres + fleurs + gazon, ce n’est pas une plaza...).
Il s’agira de spectacles de tango (avec des démonstrations de danseurs de renom) couplés à des bals populaires où habitants et touristes pourront danser au son d’orchestres en vivo (en chair et en os) et à des cours ouverts prodigués par des professeurs enseignant dans les écoles de tango du quartier. Le tout gratuitement.
Le cycle a été lancé vendredi 16 janvier, à 21h, avec un hommage à Francisco Canaro (1888-1964), compositeur et chef d’orchestre mythique, astre des années 30 et 40 (et jusque plus tard encore), fabuleusement apprécié par les danseurs de milonga car son rythme est facile à suivre et n’a rien de sorcier (1) : il se caractérise par une même valeur donnée à chacun des quatre temps de la mesure du tango. Le Quinteto Pirincho, une formation qu’il avait fondée en lui donnant son surnom (2), qui n’a bien évidemment aujourd’hui plus grand chose en commun avec le groupe d’origine mais qui se fait fort de conserver vivant ce style orchestral (3), le Quinteto Pirincho était donc la formation qui a eu l’honneur d’inaugurer le cycle au cours d’une soirée qui a eu lieu sur le Bulevar del Monumento al Tango, dans le quartier de Puerto Madero (esquina Azucena Villaflor y Aime Paine). Le spectacle était à la charge d’un artiste du Parakultural, une salle du quartier de San Telmo, Omar Viola, et le couple champion du monde en catégorie Tango Salón, au dernier Mundial del Tango en août 2008, Cristina Sosa et Daniel Nacucchio, se sont livrés à quelques démonstrations (cf. mon article sur le Mundial le 5 septembre 2008).
(1) Ça n’a rien de sorcier, ce n’est pas sorcier (no hay ninguna brujería, no es nada brujo) : no es nada difícil, es muy fácil.
(2) Le pirincho est un oiseau bien connu en Argentine. Il se caractérise par une sorte d’aigrette ébouriffée. Le père de Canaro l’avait surnommé ainsi à sa naissance à cause de l’implantation des cheveux du bébé. Pourtant, de Canaro, on garde surtout l’image d’un homme plutôt dégarni...
(3) Il y a ainsi à Buenos Aires plusieurs orchestres qui se sont spécialisés dans un rôle de conservation. Color Tango joue à la Pugliese, Los Reyes del Tango joue à la D’Arienzo, Quinteto Pirincho joue à la Canaro, etc... La démarche ne doit pas être confondue avec celle de la Orquesta Escuela de Tango Emilio Balcarce. Celle-ci conserve tous les styles des grands orchestres historiques (Pugliese, Di Sarli, D’Arienzo, Troilo, Piazzolla) mais dans une optique de transmission esthétique, technique et culturelle. Les musiciens y passent sans cesse d’un style à un autre, en répétition comme en concert, ce qui lui éloigne tout risque de sclérose ou d’absence d’une originalité propre, d’autant que les instrumentistes n’intègrent cette formation que pour quelques années, le temps d’apprendre, avant de voler de ses propres ailes, alors que les encadrants appartiennent tous à leur propre formation et sont eux-mêmes des compositeurs et des arrangeurs originaux (Néstor Marconi et Emilio Balcarce avant lui, Ignacio Varchausky, Ariel Ramirez...)