lundi 18 décembre 2023

Élections à Boca Juniors : ¡Viva Riquelme! [Actu]

Jeu de mot : "empire romain" se dit "imperio romano"
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Finalement, toutes les finasseries judiciaires du clan Ibarra-Macri n’auront servi à rien. La liste de Riquelme l’a emporté haut la main hier, dimanche, au stade de la Bombonera : l’ancien footballeur, de modeste extraction, est bel et bien élu, incontestablement élu à la tête de Boca Juniors à plus de 65 %.

Sur le compte Twitter du club dans la soirée d'hier

« Le président de club le mieux élu de toute l’histoire du football argentin », a plaisanté le service de communication de la plus célèbre institution de la Boca en reprenant le slogan entendu lors de l’élection présidentielle à la mi-novembre (« le président argentin le mieux élu depuis la récupération de la démocratie », avec 55 % des voix sur son nom).

Les résultats officiels !
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Ibarra, le candidat malheureux, n’a d’ailleurs pas tardé à reconnaître sa défaite, tout en continuant à soutenir qu’il y avait bien eu manipulation du scrutin et que les votes des électeurs jugés irréguliers par lui et son compagnon de formule le démontraient parfaitement (sur 13 000 noms que Macri et lui récusaient, seuls 8 500 personnes sont venu voter : cela ne saurait mettre en doute le résultat total sur l’ensemble des électeurs). Ibarra a concédé la victoire à Riquelme alors que les scrutateurs étaient encore loin d’avoir dépouillé 50 % des votes. Or le score du vainqueur était déjà à 60 %.

Jeu de mot habituel : "Histoire d'amour"
dit le gros titre dans les couleurs du club
En haut, le président argentin en tenue de guerre !
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L’un des plus célèbres sociétaires, le nouveau Président de la Nation, Javier Mileí, est venu déposer son bulletin. Il appelait à voter pour Ibarra et Macri, dans un beau renvoi d’ascenseur puisque Macri avait appelé à voter pour lui dans un autre scrutin ! Ce qui tend à prouver une fois de plus que tout ce barnum était bien une opération purement politique de la part de Macri et de son associé (et probable prête-nom dans ce qui serait passé de club associatif à fort retentissement social et culture à société commerciale avec arrière-pensée politique). Mileí a été copieusement hué par la foule des autres sociétaires déjà présents au stade pour le scrutin. Il ne s’est donc pas attardé. Il est aussitôt parti, avec son imposant dispositif de sécurité, pour le sud de la Province de Buenos Aires récemment affectée, sur toute la côte, par une redoutable tempête qui a fait 13 morts à Bahía Blanca, des blessés un peu partout et des dégâts considérables dans cette ville, comme à La Plata (la capitale provinciale) et à Buenos Aires où les beaux quartiers, notamment Palermo, ont été sévèrement touchés, avec des arbres déracinés et tombés en travers des rues et des réseaux électriques endommagés.

En haut : le président, son ministre de la Défense
et la ministre de la Sécurité qui le chapeaute à Bahía Blanca
avec le maire de la ville (debout) et le gouverneur (péroniste)
En bas : Riquelme fait la fête
A gauche, l'anniversaire du pape François au Vatican
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Là-bas, notre apprenti-chef d’État a voulu se la jouer Zelenski, dont il n’a pas la classe : le cheveu en bataille comme d’habitude, il est apparu en battle-dress, en compagnie de son ministre de la Défense, lui aussi porteur du même déguisement (ils ont deux mois d’avance sur le carnaval), dans un pays qui vivait sous la pire dictature militaire de son histoire il y a un tout petit peu plus de quarante ans ! Notons d’ailleurs que Zelenski ne revêt jamais la tenue de camouflage : il porte certes des vêtements militaires, mais ce sont des tenues de sport et non pas l’uniforme de service ou d’entraînement au combat.

Quant à Macri, se sachant déjà vaincu sans doute (il ne fallait pas être grand clerc pour le deviner), il n’a même pas voté : quand le scrutin s’est ouvert dimanche matin, il était déjà dans un avion et volait vers la Péninsule arabique où se tient une compétition de la FIFA. Il s’est toutefois fendu d’un tweet pour s’offusquer que des « soi-disants supporters » aient osé siffler le « Président de la République » (reprenant à son compte une expression peu usitée et qui remonte à la guerre civile de 1820-1880). Il est probable pourtant qu’il faille que l’intéressé s’y habitue. A la manière dont il s’y prend, des sifflets et des hués, il va en entendre souvent pendant ses quatre ans de mandat.

Clarín a préféré titrer sur les dégâts de la tempête
Photo principale : Buenos Aires
Photo en insert : Bahía Blanca
Riquelme est en haut à droite
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Ce matin, l’article de presse le plus sévère à l’endroit de Macri est sans doute celui de La Nación qui analyse toute l’opération menée par l’ancien chef de l’État comme un lamentable échec personnel où l’homme s’est ridiculisé en tentant de revenir dans le jeu politique d’un pays qui, très visiblement, ne veut plus de lui depuis quatre ans. Il n’a pas pu présenter sa candidature à la présidence du pays, il a vu la candidate qu’il soutenait officiellement (en réalité comme la corde soutient le pendu) loin très loin de pouvoir atteindre le second tour, candidate qui lui a faussé compagnie par la suite en s’affranchissant de son autorisation pour entrer dans le gouvernement à un poste régalien. Voilà maintenant qu’il rate aussi la présidence du club sportif où il a fait ses débuts dans la vie publique avant de se lancer en politique. Sur quoi, il fuit en Arabie pour ne pas assister au désastre. L’article traite cette dernière campagne électorale de « titanesque » (propre au Titanic).

Un choix presque identique à La Nación
En haut, les dégâts (620.000 foyers toujours privés d'électricité)
En bas, la réunion à Bahía Blanca
Tout en haut, Riquelme
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Quant à Página/12, ravi du succès d’hier au point d’en faire son centre de une, sa rédaction analyse les enjeux de ce scrutin : s’opposer aux projets de l’actuel gouvernement qui entend transformer les clubs en sociétés commerciales sportives, à l’image des clubs des pays industrialisés qui en ont fait des caisses à pognon sans autre horizon que le bénéfice. En Argentine, les clubs sont des centres d’animation locaux, avec des tas d’activités culturelles et de services sociaux qui viennent, comme nos associations, pallier les carences de l’État, qu’il soit national ou local.

© Denise Anne Clavilier


Pour aller plus loin :

lire l’article principal de Página/12
lire l’entrefilet de Página/12 sur la signification socio-politique de la victoire de Román Riquelme contre l’élite affairiste et politique que représente Mauricio Macri
lire l’entrefilet de La Prensa
lire l’article de Clarín
lire l’article de La Nación
lire l’article de Olé, le quotidien sportif du groupe Clarín