Ce matin, Página/12 a une nouvelle occasion de dénoncer Mauricio Macri, son ennemi juré, installé, depuis décembre 2007, à la tête du Gouvernement de la Ville Autonome de Buenos Aires, où il mène une politique ultra-libérale, très dure aux pauvres et aux fragiles et passablement propice aux affaires économiques.
C’est le 19 juillet dernier qu’un avocat du Conseil des Droits de Enfants et Adolescents de la Ville a porté plainte auprès des services de police pour non assistance (abandono) à mineurs en danger contre un couple sans toit, qui a trouvé refuge, avec ses enfants mineurs, sous le pont de l’autoroute du 25 de Mayo, dans le sud de Buenos Aires (à Buenos Aires, les autoroutes traversent toute la ville sur des voies aériennes, qui forment autant de ponts très larges, sous l'énorme tablier desquels on est un tout petit peu protégé du vent, du froid de l’hiver et de la pluie, mais pas du bruit ni de la pollution ni du passage des voitures dans la rue qui passe sous le pont et encore moins du passge des gros bras qui attaquent les sans logis pour les inciter à quitter la ville et à rejoindre la Province de Buenos Aires pour fuir les sévices dont ils sont l'objet dans la capitale).
Dès le lendemain, lui ont emboîté le pas différents ministres et directeurs de service de ce même gouvernement portègne. Le Procureur n’a néanmoins moins pas donné suite à ces dénonciations parce qu'il estime que les parents ainsi mis en cause se trouvent eux-mêmes en situation de grande précarité et que le fait de faire vivre ainsi leurs enfants ne peut pas leur être imputé comme un délit. En l'occurrence, les deux personnes que les dignitaires ont cherché à transformer en délinquants ou en criminels sont un homme de 51 ans qui exerce le métier de cartonero (chiffonier) et sa femme de 40 ans, qui n'a pas de papiers. Leurs deux enfants ont respectivement 10 ans et 10 mois.
Une nouvelle vague de froid polaire vient de s’abattre sur Buenos Aires, quelques jours après la fin de la première. La nuit, le thermomètre descend en-dessous de zéro, ce qui représente une température peu habituelle dans la capitale argentine et donc une pénible contrainte pour des organismes mal adaptés à de tels frimas. A l’aube du 4 juillet dernier, un nouveau-né, Luis Navarro Fernández, né dans la rue 25 jours plus tôt et dont les parents vivent sous ce même pont de cette même énorme autoroute, est mort d’une pneumopathie et les médecins de l’hôpital voisin, où sa mère s’est précipitée pour tenter de le sauver, n’ont pas pu le réanimer. Depuis, la famille, le père, la mère et leurs cinq enfants toujours en vie, a été logée dans un hôtel du quartier de Constitucion.
Comme j’ai eu l’occasion de le dire ici à plusieurs reprises depuis la fin de l’été austral, les gens qui se retrouvent à la rue à Buenos Aires le doivent en grande partie à la politique anti-sociale de Mauricio Macri. Aussi, dès qu’a été connue la nouvelle des plaintes déposées auprès des services de police par les instances municipales, deux députés siégeant au Congrès, membre de Proyecto Sur, l’un des partis socialistes argentins, dirigé par Pino Solanas, élu de la Legislatura de Buenos Aires, ont porté eux-mêmes plainte contre Mauricio Macri pour abus de pouvoir et manquement à ses devoirs de détenteur de l’autorité exécutive (incumplimiento de sus deberes de funcionario, terme qui, en Argentine, ne veut pas dire fonctionnaire mais haut-commis de l’Etat ou Ministre).
Les deux élus socialistes ont présenté leur requête, vendredi 30 juin, devant le tribunal criminel territorialement compétent : elle dit qu’on "peut difficilement trouver des cas dans lesquels on aura recouru de manière aussi manifeste à la criminalisation de personnes se trouvant dans un si haut niveau de vulnérabilité en violation des règles et des procédures en vigueur afin de dissimuler le manquement à ses propres fonctions".
La plainte est déposée nommément contre Mauricio Macri et plusieurs de ses ministres ainsi que contre les membres du Conseil des Droits des Enfants.
Les organismes sociaux estiment aujourd’hui qu’il y a à Buenos Aires environ 15 000 personnes à la rue mais le Gouvernement de la Ville n’en dénombre, lui, qu’à peine 1500. Sur ces 15 000 personnes, près d’un millier serait des mineurs d’âge, la plupart scolarisés. C’est beaucoup plus que ce que les organismes sociaux municipaux estimaient il y a un peu plus d’un an, en mai 2009, au début de l’automne (moins de 2000 personnes, ce qui à ce moment-là paraissait un chiffre exorbitant dans une ville comme Buenos Aires).
Pour en savoir plus :
Lire l’article de Página/12 de ce matin.
Lire mon article du 5 mai 2009 sur le nombre des sans abris déjà alors en forte croissance.
Lire mon article du 25 avril 2010 sur la tentative du Gouvernement portègne de placer les sans-abris dans les les lieux de culte la nuit contre une misérable rétribution pour les institutions religieuses qui se seraient ainsi nuitamment transformées en asiles, totalement inadaptés à cet objectif.
Lire mon article du 23 juin 2010 sur l’augmentation brutale de la mortalité infantile à Buenos Aires en 2009.
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