Message de Zelensky après sa conversation avec Mileí (version anglophone) Cliquez sur l'image pour une haute résolution |
Mileí essaye de montrer qu’il a bel et bien une stature internationale. Il reçoit en effet une farandole d’appels téléphoniques du monde entier, dont il est très fier alors que ça ne veut strictement rien dire, puisque c’est la pratique ordinaire entre États ayant des relations diplomatiques. Hier, son équipe de communication mettait donc en valeur les huit minutes de conversation téléphonique avec le pape François, qu’il avait textuellement traité d’« imbécile qui est à Rome » pendant sa campagne. Le « bureau du président élu » soulignait que celui-ci lui avait à chaque fois donné du Votre Sainteté. Encore heureux mais ils ont trouvé bon de le préciser.
Aujourd’hui,
ces mêmes communicants vantent une conversation avec un certain
Cameron, probablement le ministre des Affaires étrangère du Royaume-Uni ou d'Hollywood, allez savoir !, et avec Volodimir Zelensky, à qui il a
proposé d’organiser en Argentine un forum pour la paix qui
rassemblerait l’Ukraine et l’Amérique latine. Manque de bol !
Ses équipes sont toujours aussi vaseuses et le communiqué montre
toute l’ampleur de leur peu de professionnalisme avec deux fautes
d’orthographe sur les deux prénoms des mandataires. Si celle sur
le prénom de Zelenski peut à la rigueur passer pour une coquille,
celle qui concerne Cameron est à mourir de rire. Je vous laisse la
découvrir !
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Montrer qu’il est contre la Russie et donc pour l’Ukraine est évidemment un moyen de faire sa cour à Jo Biden (1) et à toutes les démocraties de vieille tradition qui se sont rangées au côté du pays agressé depuis février 2014. La démarche n’en est pas moins cousue de fil blanc de la part d’un élu qui s’est ouvertement présenté, tout au long de la campagne électorale, comme le Trump de l’Argentine, à tel point que Trump lui-même reconnaît en lui un émule au point de laisser entendre qu’il pourrait assister, avec leur pote, l’inénarrable Jair Bolsonaro, à la prestation de serment le 10 décembre, cérémonie à laquelle Biden ne se rendra évidemment pas (de toute manière, les présidents des États-Unis ne se déplacent pour ce genre de manifestation nulle part, ni en Amérique ni ailleurs dans le monde).
Du côté de Kiyv, Zelenski, qui a oublié d’être idiot, fait le minimum diplomatique sur son compte Twitter (et je me contrefiche que le nouveau proprio en ait changé le nom) : il prend acte du soutien à l’Ukraine dont il remercie son futur homologue et qu’il dit être « apprécié » par les Ukrainiens. D’habitude lorsqu’un nouveau soutien se manifeste pour son pays, il déploie tous ses talents d’écrivain et d’orateur sur les réseaux sociaux comme dans son allocution vespérale (2).
De toute manière, pour le moment, la promesse de Mileí ne tient pas debout : avec quel autre pays va-t-il représenter l’Amérique latine dans cette affaire ? Le Brésil, le Chili, le Venezuela ? Aucun de ces gouvernements n’est prêt à coopérer avec lui et encore moins dans ce domaine puisque d’un côté Maduro et Lula sont méchamment hostiles à l’Ukraine et de l’autre, le président chilien, authentique et sincère soutien de l’Ukraine, appartient à un courant politique et idéologique aux antipodes de Mileí (dont il a salué la victoire du bout des lèvres). Le Pérou, quant à lui, s’est complètement discrédité sur la scène internationale avec ses multiples renversements de président depuis cinq ans et la violence de la répression contre l’opposition de l’actuelle présidente, elle-même issue de l’un de ces coups d’État parlementaires. La Bolivie n’est guère mieux lotie, tout comme l’Équateur ou la Colombie. En ce qui concerne l’Uruguay, plutôt favorable à l’Ukraine par principe, il traverse depuis une quinzaine de jours une crise de crédibilité gouvernementale telle que le pays n’en a jamais traversée depuis son retour à la démocratie.
Página/12 se paye donc la bobine de sa nouvelle tête de Turc de président tandis que les autres journaux passent discrètement sur ces premiers impairs et que les gouverneurs élus sous l’étiquette Juntos por el Cambio commencent à poser leurs conditions pour coopérer avec le niveau fédéral. Seront-ils une force d’opposition ou finiront-ils par se rallier au pavillon du pirate ? Après tout, ils sont tous de droite. La question reste en suspens.
Pour aller
plus loin :
lire l’article principal de Página/12
lire le billet d’humour de Página/12 sur les couacs de communication
lire l’article de Clarín
sur la conduite des gouverneurs
lire l’article de Página/12
(1) Il devrait avoir droit à sa toute première visite officielle, juste
avant qu’il se rende en Israël
(il est pour la manière forte, Mileí, et il est fait du même bois
que le Premier ministre israélien).
Aujourd’hui même, il doit s’envoler pour un voyage personnel aux
États-Unis.
Que va-t-il fabriquer à l’étranger alors qu’il n’a pas encore
complété son gouvernement qui doit être prêt le 10 décembre
prochain et qu’il n’a pas encore prêté serment ?
Sur le sujet, voir les courts articles (en ukrainien) de 24 TV et de Liga, les seuls qui remontaient lorsque j’ai fait mes recherches ce matin, et l’article en espagnol de Deutsche Welle, qui est leur source commune avec les agences de presse internationales. En revanche, le désastre politique aux Pays-Bas les intéresse beaucoup ! Il faut dire que la livraison des F-16 est en jeu.