Comme
tous les ans, deux fois par an, en été et en hiver, la Présidente
Cristina Kirchner vient d'annoncer, dans une grande conférence de
presse depuis le Salón de las Mujeres de la Casa Rosada, le palais
présidentiel à Buenos Aires, l'augmentation des minimaux de
retraite d'un peu plus de 18%, pour atteindre la somme plancher de 3
821,73 pesos par mois, soit 81% du salaire minimum officiel (en
Argentine, comme une part importante de l'économie est souterraine,
le salaire minimum est souvent une pure fiction). Cette décision
concerne le système de retraite par répartition que Cristina a
institué comme système de base dans les premières années de son
premier mandat, en 2009.
Première
annonce politique de l'année, en dehors de son apparition la semaine
dernière lorsqu'elle a reçu les associations juives parties civiles
dans le dossier de l'attentat contre l'AMIA, après la mort violence
du procureur en charge de l'affaire.
Cette
augmentation entrera en vigueur en mars et s'ajoutera à celle qui
avait été implantée en septembre. Depuis 2003, à l'arrivée au
pouvoir de son mari, immédiatement après le krach de l'économie
nationale à Noël 2001, ces minimums ont été augmentés de 2 500
%, ce qu'elle affiche naturellement dans le bilan économique de leur
politique à tous les deux et comme un pied de nez aux tentatives de
quelques fonds spéculatifs de mettre le pays à genoux une deuxième
fois.
Bien
entendu, l'opposition tente de crier à l'opération électoraliste.
C'est oublier que la loi votée en 2009 prévoie cette révision
semestrielle dans un pays qui subit 25% d'inflation par an depuis
2001.
Página/12
fait de cette information sa une, sans oublier de traiter les
avancées de l'étrange décès du procureur (1).
Clarín
et La Prensa préfèrent braquer les projecteurs sur l'affaire du
juge, qui a été enterré hier, au cimetière juif de La Tablada,
tout en continuant d'y impliquer la Présidente avec des arguments
qui partent de plus en plus en vrille et s'éloignent du pas à pas
de l'enquête judiciaire.
La
Nación n'en touche presque pas un mot, préférant des spéculations
interprétatives sur la tenue vestimentaire, les mimiques et le ton
employé par la Présidente pendant sa conférence de presse, tenue
dans un style inimaginable en Europe (et digne, il est vrai, d'un
meeting politique) et retransmise en direct par tous les médias
publics nationaux.
Pour
aller plus loin :
lire
l'article de Clarín
lire
l'article de La Nación, qui inclut l'intégralité du discours de la
Présidente, depuis le canal Youtube de la Casa Rosada ! On
pourra y constater qu'elle ne fait aucune référence au scandale de
cet étrange suicide ou non moins bizarre homicide, qui pourrait être
un fait crapuleux ou un coup monté. Et peut-être a-t-elle eu tort
de ne pas en parler, eu égard à l'émotion que l'événement
suscite dans la saison estivale. L'article de La Nación est
agrémenté d'un tweet ordurier à un degré inouï d'un
informaticien au service du juge qui est le dernier à lui avoir
parlé avant qu'on ne retrouve son corps dans la salle de bain (comme
toujours dans ce type de situation, l'homme se retrouve au centre des
soupçons et passe un très mauvais quart d'heure), un tweet auquel la Présidente fait allusion dans son discours pour dénoncer ce comportement incompatible avec la démocratie.
(1)
S'il y a dix jours, les experts n'avaient pu conclure ni au suicide
(faute de poudre sur les doigts de la victime) ni au meurtre (faute
de trace d'intervention d'un autre homme), hier, les analyses des
prélèvement sur la scène de crime ont montré que dans la salle de
bain où le corps a été retrouvé gisant dans son sang, on ne
pouvait trouver que l'ADN du juge. Ce qui fait de plus en plus penser
à un suicide. D'autant que le juge avait emprunté son arme à l'un
de ses gardes du corps, dont il se servait comme de factotums (ils
lui rendaient tellement de services divers et variés qu'ils
n'avaient même plus le temps d'assurer sa sécurité), qu'il avait
menti à son ex-femme sur les motifs qui lui faisaient écourter ses
vacances en Europe avec leur fille et qu'il était en lien direct
avec des personnes qui semblent avoir été des agents ou des
officiers de services secrets (argentins ou étrangers), dont un
journaliste qui s'est empressé d'aller se réfugier... en Israël
plutôt que de répondre à la justice argentine dans le cadre de
l'enquête. Cela fait tout de même beaucoup !