samedi 25 janvier 2020

Le Musée de l’Holocauste de Buenos Aires reçoit un rouleau médiéval espagnol de la Torah [à l’affiche]

Le rouleau de Rhodes

Les musées argentins ne conservent pas de pièces médiévales. C’est à peine s’ils conservent des pièces de l’époque moderne. Leurs collections sont presque exclusivement constituées de pièces contemporaines datant d’après la Révolution de Mai 1810 et de très peu d’années avant, tels ces drapeaux, ces armes ou ces uniformes pris aux Britanniques en 1806 et 1807, après leurs deux défaites des Invasions dites Anglaises. Pas de pièces médiévales, tout simplement parce que le pays n’a commencé à avoir une histoire écrite qu’après la conquête espagnole – même s’il existe quelques pièces aborigènes datées des siècles qui correspondent au Moyen-Age européen. Peu ou pas de pièces modernes, sauf dans les églises, tout simplement parce que tout ce qui était beau ou significatif est parti en Europe. C’est ainsi qu’on trouve les originaux des plans de fondation de Buenos Aires dans les collections du Vatican ou les archives espagnoles.

Encuentro de Paz
Les participants, très jeunes, posent devant le rouleau exposé dans sa vitrine

C’est pourquoi qu’une association internationale juive ait choisi de confier à un musée de Buenos Aires un très précieux rouleau de la Torah (1) datant du bas Moyen-Age espagnol est un véritablement événement, même si seule La Nación en rend compte ce matin. Ce rouleau de parchemin se trouve maintenant au Museo del Holocausto et son exposition dans le cadre de la rénovation du musée a été accompagnée d’une rencontre inter-religieuse pour la paix entre des juifs et des musulmans pendant que le musée est encore fermé.

Le rouleau (sefer torah) a été copié il y a environ 800 ans et emporté jusqu’à Rhodes lors de l’expulsion des juifs et des musulmans par les Rois Catholiques, Fernando d’Aragon et Isabel de Castille, en 1492, après la prise de Grenade, la dernière ville dirigée par un prince musulman en Andalousie. Beaucoup plus tard, ce rouleau a encore échappé aux destructions nazies. C’est donc un rescapé patrimonial mondial qui atterrit à Buenos Aires, la ville d’Amérique du Sud qui compte la plus importante communauté juive en effectif démographique.

La pièce est si exotique pour ses lecteurs que la journaliste se sent obligée d’expliquer ce que c’est que du parchemin et pourquoi il a cette couleur beige que les habitants du Vieux Continent qui lisent ce même genre de quotidien reconnaissent du premier coup d’œil. Elle attirera tous les visiteurs à la réouverture du musée le mois prochain.



(1) La Torah, c’est le Pentateuque des bibles chrétiennes, soit les cinq premiers livres des Écritures Saintes, à ceci près que le texte est toujours recopié à la main par un scribe à l’expertise ultra-pointue et écrit en hébreu sur une seule peau que l’on peut ensuite rouler sur elle-même pour la déposer dans le tabernacle et dérouler pour faire la lecture liturgique du chabat et des jours de fête.