 |
Une des pages culturelles de Página/12 Cliquez sur l'image pour une meilleure résolution |
Le clown, comédien et musicien
Carlos Balá a fait rire, chanter et rêver tout le monde, les grands
et les petits, à la télévision, dans une émission enfantine qui
tient dans le cœur des Argentins la place que le Club Dorothée,
un peu plus tardif, tient dans celui des Français. De lui, il reste
une image unique : cette coupe de cheveux à la Jeanne d’Arc
surmontant une bouille rigolarde. Seules les rides sur son visage ont
peu à peu permis au public de voir le temps passer.
Dans la nuit de jeudi à
vendredi, sa mort, après une courte hospitalisation qui n’augurait
rien de bon en milieu de semaine, fait un peu l’effet, l’assassinat
en moins, de la disparition d’un personnage comme Cabu en France,
qui avait comme lui conserver cette coupe de cheveux très datée.
Balá était citoyen illustre de
la Ville de Buenos Aires. A ce titre, la chambre législative de la
Ville, la Legislatura, a ouvert ses portes pour abriter la chapelle
ardente qui s’est tenue hier après-midi et a reçu de très
nombreuses visites, de personnalités connues, comme du grand public
des anonymes qui a formé une longue file d’attente autour du
bâtiment dans le cœur historique de Buenos Aires. Ses obsèques se
sont tenues aujourd’hui dans la plus stricte intimité familiale.
Né à La Chacarita, Balá avait
étrenné son talent humoristique dans le bus qui traversait son
quartier avant de gagner ses lettres de noblesse dans le monde du
spectacle professionnel. Ce matin, toutes les nécrologies citent ces
débuts pour le moins originaux. A la fin de sa vie, sa réussite
professionnelle lui avait permis de s’installer dans un quartier
beaucoup plus chic, celui de Recoleta. Página/12 en fait même
l’axe de son hommage du jour sous le titre « Carlitos Balá,
du bus au statut de star ».
 |
Carlitos Balá, la frange la plus connue de l'Argentine Cliquez sur l'image pour une haute résolution |
Son grand âge faisait de
Carlitos Balá un grand témoin de l’histoire de l’Argentine au
20e siècle mais il n’en a pas fait pour autant un
acteur engagé. Prudemment, il a toujours ménagé la chèvre et le
chou, la démocratie et le pouvoir militaire. Du coup, tout le monde
peut s’y retrouver aujourd’hui sans prendre aucun risque.
Mon ami Alorsa, né en 1970 et
décédé en 2009, avait cité le personnage dans l’une de ses
chansons, Clase 70 (promo 70), que j’avais eu bien du mal à
comprendre et donc à traduire pour Deux cents ans après, le
Bicentenaire de l’Argentine à travers le patrimoine littéraire du
tango (Tarabuste Éditions,
2010).
Malgré le caractère très
prévisible de l’événement, Clarín ne présente pas
d’article sur l’événement dans sa version imprimée, même si
celui-ci est annoncé en une. Et les autres titres traitent l’info
très loin dans la pagination de leur édition papier. Peut-être
parce qu’un clown, qui plus est lié à l’enfance, ne mérite pas
plus dans la politique éditoriale de la presse argentine.
© Denise Anne Clavilier
Pour aller plus loin :