Des préparatifs de voyage, très tanguero le voyage !, et diverses obligations administratives me privent aujourd'hui du temps nécessaire à la rédaction d'un article aussi développé que d'ordinaire dans ces circonstances... Mais pour autant, pas question de laisser passer cette journée sans faire écho à la bonne nouvelle, qui fait du bien à tous au milieu de toutes les mauvaises nouvelles économiques et autres faits divers crapuleux dont les médias en France nous rebattent les oreilles (et les yeux) depuis le début du mois : l'ONG argentine Abuelas de Plaza de Mayo (Grands-Mères de la Place de Mai) a annoncé qu'on avait identifié l'un des 400 enfants volés à leurs familles par la Dictature de 1976-1983. Il s'agit d'une jeune femme prénommée Laura, née dans la prison clandestine installée à l'ESMA (Ecole Supérieure de Mécanique de la Marine) (1), à Palermo, en février 1978. Ce médecin, mariée et mère de deux enfants, est la fille de Susana Siver et Marcelo Reinhold, qui avaient été arbitrairement arrêtés le 14 août 1977. On sait que Marcelo a été assassiné le 9 novembre 1977 mais les goeliers firent croire à sa femme qu'il avait été libéré. On ne dit rien du sort de la mère qui semble avoir pu communiquer avec l'extérieur après la naissance de son enfant, dont il est certain qu'elle a été adoptée frauduleusement et en toute connaissance de cause par la famille qui l'a élevée.
La mère de son père, Luisa Bermúdez de Reinhold, a rejoint Abuelas en 1982, donc sous la dictature, pour rechercher ce bébé dont on avait annoncé la naissance à son mari. Le titre de l'article du quotidien Página/12 cite Estela de Carlotto, la Présidente de Abuelas, qui se réjouit à cette occasion que "la grand-mère ait assez vécu pour connaître cette petite-fille".
C'est Laura Reinhold Siver elle-même qui a alerté Abuelas sur sa situation il y a quatre ans car elle était envahie par le doute sur son identité depuis de nombreuses années.
Pour aller plus loin :
Vous pouvez aussi vous reporter au site Internet de Abuelas, dont vous trouverez le lien dans la Colonne de droite, dans la rubrique Cambalache (casi ordenado), dans la partie inférieure.
(1) Après le retour de la Démocratie, l'ESMA a été désaffectée et c'est depuis plusieurs années un centre culturel dédié à la mémoire des victimes de la répression politique, essentiellement dans la période où la Junte militaire exerçait le pouvoir. Pendant la dictature, l'ESMA abritait un centre de torture et une maternité clandestine où les prisonnières accouchaient, le plus souvent avant d'être exécutées tandis que leur bébé, s'il avait survécu, était remis, sous une fausse identité et avec une fausse date de naissance, à des sbires du régime, qui aujourd'hui sont poursuivis pénalement lorsque leur implication dans de tels crimes est établie (faux et usage de faux, appropriation de mineur, c'est-à-dire adoption frauduleuse, falsification d'identité de mineur). Ils encourent plusieurs années de prison.