vendredi 30 septembre 2011

Mauricio Macri remet les enseignants dans la rue [Actu]


Récemment réélu à la tête de Buenos Aires, le 31 juillet dernier, dans un deuxième tour qui lui a donné plus de 60% des voix (voir mon article du 1er août 2011 à ce sujet), Mauricio Macri, le Chef du Gouvernement de la Ville Autonome de Buenos Aires (ci-dessus), en profite pour remettre en cause une grande partie du statut des enseignants de l'école publique. Il vient d'envoyer à la Legislatura Porteña un projet de loi qui supprime les jurys de concours de recrutement et de promotion au profit de simples conseils dont les membres seront nommés par le Ministère portègne de l'Education, sans aucun contrôle paritaire ni parlementaire.

Les jurys d'aujourd'hui sont composés de membres élus par la profession et les syndicats y sont donc largement représentés. Ces jurys ont été institués en 1958, dans tout le pays, avec des adaptations ponctuelles dans chaque Province fédérée, au terme d'une longue lutte sociale pour mettre fin à l'arbitraire des nominations et des avancements dans l'éducation publique. Tout le monde s'accorde aujourd'hui pour juger que ce nouveau projet de loi fait partie de la lutte de Mauricio Macri contre les syndicats, qui ont été, dès sa prise de fonction en décembre 2007, la première cible dans son viseur...

Selon le projet de loi, les 14 jurys (1 par niveau d'enseignement) démocratiquement constitués par le vote des enseignants, seront remplacés par des comités où siègeront des personnalités nommées par l'exécutif portègne. Ils répondront donc devant l'exécutif et non pas devant le corps enseignant constituant le corps électoral dont ils sont issus, selon la formule en vigueur depuis 1958. Les représentants élus par leurs pairs dans le nouveau système, au nombre de 12 seulement, n'interviendront qu'en cas de contestation d'une décision prise au premier niveau.

Pour justifier son projet de loi, le Gouvernement Portègne avance que le système actuel donne lieu à de nombreuses injustices, selon que le candidat a ou aurait eu à un moment ou à un autre de sa carrière un désaccord avec tel ou tel syndicat, qui lui mettrait, pour cette raison et de manière arbitraire, des bâtons dans les roues.

Un grand nombre d'enseignants seront en grève jeudi prochain, 6 octobre 2011, à l'appel des syndicats, pour défendre l'actuel système.

Ce projet de loi montre combien Mauricio Macri va sans doute chercher, pendant les 4 ans de son second mandat, à éliminer les modes de fonctionnement démocratique dans tous les secteurs d'activité intellectuelle, après avoir réduit de manière draconnienne les budgets qui leur sont alloués (à Buenos Aires, l'école publique est en bien triste état, avec des locaux qui manquent même de chauffage en hiver, alors que l'école privée reçoit des subventions publiques supplémentaires depuis l'arrivée au pouvoir de Macri). Et ce qui se passe à l'école se passe aussi dans le secteur de la santé, y compris dans les hôpitaux et dans le secteur culturel (voir mes différents articles sur les problèmes rencontrés par les théâtres municipaux ou les orchestres dépendant du Ministère de la Culture portègne, en cliquant sur le sigle GCBA dans le bloc Pour chercher, para buscar, to search, ci-dessus).

Très souvent, Mauricio Macri reproche à Cristina Fernández de Kirchner, la Présidente de la République, d'être clivante, de provoquer en permanence l'affrontement avec l'opposition. Sans doute se voit-il lui-même comme un pacificateur.

La perspective n'en est que plus inquiétante et Página/12 ne pouvait pas la laisser passer sans réagir, à quelques semaines de l'élection présidentielle, pour laquelle Macri a annoncé qu'il ne souhaitait pas donner de consigne de vote à ses partisans (24 octobre 2011). Le quotidien de gauche a donc fait de la nouvelle sa une, avec un titre de tango qui est aussi le titre espagnol d'un film de Sydney Poitier (qui a eu beaucoup de succès en Argentine) et une dédicace traditionnelle des élèves à leurs professeurs pour le jour de la Fête des Maîtres (Día del Maestro), et la rédaction a choisi avec le plus grand soin la photo du politicien. Où sont-ils allé chercher un sourire aussi peu flatteur ?

Pour aller plus loin :