Les Argentins sont comme les autres Occidentaux : ils se passionnent pour ce qui s'est passé ce matin à Westminster Abbey. Miguel Rep a donc consacré son dessin du jour à l'événement en le liant à ce que rappelle le calendrier argentin aujourd'hui et que tout le monde a oublié : le 29 avril, c'est la Fête des Animaux en Argentine (Día del Animal ) (1).
Or le terme animal a deux sens là-bas : il désigne les êtres vivants animés que les humains, à l'exception notable d'une ancienne star du cinéma français, regardent avec une certaine condescendance par qu'ils n'appartiennent pas à leur genre (les petits chiens, les gros lions, les canaris et les baleines à bosse...), il désigne aussi certains êtres humains et la connotation qu'il comporte alors manque quelque peu d'amabilité. Mais il y a pire que de traiter quelqu'un d'animal. Vous pouvez aussi le traiter de bestia et à ce moment-là, le type est vraiment infréquentable.
Et rappelez-vous qu'en Argentine, lorsqu'on parle d'îles et qu'on pense à celle qui abrite la ville de Londres, on pense ipso facto à d'autres îles, situées aux antipodes, des îles perdues dans l'Atlantique Sud, à la limite du cercle polaire et que les Britanniques ont pris manu militari aux Argentins en 1833, les îles Malouines, que les Argentins appellent Malvinas (comme nous) et les Anglais Falklands (et on se demande bien pourquoi ils ont ainsi exclu de cette dénomination la référence à une belle ville fortifiée française, située sur la côte bretonne nord) (2)...
Ce qui donne le dessin suivant :
Página/12 du 29 avril 2011
Le chat : Aujourd'hui, tout le monde parle des noces pompeuses (3) de certain prince d'un caillou perdu dans la mer (4)...
Le chien : Qu'est-ce qu'ils sont bêtes !
(Traduction Denise Anne Clavilier)
(1) Comme le savent les lecteurs fidèles de Barrio de Tango, les Argentins ont une fête pour à peu près tout ce qui existe sous le soleil et il y a grosso modo 365 fêtes par an (année bissextile ou non).
(2) A l'intention de mes lecteurs sud-américains qui ne connaissent pas toujours le pourquoi des bisbilles franco-anglaises : sous Napoléon, un certain marin malouin, répondant au brillant nom de Surcouf, poursuivait (et atteignait assez souvent) les navires de la marine marchande anglaise, qu'il pillait allègrement avec son équipage d'enfants de choeur (angelitos). De ce côté-ci du Channel (la Manche, en français), on aime bien Surcouf. Du côté de Douvres (Dover), non...
(3) L'adjectif pomposo/sa est relatif à la grande pompe royale que 2 milliards de téléspectateurs ont admirée ce matin mais il est plus souvent employé pour qualifier en fait le comportement arrogant et insupportable de quelqu'un qui joue les importants. Il y a là presque un jeu de mot et j'aurais pu, pour en faire passer l'esprit, traduire par "qui nous pompe l'air". Le substantif pompa désigne quant à lui tout autant la pompe (des cérémonies, joyeuses ou funèbres) et la bulle (qu'on peut faire en soufflant dans une pipette trempée dans de l'eau très savonneuse).
(4) islote : petite île très peu peuplée. Tous ceux qui ont regardé les images de foule excentrique et surexcitée répandue tout au long des différents cortèges, de la mariée, du marié, de leurs parents et même des grands-parents, n'auront sans doute aucun mal à reconnaître la Grande-Bretagne dans ce terme. Ajoutez encore que dans l'histoire de l'Argentine, la Grande-Bretagne a joué longtemps un rôle de puissance post-coloniale tout au long du 19ème siècle et jusqu'à la moitié du siècle dernier et que ça a laissé des traces dans la vindicte populaire.