lundi 29 décembre 2014

Douloureuse fin d'année : Leopoldo Federico s'en est allé lui aussi [Troesma]

Página/12 a décidé de titrer avec les premiers mots de La última curda
"Pleure, bandonéon, mon cœur..."

Quel mois pour le tango ! Une semaine tout juste après Horacio Ferrer, c'est le Maestro Leopoldo Federico qui s'en va, à l'âge de quatre-vingt-sept ans.

Il était né en janvier 1927 (1) à Buenos Aires, dans le quartier de Balvanera. Il est mort dimanche matin, avant l'aube, à Palermo, le 28 décembre 2014, le jour traditionnel des Saints-Innocents et des blagues de 1er avril en Argentine.

Il a été de toutes les belles aventures du tango à Buenos Aires depuis les années 1940. Il a travaillé avec presque tous les grands créateurs et les grands orchestres qui auront marqué l'histoire de l'âge d'or du genre. Compositeur, il était aussi un remarquable interprète, un directeur d'orchestre, un arrangeur et un orchestrateur recherché. Il a aussi longtemps été le président de l'AADI, l'association des interprètes argentins, un travail institutionnel de défense et de promotion du métier qui a besoin d'avoir ainsi pignon sur rue.

Il a joué avec Piazzolla, avec Salgán, avec Gobbi, avec Di Sarli, avec Troilo, avec Grela, avec Julio Sosa. Il a travaillé avec Mariano Mores et avec Osmar Maderna, avec Miguel Caló et avec Héctor Stamponi. Il fait partie de ces rares figures du tango dont tout le monde disait du bien, dans une ville très cancanière, où l'on aime bien dire du mal du prochain (l'actuel Pape en a même fait l'objet d'une de ses recommandations pastorales, le 19 mars 2013, dans son appel quelques heures avant son installation comme évêque de Rome). Il était aimé et respecté unanimement. Il est vrai qu'il avait un caractère conciliant et chaleureux.

En 1952, il a fondé son propre orchestre et il est resté son maître depuis lors avec des formations à géométrie variable. Ces dernières années, il était un pilier du Festival de Tango de la Ville de Buenos Aires dont il faisait régulièrement l'ouverture ou la clôture.

Il laisse derrière lui une discographie importante, une lutte vigoureuse pour les droits sociaux des musiciens (et quelques frictions musclées avec l'actuel Gouvernement de la Ville Autonome de Buenos Aires),malgré une santé délicate depuis une quinzaine d'années et des douleurs physiques dans tous les sens, qui semblaient disparaître sur scène, lorsqu'il empoignait son instrument.

Deux auteurs avaient publié sa biographie en 2009 aux Editions Gourmet Musical.



Son corps est veillé à la Legislatura de Buenos Aires jusqu'à 13h30 aujourd'hui (heure de Buenos Aires).

Toute la presse salue l'artiste et l'homme, avec un papier de Susana Rinaldi, d'autant plus émouvant qu'il est écrit depuis Paris où la chanteuse exerce maintenant des fonctions de représentation diplomatique comme attachée culturelle.

Pour aller plus loin :
lire l'article de Página/12, qui lui consacre aussi trois notes annexes
lire l'article de Clarín, avec l'hommage de Susana Rinaldi et celui de Atilio Stampone (président de la SADAIC, la société des auteurs et compositeurs argentins)
lire l'article de La Nación, rédigé par Gabriel Plaza, le critique musical spécialisé dans le tango dans ce quotidien, un bon journaliste qui connaît sa partie
lire la dépêche de Télam, qui comprend, dans la version digitale, un petit reportage à la porte du palais législatif portègne, avec une Teresa Parodi au bord des larmes.

En Uruguay, on en parle aussi :



(1) Et non 1924 comme l'écrit par erreur l'agence Télam.