Quatre gros titres ce matin pour La Nación les ennuis judiciaires de la Présidente le Pape à Strasbourg, les chefs argentins étoilés en réunion à Buenos Aires et les ennuis du Club River Plate |
Il
y aura finalement eu peu d'échos dans la presse argentine des deux
discours du Pape François à Strasbourg, dont le premier pourtant,
adressé au Parlement de l'Union Européenne, puissance invitante, ne
manquait pas de franchise à l'égard de nos institutions qui peinent
à s'ancrer dans la réalité vécue par les citoyens de l'Union.
Il
est vrai que pour la presse d'opposition argentine, il existe des
sujets plus brûlants et qui ont la priorité : le retour aux
affaires de la Présidente, qui relève d'une maladie infectieuse
particulièrement longue et difficile à soigner (et de cela tout le
monde convenait), les affaires judiciaires qui cernent ses
investissements hôteliers en Patagonie (1) et les sempiternels
sujets footeux dont Clarín, La Nación et La Prensa se repaissent à
longueur d'année.
Página/12,
qui a fort apprécié le discours au Parlement (2), en dresse une
analyse approfondie, sous la plume de son correspondant à Paris,
Eduardo Febbro. Pour ma part, je retrouve bien le contenu de ce que
j'ai moi-même entendu en direct et en italien (je me demandais s'il
n'allait pas parler en espagnol – ça aurait peut-être fait que
les journalistes argentins soient plus nombreux à en parler, comme
la semaine dernière avec la FAO, où ils ont tous embrayé).
Dans
la presse d'opposition, il faut en général fouiller le site
Internet du canard pour tomber sur des articles un tant soit peu
développés sur le sujet. Clarín se contente d'une galerie photos !
La Nación publie trois articles et celui qui est mis en avant sur le
site aborde d'autres sujets (comme le scandale de pédophilie qui
secoue depuis deux jours l'archidiocèse de Grenade en Espagne, un
scandale dans lequel le Pape est intervenu personnellement à la
demande de la victime). Les deux autres, qu'il faut chercher, sont
l'un un digest très léger des propos pontificaux concocté à
partir de dépêches d'agences et l'autre, rédigé par la
correspondante à Rome, Elisabetta Piqué, revient convenablement sur
le contenu de deux discours, dans un style un peu plus enrobé que
celui de Febbro (3).
La
Prensa regarde ailleurs.
Pour
aller plus loin :
lire
l'article de Página/12, qui ne cache pas son accord avec le Pape
lire
l'article de Elisabetta Piqué dans La Nación
lire
l'article de La Nación sur la conférence de presse à bord de
l'avion (où il est question du scandale grenadin)
lire
l'article de dépêches qui est, comme celui de Elisabetta Piqué,
agrémenté d'une vidéo de la standing ovation reçue par le Pape à
la fin d'un discours qui pourtant ne ménageait pas les eurodéputés
(que pour ma part j'ai trouvé très revigorés par ces propos, comme
s'ils correspondaient au rôle qu'ils aspirent à jouer dans des
institutions qui restent peu démocratiques, trop bureaucratiques et
pas assez politiques au regard des enjeux. Le plus enthousiaste était
bien Martin Schultz – Il est vrai qu'ils sont les seuls
représentants légitimes des peuples européens, les seuls
directement issus d'un scrutin populaire, quand bien même celui-ci a
été boudé par les électeurs).
Bien
entendu, vous pouvez aussi aller admirer la galerie de photos de Clarín mais vous aurez aussi bien, sinon mieux, sur le site
d'information du Vatican.
Lire le discours intégral du Pape traduit en français par les
services de la Secrétairie d'Etat (Card. Parolin) et le compte-rendu de la conférence de presse aérienne (en français).
A noter que le compte-rendu en italien est différent.
A noter que le compte-rendu en italien est différent.
(1)
Voilà quinze jours environ que le scandale a commencé. Mes autres
activités, écriture, salons du livre, Unesco...) ne m'ont pas
permis d'y porter l'attention voulue, mes fidèles lecteurs s'en sont
peut-être rendu compte avec le contenu des articles que j'ai publiés
dans cette période sur Barrio de Tango. Ne voulant pas répercuter
des âneries, j'ai donc préféré m'abstenir jusqu'à y voir un peu
plus clair. Pour ce que j'ai compris à cette heure, un juge a dans
le collimateur, à tort ou à raison, le groupe hôtelier dont
Cristina Kirchner est la principale actionnaire, un investissement
entamé par Néstor Kirchner au Calafate, dans sa Province natale de
Santa Cruz. A force de perquisitions répétées, le juge chercherait
à prouver que cette activité hôtelière abrite de la fraude
fiscale, un trafic de fausses factures et du blanchiment d'argent. En
revenant aux affaires hier, la Présidente a dit qu'elle ne se
laisserait intimider ni par l'acharnement des fonds spéculatifs de
New York ni par l'acharnement judiciaire. Depuis le début de cette
semaine, Página/12 rapporte les péripéties du dossier alors que
pendant une dizaine de jours, seule la presse d'opposition en parlait
(en s'en gargarisant avec une délectation vraiment suspecte). Comme
pour les poursuites contre le vice-président Amado Boudou, il est
difficile de savoir quelle est la part de l'impartialité théorique
des juges telle qu'elle est établie dans la constitution du pays et
celle de la curée d'une classe sociale, la magistrature,
majoritairement et traditionnellement, pour ne pas dire
dynastiquement, à droite toute, contre des gouvernants en fin de
mandat et qui ne se représenteront pas en 2015. Or la Présidente
s'en est déjà prise dans sa politique à ces pratiques ataviques
d'une justice de classe qui caractérisent encore le système
judiciaire argentin plus de trente ans après le retour de la
démocratie, il est humain, mais illégitime, que les juges ne
l'aient pas à la bonne.
(2) moi aussi, vous l'avez compris.
(3) Tant et si bien qu'on se demande
pourquoi le journal publie cette bouillie rédactionnelle du second
article. Car de deux choses l'une : ou ils attendent l'article
que leur journaliste sur place va leur envoyer une fois rentrée chez
elle à Rome (en fin de matinée pour les lecteurs argentins) ou ils
se lèvent tôt pour écouter eux-mêmes en direct le discours
pontifical retransmis sur Radio Vatican-CTV et ils font le boulot
depuis Buenos Aires. C'est le métier, que je sache !